Archives de catégorie : vins et vignerons

Visite à la maison de champagne Mumm vendredi, 27 février 2015

Lors d’un dîner de la fondation Michel Chasseuil j’avais rencontré une femme politique très intéressée par les sujets de gastronomie. Elle m’a mis en contact avec une personne en charge, dans le groupe Pernod-Ricard, d’une enquête sur le luxe et la gastronomie. J’ai répondu à ses questions. De fil en aiguille il fut décidé que nous nous retrouverions tous les trois au siège de la maison de champagne Mumm, qui fait partie de ce groupe depuis 2005, pour une visite et un déjeuner.

Nous sommes accueillis par Didier Mariotti, œnologue et chef de caves de Mumm qui nous entraîne dans les caves creusées dans la craie qui couvrent vingt kilomètres de travées. C’est assez impressionnant. Les murs sont tantôt en craie brute, tantôt recouverts de petites briques. Au fond d’un des bras de ces innombrables tentacules, une sculpture en craie représente la nouvelle étiquette de la cuvée R. Lalou qui fait suite à la légendaire cuvée René Lalou à la si belle bouteille biseautée, dont le moule n’appartient plus à la maison Mumm et devrait, à mon avis, lui revenir. Pour l’histoire.

Sur un tonneau sont placés une bouteille et un magnum. Nous commençons à boire le Champagne Mumm Cuvée R. Lalou 2002. Son nez est de miel. L’attaque est un peu rêche mais c’est la première gorgée de la matinée. Je ressens en buvant ce vin de la pâtisserie, du pain d’épices, de la nonette. Il y a de beaux amers qui donnent de la longueur en bouche. Ce champagne a beaucoup d’équilibre, une belle matière. Il enrobe la bouche. Je vois aussi apparaître des fruits confits, alors que Didier Mariotti nous impressionne en citant des myriades d’évocations. Je sens ce champagne très gastronomique.

Le Champagne Mumm Cuvée R. Lalou magnum 1999
a un nez très puissant et expressif. On sent des fruits frais, un panier de fruits. Le 1999 est très différent du 2002. Je le trouve plus strict, plus évocateur de l’automne. Il est aussi plus fluide. Didier le trouve plus gourmand. Je sens des noisettes qui corroborent l’impression d’automne. Mon cœur va plus du côté du 2002.

Nous nous rendons en voiture au moulin de Verzenay
qui est implanté au sommet d’une colline qui offre un panorama exceptionnel. Le moulin qui déploie ses ailes, contrairement à Valmy, est reconstitué. La petite maison adjacente offre une salle à manger qui sur trois côtés laisse voir la Champagne à perte de vue. Nous sommes accueillis par un Champagne blanc de blancs Mumm Cramant magnum sans année qui souffre un peu de passer juste après des R. Lalou, mais ça ne dure pas car il est agréable et de belle fraîcheur. C’est un champagne de soif. Les petites cuillers d’apéritif, d’un saumon au caviar ou de foie gras conviennent bien au champagne et lui donnent de l’ampleur.

Le menu composé par la charmante cuisinière de l’endroit est : amuse-bouche / dos de cabillaud cuit vapeur, petits légumes croquants, pesto de cresson à l’huile de citron / veau en croûte de nougatine de truffe, sablé de parmesan, tombées de légumes de saison / vieux comté et parmesan / Tatin de pomme, quenelle de calisson.

J’ai apporté avec moi un Côtes du Jura blanc Bruno Vincent 1982
à la magnifique couleur dorée. Je demande qu’il soit servi avec les champagnes du repas pour que l’on voie la complémentarité gustative des champagnes et du vin du Jura qui se fécondent et s’élargissent de leurs différences.

Le Champagne Mumm Brut Sélection sans année
est fait de cinq grands crus sur une base de vins de 2008 et de vins de réserve allant jusqu’à 2002. Il a une belle ampleur et un joli corps. Il est servi en même temps que le Champagne Mumm millésimé 2006
qui est subtil et joyeux, dans les fruits rouges.

Le Côtes du Jura a une magnifique acidité et des évocations de noix comme un vin jaune. Mais il est plus fluide qu’un vin jaune, moins oxydatif et crée des ponts fascinants avec les deux champagnes, lorsque l’on passe de l’un à l’autre et le cabillaud d’une cuisson très réussie est un merveilleux révélateur des goûts des champagnes.

Didier avait pris en cave pendant notre visite un Bouzy Mumm 1959. Sa couleur est clairette. Ce vin est magnifique. Le nez est cendré, poussiéreux mais cela disparaît. La bouche est agréable, très typée, aigrelette avec un formidable caractère. C’est un vin de connaisseur car beaucoup de gens seraient rebutés par sa fragilité si subtile. A l’aveugle, que de contresens seraient commis ! Il me plait énormément.

A côté de lui, on nous sert un champagne « de compétition », le Champagne Mumm magnum 1961. Sa couleur est magique, d’un or jeune et glorieux. En bouche il est puissant, serein, équilibré et très réconfortant. Il joue avec le vin du Jura une danse de séduction. Sur le veau, c’est le Bouzy qui s’exprime le plus. A noter que le 1959 et le 1961 cohabitent ensemble sans se nuire.
C’est alors qu’arrive un vin tout simplement exceptionnel. Le Champagne Mumm magnum 1953
marque un saut qualitatif gigantesque par rapport au 1961 qui nous plaisait tant. Il fait prendre conscience de ce qu’est la perfection. L’année 1953 n’est pas une année légendaire mais ce Mumm est dans un état de grâce qui m’émeut. Il est invraisemblable d’émotion, car on ne peut pas le boire sans penser qu’il représente une forme de l’absolue perfection. Tout y est, acidité, mâche superbe, fruits suggérés, longueur infinie. Que du plaisir.

