Le Château Doisy Barsac Dubourdieu 1921 a été remis en de bonnes mains, celles de Bernard Repolt du domaine Remoissenet.
Elle sera le prétexte pour se revoir !
A l’invitation de Bernard Repolt, je me rends au siège de la maison Remoissenet à Beaune. Cette maison familiale de négoce appartient depuis quelques années à un richissime américain. Le siège est composé d’un entrelacs de parties d’immeubles ou d’immeubles en centre ville, avec une décoration d’inspiration médiévale qui date un peu mais crée une atmosphère sympathique. Nous nous rendons dans les chais construits en 1950, d’une architecture très pertinente, pour déguster de fûts quelques 2012 et 2011. C’est la première fois que je goûte des 2012 et je suis étonné de l’extrême accessibilité des vins rouges. Ils sont bons et peuvent se boire avec plaisir, alors qu’ils n’ont pas encore six mois. Il y a tellement de petites cuvées que l’on pourrait s’y perdre. Le Charmes-Chambertin Remoissenet 2012 est un vin d’un charme immense – il porte bien son nom – plus agréable à boire que le Chambertin Clos de Bèze Remoissenet 2012 plus riche mais qui mettra plus de temps à se révéler. Le Montrachet Remoissenet 2011 est absolument superbe alors que les blancs de 2012 sont vraiment trop jeunes pour être appréciés.
Bernard ouvre deux vins de 2010 qui sont en bouteilles, le Meursault-Poruzots 1er cru et le Beaune Toussaints 1er cru. Ils sont dans une période intermédiaire qui ne les met pas assez en valeur. Nous revenons au siège pour aller prélever dans l’opulente cave des vins anciens deux bouteilles pour le déjeuner. Je vois quelques piles sympathiques mais je sens qu’on ne peut pas y toucher. Quand il me dit que généralement il ne boit pas au déjeuner, j’ai un regret, car j’ai prévu une surprise. Peu importe, l’ambiance est amicale et nous partons au restaurant hôtel Ermitage de Corton à Chorey-lès-Beaune avec deux flacons de rouge, un Gevrey-Chambertin Clos Saint-Jacques Remoissenet 1969 et un vin mystère. Nous sommes accueillis par Nicolas Chambon, propriétaire des lieux et amateur de vins anciens. M’excusant pour une pause technique je vois à mon retour que le 1969 a été ouvert par une serveuse qui a fait tomber des miettes de bouchon dans le liquide. Montrant mes biscotos, je veux prendre en main l’ouverture du vin mystère et Bernard me dit : « vous n’échapperez pas à laisser des miettes dans le vin, car jamais je n’ai réussi à l’éviter pour ce vin ». Audouze est fier et fanfaron : « rien ne tombera dans le liquide ». Bernard est tenace : « ça m’étonnerait ». Devant Bernard, Nicolas Chambon et son équipe, j’ouvre la bouteille. Dix fois Bernard examine la bouteille pour essayer de trouver une miette qui aurait échappé mais il n’en trouve pas.
Le Gevrey-Chambertin Clos Saint-Jacques Remoissenet 1969 est un vin lourd, à l’alcool fort, et qui s’est un peu torréfié comme lors d’un passage dans une cave chaude. Le vin mystère a une belle couleur et fait plus jeune, même si l’on sent qu’il est plus vieux. Il est d’une belle tenue et s’il a un peu d’alcool, sa trame et son grain sont plaisants. Je me trompe d’une décennie. C’est un Volnay Premier Cru Remoissenet 1967. C’est une très plaisante surprise. Sur de délicieux escargots de Bourgogne, le 1969 fait belle figure. Sur une joue de bœuf fort plaisante, le 1967 est à son aise, mais au fil du temps, le 1969 s’améliore considérablement pour trouver un équilibre sans défaut qu’il n’avait pas, alors que le 1967 commence à faire sa sieste.
Bernard avait prévu de recevoir des américains juste après le déjeuner aussi la question d’ouvrir mon vin ne se pose même pas. Je le confie à Bernard pour une prochaine rencontre. C’est un Château Doisy Barsac Dubourdieu 1921 à l’ambre foncé magnifique, au niveau dans le goulot alors qu’il s’agit d’un bouchage d’origine.
Souvent, les peintres en bâtiment qui ont obtenu un chantier posent leur pot de peinture pour montrer qu’ils sont là, mais vaquent à leurs autres chantiers en retard. Mon Doisy 1921 est posé dans les belles caves de Remoissenet comme l’hameçon pour de belles pioches futures, à partager avec ce chaleureux vigneron.
Les domaines familiaux de Bourgogne présentent chaque année leurs vins. C’est le millésime 2010 qui est proposé à l’hôtel Bristol à une foule de professionnels, sommeliers, restaurateurs, cavistes marchands, gens de presse. Ceux qui grignoteront quelques fromages pourront boire des 2008 que plusieurs vignerons ont apportés.
L’année 2010 est une année qui a beaucoup de talent. Des vins sont encore fermés et ce sont généralement les plus grands. Parmi les plus fermés, mais aussi les plus prometteurs, on remarque le Corton-Charlemagne de Bonneau du Martray. Il y a naturellement des confirmations d’excellence dans les plus grands domaines : Roumier, Rousseau, Mugnier, etc..
Des experts ès vins jeunes auront des commentaires précis et structurés. Je me limiterai à quelques belles surprises (ou confirmations d’excellence) pour mon palais. Le Bâtard Montrachet Faiveley est assez exceptionnel. Il a une richesse mais surtout une complexité rare.
L’Aligoté « raisins dorés » de Lafarge est adorable dans sa subtilité fragile. Le Bouzeron de Villaine est étonnant de richesse. Le Corton rouge de Bonneau du Martray est d’une finesse rare. Le Clos Vougeot Chateau de la Tour est un grand vin bien construit. Le Musigny de Mugnier a, pour moi, la plus belle finesse du Musigny. Le Chambertin Armand Rousseau est, sans surprise, très grand, mais à attendre. Le Bourgogne La Digoine de Villaine surprendrait plus d’un amateur, tant il est bien charpenté.
