Archives de catégorie : vins et vignerons

dégustation de vins de Trimbach à la maison de l’Alsace lundi, 3 octobre 2005

L’avenue des Champs-Élysées abrite la Maison de l’Alsace, qui sert d’écrin idéal pour promouvoir le meilleur de cette belle région. Et aujourd’hui, le meilleur c’est Trimbach. Une panoplie des vins de ce domaine est mise en valeur par des huîtres délicieuses et par des fromages de Bernard Antony qui nourrira demain la première promotion de l’académie des vins anciens. De toute cette belle brochette de grands vins j’en retiens deux, incontournables : le Riesling Clos Sainte Hune 1990 Trimbach d’un équilibre serein et d’un goût plein bien assumé. C’est le petit frère du 1976 si beau et si vert que j’ai plusieurs fois dégusté, réussite de cette appellation et que je venais juste de revisiter chez Laurent. L’autre est un Gewurztraminer SGN 1967 Trimbach à la couleur d’un jaune vert doré éblouissante. Le nez raconte à quel point les vins mûrs ont une dimension de plus. Et en bouche, c’est un bonheur rare, joyeux et chantant. C’est beau le vin d’Alsace quand il est bien fait. Hubert Trimbach, comme Jean Hugel, que je raconte dans les prochains numéros, sont porteurs d’une histoire du vin, où, avec moins de science qu’aujourd’hui, on a produit certains des plus beaux breuvages que l’homme ait jamais faits.

Le jury de champagnes du Spectacle du Monde va diner chez Dom Ruinart vendredi, 30 septembre 2005

Un car affrété par la maison Ruinart prenait en charge ce joyeux groupe, qui n’avait pas fini ses explorations de la champagne. Nous sommes accueillis chaleureusement dans une magnifique salle où, dans un calme rassurant, nous allons goûter de magnifiques champagnes. Avant cela, j’avais visité les crayères à 35 mètres sous le niveau du sol où mûrit le champagne (voir photo). C’est beau et impressionnant à la fois. Le Dom Ruinart 1996 a un nez très intense, profond, très vineux. En bouche il est élégant, évoque la pamplemousse quand il devient plus chaud. A ce propos, j’ai constaté avec tous ces champagnes à quel point mon plaisir se situe entre la deuxième minute et la quatrième minute dans le verre. Le vin a besoin de s’installer dans le verre. Ensuite, il cumule la force de la bulle, la fraîcheur, et les arômes qui s’expriment. Au bout de quatre minutes, le réchauffement épaissit la bulle, empâte les arômes et le champagne perd de sa longueur. J’ai généralement tendance à aimer les champagnes moins frais que ce qui est servi dans les restaurants. Ici je me rends compte que la fenêtre de tir des températures pour les champagnes Ruinart est très étroite, phénomène que j’avais déjà constaté pour le Haut-Brion blanc, qui s’exprime avec le maximum de charme dans une plage de température qui n’excède pas deux degrés. Le Dom Ruinart 1993 a un nez déjà plus évolué. Il est très mûr, développé, expressif. Le 1990 est beaucoup plus doré, au nez avancé pas trop agréable. En bouche, il est exactement complet. On ne peut s’empêcher de penser à Roxane Debuisson, l’aficionado de Ruinart qui ne jure que par le 90, mais en magnum seulement. Le 1988 est moins doré que le 90, plus citron. Le nez est plutôt minéral. Au début, il est un peu coincé, un peu en dedans. Puis il s’ouvre et devient intéressant par une jeune agressivité. C’est lui que mes amis préférèrent des blancs. Le 1981 est ambré, déjà bronzé. Le nez me plait, fait de beurre et de pêche. En bouche, nettement évolué, il est intéressant car sa bulle est belle. Un champagne pour accompagner une belle cuisine. Je me suis rendu compte de l’autorité dont jouit Richard Juhlin, expert mondialement reconnu en champagnes, auteur de plusieurs livres qui font référence. Il a signalé que le 1981 ne lui convenait pas et immédiatement la bouteille fut doublée par un 1981 ravissant que je fus le seul à classer en premier des blancs, le 1988 étant acclamé par ces juges, même si le 1990 impose le respect. Alors que je suis assez peu fanatique des champagnes rosés, je suis interdit comme sur un uppercut par le Dom Ruinart rosé 1990. le nez est incroyablement séducteur et en bouche, quelle élégance après les blancs ! Passionnant. Mais le rosé 1988 allait me plaire plus encore par un fruité excitant. Je l’ai préféré au 1990, contre l’avis de mes amis qui ont plébiscité le 1990. Mais ce fruité m’allait bien. Le rosé 1986 moins ouvert, plus conventionnel, fut vite doublé, sur un froncement de cil de Richard Juhlin, par un magnum du même millésime. Malgré une nette amélioration, ce champagne ne me fit pas vibrer. L’impression générale qui restait en bouche, c’est que l’on avait bu de grands champagnes. Mais mon palais allait vivre une de ces excitations que j’adore. Après deux jours assez intenses, l’iode et le sel d’huîtres Gillardeau bien calibrées ont formé avec le blanc de blancs non millésimé Ruinart un accord absolument renversant. La bouche appelle cette combinaison où les deux composantes, l’iode et la bulle publient les bans pour une union où, selon le code civil, chacun doit apporter au mariage selon ses capacités contributives. Et ça contribuait.