Alors, le Champagne Mumm Carte Classique magnum sans année, vin assez doux qui accompagne le dessert passe inaperçu, d’autant qu’il a un léger goût de bouchon.

Le moins que l’on puisse dire c’est l’honneur qui nous fut fait de goûter autant de vins de si belle qualité. Chacun des vins avait son intérêt, y compris le Mumm de Cramant. Le 1961 est un grand champagne, de très grande jeunesse et de bel équilibre, et le R. Lalou 2002 est un grand champagne qui vieillira bien. Et l’illumination de ce beau jour, c’est le fantastique 1953. Et je mettrai en second le si expressif Bouzy.

Nous avions avec nous le responsable marketing de plusieurs unités du groupe Pernod-Ricard et notamment en charge de l’implication de Mumm en Formule 1. Cette image associée à Mumm ne doit pas faire oublier qu’un champagne qui peut produire un 1953 de cette stature est incontestablement un très grand champagne.

Dégustation de Pontet-Canet au restaurant Il vino mercredi, 25 février 2015

De bon matin je pars au restaurant Il Vino
d’Enrico Bernardo, l’entreprenant meilleur sommelier du monde, où se déroule une présentation des vins du château Pontet-Canet. C’est Enrico lui-même qui sert les verres de chaque millésime et Alfred Tesseron, le propriétaire de ce Pauillac nous suggère de commencer par le plus vieux, pour voir l’évolution du travail fait au château.

Le Château Pontet-Canet 2001
a un nez très joli de fruits rouges et noirs. La bouche est assez neutre. C’est un vin bien construit, droit, mesuré, mais sans grande folie.

Le Château Pontet-Canet 2007
a un nez un peu plus profond et moins fruité. Il a plus de fluidité, il est assez agréable. Sa matière n’est pas abondante. C’est un joli vin dont j’aime le final.

Le Château Pontet-Canet 2010
a un nez subtil et raffiné. Il a plus de matière et se montre plus boisé. Il perd un peu du caractère que j’ai en mémoire de Pontet-Canet car il devient un peu plus conventionnel. Le final est plus rêche et boisé.

Le Château Pontet-Canet 2011
a un nez un peu plus fermé mais on sent toute sa subtilité. Il a une très jolie attaque avec beaucoup de charme. C’est un vin très agréable et parfaitement équilibré. Le final est un peu rêche ce qui est lié à sa jeunesse. Je pressens que ce sera un grand vin.

Le Château Pontet-Canet 2012
a un nez très clair mais peu typé. Son parfum évoque le velours. Il y a une fluidité de l’attaque qui ressemble à celle du 2007. En bouche il y a une petite âpreté. Le final est agréable. C’est un joli vin qui manque un peu de corps et de matière. Je l’aime assez.

Il se trouve que j’étais l’un des premiers à déguster des vins qui venaient juste d’être ouverts. Aussi en y revenant, l’écart de sensation est très fort, car les vins se sont réchauffés et aérés. Et chose curieuse, je vois apparaître chez tous ces vins des évocations de café.

Le 2001 gagne en fluidité et se montre nettement plus généreux, mais c’était mon premier vin du matin, avec un palais non encore aiguisé. Le 2007 montre maintenant un joli fruit et se montre chaleureux. Le 2011 devient nettement plus large. Et le 2012, plus large aussi est plus doux avec un joli poivre.

Comme le deuxième tour est nettement plus favorable, je n’aurais qu’une envie, c’est de goûter ces vins à table, car ils se révéleraient sans doute encore plus opulents. Lors de cette dégustation je n’ai pas eu l’émotion que pourrait procurer un très grand vin. Les vins sont bien faits mais il n’y a pas cette étincelle qui caractérise un très grand vin. La raison en est peut-être que la Côte Rôtie La Turque d’hier est encore fortement présente dans ma mémoire.

Alfred Tesseron nous a raconté l’implication de son père et lui-même dans l’évolution de ce vin et le rôle important de Jean-Michel Comme, l’homme qui fait le vin et a initié depuis 2004 la transition vers la biodynamie. Un travail important a été fait dans la vigne et dans les processus. On sent une volonté de faire bien. Cela se ressent dans la précision des vins que j’ai bus dont j’ai préféré 2007 et 2011 qui révèlent plus que d’autres les qualités de ce beau Pauillac. Connaissant quelques ancêtres de Pontet-Canet dont un grand 1870 je peux sans risque prédire un beau futur à ce Pauillac subtil.

Déjeuner au restaurant Le Train Bleu jeudi, 19 février 2015

Jean-Luc Colombo est un dynamique vigneron de Cornas qui a créé les Automnales qui réunissent une quantité impressionnante de restaurateurs, de sommeliers d’entrepreneurs dans le monde du vin et de la restauration et aussi beaucoup de copains. Ça se passe chez Jean-Luc et c’est festif.

A son invitation, je me rends au restaurant Le Train Bleu de la gare de Lyon où sont conviés des personnages de l’alimentation, de la restauration et aussi des amis dans des activités diverses. C’est éclectique et fécondant.