Les vins sont bons à boire maintenant et je peux vous dire que le Bonnes Mares Roumier sur un saint-nectaire, ça fait chanter la joie de vivre.
Un déjeuner s’organise à l’initiative d’un couple de restaurateurs et je me retrouve avec eux et Alix de Montille, Dominique Lafon, Patrick Bize, Christophe Roumier à la brasserie du Bristol. Le Saint-Joseph Jean Michel Gérin 2011 est très agréable malgré son jeune âge. Le Côtes du Marmandais le vignoble d’élian 2008 est beaucoup plus difficile car il est taillé à coups de serpe. L’épaule d’agneau du Quercy confite aux piquillos, en cocotte, est superbe.
Comme toujours la présentation des vins par les domaines familiaux de Bourgogne est le point culminant des dégustations de vignerons, du fait de la générosité sans égale de – n’ayons pas peur des mots – l’élite mondiale du vin.
La Tour Blanche est un sauternes que j’apprécie pour son goût, mais aussi pour la fabuleuse histoire d’Osiris, mécène comme on n’en faisait qu’au 19ème siècle. Banquier, il a acquis La Tour Blanche en 1876 et en a fait don à l’Etat à la condition qu’on y construise une école de viticulture et de vinification. Elle accueille aujourd’hui 140 élèves par an. Osiris a créé l’ancêtre des restos du cœur, a été le plus généreux donateur de l’Institut Pasteur, a restauré pour en faire don à l’Etat la Malmaison. Bien sûr, il y avait dans cette générosité un intense besoin de reconnaissance, mais les dons sont concrets et d’une ampleur impressionnante. Alors, en buvant La Tour Blanche, je trinque à cet homme atypique, controversé peut-être, mais diablement généreux.
Didier Fréchinet responsable commercial, m’accueille à l’aéroport et me conduit au château La Tour Blanche. Nous faisons une petite visite du site de l’école d’où l’on a une vue qui s’étend à l’infini et surplombe le Ciron, le fameux cours d’eau qui est responsable de l’apparition du trésor du sauternais, la pourriture noble. Nous visitons les chais puis nous nous rendons dans une salle de dégustation très cosy où se regroupent Alex Barrau, directeur du château, Didier, Philippe Pélicano maître de chai qui travaille au château depuis 2001 et dont le premier millésime géré seul est le 2012. Se joint aussi Adeline, jeune stagiaire dont c’est le dernier jour de stage.
Château La Tour Blanche 2012 est un vin dont l’assemblage vient d’être fait hier, en vue de la semaine des primeurs du début avril. La couleur est d’un jaune vert et le vin est un peu trouble. Le nez est très pur, très frais, de très grand niveau. La bouche est lourde au sucre fort et dominant. Le vin est gourmand, mais il faudrait que le sucre se calme. Le goût qui reste en bouche, c’est le sucre. Aux experts de dire ce que ce bambin aux yeux à peine éveillés deviendra. Son nez est un signe positif de grandeur.
Château La Tour Blanche 2009 est fortement bouchonné. Elle est remplacée par une deuxième bouteille. Le nez est discret mais on sent un vin intense. La bouche est superbe, suave, d’un vin riche, sucré mais beau. Sa fraîcheur est invraisemblable et il est diablement bon. Quel dommage ! Car il est si goûteux que les amateurs vont le boire trop tôt, alors qu’avec quelques décennies de plus il sera immense. Tout est réuni pour faire un vin d’anthologie.
Château La Tour Blanche 2001 a un nez qui n’est pas parfait, d’iode, de camphre et si l’attaque est belle, le final est trop marqué. Aussi, Philippe va chercher une deuxième bouteille au nez un peu marqué, mais nettement meilleur. En bouche l’attaque est belle de caramel, de crème de lait et le final est sur les fruits confits. Il y a une belle fraîcheur mais je préfère le 2009. Ce 2001 n’est pas un vin de plaisir. Il faut le garder en cave pour qu’il trouve sa voie. Le 2009 donne une plus grande impression de fraîcheur. Et son final claque.
Château La Tour Blanche 1986 a une couleur claire, peu évoluée. Son nez a aussi une pointe de camphre. La bouche est très douce, raffinée, avec des fruits jaune clair. Le parcours en bouche est beau mais le final n’est pas assez précis, trop rêche.
Château La Tour Blanche 1983 a une couleur plus foncée, d’un bel or intense. Le nez a un soupçon d’animal et le pain d’épices est plus nettement marqué. Le vin est opulent, frais, de belle ampleur en bouche. Il est équilibré, au final un peu en dedans mais beau. Le 1986 s’améliore par l’aération, le 1983 est vaillant, solide sur ses jambes, au final court mais solide aussi. Il y a beaucoup de similitudes entre le 1986 et le 2001. Le 1983 devient nettement meilleur et son final s’allonge. Il convient de signaler que chacun des vins que nous buvons est ouvert au moment même. Il aurait beaucoup plus d’ampleur avec quelques heures d’aération lente.
Château La Tour Blanche 1967 a une couleur d’un ambre très clair. Le nez est frais, de fruits confits. Le vin est noble. Il est doux, élégant, au beau final. C’est un grand vin. Si son final est un peu sec, c’est à cause de sa minéralité. Alex évoque deux cailloux que l’on frotte. De ce vin de grande fluidité on aimerait ne garder que l’attaque pour oublier le final et ne rester que sur la première impression.
Château La Tour Blanche 1962 est plus sombre d’un très bel or foncé. Le nez est minéral. En bouche, c’est une merveille. Le sucre affleure, mais sur un nuage de bonheur. Riche, à la forte impression sucrée, à l’alcool marqué, il dégage une impression de luxure. Le final de ce vin voluptueux est beau. Le caramel et le zeste d’orange sont là, sur un alcool présent. Il y a dans le 1962 un infime côté liégeux que Philippe avait remarqué mais n’osait exprimer pour nous laisser libres de le découvrir. J’aime son côté atypique.
