Dîner pour les vainqueurs d’un concours européen de dégustation à l’aveugle vendredi, 24 novembre 2023

Une habitude avait été créée il y a quelques années de proposer à des étudiants de grandes écoles de participer à l’Académie des Vins Anciens en bénéficiant d’un tarif préférentiel. Plusieurs étudiants de diverses écoles, HEC, Normale Sup et autres, en avaient profité. J’avais revu certains étudiants lors de dîners privés et j’ai appris qu’ils avaient formé un groupe qui participait aux compétitions ouvertes aux grandes écoles européennes de dégustation de vins à l’aveugle.

J’avais dit à ces candidats : si vous gagnez la compétition, j’ouvrirai pour vous de belles bouteilles. Il se trouve qu’ils ont gagné. Je n’ai pas vu le diplôme, je fais confiance.

Nous avons échangé des messages pour mettre au point le programme des vins. L’un des lauréats a proposé un restaurant que je ne connais pas, le restaurant Passionné, fondé il y a un an. Le personnel est prévenu que je viendrai vers 17 heures ouvrir les vins.

Lorsque je me présente, l’accueil est sympathique. On sent le personnel très intéressé et concerné par notre dîner.

J’ouvre les vins. Le serveur ou sommelier qui accompagne mon travail vient avec plusieurs carafes et je lui dis que je ne les utiliserai pas. Pendant l’ouverture, je me fais expliquer les plats conçus par le chef Satoshi Horiuchi et je fais modifier l’ordre de service, j’ajoute un plat et certains ingrédients seront évités, comme la vanille ou la vinaigrette. Cela se fait dans un climat ouvert.

Le Montrachet Caves Nicolas 1928 a un verre très clair qui permet de voir que le vin est trouble. Le nez n’est pas parfait mais il faut attendre avant de juger. Le Kébir Rosé Frédéric Lung probable 1947 a un nez qui me rappelle de beaux souvenirs. Un sourire illumine mon visage.

Le Chambertin Clos de Bèze Pierre Damoy 1961 a un parfum qui promet du bonheur et La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1963 promet de la grandeur.

J’ouvre maintenant le vin parmi les trois que j’ai apportés qui est le cadeau symbolique pour mes amis gagnants du concours : le Cru de Coÿ Enclave Yquem Sauternes 1923. Il a cent ans tout juste et il a vécu dans le berceau d’Yquem. Il y a un fort symbole dans ce cadeau. Son parfum est d’une justesse parfaite.

L’ami qui a apporté son vin, le Château Siran Margaux 1929 est un héritier des propriétaires. La bouteille a été reconditionnée au château en 2002. On sent que le parfum est plus jeune que celui d’un 1929, même si le vin est authentiquement de 1929.

Les deux champagnes sont ouverts au dernier moment car je ne voulais pas les ouvrir avant l’arrivée de leur apporteur.

Les bouteilles étant ouvertes, j’ai le temps de me rendre au siège de la Banque J.P. Morgan où le cognac Hennessy va faire goûter des cognacs d’exception en présence du Maître Assembleur Renaud Fillioux de Gironde. Je bavarde avec plusieurs personnes invitées en grignotant des petits canapés sympathiques et en buvant un champagne du groupe Moët Hennessy. Devant repartir assez vite, je demande à Renaud de me faire goûter un seul cognac avant le début de la dégustation. C’est un Cognac Richard Hennessy qui m’est tendu. Quel grand cognac. Il ne peut se boire que religieusement.

Je reviens vite au restaurant Passionné. Le menu du repas est : Le menu : amuse-bouches: saint Jacques, crabe, tourteau et betterave / saint Jacques dans sa coque, ormeaux avec aubergine / déclinaison autour du champignon, comme un café gourmand / lieu jaune / ris de veau et crevettes / canard / lièvre à la royale / Tatin / cannelés exotiques.

Parmi les deux champagnes Pol Roger Demi-Sec nous commençons par le Champagne Pol Roger Extra Cuvée de Réserve Demi-Sec années 50. C’est la mauvaise pioche car en voulant le plus sec des deux, nous nous sommes méfiés de la notation « goût français », mais le plus dosé est l’extra cuvée de réserve. Le champagne en soi est follement intéressant, mais il le serait plus sur le dessert que sur les entrées. La coquille Saint-Jacques crue n’est pas à l’aise avec lui aussi nous précipitons le service des blancs. Le Montrachet Caves Nicolas 1928 a un nez incertain que l’un d’entre nous trouve bouchonné. Je lui suggère de passer outre ce sentiment, car en milieu de bouche le vin est extrêmement agréable. Il est riche et puissant, et en laissant de côté le très léger défaut de nez, on se régale.

Le Kébir Rosé Frédéric Lung probable 1947 est un vin absolument plaisant aux goûts exotiques. Les ormeaux sont magnifiquement réussis et trouvent un écho avec le vin algérien. Les ormeaux pourraient cohabiter avec un vin rouge et l’essai avec le Château Siran Margaux 1929 est concluant. Ce vin de Bordeaux est frais avec des accents jeunes. Il est riche et cohérent. Je le trouve accompli comme un 1929 doit l’être.

J’avais vanté les qualités du Chambertin Clos de Bèze Pierre Damoy 1961 que j’avais massivement acheté il y a une quarantaine d’années. Damoy était le nom d’une chaîne de magasins et peu de gens s’intéressaient à un chambertin doté d’un tel nom. Quelle erreur, car ce vin que j’ai mis souvent dans mes dîners finissait presque chaque fois en premier ou en second des votes des convives. Alors après tant de compliments, mes jeunes amis étaient curieux.

Sur le ris de veau, bonheur absolu, car ce chambertin est d’un accomplissement total. Il a des notes salines qui suggèrent un peu celles des vins de la Romanée Conti. Il est riche, droit, serein. Une merveille et mes amis comprennent mon amour pour ce vin. Ils sont conquis.

Pour beaucoup, La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1963 est le premier vin du domaine de la Romanée Conti qu’ils découvrent. Et ils ont une immense chance car cette Tâche est exceptionnelle. Par un hasard de l’histoire, il y a le même nombre de vins mis en bouteilles pour les millésimes 1963 et 1966. Comme la donnée du nombre de bouteilles produites est la seule permettant une identification je pourrais choisir 1963 ou 1966, mais le caractère gracieux et délicat de ce vin subtil me suggère de le dater en 1963. La rose et le sel sont présents avec grâce et raffinement. C’est une Tâche qui ne joue pas sur sa puissance mais sur son élégance. Un immense vin, idéal pour le lièvre à la royale que j’ai préféré à celui du Train Bleu beaucoup plus gibier. Celui-ci, plus doux mais très goûteux, est idéal pour le vin. Du bonheur.

Le Cru de Coÿ Enclave Yquem Sauternes 1923 est un sauternes d’une grande délicatesse. Il est subtil et délicieux mais il n’a pas le coffre des vins d’Yquem. Ce qui est intéressant c’est qu’il a atteint un équilibre qui le rend sans âge. A l’aveugle, personne ne s’aventurerait à lui donner cent ans. C’est un vin d’un bel équilibre. J’avais demandé pour ce vin une Tarte Tatin, mais j’ai trouvé qu’elle ne faisait pas Tatin et n’apportait pas sa douceur appuyée au vin. Boire ce vin centenaire est un grand moment.

Le Champagne Pol Roger Grand Vin Goût Français Demi-Sec années 50 est absolument charmant. On regrette qu’il n’ait pas été en tête de repas, car il est beaucoup plus sec que le premier que nous avons bu. Dommage car ce champagne raffiné est très grand.

Il y a quelques mois quelqu’un a remis au restaurant L’Ecru de France un petit flacon à mon intention. On peut lire sur le verre : Pure Single Rum Renaissance Distillery Isle of Formose Single Cask. Je ne sais pas du tout qui me l’a adressé et s’il lit cet article, qu’il me contacte pour que je le remercie. Nous buvons ce rhum comme point final de notre repas, mais ce breuvage m’évoque beaucoup plus un excellent Bourbon qu’un rhum. Agréable à boire, large d’épaules, mais très peu rhum.

Que dire de ce repas ? Mes amis sont charmants, ils ont l’avenir devant eux et ils aiment le vin ce qui est un atout de plus. Je suis heureux de leur avoir fait découvrir deux bourgognes dans leur plus belle expression. Le restaurant a été très réactif, dans une ambiance de belle coopération. Les apports de mes amis ont été généreux. Les ormeaux et le lièvre à la royale m’ont séduit.

Ce grand moment d’amitié avec des jeunes prometteurs est très important pour moi.


Après mon compte-rendu il est intéressant de voir les comptes rendus des participants. C’est très intéressant de voir ces approches différentes.

Compte-rendu d’un des convives :

(1)         Pol Roger demi-sec, années 1950 : la robe est claire, brillante et orangée. L’on dirait un sauternes de vingt ans tant la couleur est sirupeuse. Le premier nez est opulent, encore sur les fruits jaunes et la mangue. C’est très surprenant, avec encore un peu de brioché qui donne de la jeunesse. Le nez s’arrondit sur la cire, le menthol : mon ami à ma gauche me dira que cela fait penser aux salons nouvel-empire. Je ne peux qu’y souscrire.

La bouche est surprenante. Une légère bulle soutient le vin et lui donne de l’ampleur. La longueur est immense, avec un sucre épais et massif. On peut hésiter entre 100 et 200 grammes de sucre résiduel. Je m’attendais avec la mention « demi-sec » à moins, mais avec l’âge le sucre est suffisamment patiné pour que le vin ouvre le bal sans heurter les suivants.

Il me rappellera un cidre de glace fait par Antoine Marois et dégusté il y a quelques semaines. Un merveilleux vin.

(2)         Le montrachet est d’une robe jaune léger. Elle est intemporelle. Le nez est initialement fatigué, avec un voile liégeux. Si l’on passe outre, on a un bouquet tout à fait terrien. Les notes de fruits secs sont belles et légères, la truffe blanche est opulente.

La vraie magie opère en bouche. Le vin n’a pas la moindre trace de bouchon et la structure est proprement magistrale. On croirait une cathédrale. La rétro-olfaction est une définition extrêmement précise de la morille, cette précision est magique. Le vin est puissant, ample, il se déploie de façon concentrique puis ramène à l’essentiel par une acidité salvatrice. C’est un vin de méditation qui se marie merveilleusement avec la Saint-Jacques. C’est un vin merveilleux par ce qu’il donne, si on accepte cette légère imperfection du nez.