J’ai l’air songeur en écoutant Philippe Faure Brac pendant ce dîner chez Ruinart

Dans une belle salle voûtée dont les murs sont ornés des panneaux de support des bouteilles en vieillissement, un dîner fort élégant : salade de homard au parmesan, poularde en demi-deuil et sa petite purée truffée, fromages frais et affinés, poire aux épices, tuile aux éclats d’amandes et sa glace au gingembre confit. Belle cuisine au homard résolument carpacchique, à la truffe délicatement et goûteusement glissée sous la peau, et au gingembre très consensuel. Sur ce beau menu Dom Ruinart 1996, évidemment plus vivant qu’en salle de dégustation, Dom Ruinart 1990 magnifique, « R » de Ruinart bien fait pour apaiser le fromage et le Dom Ruinart rosé 1990 qui marche évidemment très bien avec la poire et surtout le gingembre, mais que je verrais volontiers sur d’autres audaces. Il est certain que deux dîners de suite où il n’y a que du champagne, même d’une qualité irréprochable, donnent des envies de vins rouges, pour « mâcher » du vin. Une générosité remarquable de deux maisons de champagne, totalement libre puisque le jury a jugé à l’aveugle, sans possibilité de se tromper, comme j’en fus le témoin. Il faudra lire cette brillante analyse dans « le Spectacle du Monde », qui consacre séparément des grandes maisons de champagne et des petits propriétaires, dont un primé qui était inconnu de tout le jury, quand on a révélé son nom ! Ça fait plaisir qu’on consacre des vignerons discrets qui font bien. Pendant que je rentrais fourbu à Paris, mes compères infatigables ont poussé la chansonnette dans des karaokés endiablés jusqu’à l’heure du laitier. Ces deux jours m’offrirent de grands moments d’amitié.