Château La Tour Blanche 1957 a un nez très Tour Blanche. Comme dirait Audiard, la bouche, elle cause. J’adore ce vin qui n’est pas orthodoxe. Il a un final magique. On sent les pomelos, le vin est légèrement acidulé, marqué par une forte tension. Son final rebondit sans cesse. Il est vivant, vibrant et claque comme un fouet. Ce vin de fraîcheur a le plus beau final.
Château La Tour Blanche 1950 a une couleur qui va plus vers le thé. Le nez est discret, retenu. Le vin est de grande pureté, très équilibré et très intégré. C’est un vin noble, serein, calme, avec un beau final. C’est le bon élève, droit dans la définition d’un sauternes accompli. Il a une très grande fraîcheur même si on sent un peu l’alcool. Le 2001 est nettement meilleur maintenant et devient ce que 2001 doit être.
Voici nos classements. Alex : 50 62 57 67 83 86 09 01 12. Didier : 62 83 50 57 67 86. Philippe : 57 62 83 67 50 86. Adeline : 62 50 83 57 67 86. Mon classement : 57 50 62 83 67 86 09 01 12.
Nous sommes unanimes pour mettre le 1986 en dernier des anciens, mais avant cela, nos préférences divergent. C’est le goût de chacun. Alors que nous avons adoré le 2009 si agréable à boire, lorsqu’on le boit après les 1957 et 1950, il paraît dénué de toute complexité ! L’avenir est au sauternes vieux. Ce devrait être un dogme.
Nous nous rendons au restaurant le Saprien à Sauternes, qui a changé de propriétaire depuis ma dernière visite. Le menu que nous sommes plusieurs à prendre est un duo de foies gras, puis un ris de veau et une variation sur le thème de fromages à pâte persillée.
Château La Tour Blanche 1990 est d’un équilibre rare. Il évoque le 1950 par son côté très archétypal. Il n’a pas l’ombre d’un défaut. C’est un splendide sauternes.
Château La Tour Blanche 1948 est d’un bel or. Le nez est d’orange amère. La bouche est éblouissante. C’est vraiment le plus grand de tous. C’est le seul à avoir un final mentholé. Le nez est de menthe et d’anis. Le vin est merveilleux. Il est beaucoup plus puissant que ce qu’on imaginerait d’une année qui souffre de sa proximité avec des années de légende. En fait il est magique d’équilibre et de sérénité. Il a beaucoup d’émotion et de plénitude. Il est orange confite, avec une grande pureté d’expression et beaucoup de cohérence.
Château La Tour Blanche 1947 est très café. Il a plus de fraîcheur mais aussi plus d’amertume. Il est très complexe et moins charmeur que le 1948. Le 1947 fait penser au 1957 et crée un accord magique avec le ris de veau.
Château La Tour Blanche 1943 a été ajouté parce que c’est le vin de mon anniversaire. J’apprécie cette délicate attention. Il est d’un bel or. Le nez est calme. Le vin est sec et j’explique à mes hôtes que je suis habitué aux sauternes qui ont mangé leur sucre et que j’apprécie leurs charmes particuliers. On sent que la « matière vineuse » de ce sauternes sec est magnifique. C’est un très grand vin noble.
Des quatre vins de ce déjeuner, ce sont les 1990 et 1948 qui sont les plus équilibrés. Le 1990 a des saveurs exotiques. Je classe les vins ainsi : 1948, 1990, 1947 et 1943. Et ces quatre vins se classeraient en tête, si l’on combinait les deux séries, le 1957 pouvant se situer presque à égalité avec le 1943.
Quels commentaires ajouter ? Nous avons rencontré sur quelques vins de la dégustation du matin des imperfections olfactives ou dans le final alors que les quatre vins du déjeuner frappent par leur absolue pureté. Dans chaque décennie, les écarts entre les vins présentés sont importants, sauf pour la décennie 40 où les vins sont beaucoup plus proches et cohérents. Les 1947 et 1948 sont deux vins magistraux et proches.
Cette verticale de treize vins de la Tour Blanche est un honneur pour moi dont je suis reconnaissant. Ce fut un exercice apprécié par mes hôtes car ce fut pour eux une belle occasion de revisiter l’histoire de leur grand vin. Ce grand moment a apporté de l’eau au moulin de mes convictions : plus un sauternes est ancien, meilleur il est. Longue vie à La Tour Blanche, un grand sauternes.
le 2012 est dans un flacon de 2007, à gauche ci-dessus
déjeuner au Saprien
Décidément, les vins de la Romanée Conti ne me quittent plus. Sébastien, un fou de vin dijonnais, lance une invitation dont le thème est la Romanée Conti. Il coordonne les apports de chacun et l’ordre du jour est à la générosité. Le repas devant se tenir à Dijon, j’ai apporté il y a plus de deux semaines mes deux bouteilles au domaine de la Romanée Conti où Sébastien en a pris possession.
La veille de l’événement, Sébastien m’envoie un mail où il déclare que pendant la séance des photos des bouteilles apportées, il a pu constater que le Richebourg 1942 que j’ai fourni est considéré par lui-même et un ami comme un faux. Instantanément j’envoie un mail de réponse avec des extraits des bulletins 89 et 216 dans lesquels j’ai raconté les bouteilles sœurs de celle-ci. L’une était fatiguée, l’autre splendide, mais aucune ne m’avait donné le moindre doute sur son authenticité. Il est vrai que sur l’étiquette il n’y a pas la mention des propriétaires, ce qui paraît étrange et sur lequel je reviendrai après la dégustation du vin.
Après ce mail qui me froisse un peu, je choisis une bouteille de complément, « pour le cas où ». Le lendemain matin, jour de la dégustation, j’arrive au restaurant La Dame d’Aquitaine à Dijon, et je descends des marches pour me trouver dans une magnifique salle d’architecture gothique aux nombreux piliers qui soutiennent d’élégantes voûtes. La hauteur de plafond est très grande et l’atmosphère du lieu est engageante. Sébastien est en train d’aligner les bouteilles présentes pour des photos. Ma bouteille de La Tâche 1974 est alignée avec les autres mais la bouteille de 1942 est dans un casier de réserve. Je dis à Sébastien qu’il me paraît opportun de boire la 1942, ne serait-ce que pour un intérêt pédagogique : si elle est vraie, que conclure et si elle est fausse, que peut-on en dire ? Je sens Sébastien réticent et je lui réitère mon opinion sur les deux précédentes que j’ai bues, d’un lot que j’ai dû acheter il y a une vingtaine d’années.