(3)         Le Kebir rosé années 1940 est tout l’inverse. C’est une perfection au nez, avec des notes de fleurs enivrantes. On a toute l’opulence de la datte. Le vin semble intemporel. La bouche est puissante et alcooleuse, mais je lui trouve de légers écarts. C’est trop crayeux, trop huîtré. Je retrouve cela sur certains vieux vins blancs ou rosés, et je ne pense pas que cela provienne du terroir. La nourriture lui fait le plus grand bien, notamment l’ormeaux qui réalise avec ce vin un mariage d’amour.

(4)         Le Siran 1929 a été reconditionné au domaine il y a moins de dix ans. Le nez est éclatant, c’est un cigare et des notes de fumées merveilleuses. Le vin est précis et net en bouche, avec une puissance de l’alcool et des fruits compotés que l’on n’imaginerait.

(5)         Le chambertin clos de Bèze 1961 de Pierre Damoy arrive, et l’on pourrait croire à un miracle. Le vin est d’une puissance sans commune mesure. Dès le nez dans le verre, impossible de s’en sortir. On sent la figue rôtie, une très légère olive noire, de la fumée… A l’aveugle, qui dirait que ce vin n’a pas 20 ans ? La bouche est stratosphérique, il est difficile de pouvoir lui trouver une comparaison dans mon parcours. Elle est tannique, d’une longueur interminable.

Le vin est puissant, terrien, il impose son monde. Quelques rires nerveux caractérisent l’atmosphère de la table. C’est ça un grand cru de bourgogne. Quel vin.

(6)         La Tache 1963 domaine de la Romanée Conti. Après de tels propos dithyrambiques sur Clos de Bèze, vous allez me dire que je vais faire encore au-dessus avec la Tache. C’est plus nuancé, mais je n’arriverai pas à mettre un de ces deux vins au-dessus de l’autre. La Tache joue sur un autre registre. Le nez est merveilleux sur la rose, des fruits noirs très légers, de la cannelle. C’est incroyablement frais, un parfum subtil. La bouche est tout le contraire du Chambertin, elle n’impose rien, elle est aérienne. Elle passe d’une senteur à une autre, des fruits aux épices, de la fumée au sel.

La Tache est un vin qui n’a plus de chair, c’est un pur esprit. Et ca le rend magnifique.

(7)         Clos de Coÿe 1923 enclave d’Yquem est surnaturel, car on ne peut pas lui donner d’âge. On y trouve de la mandarine, du citron vert, une fraicheur et un exotisme d’une grande exubérance. Le nez est aussi dominé par des notes de plastique brulé, de noix de coco grillée, de torréfaction puissante. Je suis persuadé que ce vin a séjourné longtemps dans un fut très neuf, car ces notes sont puissantes. En bouche, la mache est immense, le sucre est massif avec une acidité mordante qui étend longuement le vin.

(8)         Pol Roger années 1950 « goût français » a du mal à passer avec Coÿe, car nous l’attendions extrêmement sucré, encore plus que le premier champagne et le clos de Coÿe. C’est l’inverse qui se produit, il est moins sucré et plus fatigué que le premier champagne.

Compte-rendu d’un autre participant

Bonjour à tous, je tiens tout d’abord à vous dire un grand merci pour ce dîner dantesque et dont je me souviendrai longtemps. Puisse le vin continuer à nous rassembler à l’avenir comme il le fait avec tant de complicité. Mon classement est le suivant :

-Chambertin 1961

-La Tâche 1963

-Montrachet 1928

-Cru de Cöy 1923

-Château Siran 1929

-Le premier Pol Roger années 1950

-Kébir Rosé 1950

-Le dernier Pol Roger « goût français » années 1950

Je mets le Chambertin juste au-dessus de La Tâche en raison du choc ressenti au moment de plonger mon nez dans le verre. C’était une expérience sensorielle rare, un tremblement de terre après les premiers vins qui étaient alors déjà excellents. Surtout après le Siran. En goûtant ce dernier, c’est un peu comme si j’avais eu en moi la preuve que l’univers est immense et que nous ne sommes qu’un point infime perdu dans sa totalité ; mais le Chambertin m’est apparu comme l’infini, il m’a montré que l’univers était en fait au-delà de notre conception des distances. La couleur cuivre sublime attire instantanément le regard avant de révéler des arômes de viande rôtie et de poivre chaud, de ceps et de truffes noires. La bouche était d’un velours soyeux et ample, avec une sensation poivrée sur la langue que je n’avais jamais ressentie.

J’avais en bouche un vrai vin épicé. Un vin très viril, inoubliable.

La Tâche était au même niveau, soyons francs, mais il venait après un titan, ce qui a réduit la distance de surprise dans la dégustation entre les vins. Le Chambertin avait en plus l’avantage de correspondre davantage à mes goûts personnels. La Tâche était plus subtile, plus aérien, magistral de longueur et de fraîcheur en bouche. Chambertin est un Delacroix, La Tâche un Chagall. Deux conceptions de la noblesse et de l’excellence. Le nez de roses surannées est unique en son genre, enivrant et profond. Le gros sel est d’une fraîcheur impressionnante. En bouche, la structure était celle d’une cathédrale : long et tout en oraison. En effet, le vin rebondissait sur la langue, montait vers le palais pour redescendre dans un va-et-vient incontrôlable, joyeux : divin.

Au moment de goûter le Montrachet, j’ai eu peur à cause des effluves de bouchon qui s’en dégageaient. Mes craintes furent vites dissipées à mesure que le vin s’ouvrait dans le verre. Car j’avais devant moi un vin presque centenaire d’une fraicheur désaltérante. L’acidité du vin soutenait et amplifiait des arômes de vieille poire et de tabac blond.

Le côté suranné offrait à la dégustation une profondeur mystérieuse et insaisissable. L’accord avec les ormeaux l’aura rendu incontournable pour ce classement.

Le cru de Cöy est quant à lui au rang des vins éternels. Sa robe or-cuivre avec des reflets rouges était d’une beauté incomparable. S’il eût pu en acheter, Sardanapale aurait bu de ce vin à son image : un vin opulent, d’une richesse démesurée. Plonger le nez dans ce verre, c’est se perdre dans des plaisirs exotiques violents, mélange ahurissant de fruits et d’encens, d’épices et de sucre. En bouche, je fus agréablement surpris par un taux de sucre maitrisé, équilibré par une acidité qui n’a pas pris une ride. Est-il vraiment nécessaire que je fasse l’éloge de sa longueur en bouche ? L’homme n’a pas encore inventé l’outil capable de la mesurer.

Château Siran est le vin qui m’a séduit au premier nez. Le goûter m’en fit tomber amoureux. D’une élégance aristocratique, sa robe pourpre fut confectionnée par une maison de haute couture et lui rend la beauté de ses vingt ans. On ne se lasse pas de son bouquet de pivoines et de fruits rouges mûrs. C’est un vin divinement féminin, digne de Margaux.

La bouche est suave, caressante. On reste sur un mélange de cerise confite, de vanille et de cardamome. Et moi qui pensait que le Bordeaux serait plus dominateur que le Bourgogne ! Le Siran fait la révérence tandis que le Chambertin jette ses armes sur la table.

On peut dire qu’un dîner commence bien lorsqu’il s’ouvre sur un Pol Roger demi-sec années 1950. Davantage demi que sec, le vin se love entre les papilles et vient chatouiller le palais. C’est doux, c’est frais, d’un gras fin et gourmand à la fois. Je prenais plaisir à remuer régulièrement mon verre tout au long du repas car s’en dégageaient des arômes nostalgiques de boiseries anciennes. Un vin joyeux et mélancolique à la fois :  la classe à la française.

Boire un Kebir c’est remettre un képi. Le temps d’un repas, hors du temps. La sensation incroyable de boire un vin produit à Alger dans les années 1950 est difficile à décrire. On s’attend à tout, sauf à ça. Le nez est expressif, un subtil mélange de groseille et de cumin. La bouche est chaude, on sent tout de suite la tenue du vin : stricte, d’une grande dignité. C’est un rosé dans toute sa splendeur : ni blanc, ni rouge, il ne prend pas parti. C’est le vin à part de la sélection, étonnant, fascinant, indépendant.

Le Pol Roger « goût français » m’a finalement semblé plus fermé par rapport aux autres. Mais il faut reconnaitre qu’être servi en dernier après cette ascension de l’Olympe est un rôle ingrat. Mon attention quelque peu distraite en cette fin de repas n’y est aussi probablement pas étrangère. Le vin était néanmoins très agréable, gourmand, beurré. D’un beurre vieilli, affiné. La bouche ne ment pas et vient clore en beauté ce dîner spectaculaire.

Je tiens à saluer le travail du chef Horiuchi et toute l’équipe du Passionné pour l’organisation de ce cette expérience inoubliable.

L’intelligence est une question de goût.

Commentaire d’un autre participant

Merci encore pour ce moment merveilleux. Les mets étaient délicieux, les vins spectaculaires et la compagnie de grande qualité. Je me souviendrai toujours de ce lièvre à la royale avec la Tache 63.

Voici mon classement qui reflète avant tout mes goûts, car tous les vins étaient excellents.

  1. La Tâche (Pour sa complexité au nez et sa douceur en bouche)
  2. Chambertin (Pour sa puissance et ses épices)
  3. Siran (Pour son fruit et son côté féminin)
  4. Montrachet (Pour son acidité et son intemporalité)
  5. Pol Roger demi-sec (Pour son équilibre et son côté gourmand)
  6. Cru de Coy (Pour ses notes de noix et sa couler cuivrée)
  7. Kébir Rosé (Pour son nez majestueux et sa jeunesse)
  8. Pol Roger goût français (Celui que j’ai le moins apprécié car je le trouvais vieux au nez et pas très équilibré en bouche)

Gauthier, merci encore pour l’organisation. Le restaurant était clairement à la hauteur et ce fut une belle découverte. François, merci de nous avoir fait découvrir ces trésors !

déjeuner à la Manufacture Kaviari vendredi, 24 novembre 2023

Une amie américaine était présente au dîner au château d’Yquem. Elle est encore à Paris aussi nous allons ensemble déjeuner à la Manufacture Kaviari. Karin Nebot reçoit des chefs étrangers de Corée et du Danemark aussi déjeunerons-nous dans la cuisine qui est un espace fort agréable.