A l’apéritif on peut avoir des vins de trois couleurs. Je choisis une Clairette Les Anthénors domaine Jean-Luc Colombo. Le vin est franc, joyeux, et plein d’un joli fruit. Il est bien sûr très jeune, mais il est plaisant à boire.

Dans le menu composé à notre intention, seule l’entrée est optionnelle. Le menu que j’ai choisi est timbale de ris de veau et foies de volaille, sauce madère, salade d’herbes / lotte rôtie vigneronne, lentilles du Puy en vinaigrette persillée de gingembre, poireaux fondants / gigot d’agneau de nos régions rôti, gratin dauphinois.

Au Train Bleu, on est fasciné par le plafond absolument magique et impressionné par le gigantisme du lieu. Le service est professionnel et attentionné. La cuisine peut donner lieu à des jugements divers. La timbale a plus de foies de volaille que de ris de veau et elle est croquante et sèche. Le poisson a passé pas mal de temps sous la salamandre. C’est avec l’agneau que l’on a le sourire et la satisfaction de retrouver ce qu’était il y a cinquante ans la cuisine du lieu, avec des cuissons d’une exactitude parfaite. Le gigot a sauvé le repas. Il y avait ensuite du Brie de Meaux et une fine meringue au pavot mais j’ai dû m’éclipser avant leur arrivée sur table pour cause de rendez-vous auxquels je m’étais engagé.

Les retrouvailles avec ce lieu mythique sont finalement positives, mais il faudrait un peu plus s’accrocher à l’excellence d’il y a un demi-siècle.

Le Côtes du Rhône rouge Les Forots domaine Jean-Luc Colombo 2011 est un vin de pays, franc, direct et authentique. Je l’aime bien pour sa franchise, car il ne cherche pas à en faire trop. Il est jeune bien sûr et je regrette toujours que l’on boive des vins si puceaux, mais ce sont les contraintes du monde moderne qui les imposent.

La Côte Rôtie La Divine domaine Jean-Luc Colombo 2011 me pose problème, car plus un vin est grand, plus j’ai du mal à l’apprécier lorsqu’il est encore dans une phase ingrate de sa jeunesse. Je n’ai pas réussi à accrocher avec ce vin.

C’est le contraire avec le Cornas Les Ruchets domaine Jean-Luc Colombo 2006 qui me plait instantanément. Il est plaisant, goûteux, joyeux, coordonné et se boit avec une grande facilité. Et on en redemande.

Jean-Luc Colombo est un hôte dynamique, entreprenant et foisonnant d’idées. Les discussions sont allées bon train avec des convives charmants. Ce déjeuner au Train Bleu fut un bon moment.

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Ventes de bouteilles rares de Dom Pérignon à Artcurial lundi, 22 décembre 2014

Il y a quelques semaines, j’avais participé à un déjeuner de lancement du concept de « Plénitude » pour le champagne Dom Pérignon, à l’invitation de Richard Geoffroy. Quelques jours après un cocktail à Artcurial annonçait une vente prochaine de bouteilles très rares de Dom Pérignon. Lorsque j’ai reçu le catalogue, je n’étais pas très inspiré, car les prix me sont apparus élevés. Mais l’amicale invitation de Stanislas, du groupe Moët, m’a conduit à venir à la vente aux enchères à Artcurial. Alors que j’avais dit aux experts avant la vente que je trouvais les estimations élevées, les prix ont explosé. J’ai tenté à de nombreuses reprises d’acquérir des lots et chaque fois, au téléphone, quelqu’un s’exprimant en anglais, relançait. Je suis allé au-delà des limites de la raison et chaque fois le téléphone prenait le lot. Pour Dom Pérignon c’est un succès. Pour le consommateur que je suis, c’est un regret de voir les niveaux qui sont atteints. Longue vie aux Plénitudes, qui se substituent aux « Œnothèque ». Mais j’espère que cette fièvre d’un jour (à laquelle j’ai concouru) ne deviendra pas la norme.

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Dîner au siège de « Grains Nobles » mercredi, 17 décembre 2014

Après la dégustation des vins de la Romanée Conti de 2011, Pascal Marquet, le gérant de Grains Nobles, retient à dîner Aubert de Villaine au siège de sa société. Michel Bettane, Bernard Burtschy et quelques amis participent au repas. Nous dînerons d’un délicieux velouté de champignons, de dés de thon au quinoa et cosses de petits pois, de divers fromages et d’une panacotta aux fruits rouges. La cuisine est sympathique et amicale.

Le Champagne De Souza & Fils Brut Millésime 1988 est charnu et plaisant. Il se boit bien, avec des évocations un peu fumées. La mâche est belle et on sent l’effet de l’âge qui rend les fruits bruns et compotés. Sa plénitude est belle.

Le vin qui suit est très difficile à trouver à l’aveugle et c’est rare que Michel Bettane ne trouve pas la région. Je n’ai pas été meilleur. Il faut dire que ce vin n’est pas typique. Il s’agit d’un Volnay Les Mitans 1er cru Hubert de Montille 1990. C’est un ami qui a eu la pensée délicate d’apporter ce vin en hommage à Hubert de Montille, récemment décédé. Aubert de Villaine était avec lui lorsqu’ils ont goûté un vin juste au moment de mourir de la meilleure des morts, sans la moindre souffrance et en buvant un de ses vins. Ce 1990 est un peu torréfié, évoque la truffe. Il n’a pas la fluidité que l’on attendrait d’un vin de Montille, même s’il est bon.