Un de ses amis arrive, qui avait questionné le domaine sur la 1942. Il dit que dans une dégustation qui se veut sérieuse, on ne devrait pas l’ouvrir. Un peu agacé par cette réaction, je décide d’offrir à la dégustation un Richebourg 1953 de beau niveau, d’une année de grande réussite ce qui fait que mon apport sera : La Tâche 1974, Richebourg 1953 et Richebourg 1942 que je tiens à goûter au sein des autres vins.
Avec Sébastien, j’ouvre les bouteilles et lorsque je sors le bouchon du Richebourg 1942, il apparaît que le bouchon est bien de cette époque, qu’il a 1942 imprimé clairement visible et le mot « Richebourg » écrit comme on l’écrit au domaine. Voilà un élément qui conforte ma bouteille et Sébastien en convient.
A onze heures débute dans la belle salle voûtée une dégustation verticale d’Echézeaux du domaine. Un ami signale que si cette dégustation démarre à onze heures, c’est qu’à ce moment précis nous entrons dans un jour fleur. Nous rions de cet à-propos. Sabine, propriétaire avec son mari du restaurant fait le service du vin en annonçant à haute voix celui qu’elle répartit. Elle aura accompagné notre parcours et nos facéties avec une bonne humeur digne d’éloges.
Christian, l’ami qui voulait refuser ma 1942 remet à tout le monde un document où nous devons marquer trois notes pour chaque vin : d’abord celle que nous donnerions, sur 20, sans avoir bu, en fonction de ce que nous attendons. La seconde note est celle du vin dégusté et la troisième est le classement du vin dans l’ensemble des vins de la journée. Nous sommes douze et il y a 29 vins à boire. Aurons nous la force de noter au final ? L’avenir le dira mais l’idée est intéressante.
L’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1989 a une couleur trouble assez évoluée. Le nez est un peu dévié, amer. La bouche est opulente. Le vin est plus riche que ce que je pensais. Il est nettement meilleur que ce que le nez annonce. Il a une belle acidité, mais il commence à décliner. On note une torréfaction. Il est beaucoup plus évolué qu’il ne devrait et lorsqu’on y revient plus tard, le vin décline.
L’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2003 a un nez très fenouil, très végétal. Le vin est jeune, gourmand. Il est généreux, au final poivré. Ce vin tue le pauvre 1989 qui est trop évolué. Tout au long de cette dégustation des Echézeaux, des amis vont signaler le côté gibier des vins, pour presque tous. Je ne partage pas cette analyse pour le 2003 que je trouve végétal, au final de cassis.
L’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2005 a une couleur assez claire. Le nez est de menthe et d’anis. Avec lui je perçois le côté gibier suggéré par les amis. La bouche est assez dure et marquée par une certaine sécheresse, mais ce vin a un gros potentiel. Il faut qu’il devienne moins rugueux et il sera grand.
L’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2006 a une couleur grenat. Le nez de ce vin est absolument magique. Il est élégant, velouté, capiteux. Une merveille de nez. En bouche, le vin est élégant avec un léger manque de puissance. C’est un vin de plaisir que j’adore. Il est vraiment DRC.
L’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2007 a une couleur très claire et le nez laisse apparaître le gibier. La bouche est agréable, un peu modeste. On sent ses limites. C’est un vin qui ne me parle pas et je suis gêné par son côté gibier.
L’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2008 a un nez jeune qui sent le soufre. La bouche est goûteuse, gourmande. C’est bon. Le vin est jeune et minéral, pas encore positionné, mais c’est un vin de plaisir. Il est agréable à boire maintenant et c’est assez difficile de prédire son futur. Il me semble gourmand et gastronomique.
L’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2009 a une couleur plus sombre. Le vin est plus dense. On sent le cassis et le poivre. La bouche est puissante, envahissante. Le final est plus discret. Il a la sécheresse du 2005 mais il est plus élégant. Il est beau mais son final est un peu court.
Plutôt que de noter ces sept vins au sein des 29 vins, j’ai jugé plus prudent de les classer entre eux et ce sera dans l’ordre de préférence : 2006, 2008, 2009, 2005, 2003, 2007, 1989. J’ai pu constater que mes amis ont des votes différents entre eux.
Nous faisons une pause pendant que notre table se prépare pour le déjeuner. Mon ami Florent a apporté deux champagnes et le sauternes. Il me sert le Champagne Dom Pérignon rosé 1985 et ma réaction est instantanée : ce vin sent le Paris-brest. Et tout le monde en convient. C’est incroyable que ce champagne soit aussi nettement Paris-brest. Mais il l’est aussi en bouche ce qui est encore plus incroyable. Alors mon cerveau est totalement possédé par cette image. Plus tard, je sentirai de la truffe blanche. Nous allons différer Florent et moi, car je pense que ce goût atypique est une déviation de ce que devrait être ce rosé. Florent n’est pas d’accord. Mes amis ont aimé ce champagne plus que je ne l’ai aimé. Le champagne réagit bien à un amuse-bouche au ris de veau.
Le Champagne Krug 1989 de Clément a beaucoup plus de tension et de précision. Il est très agréable, à la bulle forte. Le Champagne Henriot Brut Souverain magnum 1949 est absolument délicieux. Il a la perfection de l’année 1949, une des plus belles en Champagne, et il a le charme fou des champagnes anciens. Sa bulle est discrète mais le perlant est là. Sa force vient de sa conservation en magnum. La douceur est d’une élégance rare. C’est un pur régal.