Nous allons déguster du Caviar Osciètre que j’aime beaucoup, du Caviar Baeri français, du Caviar Osciètre gros grains et du Caviar Cristal. Les préférences sont différentes pour chacun de nous. L’Osciètre gros grains que je mets en premier est mis en dernier par ma voisine. Ma femme préfère le Baeri à l’Osciètre alors que je fais le choix contraire. Peu importe et cela prouve que ces caviars ont tous bons.

On les goûte d’abord avec des blinis et des œufs de truites, des œufs de saumon viennent compléter nos amuse-bouches avec du saumon présenté en deux formes différentes, l’une très douce et l’autre plus typée.

J’ai apporté un Champagne Dom Pérignon Magnum 1992 qui est d’une belle sérénité. Lors de son lancement ce champagne n’avait pas été encensé, car d’une petite année, mais aujourd’hui son équilibre non ostentatoire en fait un champagne adorable.

Dom Pérignon est vraiment l’ami des caviars du fait de cette aisance accueillante. Mais j’ai aussi apporté un Château Chalon Désiré Petit & Fils à Pupillin 1992. Son nez est intense et puissant avec une forte marque alcoolique mais aussi un petit soupçon de caramel.

Avec une tartine smorrebrod danoise, l’accord avec le Château Chalon est impressionnant aussi je vais le faire goûter aux danois présents dans la grande salle de la Manufacture. Ils sont comme moi éblouis de cet accord.

Nous allons dans la salle de dégustation réfrigérée faire la traditionnelle dégustation avec Alexis qui nous suit ou nous précède dans notre périple.

La suite du repas se fait à la cuisine avec de délicieuses tartes, et un dessert à base de citron. L’atmosphère chez Kaviari est toujours aimable et ouverte au partage.

L’amie américaine aura participé au diner à Langon, au déjeuner à Yquem avec l’équipe qui fait Yquem, au dîner à Yquem et à ce déjeuner. Elle a vécu une belle expérience.

Déjeuner dominical au Train Bleu vendredi, 24 novembre 2023

Le dimanche nous allons faire un déjeuner de famille au Train Bleu le mythique restaurant de la Gare de Lyon à Paris. Il est géré à la façon d’une brasserie avec une cuisine très traditionnelle. Le gigot d’agneau est découpé devant le client sur le chariot appelé « voiture de tranche », les crêpes Suzette flambent au Grand Marnier devant la table. C’est vraiment « à la française ». Nous sommes sept, chacun fait son menu. Pour moi ce sera une royale de foie gras au topinambour, un lièvre à la royale façon Michel Rostang, sauce poivrade et taglierini à la crème et des crêpes Suzette. Ma balance va en garder le souvenir pour plusieurs jours tant c’est copieux.

Nous commençons par une Champagne Collet Esprit Couture Brut Premier Cru 2012 d’une bouteille très originale. Une amertume prégnante m’a empêché d’en profiter comme j’aurais voulu. Les deux vins qui suivent ont été choisis après que deux demandes n’ont pu être satisfaites car les vins n’étaient plus en cave. C’est assez désagréable mais le restaurant a réagi en octroyant une remise sur la note finale.

Le Châteauneuf-du-Pape Clos de l’Oratoire des Papes blanc 2022 est vin simple, jeune mais déjà agréable, qui a bien suivi mon premier plat qui ne m’a pas vraiment séduit.

Le lièvre à la royale est d’une puissance extrême. C’est l’expression gibier dans toute sa grandeur et c’est bon. On ne peut pas dire délicieux, car le plat est guerrier. Et le Clos Vougeot Grand Cru Domaine Jacques Prieur 2017 est idéal, car sa jeunesse gracieuse et délicate fait un contrepoint à l’envahissante grandeur du lièvre. La combinaison est idéale. J’ai beaucoup aimé ce vin gracieux et ce lièvre sauvage.

Nous étions nombreux à avoir commandé des crêpes Suzette aussi deux serveurs sont venus avec leurs chariots pour flamber les crêpes. L’un a eu la main lourde sur le Grand Marnier. L’autre l’a eu légère. Les deux versions sont agréables.

L’ambiance est très brasserie. On sent la volonté de bien faire et le dimanche pour un déjeuner de famille, c’est cela la France que nous aimons.

278th dinner in Château d’Yquem complete report of two days dimanche, 19 novembre 2023

(This translation of my notes concerning the 278th dinner corresponds to three articles in French)

The 278th dinner will be held tomorrow at the Château d’Yquem. I leave my home in the eastern suburbs of Paris at 7:30 a.m. to deliver the wines to the château so that they have time to rest there. To cover the first forty kilometers it takes me an hour and a half, as the traffic has exceeded the capacity of the car lanes. That we can imagine welcoming new populations to the Paris region is difficult to understand.

Trucks are extremely numerous on the highways and Eastern European countries must bless our 35-hour week law, because trucks from Poland, Hungary, Serbia, Lithuania and others represent almost all of those on the road, competed in the opposite direction by trucks from Italy, Spain and Portugal, because French trucks have almost disappeared, thanks to this wonderful law which made international transport impossible for French companies.

I am welcomed at the castle by the smile of Fatiha, who helped me during previous dinners at the castle and later by that of Laetitia, also present during these events. I salute Olivier Brulard, the chef de cuisine of the château, MOF 1996, with whom I had the 230th dinner in this place, five years ago now.

Olivier and I had already worked on the menu over the phone and we revised each dish together so that every detail will be perfect. Olivier understands well that each dish serves the wines, which means that each ingredient must be coherent in the construction of the dish. We understand each other half-heartedly and I like that. What impresses me is the care Olivier takes to find the best products. Whether quails or mushrooms, we are faced with the perfection of the product.

Chatting with Olivier is a real pleasure. Valérie Lailheugue, the historical secretary of Alexandre de Lur Saluces and now of Pierre Lurton comes to join me and we check all the details of the accommodation of those who will reside at the castle, the menus and all other details.

A tradition has been established since several dinners that I had at the château, which is that at lunch on the day of the dinner, I « invite » (in a way) to an informal meal those who make the wine and I share with them a very old Yquem from my cellar. At the last dinner I opened the 1893, a legendary vintage. Tomorrow, I will « receive » (so to speak) Lorenzo Pasquini, director of operations of the estate, Toni El Khawand, cellar master and Thomas Robert, head of cultivation. We therefore developed with Olivier Brulard the menu which will allow us to check some of the dinner dishes while adapting to the wines.

For this lunch I brought a Château Haut-Brion 1981 and a Yquem which I consider to be from a year close to 1880, because no year is readable on the label, the cork or the capsule. It turns out that I had put a photo of the label on Instagram which is a merchant label and not that of the domain. An astute reader found on my blog that I had opened a bottle with the same label in 2009. This bottle had a vintage: 1906. So we will probably drink a Yquem 1906 but I still believe that we are rather around from 1880.

It seems appropriate to open this Yquem now, because if I arrive at the château tomorrow around 11 a.m., the wine will not have enough time to develop. So I open it, with the intention of recorking the bottle. A new air will slowly blossom the wine. The scent of Yquem is extremely promising. The very black cap gives no legible indication.

The preparations having been made and the entire kitchen and castle team having been informed of the program, I go to Langon to the Maison Darroze hotel where I will sleep and where I will shortly have a dinner with three Americans who will participate in the dinner tomorrow at the Château d’Yquem.

I have known the Darroze house for decades, which enjoyed a fame that could be compared to that of the Auberge du Père Bize where political or entertainment celebrities flocked.

At 7:30 p.m., all four of us are at the table. Two American friends are my most loyal dinner guests and Bill, an incredible globetrotter, joined our group. He brought Un Château Guadet Saint-Emilion 2015, from an estate where he did the harvest.

For the aperitif, I choose a Champagne Philipponnat Clos des Goisses Extra Brut 2008 made from 55% chardonnay and 45% pinot noir. This champagne has a great personality. He is noble and lively, paving his way with conviction. It will gain with age in roundness and consistency, but it is already pleasant with its sharpness and its determination.

We choose a very generous four-course menu. Having the wine list in hand I see that the list includes very old bottles at attractive prices. A wine catches my eye. It’s a Beaune Grèves Domaine Ropiteau Mignon 1947. The head waiter to whom I showed this wine immediately jumped: « oh don’t take that, it’s very probably dead ». Audouze is stubborn. I ask him to go get it. He comes back with a 1947 wine which is not the right one and which I don’t like. He goes back to the cellar and brings the wine I wanted. The level has fallen but not abnormally.

I reassure the head waiter that I won’t make a fuss if the wine isn’t good. He seems reassured. I take out my tools and carefully I manage to extract the cork. Bill is surprised that I play the surgeon who « operates » on the bottle. The nose is quite dusty but not off-putting. There will not be enough time for slow oxygenation to do its job. Too bad.

The very pleasant foie gras goes well with champagne. The chef opens the Château Guadet Saint-Emilion 2015 and the nose gives me this thought: all wines of this age have the same scent. Indeed, it is rich, powerful, and all well-made wines have the same message at this age.

On the palate, the wine would probably not have much to say but fortunately the fish dish, the best dish of our meal, made the Saint-Emilion shine. The agreement is superb.

The main course based on poultry is far from having the level of the fish main course. The Beaune Grèves Domaine Ropiteau Mignon 1947 with its discreet and subtle scent is tired. But if we ignore his fatigue, he tells infinitely more things than the young Bordeaux. You just have to listen to its subtleties which are just waiting to blossom.

The delicious soufflé is pantagruelian.

We are far from the luster of the Darroze house during its splendor, but we had a very pleasant time with a superb fish dish and a tired relic from 1947.

  • * *

After a restful night, I arrive at the Château d’Yquem at 11 a.m. Olivier Brulard has planned the lunch menu: lightly smoked roast Breton lobster on our vine shoots, golden apple and truffle juice / beautiful Méracq poultry, castle citrus fruits and oak lentins / Roquefort Le 12 AOP and Régalis César du Mont Royal / mango and tangy delicacies with passion fruit juice.

I want to open the Yquem 1874 which is planned for this evening with the following idea: This wine was reconditioned at the château in 1989. However, there have been some fake Yquems on the market presented as being reconditioned at the château but in fact made by counterfeiters. I would like my guests this lunchtime to give me their olfactory opinion on this 1874. And, smelling the two wines, I would like to reserve the best of the two for dinner. We would drink the one that seemed less brilliant to us.

Lorenzo Pasquini, operating director of the estate, Toni El Khawand, cellar master and Thomas Robert, head of cultivation, join me in the beautiful and large dining room that we will have this evening. Usually we took the smallest dining room but these three people who are so important to the life of the estate will use it for an olfactory practice session with an olfactory analysis teacher.