Le Barolo Sori Ginestra Conterno Fantino 1996 est joyeux, de belle présence sur les fromages. Michel Bettane et Aubert de Villaine ont parlé de musique, d’instruments et d’interprètes avec une érudition qui m’a impressionné, aussi grande que leur érudition en vin. Ce qui me conduit à citer l’anecdote qu’Aubert de Villaine a racontée pour expliquer que dans les « climats » de Bourgogne, dont on attend le classement par l’UNESCO au patrimoine de l’humanité, il y a la terre, le climat mais aussi l’exploitation de la terre par les hommes : à la fin d’un concert, une femme approche David Oïstrakh et lui dit : « ah, le Stradivarius, quel son prodigieux ! ». David colle le violon à son oreille et dit à la dame : « c’est curieux, je n’entends rien ». Le terroir sans l’homme ne peut pas s’exprimer.

Le Champagne Egly-Ouriet Grand cru Extra Brut Vieillissement Prolongé dégorgé en mai 2007 après 58 mois de cave est superbe et me rassure – je n’en avais pas besoin – sur les qualités de cette excellente maison. Le champagne est riche, clair, précis et agréable. Un beau champagne qui conclut une belle soirée avec la Romanée Conti.

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Dégustation des vins de 2011 du domaine de la Romanée Conti mardi, 16 décembre 2014

Comme chaque année, Aubert de Villaine, co-gérant de la Romanée Conti, vient présenter au siège de la société « Grains Nobles » le dernier millésime qui vient d’être mis sur le marché. Il est assisté de Michel Bettane et Bernard Burtschy. Les participants sont des fidèles. Aubert de Villaine nous présente les 2011 qui sont de la 46ème vendange suivie par lui. Il parle du millésime et de sa vision. Un vigneron doit prendre des risques et avoir de la chance. Le début de saison avait été précoce. Un très beau temps en avril a duré presque jusqu’à la floraison le 20 mai ce qui est très tôt, comme en 2003 et 2007. Le retournement du temps s’est produit au moment de la floraison. Il y a eu du millerandage. Pluies, vents tournants, orages ont perduré. Juillet n’a pas été beau et a donné lieu à des attaques de botrytis qui ont fort heureusement cessé car il a fait froid. Au 15 août, nouveau retournement avec chaleur et orages, ce qui a compliqué le travail en vigne. Il y a eu une maturité très rapide et une baisse des acidités. Il y a eu de la grêle à Volnay et Gevrey mais Vosne Romanée a été épargné. Fin août on sentait que la maturité était proche et il fallait prendre le risque d’attendre et de voir apparaître le botrytis. La chance a été d’avoir des peaux épaisses qui ont permis de retarder les vendanges au 2 septembre pour le Corton et au 5 septembre à Vosne, sans avoir d’explosion du botrytis. La vendange a été difficile, avec le souci d’éliminer les baies à botrytis ou grillées. Ce fut une vendange très sélective et l’on a laissé de côté les ceps qui portaient les grappes les plus grosses. On a essayé une table vibrante et on a éliminé beaucoup de larves et de coccinelles. Les raisins de cette récolte ont été parfaits. Il y a eu beaucoup moins de botrytis dans le Montrachet que dans les rouges.

Après cet exposé passionnant, nous avinons nos verres avec un Vosne Romanée Dominique Laurent 2011. Le vin est violet clair, sent des fruits aigrelets. Il est de belle mâche, bon, franc, sans complexité.

Le Corton Grand Cru Prince Florent de Mérode Domaine de la Romanée Conti 2011 est de la troisième vendange faite sous l’autorité de la Romanée Conti. Il est fait de trois sous-climats de Corton qui sont les meilleurs selon Michel Bettane. La couleur est rouge clairet. Le nez est assez chaleureux avec des suggestions de fraises écrasées. Le vin est ouvert, très fraise et framboise. Le final est vineux, avec des traces de réglisse et légèrement de thé. Il est plutôt gourmand, agréable et on sent un potentiel gastronomique. Je le trouve plus abouti que les 2009 et 2010, avec un côté terrien, racinaire dit Aubert et un bois bien fondu.

L’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2011 a une robe d’un rouge plus foncé que celui du corton. Le nez est très pur et c’est celui du domaine, ouvert mais rêche, tout en finesse. L’attaque est gourmande avec des fruits noirs. Le final est végétal avec un peu de réglisse. Le vin est plutôt sucré, délicieux au beau final raffiné. Il semble gastronomique suggère un peu de café tout en étant vineux. Il est de grande fraîcheur et plus facile à comprendre que des Echézeaux d’autres années. Bien sûr les autres vins du domaine sont plus complexes, mais il est plaisant.

Le Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2011 a une robe un peu plus sombre encore. Le vin est un peu réduit, ce qui fait qu’il a besoin de plus de temps pour s’épanouir dans le verre. Il est plus intense que l’Echézeaux, plus riche mais un peu plus brut aussi. La mâche est riche, il s’améliore. C’est un vin qu’il faudra attendre plusieurs années.

La Romanée SaintVivant Domaine de la Romanée Conti 2011 a une robe assez proche de celle du Grand Echézeaux. Aubert dit que c’est une robe de Nuits-Saint-Georges. Le nez est délicat. Il n’y a pas une trace de bois, on sent le vin. L’attaque est superbe et élégante. Le vin est gracile, féminin, doux. Le final le rend plus viril, affirmé. Il y a un saut qualitatif par rapport aux deux premiers vins du domaine. Aubert parle de concentration et transparence de ce vin ciselé.