Le menu conçu par Laurent Perriguey est : tartare de Saint-Jacques à l’huile de truffe, copeaux de parmesan et mesclun / foie gras de canard poêlé aux légumes oubliés / barrette de thon mi-cuit, crumble de chorizo et grué de cacao / déclinaison de porcelet, la côte en juste température, le carré confit et le pied en cromesquis / crépinette de queue de bœuf et joue de bœuf, purée de rattes / plateau de fromages / assortiment de sorbets poire Williams, pêche de vigne, yuzu et mirabelle.
Le Bourgogne Hautes Côtes de Nuits blanc mis en bouteille par DRC 2009 a un nez de vin très jeune. On sent le beurre et le toast, voire un peu de noisette. C’est un vin un peu limité.
Le Montrachet Domaine de la Romanée Conti 2001 a un nez diabolique de richesse et d’évocation. Ce nez est à se damner. Ce montrachet n’est pas très puissant par rapport à d’autres du domaine et ça lui va bien, car il joue sur l’élégance et la discrétion. Dans le brouhaha, car notre joyeuse équipe est assez dissipée, j’essaie de me recueillir sur un accord de première grandeur, voire de folie. Car l’huile des coquilles est parfumée à la truffe blanche et trouve un écho incroyable dans ce vin splendide. C’est un moment merveilleux de ce repas. C’est totalement sublime.
Le Corton Prince Florent de Mérode Domaine de la Romanée Conti 2009 a un nez de vin jeune, un peu imprécis. Mais en bouche, c’est une belle surprise, car il est beaucoup plus riche que ce qu’on attendrait. J’ai une bonne relation avec ce vin. Le Vosne-Romanée 1er cru Cuvée Duvault-Blochet Domaine de la Romanée Conti 2002 servi en même temps que le Corton fait beaucoup plus faible. Toutefois, et c’est cela la magie de la gastronomie, il trouve une alchimie avec le goûteux foie gras qui crée un accord fabuleux.
Sébastien, par prudence, fait servir maintenant les deux 1961 pour que nous ayons toute notre lucidité pour les apprécier. Les deux vins sont noirs et donneront des sensations un peu torréfiées. La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1961 est très vivante et la Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 1961 est magique de complexité. Le côté torréfié est commun aux deux. Nous sommes face à deux très grands vins, car toutes les complexités sont là, mais en revenant sur eux après la série des Richebourg, j’ai noté dans mes verres une fatigue qui ne devrait pas exister.
La Romanée Saint-Vivant Marey-Monge Domaine de la Romanée Conti 2004 est superbe et très étonnante après les deux 1961, car elle les snobe de sa jeunesse. J’aime beaucoup sa subtilité. Le Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1997 est beaucoup plus vieux que ce que son année devrait donner. Il n’est pas très intéressant.
C’est maintenant qu’apparaissent les trois Richebourg dont un est affirmé faux par Sébastien et Christian. La surprise n’en est que plus agréable, car le Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1942 a le nez d’un vin du domaine et d’un vin de cette époque. Il est très conforme à ce qu’on attend d’un Richebourg du domaine. Le Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1953 est lui aussi très DRC, et j’en jouis avec plaisir, heureux de l’avoir rajouté pour qu’il serve de témoin au 1942. Et le Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1975 ajouté par Sébastien est nettement meilleur que ce qu’on peut imaginer de cette année faible. Je l’aime beaucoup. Ces trois Richebourg sont superbes, très DRC et je classe pour moi : 1942, 1953 et 1975.
La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1997 est un très beau vin que je trouve un peu conventionnel, surtout après les émouvants Richebourg, qui surclassent à mon sens les deux 1961.
La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1974 est aussi un très beau vin du domaine. Il n’a pas de signe de fatigue. Il est quand même en dessous des deux Richebourg que j’ai aussi apportées. La Tâche Domaine de la Romanée Conti 2007 est un vin agréable mais qui donne relativement peu d’émotion après les vins plus canoniques.
Nous buvons un vin mystère de Sébastien et j’avoue que « Le Vin le plus simplement » domaine Van Berg à Meursault 2006 n’a pas laissé de trace dans ma mémoire tant une myriade d’étoiles des vins du domaines valsaient dans mon cerveau.
Le Champagne Heidsieck Monopole « Red Top », goût américain vers 1930 est superbe, plus sec que ce que suppose le goût américain. Il est très beau mais nettement moins vibrant que le Heidsieck 1907 gardé cent ans dans des eaux de la mer du Nord. Mais c’est un grand vin.
Le Château Suduiraut Sauternes 1928 est comme toujours une merveille de précision. C’est un de mes chouchous du sauternais et c’est pour cela que Florent l’a apporté. D’une couleur acajou, bien gras, c’est un vin de bonheur.
Le Marc de Bourgogne Domaine de la Romanée Conti 1991 est à la Fine de Bourgogne Domaine de la Romanée Conti 1991 ce que le vin jaune du Jura est au vin blanc de Bourgogne. Le côté interlope, canaille du marc est un bonheur coupable, car il fauche comme des blés nos restes de lucidité.
L’ambiance du repas a été joyeuse, parfois estudiantine. Sabine a été une hôtesse parfaite et son mari Laurent a fait une cuisine remarquable. Si je classe ce qui n’est pas vin rouge, ce sera : 1 – Montrachet DRC 2001, 2 – Champagne Henriot 1949, 3 – Suduiraut 1928, 4 – Marc 1991.
Si je classe les vins rouges, ce sera 1 – Richebourg 1942, 2 – Richebourg 1953, 3 – La Tâche 1961, 4 – Romanée Conti 1961. Le fait de classer premiers deux de mes vins peut paraître puéril ou provocateur, car souvent, je regarde mes vins avec les yeux de Chimène. C’est indéniablement pour le goût que je fais ce classement et cela donne l’occasion de réfléchir au problème des faux. Si l’on est capable de faire un faux 1942 (grands dieux, pourquoi cette année) avec la typographie exacte du domaine, pourquoi oublierait-on d’indiquer les noms des propriétaires. Comme le bouchon est d’origine, comme le goût est celui d’un Richebourg du domaine (personne n’a crié au faux en le goûtant et je n’ai eu que des compliments), je m’entretiendrai avec le domaine sur une hypothèse que je risque : c’est en 1942 qu’Henri Leroy achète les parts des Chambon dans la société civile du domaine, selon ce que j’ai lu. Quelqu’un au domaine aurait pu demander à l’imprimeur d’étiqueter des bouteilles sans que les noms des propriétaires n’apparaissent, puisqu’ils changeaient. C’est peut-être une hypothèse fausse. Mais elle a plus de consistance pour moi qu’un faux, qui pourrait se mesurer à égalité avec deux Richebourg du domaine, dont on ne voit pas l’objet quand il a été fait.