They accept the exercise that I propose to them. For my nose, I find that the minty impression of the 1874 is a little strong while the supposed 1906 with the original cork opened yesterday is very comfortable and consistent with what we expect. The three are unanimous in declaring that the 1874 conforms to what it should be because we often find this beautiful minty trace in wines from this period.

It seems obvious that the 1874 remains assigned to dinner. We will therefore drink the probable 1906.

I go with Lorenzo to the cellar to choose a wine. It will be Yquem 2001, this vintage that I love. I wanted the lobster to host the red wine and the Yquem poultry, but Lorenzo prefers the opposite order. ‘No worries’ as we say more and more often in urban exchanges and not only in the south of France.

The Château d’Yquem 2001 is a very great Yquem but it has become more seated, comfortable, while I loved its wild side which almost made me faint when I drank it for the first time during its launch. The lobster is of exceptional quality.

Château Haut Brion 1981 is from a vintage that has been underestimated for far too long. This balanced wine is of certain solidity. He is frank and very pleasant and deserves much more than the image given to him. For decades I have considered 1981 a great year.

The Château d’Yquem 1906 is captivating. Let’s imagine a flying saucer that sends waves in all directions. This Yquem is like that. It is round and sends complexities in all directions. It is magical and I fall under its spell, because despite a slightly dark color and a discreet fragrance, it is a festival of emotion. And I realize that it could enter the circle of the most beautiful Yquems that I have drunk. It’s not as big as the magical 1861, but it’s not far off.

I will have advanced the science of Olivier Brulard who defended Roquefort as a partner of Yquem. I told him that Roquefort is not suitable and that Stilton is the ideal companion. The stilton won by technical knockout in the first round. There was no match.

Yquem was brilliant at all times and although 1906 is the natural lead since I drank one from a bottle with the same label, I think this wine is more in keeping with the period around 1880.

Lorenzo, Toni and Thomas go to their olfaction session while I will now open the dinner wines in the beautiful dining room where we just had our lunch. I am in an extremely serene and happy mood and I put a lot of attention into my actions when removing the corks.

Y d’Yquem 1960 has the scent of a great wine with strong botrytis. As this is Y’s second vintage, the sorting of the grapes had accepted a lot of botrytized grapes. This scent is engaging. The Jurançon 1993 has a nose of lychee which is of significant intensity.

The Hermitage blanc 1928 from an unknown domain has a discreet nose which will blossom and promise. The Cheval Blanc 1934 has an extraordinary nose and is so full that I decided to put a glass stopper to keep this perfect perfume. The Ausone 1985 has a rich scent but less bright than that of the 1934.

The noses of the two Nuits Saint Georges are large. That of Henri Jayer is extremely subtle.

I had announced a Chambertin Coron Père & Fils 1929 because I have several, but I had read too quickly. On the torn label, the word Chambertin is on the right, which implies that it is preceded by Gevrey or Charmes. As for the name of the merchant, the top of the capsule indicates René Téze in Ambrières. The perfume seems to me to be one of the most beautiful that I have opened, except Cheval Blanc.

The power of the nose of Château Chalon 1945 is unrivaled. The 1934 Yquem recorked at the château and remaining at the château, which is the contribution of Pierre Lurton, seems to me to be incredibly young and has a lively scent.

I now open the champagnes. The Dom Ruinart 1990 gives me a nice spritz even if it is not thunderous. The two older champagnes are dirty under the cap and their corks break when twisted. The nose of the Veuve Clicquot 1947 is very discreet and that of the Dom Pérignon 1962 has a beautiful personality.

Throughout the opening, I was focused, looking for the right gesture and I was amazed to see that all the wines were almost perfect. Heaven was with me.

The guests who have rooms are arriving little by little. Quickly, I’m going to try to rest before welcoming the guests for a tour of the castle and a tasting before dinner.

  • * *

The 278th dinner is held at the Château d’Yquem. I brought the wines yesterday, I opened them this afternoon. Participants who have a room at the castle arrived at 5 p.m. The appointment for the visit to the castle is scheduled for 6:30 p.m. but we are informed that Pierre Lurton, president of Yquem and Cheval Blanc will be late.

So it is Léo who guides visitors to the castle, who takes us to the cellars and praises the quality of the management of the vines, the organization of the harvest so that the botrytis has its best effect.

Pierre Lurton joins us for the tasting in the beautiful tasting room. We begin to taste the Y d’Yquem 2021 which despite its age has a magnificent presence and freshness which make it a remarkable wine at this age of its life.

We were supposed to taste the Yquem 2017 then the 2009 but it is reasonable to only taste the Château d’Yquem 2009 because we have a long dinner program. We had already tasted the 2009 during the last dinner in Yquem. He has retained this astonishing freshness and an obvious joie de vivre. It’s a great Yquem with a bright future.

We return to the large living room for an aperitif. In the program sent to registrants there were two champagnes but I felt that it was necessary to add a champagne that was easier to understand, to prepare our palates for future wines. So we start with a Champagne Dom Ruinart 1990 which I love because 1990 was a year of total success for Dom Ruinart.

The appetizers are: Imperial Beluga Caviar (1st exceptional Beluga Caviar, 100% French and matured in New Aquitaine) / king crab, morning yuzu and garden flowers / parmesan shortbread, Culatello di Zibello.

Champagne combines the freshness of youth with the serenity of success. It’s pure happiness. The appetizers are, like the cuisine of chef Olivier Brulard, based on quality products. The Dom Ruinart 1990 is a very great champagne that I cherish.

There are twelve of us, including Pierre Lurton, president of Yquem, two Americans who are my most loyal dinner guests, a couple of French friends, a globe-trotting American, an American of Spanish origin, a Spaniard, a Bordeaux native, a French man with origins in Eastern Europe and the only new one of my dinners who lives in Portugal. The dinner will be held in English but Pierre Lurton, very fit and full of humor, will tell us some stories and puns that are difficult to translate.

We sit down at the table. The menu is distributed to everyone. It is written as follows: the best of Landes foie gras, three gourmet recipes to taste / Scallops cooked naturally in a shell with Alba white truffle, « Served like a Garden » / silky turbot « Belle Meunière », porcini mushrooms with Bordeaux corks picked with dew / special « well-bred » quail from Pierre Duplantier, return from the vines / Girondin game venison, spicy autumn casserole, pepper sauce / 18 Month vintage Comté / stilton, Ford farmhouse cheddar and English Shropshire selected by Dominique Bouchait MOF cheese maker / Ente plums from the new harvest enhanced with château wine, candied orange zest and « Candi » hazelnuts.

It is a menu based on the highest quality products and we have worked with the chef to ensure that every ingredient is completely consistent with the wines which must be highlighted by the dishes.

Sébastien served the wines, which is not easy as there are so many requirements.

Champagne Veuve Clicquot 1947 and Champagne Dom Pérignon 1962 are served with the first course of foie gras. They are very different. Dom Pérignon is more welcoming and comfortable while Veuve Clicquot is much more tense and complex. It’s hard to compare them but both are superb. The votes will go towards 1947.

On the next course I have planned three wines, one of which I added to the planned program, the Jurançon and I must say that on the delicious shells I am very proud to have planned these three wines. Because the 1960 Y d’Yquem is absolutely glorious. This is the second vintage of Y, the first being 1959 and this one is imperial, with a marked botrytis which gives it a nice width.

The Jurançon Domaine de Souch dry 1993 which follows it has a nose of lychee and a strong energy of straight and dry but great intensity. Highly fruity with green vegetables, it traces its path and it is then that the Hermitage Blanc 1928 appears, with a subtle and delicate nose, a racy and accomplished taste, calm and serene, which calms the passion of Jurançon. You can switch from one to the other because the shell accepts all three wines, and this variety of tastes is magical. I think I had a great intuition to create this merry-go-round of tastes where the Y is royal, the Jurançon scoundrel and mad dog, and the Hermitage has the wisdom of the ancient and a remarkable serenity. For me, it’s a big emotional moment of the meal.

There are occasions in my life as a wine lover when I encounter perfect wines. Château Cheval Blanc 1934 is one of them, because it reaches a level of perfection that we feel. It is balanced, rich, obvious like a riddle that has been solved.

Next to it, the Château Ausone 1985 is a beautiful ‘jeune premier’, rich and expressive, but it is clear that the Cheval Blanc steals the show. Turbot shows us that it is a fish made for red wines and porcini mushrooms are real sweets because they are so good.

Olivier Brulard showed me the splendid quails yesterday. They have a magical flesh that will allow two wines to coexist. The Nuits-Saint-Georges aux Murgers Méo Camuzet 2000 is young and solid, readable and frank. He is rich. The Nuits-Saint-Georges aux Murgers Henri Jayer 1981 is all delicacy and subtlety. One would have thought that the 1981 would have been much more popular due to the fact that the winemaker is Henri Jayer who is crowned with glory, but to my great surprise, the Méo Camuzet will be in the votes of six guests, and the Henri Jayer also of six guests. They therefore deserved to be associated with quail, ideal for those two beautiful, expressive and frank Burgundies.

The Gevrey-Chambertin René Téze à Ambrières 1929 is served with venison. I have a particular love for the 1929 vintage which I consider to be the greatest of the 20th century. This wine has a balance that makes it almost eternal. It would have been my favorite if it weren’t for the devilish Yquem wines. The venison is truly made for such an accomplished wine and it is sweetness upon sweetness and excellence upon excellence.

For Château Chalon Jean Bourdy 1945 I did not try to complicate things and the delicious Comtés are the best companions for this wine of rare power and very strong alcohol. This 1945 is a great success. He won’t attract many votes because he is exactly what is expected of him. There is no element of surprise.

The two Yquems will accompany two dishes, a cheese dish and a dessert made with subtle plums. The Château d’Yquem 1934 is Pierre Lurton’s contribution to our dinner, the vintage of which is that of the birth of Alexandre de Lur Saluces who has just left us this year. We have a strong thought for this great man who was a great character in Sauternes but also in the world of wine. This Yquem kept at the château and reconditioned at the château is very clear with a golden tone and is characterized by incredible youth. He is as lively as a wild horse and his imprint is overjoyed.

The Château d’Yquem 1874 that I opened before lunch had been reconditioned in 1989. The three people involved in the production of Yquem wines confirmed the sincerity of this wine. It is dark and on the palate it is absolutely rich and expressively noble. It’s fireworks in the mouth. He is so attractive that we are dazzled. It is 149 years old and its vigor is that of a young wine. What happiness.