Le Richebourg Domaine de la Romanée Conti 2011 a une robe d’un rouge intense, violacé. Le nez est aussi intense, riche, très vineux. Le vin a une attaque d’une puissance rare. Le final est riche et vineux. Il s’impose, il est carré, grandiose, guerrier. A mon goût, il est particulièrement bien fait. Il est joyeux et glorieux.

La Tâche Domaine de la Romanée Conti 2011 a une couleur encore plus noire. Le nez est incroyablement suave et doux. C’est assez étonnant. L’attaque est riche, plus épicée que celle du Richebourg et moins florale. Le final est beaucoup plus ample. Il y a une grande netteté, avec puissance, grandeur, fraîcheur. Le vineux évoque le sureau. Aubert de Villaine évoque le portrait de Richelieu par Philippe de Champaigne où le velours rouge capte le regard. On sent la rafle dans le vin. Il est au-dessus du Richebourg, alors que j’ai adoré le Richebourg. Aubert dit que les grains ont des maturités plus complexes que pour La Tâche 1990 que j’ai évoqué car ce 2011 m’y fait penser, à cause du travail à la vigne qui rend le vin plus fin que le 1990.

La Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 2011 a une couleur plus rouge et plus claire. Le nez est très doux, suave, assez discret et soyeux. L’attaque tintinnabule tant elle est complexe. Le vin pianote dans toutes les directions mais il n’est pas envahissant. Il a vraiment un parcours en bouche en pianotage. Ce vin s’exprime de façon très poétique. Lorsque je reviens aux autres vins, ils paraissent tous très simples. Il y a un éventail de saveurs dont on a du mal à faire le tour. Il est impressionnant, et les fruits rouges et les épices font comme un feu d’artifice. Je me recueille. Alors que tout le monde parle autour de moi, je me renferme dans ma bulle pour essayer de capter le message du vin. Je reste sans voix, captivé par l’ampleur et la complexité du vin.

Si je résume les quatre derniers bus, la Romanée Saint-Vivant est très franche, claire et pure, le Richebourg est affirmé, puissant, direct, La Tâche a une grande complexité et beaucoup de charme et la Romanée Conti est encore plus complexe, à la palette gustative infinie. Si ces vins sont plus faciles à lire que ceux de précédentes années, ils sont loin d’avoir permis de comprendre tous leurs mystères.

Le Montrachet Domaine de la Romanée Conti 2011 a une robe d’un jaune clair avec un peu d’or blanc. Le nez combine agrumes, lait et amandes. Le vin est beaucoup plus sec que d’habitude, sans la moindre trace de botrytis. Il a du citronné et son final est grandiose. C’est dans le final qu’il s’affirme avec citron, amande et noisette. Michel Bettane dit que sur ce millésime il a le style Leflaive. Il est moins monumental que d’autres années car il est plus sec. Il a une grande pureté, une belle présence et une persistance aromatique supérieure à celle des rouges. Son empreinte est d’une grande fraîcheur.

Il est à noter que lorsque le dialogue s’instaure avec la salle, les questions sont essentiellement techniques. Personne n’a parlé de goût. Les explications de Michel Bettane sont toujours pertinentes, la vision d’Aubert de Villaine est d’une grande sagesse et humilité. Cette dégustation est un grand moment. Si je devais donner un avis sur les vins de cette année, le Montrachet est nettement plus sec et sera plus strict que d’autres années. Les rouges sont d’une très grande précision, fruits d’un travail remarquable. Mais il va falloir attendre longtemps avant que ces vins subtils ne délivrent le charme qu’ils recèlent en eux. Je ne connaîtrai sans doute jamais leur maturité.

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Dîner « Harlan Estate » à l’hôtel Meurice jeudi, 11 décembre 2014

Anne et Olivier Bernard, les chaleureux propriétaires du Domaine de Chevalier organisent à l’hôtel Meurice un dîner de presse pour mettre en valeur et faire mieux connaître les vins de Harlan Estate, le célèbre vin de la Napa Valley. Nous sommes reçus au salon Pompadour, magnifique salon de réception de l’hôtel à la décoration «  à la pompadour » raffinée. Sont présents le fils du fondateur d’Harlan Estate, le directeur général du domaine, l’importateur pour l’Allemagne, l’importateur pour la France, des vignerons amis des Bernard et les représentants de la presse du vin et du négoce.

L’apéritif se prend avec un Champagne Krug Grande Cuvée en présence de la présidente de Krug et d’Olivier Krug. Le champagne a une bulle active. Il est encore d’une folle jeunesse malgré l’âge des champagnes qui le composent. Il n’est pas le mieux adapté au foie gras poêlé avec lequel sa bulle lutte. Ses évocations pâtissières et de caramel sont jolies. C’est un champagne qu’il faut avoir la sagesse de laisser vieillir en cave.

Le menu composé par le chef du Meurice est : foie gras de canard confit, topinambour et raifort / coquilles Saint-Jacques marinées, confiture d’algues et betteraves / cookpot de homard aux pommes de terre fumées / paleron de bœuf Black Angus, salsifis truffés, vrai jus / comté 36 mois, salade mesclun / vacherin aux agrumes.

La première série de vins est de deux blancs du Domaine de Chevalier. On est surpris de constater à quel point leurs couleurs sont claires. Le Domaine de Chevalier blanc 1992 a un nez superbe. Sa bouche est grasse, de belle structure et de belle minéralité. Il est de grand équilibre et son acidité bien mesurée est un signe de jeunesse.