Plutôt que d’envisager un faux dont la logique n’est pas évidente je préfère, pour cette époque, croire à une initiative dont on n’aura pas gardé la trace, puisque les archives n’ont pas été conservées. C’est peut-être de l’optimisme, mais fondé sur les résultats de la dégustation.
Ceci étant mis à part, ce fut un moment extraordinaire, grâce à Sébastien et à la générosité de tous. Nous avons bu des grands vins, émouvants, avec une cuisine exacte en un lieu prestigieux. Mon compteur a maintenant une marque de 350 vins du DRC bus depuis 12 ans, en 74 millésimes. Même si je ne peux pas me prétendre expert des vins du domaine, j’en ai maintenant une certaine accoutumance.
It really begins to look like I cannot escape the wines from the Romanée Conti. Sébastien, a wine enthusiast from Dijon, is inviting people for a lunch based on the theme of the Romanée Conti. He coordinates everyone’s contributions and generosity is the word of the day. Since the meal is to take place in Dijon, I delivered my two bottles two weeks ago to the Domaine de la Romanée Conti where Sebastien collected them.
The day before the event, Sébastien sends me an email in which he states that during the photo session of the bottles brought by the participants, he was able to observe that the 1942 Richebourg I provided was apparently a counterfeit bottle, according to him and a friend of his. I immediately send an answer by email with extracts from some of my reports (numbers 89 and 216) in which I narrated the adventures of the sister bottles of this one: one was exhausted, and the other beautiful, but neither gave me the slightest doubt about their authenticity. It is true that on the label there is no mention of the owners, which seems odd, but I will come back to this point after the tasting.
After this mail that offends me a bit, I choose an alternative bottle—just in case. The next morning, on the day of the tasting, I arrive at La Dame d’Aquitaine in Dijon, and walk down a flight of stairs to find myself in a magnificent room in the style of Gothic architecture, with many pillars that support elegant arches. The ceiling height is impressive and the atmosphere of the place is engaging. Sébastien is in the process of aligning the bottles to take photos. My bottle of 1974 La Tâche is aligned with the others, but the 1942 bottle is kept on the side in a plastic crate. I tell Sébastien that it seems appropriate to drink the 1942, if only from an educational point of view: if it is authentic, what should we make of it? And if it is counterfeit, what can we say about the wine? I sense that Sébastien is a bit reluctant and I reiterate my opinion on the other two bottles that I drank, all from the same lot that I probably bought some twenty years.
One of his friends arrives, who has apparently asked the domaine about the 1942 bottle. He says that in a tasting that aspires to be serious, it should not be served. I am a little upset by this reaction, and I decide to contribute another bottle to the tasting, a 1953 Richebourg with a beautiful level from a highly successful vintage. As a result, my contribution will be: 1974 La Tâche, 1953 Richebourg and 1942 Richebourg which I insist I want to taste along with the other wines.
With Sébastien, I open the bottles and as I uncork the 1942 Richebourg, it appears that the cork is indeed from that time period, with « 1942″ and the word « Richebourg » clearly printed on it as is traditional at the domaine. This element seems to confirm the authenticity of my bottle, and Sébastien agrees.
At eleven, in the beautiful vaulted room, we begin a vertical tasting of the Echézeaux of the domaine. A friend points out that if the tasting starts at eleven, it is because at that very moment, we enter a « flower day » in the biodynamic calendar. The coincidence makes us smile. Sabine, co-owner of the restaurant with her husband, proceeds to serve the wines, announcing each of them out loud. She will accompany our journey and our antics with very commendable good humor.
Christian, the friend who wanted to reject my 1942, hands everyone a document on which we need to give three grades to each wine: first the grade that we would give to the wine out of 20, without having tasted it, according to our expectations; the second grade is for the tasting of the wine properly speaking; and the third is the ranking of the wine among the bottles of the day. There are twelve participants, and 29 wines to drink. Will we have enough strength to give grades in the end? Time will tell, but the idea is interesting.
The 1989 Echézeaux Domaine de la Romanée Conti is of a hazy, relatively evolved colour. The aromas are deviated somewhat, with a certain bitterness. In the mouth, it is opulent. The wine is richer than I thought. It is much better than what the nose promises. It has nice acidity, but it begins to decline. There are also roasted aromas. It is much more evolved than it should be, and when we come back to it a bit later, the wine is indeed declining.
The 2003 Echézeaux Domaine de la Romanée Conti has a very fennelly, vegetal aroma. It is a young and tasty wine, generous and with a peppery finish. It delivers the final blow to the poor 1989 that is far too evolved. Throughout this tasting of Echézeaux, our friends will point out the gamey flavour of almost all of the wines. I do not share this point of view for the 2003 which I find more vegetal, with a blackcurrant finish.
The 2005 Echézeaux Domaine de la Romanée Conti has a fairly light colour. The aromas evoke mint and aniseed. Here I can perceive the gamey flavour that our friends mentioned. The mouth is rather severe and has a certain dryness to it, but this wine has great potential. If it loses some of its roughness, it will become great.
The 2006 Echézeaux Domaine de la Romanée Conti is of a garnet colour. The aromas of this wine are absolutely magical. It is elegant, velvety, intoxicating—a wonder of a scent. On the palate the wine is elegant with a slight lack of power. This is a pleasure wine and I love it. It is DRC for sure.
The 2007 Echézeaux Domaine de la Romanée Conti has a very light colour and the smell evokes game. In the mouth it is pleasant, somewhat unassuming. It clearly has limits. This wine does not speak to me and its gamey flavour hinders my tasting pleasure.