I feel that the guests are captivated by the fact that the fourteen wines were all at the peak of what they can be and I admit that I am also struck by the perfection of these wines. I’m sure my opening method works wonders since I say it all the time, but at this point it’s almost unreal. It seems to me that the atmosphere and my joy of being in Yquem will have played a role in the behavior of all the wines.

It’s time to vote for our six favorite wines. Usually I ask for a vote of five wines but as there are fourteen a vote of six wines seems possible. Some people said that these votes are of little use, but when they saw the result they understood that these votes are very enlightening.

Seven guests put the Yquem 1974 first, four put the Cheval Blanc 1934 first and the Bordeaux resident put the Henri Jayer first, which proves a great open-mindedness. Thirteen wines had at least one vote which is remarkable. The one who didn’t have any is the Dom Ruinart and this is understandable for two reasons, we drank it in another room and we drank it first. It is logically easy to forget.

The consensus vote is: 1 – Château d’Yquem 1874, 2 – Château Cheval Blanc 1934, 3 – Y d’Yquem 1962, 4 – Nuits-Saint-Georges aux Murgers Henri Jayer 1981, 5 – Château d’Yquem 1934, 6 – Hermitage Blanc 1928 and 6 tied: Gevrey-Chambertin René Tèze & Fils 1929.

My vote is: 1 – Château d’Yquem 1874, 2 – Château Cheval Blanc 1934, 3 – Gevrey-Chambertin René Téze in Ambrières 1929, 4 – Y d’Yquem 1962, 5 – Nuits-Saint-Georges aux Murgers Henri Jayer 1981 , 6 – Hermitage Blanc 1928.

The combinations food and wine were perfectly relevant. It is difficult to choose the best pairings. I think the most beautiful is the turbot with the two Bordeaux, and the scallops with the three white wines which formed a magical trio.

Olivier Brulard was very happy to design dishes for the wines and adapt them in collaboration with me. I was very happy with this collusion with him. And his art of choosing the right products impressed me.

The Yquem team is experienced in providing great service. The whole team was happy and motivated.

But before putting an end to this story, there is one thing that pleases me the most. I have always preferred Yquems with original corks to Yquems which have changed corks during their life. The Yquem 1861 with the original cork, which seems unreal as a wine whichkeeps the same cork for one and a half century seems impossible. This 1861 coming from my cellar, is the greatest Yquem that I drank in 2006 at Château d’Yquem, because of its original cork, because there has an unrivaled authenticity.

At lunchtime, when we could smell the Yquem 1906 with the original cork and the 1874 reconditioned in 1989, it appeared to us that the 1874 had to remain on the dinner program and we drank the 1906 (which at my meaning is rather to date from around 1880) at lunch.

Well, while the 1874 won hands down at the dinner, for my taste, the 1906 (or 1880) is far superior to the 1874 because of the special taste of uncorked Yquem, and I would rank this Yquem in the Yquem firmament which I drank, in 2nd place after the 1861 or at least in the first five, because of its original cork and an unrivaled subtle complexity.

I have drunk incredible vintages of Yquem, and I only want to discover more.

This 278th meal with passionate and charming guests, with a very motivated chef and unrealistically perfect wines is one of the greatest dinners I have organized.

278ème dîner à Yquem visite, dégustation et dîner dimanche, 19 novembre 2023

(les articles étant publiés du plus récent aux plus anciens, il est recommandé de lire les deux articles ci-dessous, dans un ordre montant, pour avoir la chronologie des faits)

Le 278ème dîner se tient au château d’Yquem. J’avais apporté les vins hier, je les ai ouverts cet après-midi. Les participants qui ont une chambre au château sont arrivés à 17 heures. Le rendez-vous pour la visite du château est prévue à 18h30 mais on nous apprend que Pierre Lurton, président d’Yquem et de Cheval Blanc aura du retard.

Aussi est-ce Léo qui guide les visiteurs du château, qui nous emmène vers les caves et vante la qualité de la gestion des vignes, de l’organisation des vendanges pour que le botrytis ait son meilleur effet.

Pierre Lurton nous rejoint pour la dégustation dans la belle salle de dégustation. Nous commençons à goûter le Y d’Yquem 2021 qui malgré son âge a une magnifique présence et une fraîcheur qui en font un vin remarquable à cet âge de sa vie.

Nous devions goûter l’Yquem 2017 puis le 2009 mais il est raisonnable de ne goûter que le Château d’Yquem 2009 car nous avons un long programme au dîner. Nous avions déjà goûté le 2009 lors du dernier dîner à Yquem. Il a gardé cette étonnante fraîcheur et une joie de vivre évidente. C’est un grand Yquem promis à un avenir brillant.

Nous retournons au grand salon pour l’apéritif. Dans le programme envoyé aux inscrits il y avait deux champagnes mais j’ai estimé qu’il fallait ajouter un champagne plus facile à appréhender, pour préparer nos palais aux vins futurs. Nous commençons donc par un Champagne Dom Ruinart 1990 que j’adore parce que 1990 est une année de totale réussite pour Dom Ruinart.

Les amuse-bouches sont : Caviar Beluga Impérial (1er Caviar Beluga d’exception 100% français et affiné en Nouvelle Aquitaine) / crabe royal, yuzu du matin et fleurs de Jardin / sablé parmesan, Culatello di Zibello.

Le champagne combine la fraîcheur de la jeunesse avec la sérénité de la réussite. C’est un pur bonheur. Les amuse-bouches sont comme la cuisine du chef Olivier Brulard fondés sur des produits de qualité. Le Dom Ruinart 1990 est un très grand champagne que je chéris.

Nous sommes douze, dont Pierre Lurton président d’Yquem, deux américaines qui sont les plus fidèles de mes dîners, un couple d’amis français, un américain globe-trotter, un américain d’origine espagnole, un espagnol, un bordelais, un français d’origine d’Europe de l’Est et le seul nouveau de mes dîners qui vit au Portugal. Le dîner se tiendra en anglais mais Pierre Lurton très en forme et plein d’humour nous racontera quelques histoires et jeux de mots difficiles à traduire.

Nous passons à table. Le menu est distribué à chacun. Il est ainsi rédigé : le meilleur du foie gras landais, trois recettes gourmandes à déguster / Saint Jacques cuisinée au naturel en coquille à la truffe blanche d’Alba, « Servie comme un Jardin » / turbot soyeux « Belle Meunière », cèpes bouchons bordelais cueillis à la rosée / la caille spéciale « bien élevée » de Pierre Duplantier, retour des vignes / chevreuil de chasse girondin, cocotte épicée d’automne, sauce poivrade / Comté millésimé 18 Mois / stilton, cheddar fermier Ford et Shropshire anglais sélectionnés par Dominique Bouchait MOF fromager / prunes d’Ente de la nouvelle récolte sublimées au vin du château, zestes d’oranges confites et noisettes « Candi ».

C’est un menu fondé sur des produits de la plus haute qualité et nous avons travaillé avec le chef pour que tout ingrédient soit complètement cohérent avec les vins qui doivent être mis en valeur par les mets.

Sébastien a fait le service des vins ce qui n’est pas facile tant il y a d’exigences.

Le Champagne Veuve Clicquot 1947 et le Champagne Dom Pérignon 1962 sont servis avec le premier plat de foie gras. Ils sont très différents. Le Dom Pérignon est plus accueillant et confortable alors que le Veuve Clicquot est beaucoup plus tendu et complexe. Il est difficile de les comparer mais tous les deux sont superbes. Les votes iront du côté du 1947.

Sur le plat suivant j’ai prévu trois vins dont un que j’ai rajouté au programme prévu, le Jurançon et je dois dire que sur les délicieuses coquilles je suis très fier d’avoir prévu ces trois vins. Car le Y d’Yquem 1960 est absolument glorieux. C’est le second millésime d’Y, le premier étant 1959 et celui-ci est impérial, avec un botrytis marqué qui lui donne une belle largeur.

Le Jurançon Domaine de Souch sec 1993 qui le suit a un nez de litchi et une forte énergie de vin droit et sec mais fonceur. Hautement fruité de légumes verts, il trace sa route et c’est alors que l’Hermitage Blanc 1928 apparaît, au nez subtil et délicat, au goût racé et accompli, calme et serein, qui calme la fougue du Jurançon. On peut passer de l’un à l’autre car la coquille accepte les trois vins, et cette variété de goûts est magique. Je pense avoir eu une belle intuition pour créer ce manège de goûts où le Y est royal, le Jurançon canaille et chien fou, et l’Hermitage a la sagesse de l’ancien et une sérénité remarquable. Pour moi, c’est une grande étape du repas.

Il est des moments dans ma vie d’amateur de vins où je rencontre des vins parfaits. Le Château Cheval Blanc 1934 est de ceux-là, car il s’installe à un niveau de perfection que l’on ressent. Il est équilibré, riche, évident comme une énigme que l’on a résolue.

A côté de lui, le Château Ausone 1985 est un beau jeune premier, riche et expressif, mais il est clair que le Cheval Blanc lui vole la vedette. Le turbot nous démontre qu’il est un poisson fait pour les vins rouges et les cèpes sont de vrais bonbons tant ils sont bons.

Olivier Brulard m’avait montré hier les cailles splendides. Elles ont une chair magique qui va permettre à deux vins de cohabiter. Le Nuits-Saint-Georges aux Murgers Méo Camuzet 2000 est jeune et solide, lisible et franc. Il est riche. Le Nuits-Saint-Georges aux Murgers Henri Jayer 1981 est tout en délicatesse et en subtilité. On aurait pu penser que le 1981 aurait été nettement plus aimé du fait que le vigneron est Henri Jayer qui est auréolé de gloire, mais à ma grande surprise, le Méo Camuzet sera dans les votes de six convives, et le Henri Jayer aussi de six convives. Ils méritaient donc d’être associés à la caille, idéale pour ceux deux beaux bourgognes expressifs et francs.

Le Gevrey-Chambertin René Téze à Ambrières 1929 est servi avec le chevreuil. J’ai un amour particulier pour le millésime 1929 que je considère comme le plus grand du 20ème siècle. Ce vin a un équilibre qui le rend quasi éternel. Il aurait été mon chouchou s’il n’y avait pas les diaboliques vins d’Yquem. Le chevreuil est vraiment fait pour un vin aussi accompli et c’est douceur sur douceur et excellence sur excellence.