Le Domaine de Chevalier blanc 1987 a un nez incroyable de puissance et de richesse. La bouche est abondante, le vin est légèrement torréfié. Le 1987 est plus grand que le 1992 mais l’accord avec les coquilles Saint-Jacques se fait mieux avec le 1992 qui devient superbe sur le plat.

En fait, le champagne eût été pertinent sur les coquilles Saint-Jacques crues et les deux Graves blancs l’eussent été sur le foie gras poêlé.

Le Domaine de Chevalier rouge 2004 a un nez subtil. Le vin est tout velours, de belle mâche au final un peu rêche. Le final n’est pas au niveau de la chaude attaque du vin en bouche.

Le Château Phélan Ségur 2001 a un nez un peu ingrat et pas totalement précis. Le vin est austère ce qui me pousse à demander un second verre de ce vin. Et là, je suis face à un vin superbe et gourmand, qui forme avec le délicieux homard un accord parfait. Un rêve. La sauce du homard est suffisamment légère pour que l’accord se fonde sur elle.

Don Weaver, le directeur général de Harlan Estate fait une présentation de son domaine et nous allons boire deux séries de son vin : d’abord 2005, 2003, 1998 et 1992 puis 2001, 2007 et 2010.

Le Harlan Estate 2005 est un vin très riche superbe, joyeux, avec beaucoup de douceur et un grain très fin.

Le Harlan Estate 2003 semble moins équilibré. L’alcool apparaît sur un fond de notes bourguignonnes. Malgré cela le vin est puissant, voire un peu lourd.

Le Harlan Estate 1998 est beaucoup plus élégant, plus charmeur. C’est un très bon vin.

Le Harlan Estate magnum 1992 a d’abord une approche un peu amère mais de belle race.

A ce stade je classe : 1998, 2005, 2003 et 1992 car le 1992 n’est pas épanoui dans le verre. Ce qui va me surprendre c’est la rapidité avec laquelle les choses changent. Le 1992 devient beau avec des accents bordelais. Le classement change et devient 1992, 2005, 1998 et 2003.

Le paleron est très goûteux et l’accord se trouve surtout sur la sauce. Harlan Estate me semble un vin très typé mais pas très complexe. Le 1992 est très grand et raffiné, le 2005 est généreux et spontané, le 2003 est un peu trop marqué par l’alcool.

Mais les vins changent encore. Le 1992 a un velouté floral, le 1998 devient plus grand et gagne en structure, avec des évocations de café et de caramel. Le 2005 est vraiment charmant de douceur sous la puissance.

Viennent maintenant trois vins d’années riches. Le Harlan Estate 2001 a un nez fantastique, incroyable par rapport aux autres. Son final est végétal, de fenouil, d’anis et de menthe qui lui donne la fraîcheur des très grands vins. Je tombe amoureux de ce vin.

Le Harlan Estate 2007 est frais, très joli mais comme pour le 2003 l’alcool prend un peu le devant de la scène ce qui ne me satisfait pas. Il a des notes de café.

Le Harlan Estate 2010 est frais fluide, très élégant mais pas encore structuré. C’est un vin qui n’a pas encore été mis sur le marché. Mon chouchou de cette dégustation est le 2001 et immédiatement j’ai demandé à l’importateur français, placé à mes côtés, de chercher à m’en procurer. Michel Bettane fait une synthèse de ces vins, très écouté par les américains. Pour lui les plus beaux sont 2010 et 2005 mais il juge en devenir ce qui n’est pas mon cas.

Pour le dessert nous allons goûter deux Guiraud. Le Château Guiraud 2001 est très équilibré, pas très puissant ce qui m’étonne. Il joue plus sur l’élégance. Le Château Guiraud 2002 est fait pour être bu maintenant. Il est nettement supérieur au 2001 ce qui est étonnant puisque le grand millésime du sauternais est le 2001. Le 2002 est superbe d’élégance et d’équilibre. Il est ouvert, joliment sucré et frais. Le 2001 est probablement de plus grande structure, mais il est plus fermé. Le dessert aux agrumes forme un accord démoniaque.

Anne et Olivier Bernard ont organisé une soirée magnifique, chaudement amicale et détendue. La cuisine conduite par Alain Ducasse est très convaincante. Le service des vins a été remarquable et efficace. La démonstration Harlan Estate a été réussie, les vins d’avant Michel Rolland, consultant depuis le millésime 1999 ont montré le potentiel des vins à bien vieillir et ceux depuis Michel Rolland sont orientés vers la fraîcheur et l’élégance. Ce fut un beau dîner.

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Visite et dégustation au Domaine de la Romanée Conti mercredi, 10 décembre 2014

La nuit a été douce pour tous, comme si la Chartreuse nous avait protégés des effets de l’alcool et de la bonne chère. Nous arrivons aux portes du siège du domaine de la Romanée Conti. Aubert de Villaine avait prévenu qu’il ne serait pas avec nous car il doit se rendre à Paris. Nous avons juste le temps de le saluer car son taxi est en retard. Je lui ai parlé de l’impression désagréable que j’avais eue récemment avec une Romanée Conti 1964 que j’avais trouvée trop puissante par rapport à ce que j’attendais. Aubert m’a rassuré et Bernard Noblet le fera un peu plus tard, la Romanée Conti 1964 est extrêmement puissante et Bernard la préfère à la 1969. J’avais donc commis une erreur d’appréciation en buvant ce grand vin. C’est bien dommage de m’être trompé sur son message.