The 2008 Echézeaux Domaine de la Romanée Conti has a young, sulfurous smell. In the mouth it is tasty and flavourful. This is good. The wine is young and mineral, and has not settled yet, but it is a pleasure wine. It is pleasant to drink now and it is pretty hard to predict its future. It strikes me as a tasty and gourmet wine.
The 2009 Echézeaux Domaine de la Romanée Conti is of a darker colour. The wine is denser, and evokes blackcurrant and pepper. On the palate it is powerful and mouth-filling, and with a more discreet finish. It has the typical dryness of 2005 wines, but it is more stylish. It is beautiful but its finish is a bit short.
Rather than ranking these seven wines among the group of 29, I think it would be wiser to classify them separately, in order of preference: 2006, 2008, 2009, 2005, 2003, 2007, and 1989. I notice that my friends’ rankings differ from each other.
We pause while our table gets ready for lunch. My friend Florent has brought two champagnes and the Sauternes. He pours me the 1985 Champagne Dom Perignon Rosé and I instantly react—this wine smells like a Paris-Brest cake. And everyone agrees. It is amazing that this champagne can be so evocative of Paris-Brest. But it does too in the mouth, which is even more incredible. My brain becomes totally obsessed with this association. Later, I will find white truffle aromas in this champagne. Florent and I will not see eye to eye on this, because I believe this unusual flavour is a deviation from what this rosé should be. Florent does not agree. My friends appreciate this champagne more than I do. It pairs well with an appetizer based on sweetbreads.
The 1989 Champagne Krug brought by Clément has much more power and accuracy. It is very pleasant, with a strong bubble. The 1949 Champagne Henriot Brut Souverain Magnum is absolutely delicious. It has the perfection of the 1949 vintage—one of the finest for Champagne—and it has the enticing charm of old champagnes. Its bubble is subdued but still present. It gets its strength from the magnum format. It is sweet and of rare elegance—a pure delight.
The menu designed by Laurent Perriguey includes: tartare of scallops in truffle oil, parmesan shavings and mixed salad / pan-fried medallion of duck foie gras with ancient root vegetables / strip of seared tuna, chorizo crumble and cocoa nibs / variations on the suckling pig: slow-cooked chop, confit rack, and trotter in a croquette / flat sausage of oxtail and beef cheek, mashed ratte potatoes / cheese platter / a selection of sorbets: Williams pear, wild peach, yuzu and plum.
The 2009 Bourgogne Hautes Côtes de Nuits Blanc, bottled by the DRC, has the aromas of a very young wine. It smells of butter and toast, and a little bit of hazelnut. This is a somewhat limited wine.
The 2001 Montrachet Domaine de la Romanée Conti has fiendishly rich and evocative aromas. It is to die for. This Montrachet is not very powerful compared to others from the domaine and that suits it quite well because it is all about elegance and discretion. Amidst the hubbub caused by our unruly and joyful team, I try to collect myself and appreciate a first-rate, almost insane pairing: the oil that comes with the scallops is flavoured with white truffle and finds an incredible echo in this splendid wine. It is a wonderful, absolutely sublime moment of the meal.
The 2009 Corton Prince Florent de Mérode Domaine de la Romanée Conti has the slightly imprecise smell of a young wine. But on the palate, it is a nice surprise, because it is much richer than could be expected. I have a good relationship with this wine. The 2002 Vosne-Romanée 1er Cru Cuvée Duvault Blochet Domaine de la Romanée Conti served alongside the Corton appears a much weaker wine. However, thanks to a little bit of haute cuisine magic, it develops a chemistry with the tasty foie gras and creates a fabulous pairing.
Sébastien, as a precautionary measure, now asks both 1961 to be served when we are still level-headed enough to appreciate them. Both wines are black and produce light roasted aromas. The 1961 La Tâche Domaine de la Romanée Conti is very much alive and the 1961 Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti is of magical complexity. They share this roasted flavour. We have two great wines here, in all their complexities, but as I come back to them after the Richebourg flight, I notice in these wines a certain exhaustion that should not be there.
The 2004 Romanée Saint-Vivant Marey-Monge Domaine de la Romanée Conti is superb and very surprising after the two 1961 bottles, giving them the cold shoulder in all its youthful glory. I love its subtlety. The 1997 Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti is much older than its vintage should produce. It is not very interesting.
It is then that we come face to face with the three Richebourgs, once of which Sébastien claims is counterfeit. That makes it even more delightfully surprising, for the 1942 Richebourg Domaine de la Romanée Conti has the aromas of a wine from the domaine and from this period. It is quite consistent with what you would expect from a DRC Richebourg. The 1953 Richebourg Domaine de la Romanée Conti is also very DRC, and I greatly enjoy it. I am happy to have added it to today’s list so that it could serve as a supporting witness to the 1942. And the 1975 Richebourg Domaine de la Romanée Conti that Sébastien also adds to the list is much better than you can imagine from this weak vintage. I love it. These three Richebourgs are great wines, typical of the DRC, and I would rank them as follows: 1942, 1953 and 1975.
The 1997 La Tâche Domaine de la Romanée Conti is a beautiful wine that I find a bit safe, especially after the very moving Richebourgs, which I believe outperformed both 1961 wines.
The 1974 La Tâche Domaine de la Romanée Conti is also a beautiful wine from the domaine, showing no sign of tiredness. It is however below the two Richebourgs that are also my contribution. The 2007 La Tâche Domaine de la Romanée Conti is a pleasant wine but it creates relatively little emotion after more canonical wines.
We drink a mystery wine that Sébastien serves us and I have to admit that the 2006 « Le Vin le Plus Simplement » Domaine Van Berg from Meursault barely leaves a trace in my memory as a myriad of shining wine stars dance inside my brain.
The 1930 or thereabout Champagne Heidsieck Monopole « Red Top » Goût Américain is superb and drier than what the « American taste » suggests. It is very beautiful but much less vibrant than the 1907 Heidsieck that was left dormant in the waters of the North Sea for a century. But this is a great wine.
The 1928 Château Suduiraut Sauternes is a precision marvel, as always. This is one of my darlings from the Sauternes region and this is why Florent brought it today. It is of a mahogany colour and very fat—a wine of happiness.