Pour le Château Chalon Jean Bourdy 1945 je n’ai pas cherché à complique les choses et les délicieux comtés sont les meilleurs compagnons de ce vin d’une puissance rare et d’un alcool très fort. Ce 1945 est d’une grande réussite. Il n’attirera pas beaucoup de votes car il est exactement ce qu’on attend de lui. Il n’y a pas l’effet de surprise.

Les deux Yquem vont accompagner deux plats, un plat de fromage et un dessert à base de prunes subtiles. Le Château d’Yquem 1934 est l’apport de Pierre Lurton à notre dîner, dont le millésime est celui de la naissance d’Alexandre de Lur Saluces qui vient de nous quitter cette année. Nous avons une pensée forte pour ce grand homme qui a été un grand personnage du Sauternes mais aussi dans le monde du vin. Cet Yquem gardé au château et reconditionné au château est d’une grande clarté d’un ton doré et se caractérise par une jeunesse incroyable. Il est vif comme un cheval sauvage et son empreinte est folle de joie.

Le Château d’Yquem 1874 que j’avais ouvert avant le déjeuner avait été reconditionné en 1989. Les trois acteurs de la fabrication des vins d’Yquem ont confirmé la sincérité de ce vin. Il est foncé et en bouche il est d’une richesse absolue et d’une noblesse expressive. C’est un feu d’artifice en bouche. Il est tellement séduisant que nous sommes éblouis. Il a 149 ans et sa vigueur est celle d’un vin jeune. Quel bonheur.

Je sens que les convives sont subjugués par le fait que les quatorze vins ont tous été au sommet de ce qu’ils peuvent être et j’avoue que je suis aussi frappé par la perfection de ces vins. Je suis sûr que ma méthode d’ouverture fait des miracles puisque je le dis tout le temps, mais à ce point, c’est presque irréel. Il me semble que l’atmosphère et ma joie d’être à Yquem auront joué dans le comportement de tous les vins.

Il est temps de voter pour les six vins que nous avons préféré. D’habitude je demande un vote de cinq vins mais comme il y en a quatorze un vote de six vins paraît possible. Certains ont dit que ces votes ne servent pas à grand-chose, mais quand ils ont vu le résultat ils ont compris que ces votes sont très éclairants.

Sept convives ont mis en premier l’Yquem 1974, quatre ont mis le Cheval Blanc 1934 en premier et le bordelais a mis le Henri Jayer en premier ce qui prouve une belle ouverture d’esprit. Treize vins ont eu moins un vote ce qui est remarquable. Celui qui n’en a pas eu est le Dom Ruinart et ceci se comprend pour deux raisons, on l’a bu dans une autre salle et on l’a bu en premier. Il est logiquement facile à oublier.

Le vote du consensus est : 1 – Château d’Yquem 1874, 2 – Château Cheval Blanc 1934, 3 – Y d’Yquem 1962, 4 – Nuits-Saint-Georges aux Murgers Henri Jayer 1981, 5 – Château d’Yquem 1934, 6 – Hermitage Blanc 1928 et 6 ex aequo : Gevrey-Chambertin René Tèze & Fils 1929.

Mon vote est : 1 – Château d’Yquem 1874, 2 – Château Cheval Blanc 1934, 3 – Gevrey-Chambertin René Téze à Ambrières 1929, 4 – Y d’Yquem 1962, 5 – Nuits-Saint-Georges aux Murgers Henri Jayer 1981, 6 – Hermitage Blanc 1928.

Les accords ont été d’une pertinence parfaite. Il est difficile de choisir les meilleurs accords. Je pense que le plus beau est le turbot avec les deux bordeaux, et les Saint-Jacques avec les trois vins blancs qui formaient un trio magique.

Olivier Brulard était très heureux de concevoir des plats pour les vins et de les adapter en complicité avec moi. J’ai été très heureux de cette connivence avec lui. Et son art de choisir les bons produits m’a impressionné.

L’équipe d’Yquem est rodée pour assurer un grand service. Toute l’équipe était joyeuse et motivée.

Mais avant de mettre un point final à ce récit, il y a une chose qui me plait au plus haut point. Depuis toujours je préfère les Yquem aux bouchons d’origine aux Yquem qui ont changé de bouchon au cours de leur vie. L’Yquem 1861 au bouchon d’origine, ce qui paraît irréel, provenant de ma cave, est le plus grand Yquem que j’ai bu en 2006 au château d’Yquem, à cause de son bouchon d’origine, car il y a une authenticité inégalable.

A l’heure du déjeuner, quand nous avons pu sentir l’Yquem 1906 au bouchon d’origine et le 1874 reconditionné en 1989, il nous est apparu que le 1874 devait rester au programme du dîner et nous avons bu le 1906 (qui à mon sens est plutôt à dater autour de 1880) au déjeuner.

Eh bien, si le 1874 a gagné haut la main lors du dîner, pour mon goût, le 1906 (ou 1880) est de loin supérieur au 1874 à cause du goût spécial des Yquem non rebouchés, et je rangerais cet Yquem au firmament des Yquem que j’ai bus, au 2ème rang après le 1861 ou au moins dans les cinq premiers, à cause de son bouchon d’origine et d’une complexité subtile inégalable.

J’ai bu 102 millésimes d’Yquem, et je n’ai qu’une envie, c’est d’en découvrir d’autres.

Ce 278ème repas avec des convives passionnés et charmants, avec un chef très motivé et des vins irréellement parfaits est un des plus grands dîners que j’aie organisés.

278ème dîner à Yquem déjeuner avec le staff d’Yquem et ouverture des vins dimanche, 19 novembre 2023

(les articles étant publiés du plus récent aux plus anciens, il est recommandé de lire l’article ci-dessous avant celui-ci, pour avoir la chronologie des faits)

Après une nuit reposante, je me présente au château d’Yquem à 11 heures. Olivier Brulard a prévu le menu du déjeuner : homard breton rôti légèrement fumé sur nos sarments, pomme dorée et jus truffé / belle volaille de Méracq, agrumes du château et lentins de chênes / roquefort Le 12 AOP et Régalis César du Mont Royal / mangue et gourmandises acidulées au jus de passion.

J’ai envie d’ouvrir l’Yquem 1874 qui est prévu pour ce soir avec l’idée suivante : Ce vin a été reconditionné au château en 1989. Or il y a eu sur le marché quelques faux Yquem présentés comme étant reconditionnés au château mais en fait fabriqués par des faussaires. J’aimerais que mes convives de ce midi me donnent leur avis olfactif sur ce 1874. Et, sentant les deux vins, j’aimerais réserver le meilleur des deux au dîner. Nous boirions celui qui nous paraîtrait moins brillant.

Lorenzo Pasquini directeur d’exploitation du domaine, Toni El Khawand, maître de chai et Thomas Robert chef de culture me rejoignent dans la belle et grande salle à manger que nous aurons ce soir. D’habitude nous prenions la plus petite salle à manger mais ces trois personnes si importantes pour la vie du domaine vont l’utiliser pour une séance de pratique olfactive avec un professeur d’analyse olfactive.

Ils acceptent l’exercice que je leur propose. Pour mon nez, je trouve que l’impression mentholée du 1874 est un peu forte alors que le supposé 1906 au bouchon d’origine ouvert hier est très confortable et conforme à ce qu’on attend. Les trois sont unanimes pour déclarer que le 1874 est conforme à ce qu’il doit être car on trouve souvent sur les vins de cette époque cette belle trace mentholée.

Il paraît évident que le 1874 reste affecté au dîner. Nous boirons donc le probable 1906.

Je vais avec Lorenzo en cave pour choisir un vin. Ce sera Yquem 2001, ce millésime que j’adore. Je voulais que le homard accueille le vin rouge et la volaille l’Yquem, mais Lorenzo préfère l’ordre inverse. ‘Pas de souci’ comme on dit de plus en plus souvent dans les échanges urbains et pas seulement dans le sud de la France.

Le Château d’Yquem 2001 est un très grand Yquem mais il est devenu plus assis, confortable, alors que j’adorais son côté sauvage qui m’avait presque fait m’évanouir lorsque je l’avais bu pour la première fois lors de son lancement. Le homard est d’une qualité exceptionnelle.

Le Château Haut Brion 1981 est d’un millésime qui a été beaucoup trop longtemps sous-estimé. Ce vin équilibré est d’une solidité certaine. Il est franc et fort plaisant et mérite beaucoup plus que l’image qu’on lui donne. Cela fait des décennies que je considère 1981 comme une grande année.

Le Château d’Yquem 1906 est envoûtant. Imaginons une soucoupe volante qui envoie des ondes dans toutes les directions. Cet Yquem est comme cela. Il est rond et envoie des complexités dans toutes les directions. Il est magique et je tombe sous son charme, car malgré une couleur un peu sombre et un parfum discret, il est un festival d’émotion. Et je me rends compte qu’il pourrait entrer dans le cercle des plus beaux Yquem que j’ai bus. Il n’est pas aussi grand que le magique 1861, mais il n’en est pas loin.

J’aurai fait avancer la science d’Olivier Brulard qui défendait le roquefort comme partenaire d’Yquem. Je lui avais dit que le roquefort ne va pas et que le stilton est le compagnon idéal. Le stilton a gagné par K.O. technique au premier round. Il n’y a pas eu de match.

L’Yquem s’est montré brillant à tout moment et même si 1906 est la piste naturelle puisque j’en avais bu un dans une bouteille à la même étiquette, je pense que ce vin est plus conforme à la période autour de 1880.

Lorenzo, Toni et Thomas vont à leur séance d’olfaction tandis que je vais maintenant ouvrir les vins du dîner dans la belle salle à manger où nous venons d’avoir notre déjeuner. Je suis d’humeur extrêmement sereine et heureuse et je mets beaucoup d’attention dans mes gestes pour lever les bouchons.

L’Y d’Yquem 1960 a un parfum de grand vin au botrytis fort. Comme c’est le deuxième millésime d’Y, le tri des raisins avait laissé passer beaucoup de grains botrytisés. Ce parfum est engageant. Le Jurançon 1993 a un nez de litchi qui est d’une intensité prégnante.

L’Hermitage blanc 1928 au domaine inconnu a un nez discret qui va s’épanouir et promet. Le Cheval Blanc 1934 a un nez extraordinaire et tellement épanoui que je décide de mettre un bouchon en verre pour garder ce parfum parfait. L’Ausone 1985 a un parfum riche mais moins brillant que celui du 1934.

Les nez des deux Nuits Saint Georges sont grands. Celui du Henri Jayer est d’une subtilité are.