Nicolas, chef des cultures du domaine nous entraîne le long des vignes pour expliquer aux vignerons la philosophie de la gestion des vignes. Pour les vignerons du Rhône, qui posent de bonnes questions, les exposés très clairs de Nicolas sont un régal. Pour moi, qui ne comprends pas tout ce qui est dit, je me régale aussi mais sans la perspective que peuvent avoir les vignerons. Il fait froid, nous nous tenons chaud comme le fait un troupeau car il y a un petit vent glaçant.

Nous nous rendons ensuite en cave où Bernard Noblet, l’homme qui fait les vins du domaine à la suite de son père dans une continuité historique rare, va nous faire déguster à l’aveugle quelques vins. Il fait froid dans cette cave séculaire et il faut réchauffer son verre pour en tirer le meilleur des arômes. L’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti magnum 2001 a un nez fermé. Il est d’un millésime de connaisseurs nous dit Bernard. Il a été fait en vendanges entières, c’est-à-dire en conservant les rafles. Il est floral, avec de jolies épices, avec des fruits rouges jolis et discrets. J’aime beaucoup ce vin élégant.

Le vin suivant a un nez très vif. Au nez, je pense à Richebourg. Il a une très forte personnalité. Pour trouver l’année, j’oublie que le vieillissement en cave du domaine est beaucoup plus lent que dans la cave d’un particulier. Aussi, l’idée des années 80 sur une année discrète comme 1984 me paraît possible. Il s’agit en fait du Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1965, d’une petite année mais qui réussit à ce Richebourg. Il y a une belle salinité, des suggestions de sous-bois, d’humus, de forêt. Le vin, très salin est superbe, au message pénétrant. Nous sommes aux anges.

Bernard va chercher deux bouteilles d’un même blanc. Le nez pétrole une grande minéralité. La bouche est intense. Immédiatement je reconnais les caractéristiques d’un Bâtard-Montrachet, mais le vin est tellement puissant que j’imagine que ce pourrait être un Montrachet qui se serait engagé sur les pistes d’un Bâtard. Il y a de la noisette, de l’amande, du caramel. Il y a aussi des notes salines. Ce vin riche est de très forte puissance. Les vendanges ont été faites tardivement de grains très mûrs. Il s’agit d’un Bâtard-Montrachet Domaine de la Romanée Conti 2007. C’est probablement le Bâtard le plus riche de tous ceux que j’ai bus au domaine.

Nous remercions Bernard et Nicolas de cette visite et de cette dégustation. Les vignerons sont contents de l’accueil chaleureux que nous avons eu. Ils offrent plusieurs bouteilles de leurs domaines. Ce fut un grand moment.

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Visite au Domaine Leflaive et dégustation mercredi, 10 décembre 2014

Tout le monde de « Rhône Vignobles » est heureux de se retrouver et nous nous rendons au Domaine Leflaive. Nous sommes accueillis par Anne-Claude Leflaive et Eric, le régisseur, va conduire les vignerons dans une visite des vignes et de la cuverie. Je les laisse faire, à la fois pour me reposer et pour écrire le compte-rendu du dîner d’hier au Bristol qui risquerait d’être difficile à faire de tête après deux jours en Bourgogne. Anne-Claude m’a accueilli en disant à quel point elle a été émue par le compte-rendu que j’ai fait du Montrachet domaine Leflaive 1996. Je rejoins le groupe pour la dégustation en cave, commentée par Anne-Claude et le régisseur.

Anne-Claude représente la troisième génération à la tête du domaine qui s’est agrandi. Elle a participé à l’élaboration du vin dès 1990 et a pris la responsabilité seule depuis 1994. Le travail de transformation du vignoble en biodynamie s’est fait sur une période de huit ans, de 1990 à 1998. Le domaine représente 24 hectares dont onze de premier cru et cinq de grands crus, dont le Montrachet représente environ 800 m² et produit de l’ordre de 300 bouteilles par an. A noter que le fût qui va contenir le Montrachet de l’année a une taille qui est déterminée par l’ampleur de la récolte. Chaque millésime a un fût neuf de taille différente.

La dégustation prévue est celle de vins de 2013. Le Bourgogne blanc domaine Leflaive 2013 a un nez discret. Il a un beau fruit et une belle opulence, c’est un très beau vin avec une belle acidité. Dans le final on décèle du lacté. Précis, ce vin charnu évoque les amandes. Il sera mis en bouteilles en mars 2015. C’est un vin riche, qui transcende la notion de bourgogne générique.

Le Puligny-Montrachet Clavoillon 1er Cru Domaine Leflaive 2013 a un nez plus riche. La bouche est plus fluide, rendant le vin très joli et gracieux, de belle minéralité. Il évoque les pâtes de fruits. Il est plus réservé que ce que je connais des vins de Leflaive.

Le Puligny-Montrachet les Pucelles 1er Cru Domaine Leflaive 2013 a un nez plus élégant et discret. Il est très fluide, élégant, tout en finesse. Dans le final on retrouve un peu de caramel comme pour le Clavoillon. Il est plus calcaire, plus complexe. Un des vignerons dit « on mâche de la craie ». Il a une belle acidité.