The 1991 Marc de Bourgogne Domaine de la Romanée Conti is to the 1991 Fine de Bourgogne Domaine de la Romanée Conti what vins jaunes from the Jura are to white wines from Burgundy. The rakish, cloak-and-dagger side of the marc is a guilty pleasure, reaping whatever clear-sightedness we still have left.
The atmosphere of the meal is joyful, sometimes reminiscent of a group of students. Sabine is a perfect hostess and her husband Laurent produces remarkable dishes. If I rank everything that is not red, it would be: 1 – 2001 Montrachet DRC; 2 – 1949 Champagne Henriot; 3 – 1928 Suduiraut; 4 – 1991 Marc.
If I rank the red wines, it would be: 1 – 1942 Richebourg; 2 – 1953 Richebourg; 3 – 1961 La Tâche; 4 – 1961 Romanée Conti. It could seem a bit childish or provocative to place two of my wines in the top two, for I frequently look upon my wines with great fondness. But undoubtedly I rank them as such based on the taste, and this gives us the opportunity to ponder on the problem of counterfeiting. If one is able to produce a counterfeit 1942 (but good gods, why this particular year?) with the exact typography of the domaine, why would one forget to indicate the names of the owners? Since the bottle has an original cork, and it tastes like a Richebourg from the domaine (there was no cries of outrage when tasting it and I had nothing but compliments about it), I will have a talk with the domaine about a hypothesis that I dare suggest: according to what I have read, it is in 1942 that Henri Leroy buys the Chambon shares in the Civil Society of the domaine. Someone from the domaine could have asked the printer to label some bottles without indicating the names of the owners, since they were changing. This may be a false assumption. But it has more substance to me than the possibility of a counterfeit that could compete on equal footing with two Richebourgs from the domaine and whose purpose seems quite a bit obscure.
Rather than considering a fake bottle whose logic does not seem obvious, I would rather believe in a spur-of-the-moment initiative which would not have been recorded since no records have been kept. This may be optimistic, but based on the results of the tasting.
That put aside, it was an extraordinary moment, thanks to Sébastien and everyone’s generosity. We drank great, moving wines, paired with precise cooking and in a prestigious location. There are now 350 wines on my DRCometer, drunk over the last 12 years, encompassing 74 vintages. Even if I cannot call myself an expert on the wines of the domaine, I now have at least a certain addiction to them.
Philippe Faure-Brac organise dans son Bistrot du Sommelier des vendredis dédiés au vin. Un vigneron présente ses vins au déjeuner et aussi au dîner. Ayant repéré que Jean-Luc Thunevin serait la vedette d’une de ces dégustations, je m’inscris au plus vite. Nous sommes une douzaine d’amateurs et de gens de presse autour d’une table en sous-sol et Philippe se joint à nous, tant qu’il n’est pas appelé à résoudre les inévitables questions que pose la gestion de son établissement.
Le menu est composé pour les vins : chair de crabe au raifort, tartelettes croustillantes / pressé d’aile de raie aux petits légumes, sauve vin rouge / gigot d’agneau rôti, brisures de truffe, poêlée de chanterelles et pied de mouton : bleu des Causses et Abbaye Bel’loc, figues séchées en coulis / millefeuille craquant au chocolat de Saint-Domingue et griottes.
Le Blanc N°1 de Valandraud 2009 est d’une belle couleur. Le nez est très frais et vert de jeunesse. En bouche le vin est charnu, de belle mâche avec des fruits jaunes généreux. Le vin est bien fait mais gagnerait à vieillir. C’est un vin de plaisir, de luxure, généreux qui sera bon dans cinq à dix ans. J’aime beaucoup le final de ce vin puissant qui titre 14°.
Le 3 de Valandraud Saint-Emilion Grand Cru 2009 est le troisième vin de Valandraud, après le grand vin et après Virginie de Valandraud. Le nez est très joli. L’attaque n’est pas assez précise à mon goût. Ce vin de 13,5° fait de 70% de merlot n’est pas assez structuré. Il est plutôt gourmand, riche, et s’arrondit dans le verre. Un peu brutal, un peu amer dans le final, il ne me convainc pas.
Le Virginie de Valandraud Saint-Emilion Grand Cru 2009 a un incroyable nez de truffe. L’attaque est belle et le milieu de bouche donne une impression lactée. Le final est un peu amer mais cela se corrigera. Ce vin de 14° aux tannins assez forts est un vin de gastronomie.
Le nez du Château Valandraud 2009 est plus discret. La couleur est d’un noir extrême. Le vin est lourd, généreux, opulent. Il peut ! Il titre en effet 15°.C’est un vin moderne, où la richesse bride un peu la personnalité. Le vin est riche mais a aussi de la grâce et de la légèreté. Je commence à l’aimer pour sa fraîcheur en bouche.
Le Virginie devient gracieux et le grand vin le met en valeur, alors qu’en revenant au Valandraud, on ressent à quel point il est extrême. Le Virginie est très agréable. Le Valandraud, d’une matière énorme, doit être attendu quelque années si l’on veut en profiter.
Le Maury Thunevin-Calvet 2007 titre 16° ce qui fait seulement un degré de plus que le vin de Bordeaux. Il est joli, bien « dry ». Il est très élégant, frais et léger. J’aime beaucoup ce vin légèrement muté, de 100% grenache venant de vignes de plus de 80 ans. Il est beaucoup plus à l’aise avec les fromages qu’avec le dessert au chocolat qui fait trop « ton sur ton ».
Cette dégustation de 2009 de l’écurie Thunevin est intéressante. J’aurais aimé pouvoir comparer le 2009 de Valandraud avec un vin plus âgé, pour voir comment cette folle richesse s’assagit. Mon plus grand plaisir fut d’entendre Jean-Luc Thunevin, vigneron passionnant, dont la hauteur de vues est un véritable bonheur. Philippe Faure-Brac est un hôte attentif et délicat et la cuisine adaptée aux vins est un atout. Pour un premier essai pour moi, ce vendredi du Bistrot estune réussite.