J’avais annoncé une Chambertin Coron Père & Fils 1929 car j’en ai plusieurs, mais j’avais lu trop vite. Sur l’étiquette déchirée, le mot Chambertin est à droite, ce qui suppose qu’il est précédé par Gevrey ou Charmes. Quant au nom du négociant, le haut de la capsule indique René Téze à Ambrières. Le parfum me semble être un des plus beaux de ce que j’ai ouvert, sauf le Cheval Blanc.

La puissance du nez du Château Chalon 1945 est inégalable. L’Yquem 1934 rebouché au château et resté au château, qui est la contribution de Pierre Lurton, me paraît d’une incroyable jeunesse et a un parfum vif.

J’ouvre maintenant les champagnes. Le Dom Ruinart 1990 me gratifie d’un beau pschitt même s’il n’est pas tonitruant. Les deux champagnes plus anciens, sont sales sous la coiffe et leurs bouchons se brisent à la torsion. Le nez du Veuve Clicquot 1947 est très discret et celui du Dom Pérignon 1962 de belle personnalité.

Tout au long de l’ouverture, j’ai été concentré, cherchant le geste juste et je me suis émerveillé de voir que tous les vins sont quasiment parfaits. Le ciel était avec moi.

Les invités qui ont des chambres arrivent peu à peu. Vite, je vais essayer de me reposer avant de recevoir les convives pour une visite du château et une dégustation avant le dîner.

quelques photos des beaux salons

278ème dîner – arrivée à Yquem et dîner à Langon dimanche, 19 novembre 2023

Le 278ème dîner va se tenir demain au château d’Yquem. Je pars de chez moi en banlieue Est à 7h30 du matin pour livrer les vins au château afin qu’ils aient le temps de se reposer sur place. Pour faire les premiers quarante kilomètres il me faut une heure et demie, tant la circulation a dépassé les capacités des voies pour automobiles. Que l’on puisse imaginer accueillir des populations nouvelles en région parisienne tient de l’aveuglement.

Les camions sont extrêmement nombreux sur les autoroutes et les pays d’Europe de l’est doivent bénir notre loi sur les 35 heures, car les camions de Pologne, Hongrie, Serbie, Lituanie et autres représentent la quasi-totalité de ceux qui circulent, concurrencés en sens inverse par les camions d’Italie, Espagne et Portugal, car les camions français ont quasiment disparu, grâce à cette merveilleuse loi qui a rendu impossible le transport international aux sociétés françaises.

Je suis accueilli au château par le sourire de Fatiha, qui m’a aidé lors de précédents dîners au château et plus tard par celui de Laetitia aussi présente lors de ces événements. Je salue Olivier Brulard, le chef de cuisine du château, MOF 1996, avec qui j’avais réalisé le 230ème dîner en ce lieu, il y a maintenant cinq ans.

Nous avions déjà avec Olivier travaillé sur le menu au téléphone et nous révisons ensemble chaque plat pour que chaque détail soit parfait. Olivier comprend bien que chaque plat est au service des vins, ce qui implique que chaque ingrédient doive être cohérent dans la construction du plat. Nous nous comprenons à demi-mot et cela me plait. Ce qui m’impressionne, c’est le soin que met Olivier à trouver les meilleurs produits. Que ce soient les cailles ou les champignons, on est face à la perfection du produit.

Discuter avec Olivier est un vrai plaisir. Valérie Lailheugue, la secrétaire historique d’Alexandre de Lur Saluces et maintenant de Pierre Lurton vient me rejoindre et nous vérifions tous les détails de l’hébergement ce ceux qui résideront au château, les menus et tous autres détails.

Une tradition s’est mise en place depuis plusieurs dîners que j’ai faits au château, c’est qu’au déjeuner du jour du dîner, « j’invite » (en quelque sorte) à un repas informel ceux qui font le vin et je partage avec eux un très vieux Yquem de ma cave. Au dernier dîner j’avais ouvert le 1893, d’un millésime mythique. Demain, je « recevrai » (si on peut dire) Lorenzo Pasquini directeur d’exploitation du domaine, Toni El Khawand, maître de chai et Thomas Robert chef de culture. Nous avons donc mis au point avec Olivier Brulard le menu qui permettra de vérifier certains des plats du dîner tout en s’adaptant aux vins.

J’ai apporté pour ce déjeuner un Château Haut-Brion 1981 et un Yquem que je considère d’une année proche de 1880, car aucune année n’est lisible sur l’étiquette, le bouchon ou la capsule. Il se trouve que j’avais mis sur Instagram une photo de l’étiquette qui est une étiquette de marchand et non celle du domaine. Un lecteur avisé a trouvé sur mon blog que j’avais ouvert une bouteille dotée de la même étiquette en 2009. Cette bouteille avait un millésime : 1906. Nous boirons donc sans doute un Yquem 1906 mais je persiste à croire qu’on est plutôt autour de 1880.

Il me semble pertinent d’ouvrir cet Yquem maintenant, car si j’arrive au château demain vers 11 heures, le vin n’aura pas assez de temps pour s’épanouir. Je l’ouvre donc, avec l’intention de reboucher la bouteille. Un air nouveau épanouira le vin lentement. Le parfum de l’Yquem est extrêmement prometteur. Le bouchon très noir ne donne aucune indication lisible.

Les préparatifs étant faits et toute l’équipe de cuisine et du château étant informée du programme, je me rends à Langon à l’hôtel Maison Darroze où je coucherai et où j’aurai dans peu de temps un dîner avec trois américains qui participeront au dîner demain au château d’Yquem.

Je connais la maison Darroze depuis des décennies, qui a connu une célébrité que l’on pourrait comparer à celle de l’Auberge du Père Bize où se pressaient les célébrités politiques ou du spectacle.

A 19h30, nous sommes tous les quatre à table. Deux amies américaines sont les plus fidèles de mes dîners et Bill, un incroyable globe-trotter s’est joint à notre groupe. Il a apporté Un Château Guadet Saint-Emilion 2015, d’un domaine où il a fait les vendanges.

Je choisis pour l’apéritif un Champagne Philipponnat Clos des Goisses Extra Brut 2008 fait à 55% de chardonnay et 45% de pinot noir. Ce champagne a une grande personnalité. Il est noble et vif, traçant son chemin avec conviction. Il va gagner avec l’âge en rondeur et cohérence, mais il est déjà plaisant par son tranchant et sa détermination.

Nous choisissons un menu à quatre plats très copieux. Ayant la carte des vins en main je vois que la carte comporte de très vieilles bouteilles à des prix attractifs. Un vin attire mon œil. C’est un Beaune Grèves Domaine Ropiteau Mignon 1947. Le chef de salle à qui je montre ce vin a immédiatement un sursaut : « oh ne prenez pas ça, c’est très probablement mort ». Audouze est têtu. Je demande qu’il aille le chercher. Il revient avec un vin de 1947 qui n’est pas le bon et qui ne me plait pas. Il repart en cave et apporte le vin que je voulais. Le niveau a baissé mais pas de façon anormale.

Je rassure le chef de salle que je ne ferai pas d’histoire si le vin n’est pas bon. Il semble rassuré. Je sors mes outils et avec précaution j’arrive à extraire le bouchon. Bill est étonné que je joue au chirurgien qui « opère » la bouteille. Le nez est assez poussiéreux mais pas rebutant. Il n’y aura pas assez de temps pour que l’oxygénation lente puisse faire son travail. Tant pis.

Le foie gras très agréable convient bien au champagne. Le chef de salle ouvre le Château Guadet Saint-Emilion 2015 et le nez me donne cette pensée : tous les vins de cet âge ont le même parfum. En effet, c’est riche, puissant, et tous les vins bien faits ont le même discours à cet âge.

En bouche, le vin n’aurait sans doute pas grand-chose à dire mais fort heureusement le plat de poisson, meilleur plat de notre repas, fait briller le saint-émilion. L’accord est superbe.

Le plat de résistance à base de volaille est loin d’avoir le niveau du plat de poisson. Le Beaune Grèves Domaine Ropiteau Mignon 1947 au parfum discret et subtil est fatigué. Mais si on fait abstraction de sa fatigue, il raconte infiniment plus de choses que le jeune bordeaux. Il suffit d’écouter ses subtilités qui ne demandent qu’à éclore.

Le soufflé délicieux est pantagruélique.

On est loin du lustre de la maison Darroze du temps de sa splendeur, mais nous avons passé un très agréable moment avec un plat de poisson superbe et une relique fatiguée de 1947.

le chef me montre les cailles pour demain

je vais ouvrir l’Yquem qui sera servi a déjeuner demain

dîner à Langon

Déjeuner avec des amateurs belges mardi, 14 novembre 2023

Il y a plusieurs mois, j’avais déjeuné avec deux jeunes belges amateurs de vins qui avaient proposé de partager de belles bouteilles. L’ambiance amicale de ce déjeuner a donné envie de « remettre le couvert ». Les amis belges sont passés de deux à quatre et le déjeuner se tiendra au restaurant Pages. Il était convenu de se retrouver à 11 heures pour l’ouverture des vins, mais comme je suis arrivé plus tôt, j’ai eu le temps d’ouvrir le Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1969.

Le niveau est un peu bas, la capsule est intacte et en enfonçant le tirebouchon, je sens que le bouchon est très serré. Une fois de plus je constate qu’un bouchon très serré ne signifie pas étanchéité. Des bouteilles perdent souvent plus de volume avec des bouchons très serrés qu’avec des bouchons peu serrés ou qui menacent de tomber dans le liquide.

Le bouchon est dur comme du bois sec et sur 80% de la longueur on le voit sec et portant des signes de moisissure, mais heureusement le bas du bouchon est de belle qualité. Et je suis aux anges en sentant ce breuvage qui me semble divin. Mes amis auront le même sourire en le sentant.

Je poursuis avec les vins des amis belges. Le Château Grillet 1979 a un nez de bouchon. Nous verrons. Tous les bouchons viennent entiers et sans problème. Le parfum du Château Lafite 1954 est enthousiasmant et plus riche que ce que j’attendrais de cette année et le parfum de l’Ausone 1937 est glorieux. Celui du Clos de Tart 1953 est beaucoup plus discret et on attendra son éveil.

Je croyais le Château Lafue 1928 reconditionné, un Sainte-Croix du Mont, mais non. Il est étonnamment clairet et annonce un liquoreux devenant sec.