Le Chevalier Montrachet Grand Cru Domaine Leflaive 2013 vient d’une parcelle de 2 hectares, l’appellation comptant seulement sept hectares. Tout-à-coup, on change de dimension. Ce vin a une énergie extrême. Il a le gras typique des vins de Leflaive. Il est très fin, élégant. Bien fait, il est tout en finesse. Il est gourmand, citronné, au final immense et à la belle acidité. Nous buvons un très grand vin.

L’atmosphère étant joyeuse, je lance en direction d’Anne Claude qu’à mon avis les Chevalier Montrachet sont incapables de vieillir, ce qui justifie qu’on boive le 2013. L’allusion est directe, la perche est grosse et Anne-Claude joue le jeu de bonne grâce. Nous allons boire des Chevalier Montrachet dont nous allons devoir trouver les années.

Le Chevalier Montrachet Grand Cru Domaine Leflaive qui nous est servi a un nez qui pétrole. Il est gras en bouche, caramel, épais, très grand. Il est imposant et je pense qu’il est de la décennie 90 mais en fait c’est un Chevalier Montrachet Grand Cru Domaine Leflaive 2001. Il a du fumé, de jolis agrumes. C’est un vin qui a bien évolué, déjà très gastronomique.

Deux bouteilles qui vont suivre ont un problème, l’une est bouchonnée mais légèrement et l’autre vin est cuit, il a mal évolué. Le Chevalier Montrachet Grand Cru Domaine Leflaive 1989 qui leur succède est très lacté et l’on sent l’alcool qui ressort. Pour moi ce vin n’est pas parfait et ses évocations de champignons, de brioche et de beurre manquent de précision.

Tout-à-coup Anne-Claude nous annonce qu’elle va nous ouvrir un Montrachet. Lorsqu’un domaine produit 300 bouteilles par an, un tel cadeau est inimaginable. Anne-Claude a la gentillesse de dire que j’ai tellement aimé son 1996 qu’elle est heureuse d’en ouvrir un pour nous

Le Montrachet Grand Cru Domaine Leflaive 1993 s’annonce tout de suite comme un grand vin. Il est salin ce que j’aime beaucoup. Il n’a pas l’énergie du 1996 que j’ai bu récemment, mais il est tout en suggestion. Il a une race extrême et une grande complexité. Il évoque un peu la truffe blanche. Le lait et le caramel, s’ils existent, sont suggérés. C’est un vin très structuré. Nous buvons le troisième millésime de ce vin créé en 1991. Nous sommes tous émus de ce cadeau.

J’ai préféré le Chevalier Montrachet 2001, mais ce 1993 est porteur d’une grande émotion. Mille mercis à Anne-Claude pour une telle générosité.

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Dîner au restaurant Ma Cuisine à Beaune mercredi, 10 décembre 2014

Nous logeons à l’hôtel Ibis de Beaune qui fait prendre conscience qu’il est possible d’imaginer des chambres aux tailles minuscules, où chaque centimètre carré est utilisé. C’est à pied que nous nous rendons au restaurant Ma Cuisine. Dans la salle, les cadavres de grandes bouteilles sont nombreux. Ici on a bu du grand, des plus beaux domaines bourguignons. Pierre Escoffier qui nous accueille est un homme sympathique, à la tête d’une belle cave proposée à des prix très tentants.

Notre table est longue, puisque nous sommes plus de seize et les vins se commandent aux deux bouts de la table sans grande concertation. J’ai choisi de dîner d’une douzaine d’escargots et d’un pigeon.

Le Meursault 1er cru Perrières Vincent Dancer 2008 est très gouleyant et de forte personnalité. Très agréable à boire. Le Chambolle-Musigny Ghislaine Barthod 2009 n’a pas un grand intérêt, vin manquant de vivacité.

Les choses commencent à s’animer avec le Volnay Santenots-du-Milieu domaine des Comtes Lafon 2008. Le vin est fort amène, de belle vibration. La machine est lancée et le Gevrey-Chambertin 1er cru Lavaux Saint-Jacques Claude Dugat 2008 a une belle présence, charnu et cohérent.

Pierre, le patron, qui connaît plusieurs des vignerons, nous verse un vin à découvrir. C’est le président de Rhône Vignobles, Alexis, qui va trouver l’année. Il est félicité. C’est un Beaune Grèves Chanson Père & Fils 1955 vin difficile à définir avec une forte acidité, qui est plaisant à déguster mais n’a pas le charme des excellents bourgognes de la grande année 1955.

Pour le dessert au chocolat que j’ai imposé à l’ensemble de la table, j’ai apporté deux bouteilles de Maury Paule de Volontat 1925. Le vin est superbe, à l’alcool présent et aux évocations de café, de moka, de caramel, mais surtout une richesse aromatique qui n’appartient qu’aux très vieux Maury.

L’ambiance est à la générosité aussi l’un des amis commande Château d’Yquem 1950. Hélas, un léger goût de bouchon empêche d’avoir le plaisir de cette année qui a été réussie à Yquem. Dommage, car même si on peut lire le message entre les lignes, le plaisir est émasculé.

Les cerveaux phosphorent car certains ne veulent pas qu’on finisse le repas comme cela. A seize nous allons assécher une bouteille d’un litre de Chartreuse verte des années 1965 / 1966 qui est d’une belle richesse, même si elle n’a pas la noblesse et la pureté des plus anciennes chartreuses ou Tarragone.

Ces vignerons du Rhône ont une belle santé puisqu’ils sont insatiables. Ils ont aussi une grande générosité et une joie de vivre qu’il fait plaisir de partager.

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