Nous sommes très heureux qu’à part le Grillet, tous les vins n’offrent que de belles promesses. J’ouvre alors le Krug Private Cuvée années 60 au niveau très haut. Le bouchon est d’une qualité exceptionnelle et le nez n’annonce que du bonheur.

Il me semble que l’on devrait commencer par un champagne « de début » avant ‘d’attaquer’ le Krug, afin de se faire le palais. Pierre-Alexandre nous vante les mérites d’un Champagne Marteaux Guillaume Cuvée Esprit Terroir 2016 dégorgé en 2022 fait des trois cépages, non dosé. Il a raison de l’avoir recommandé car ce champagne n’a pas la dureté des non dosés et se montre même joliment gastronomique. Une belle surprise.

J’avais mis au point le menu avec le chef Ken qui sera : mini-barquette de tartare de bœuf et verdure / poisson cru à l’huile / raviole de homard / cabillaud sauce au vin / canard de Challans et endives / wagyu en deux services et gaufres / tarte Tatin.

Le Champagne Krug Private Cuvée années 60 est d’une rare noblesse. Tout en lui est parfait, au goût idéal. J’avais acheté un lot de ce champagne qui se montre chaque fois idéal. Avec le poisson cru, l’accord est magique.

Le Château Grillet 1979 est marqué par un nez de bouchon, mais le milieu de bouche est absolument sain, sans trace de bouchon, qui ne réapparaît que dans le finale. Je me concentre sur le goût du milieu de bouche et le vin me plait beaucoup, très adapté à la raviole de homard. Il est à noter que le nez de bouchon aura complètement disparu environ trente minutes plus tard.

Le Château Lafite-Rothschild 1954 a un parfum irréellement séduisant. Il est raffiné. En bouche je retrouve les marqueurs de Lafite, le charbon comestible et la truffe. Sa densité me surprend car je n’attendrais pas une telle richesse pour un 1954. Avec le cabillaud, l’accord est divin.

Il y a bien longtemps, j’avais profité des ‘reliques’ de cave du restaurant Laurent comptant beaucoup de bordeaux de 1937. Les prix étaient bas car les risques étaient grands. J’ai donc gardé de 1937 l’image d’un millésime incertain, alors que c’est probablement la cave du Laurent qui ne permettait pas un vieillissement de longue durée. J’appréhendais le Château Ausone 1937 avec précaution mais le nez à l’ouverture m’avait rassuré. Servi maintenant, c’est un empereur, c’est César toisant Vercingétorix. Le canard est un compagnon idéal de ce riche et grandiose saint-émilion.

Un des amis demande lequel nous préférons des deux bordeaux et nous sommes tous du même avis : même si l’Ausone est un puissant guerrier, notre cœur balance du côté du subtil et émouvant Lafite.

Le Clos de Tart 1953 pourrait être jugé plaisant, mais je ne reconnais aucune caractéristique d’un Clos de Tart. C’est un bon bourgogne mais qui n’a pas la prestance que devrait avoir ce vin si subtil et rare. Le wagyu l’aide bien mais le cœur n’y est pas.

Le Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1969 est une merveille dans un état parfait. Il a les marqueurs des vins de la Romanée Conti, la rose et le sel, riches à l’extrême. J’entre en pamoison. Pour mon goût, ce vin est la perfection de la Romanée Conti. Et le wagyu apporte du gras qui fait éclore la rose.

Le Château Lafue Sainte-Croix du Mont 1928 m’avait surpris par sa couleur très claire annonçant sans doute un liquoreux devenu sec. Il montre en fait un très bel équilibre au doucereux délicat. Combien d’amateurs connaisseurs de vins ne diraient pas Sauternes en buvant ce Lafue à l’aveugle ? Le plaisir de ces appellations de vins doux du bordelais est total. La tarte Tatin revisitée par le chef pâtissier est superbe et met en valeur le liquoreux.

La cuisine du chef Ken a été absolument pertinente et a ébloui mes nouveaux amis, les plus originaux des accords étant avec le poisson cru et avec le cabillaud. Mais le canard avec l’Ausone et le wagyu avec le Richebourg ont été des accords puissants.

Il est temps de voter. Je pensais que le Richebourg serait le gagnant, mais la subtilité délicate du Lafite a impressionné mes convives qui lui ont donné trois places de premier contre deux places pour le Richebourg.

Le vote du consensus est : 1 – Château Lafite-Rothschild 1954, 2 – Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1969, 3 – Champagne Krug Private Cuvée années 60, 4 – Château Ausone 1937, 5 – Château Lafue Sainte-Croix du Mont 1928, 6 – Clos de Tart 1953.

Mon vote est : 1 – Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1969, 2 – Champagne Krug Private Cuvée années 60, 3 – Château Lafite-Rothschild 1954, 4 – Château Ausone 1937, 5 – Château Grillet 1979.

Je suis ravi que mes jeunes amis trouvent normal d’apporter un Ausone 1937 dans un repas partagé. Cela prouve que la reconnaissance des vins anciens a vraiment progressé dans le monde du vin. Et cela m’encourage à continuer à faire la promotion et le partage des vins anciens, si porteurs de plaisirs et de moments mémorables.

Une fois de plus Pages a réalisé un menu idéal pour les vins. La complicité que j’ai avec l’équipe de Pages a eu une récompense. Nous leur faisons goûter les vins du repas, ce qui les fait entrer dans ce monde merveilleux.

Deuxième jour avec mon fils mardi, 7 novembre 2023

Le lendemain, après les agapes de la veille, nous ne ferons qu’un seul repas. Il sera consacré au Wagyu que j’ai acheté en très grande quantité. Pour cela j’ai prévu un Chambolle-Musigny probable Barthod Noëllat 1929 car j’adore ce millésime. Le nom du vigneron n’est pas lisible mais c’est grâce à Instagram que j’ai pu le nommer car quelqu’un a reconnu l’écusson du centre de l’étiquette.

Je l’ouvre vers 13 heures. La bouteille est belle et saine, le bouchon vient dans de bonnes conditions et le parfum promet un grand vin.

Nous commençons avec le Champagne Mumm Cordon Rouge 1937 ouvert la veille et une fois de plus il apparaît que le champagne du lendemain est meilleur que le champagne de la veille. C’est intéressant de voir que ce Mumm est plus large, plus épanoui et plus généreux. On goûte des petits sticks au parmesan et des fromages qui côtoient bien le 1937.

Le repas est essentiellement composé de Wagyu sans aucun accompagnement. Le Chambolle-Musigny probable Barthod Noëllat 1929 est brillantissime. Son parfum est élégant et le vin a une carrure de 1929 serein, fort et élégant. Ce vin, c’est Cary Grant, le symbole absolu de l’élégance. L’accord avec le Wagyu est idéal et le gras de la viande donne une ampleur particulière au vin. Un régal qui me conforte dans l’idée que 1929 est l’année la plus belle du 20ème siècle.

Un époisses trouvera lui aussi le chemin du cœur du Chambolle-Musigny.

J’ouvre pour finir le repas un Champagne Dom Pérignon 1973. J’adore cette année fine et subtile. Ce 1973 est légèrement plus fatigué que ceux qui m’ont ébloui, mais le plaisir est grand. Nous le buvons sur un fromage Jort et aussi sur le Brillat-Savarin jeune et frais.

Il en reste la moitié, que nous envisageons de boire le lendemain.

Mon fils, très occupé dans sa journée ne revient qu’à 23 heures. Il a en main un Mont d’Or que l’on sert à la cuiller. Tous les deux nous avons mangé tout le fromage dont le crémeux a parfaitement convenu au Dom Pérignon, lui aussi meilleur le lendemain.

Faudrait-il ouvrir les champagnes anciens la veille ? Oserai-je le faire ? A suivre.

Ces deux jours avec mon fils ont permis d’ouvrir des vins inhabituels. Juste pour le plaisir voici les dates : 1903 – 1921 – 1927 – 1929 – 1937 – 1957 – 1969 – 1969 – 1973. Quel beau voyage dans le temps.

Dîner du premier jour avec mon fils mardi, 7 novembre 2023

Mon fils est venu de Miami chez moi, nous avons grignoté à l’heure du déjeuner. Il est temps de penser au dîner où ma femme a prévu des pieds de porcs et où j’ai ajouté du Wagyu. Il y aura aussi quelques fromages.

Vers 16 heures j’ouvre une bouteille de Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1927 que j’ai achetée car le niveau bas entraînait un prix attractif. Le vendeur en qui j’ai une grande confiance avait soulevé la capsule et avait pu lire 1927. Quand j’ai voulu vérifier la date, le bouchon était devenu illisible car un peu de moisissure était apparue, sans incidence sur le bas de bouchon.

La bouteille au cul profond rend plausible la période, ainsi que l’étiquette qui était utilisée dans les années 20. J’enlève le bouchon et le parfum est poussiéreux et d’une platitude décourageante. L’espoir d’un retour à la vie est extrêmement faible.

Aussi, à titre de secours, j’ouvre un Clos de Vougeot Château de La Tour Morin Père & Fils 1957. Le niveau est beau et le parfum est très engageant, d’une belle délicatesse.

J’ouvre aussi un Champagne Mumm Cordon Rouge 1937 au magnifique bouchon, au parfum prometteur.

Au moment du dîner nous commençons par le Champagne Mumm Cordon Rouge 1937. La couleur est foncée mais belle et le vin est agréable à boire. L’acidité est bien dosée et du fruit apparaît en fin de bouche. Il montre son âge mais on le boit bien.

La question était de savoir par quel vin commencer. Comme les pieds de porc passent avant le Wagyu, nous commencerons par le Clos de Vougeot Château de La Tour Morin Père & Fils 1957. Son parfum est très expressif et joyeux. Même si le vin manque un peu de corps, il est très agréable à boire avec un goût très franc et précis. Une expression très élégante.

Il est à noter que la sauce des pieds de porc s’entend bien avec le champagne.

C’est sur le Wagyu que va se présenter le Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1927. Le parfum est timide, mais acceptable et le goût est discret. Le gras du Wagyu est idéal pour ressusciter ce vin. Progressivement, on voit apparaître des marqueurs des vins du domaine. Il est subtil et complexe. Bien sûr, il est fatigué, mais le gras de la viande le rend beaucoup plus large. C’est de toute façon émouvant de chercher à recevoir le message d’un vin de 96 ans.

Mon fils m’a fait remarquer que les trois vins du dîner étaient de 1937, 1957 et 1927. Une symphonie improvisée en ‘7’.

l’année du Grands Echézeaux est impossible à lire

les deux repas