visite rendue à la maison Bichot à Beaune mardi, 27 septembre 2005

Depuis de longues années j’achète quand il y en aux catalogues des ventes les vins anciens de la maison Bichot. Ayant rencontré Jean Marc Bichot en de nombreuses occasions, il me fut dit : « vous devriez venir nous voir, nous avons de vieux millésimes ». C’est une chanson douce à laquelle je serais fou de ne pas succomber. Jean Marc Bichot est un jeune senior fort sympathique dont le coté rêveur timide le rend encore plus attachant.
J’arrive à l’heure de l’apéritif pour voir les vignes en cours de vendange, et pour une visite de la cuverie fort convaincante. Dans une cave historique, je goûte les 2003, précédés d’un 2004. Le Chablis 2004 de la maison Bichot est chaleureux, ensoleillé, encore vert de jeunesse. Le Chablis premier cru Vaucoupins Long Dépaquit 2003 est plus construit, élégant, avec un beau final. Le Chablis Moutonne Grand Cru 2003 a un nez plus floral. Il est joli en bouche, mais cet élégant jeune homme a encore besoin de mûrir.
Le meursault Domaine Pavillon 2003 a un nez explosif. Il est manifestement plus compliqué à comprendre. C’est un vin qui se cherche. La fin est très alcoolique, laissant une forte trace en bouche. Le Meursault les Charmes premier cru 2003 a un vrai nez de Meursault. L’attaque en bouche est superbe Il est grand, élégant, de belle trace. La petite amertume finale va se corriger avec quelques mois de plus. Le vin sera grand.
Quand on passe au rouge avec un Mercurey premier cru les champs Martin 2003, mon palais crie « à l’aide », tant la transition après les blancs n’est pas naturelle. On sent quand même que le vin est bien construit. Le Pommard « Clos des ursulines » 2003 a un nez violent. Le vin est en pleine révolution soixante-huitarde. En bouche il est ensoleillé, tout en compote de fruits noirs. Le Gevrey Chambertin les Corvées 2003 a un nez proche de celui du Pommard. Plus civilisé il est élégant, soutenu par un poivre marquant. Le Nuits Saint Georges Bichot 2003 est plus léger, moins dense. Facile à boire, mais plus limité. J’y ai senti de la noix fraîche. Le Vosne Romanée 2003 a un nez austère. En bouche il est très coloré et raconte des histoires. C’est un vin dont j’aime l’incivilité. Le Corton Clos des Marèchales 2003 est magnifique. Totalement en devenir, il est beau. Il y a du tannin !
Nous nous rendons au domicile du frère de Jean Marc Bichot pour un déjeuner familial. Nous goûtons à table les vins débouchés en cave, le Meursault Charmes 2003 et le Corton 2003. Manifestement plus à l’aise qu’en cave, ils montrent paradoxalement encore mieux combien de temps il leur faudra pour s’exprimer. Le neveu de Jean Marc ouvre sur table un Pommard Clos de Ursulines 2002 et je commence à me demander où sont les vins anciens que l’on m’avait fait miroiter. Je reprends de la viande – délicieuse – en me disant qu’il en viendra peut-être. C’est au fromage qu’un Meursault 1955 Bichot, déjà ambré et fort élégant me donnera un aperçu des vins anciens du domaine, avec une belle rondeur et une acidité porteuse de longévité. Nous allons ensuite visiter la maison d’un collectionneur d’objets précieux à la décoration d’un raffinement rare, qui cache en ses entrailles la cave des vieux millésimes dont on m’avait parlé. Nous débouchons un Marc des Hospices de Beaune d’environ 50 ans absolument délicieux. Ce déjeuner fut extrêmement intéressant puisque je retrouvai des souvenirs de mon ancien métier (on se dit dans ce cas que le monde est petit), et j’ai pu mieux connaître ce domaine qui fait et a fait des vins qui m’ont fait rêver et me feront encore rêver.

un grand format de Romanée Conti samedi, 24 septembre 2005


6 litres, est-ce Mathusalem ? En bordelais c’est impériale. Cette bouteille est de 1979. Avec qui la partager?

File date :
Camera make :
Camera model :
Date/Time :
Resolution :
Flash used :
Focal length :
Exposure time:
Aperture :
Whitebalance :
Metering Mode:
Comment :

Une historique dégustation de 38 millésimes de château Montrose lundi, 12 septembre 2005

Bipin Desai est l’homme qui organise les dégustations les plus folles et les plus exhaustives de la planète. Ami des plus grands producteurs et ami des plus grands collectionneurs, il arrive à rassembler des vins comme personne ne le pourrait. Ici, avec la complicité de Jean-Louis Charmolüe, le propriétaire du château Montrose, ce sont 38 millésimes de Montrose qui seront soumis à la sagacité des plus grands palais de la planète. Bipin fait remarquer que la somme de connaissances des participants est absolument unique. Je reconnais des grands critiques qui publient des guides, alimentent des revues internationales sur le vin, des journalistes qui parlent du vin dans de prestigieuses revues américaines ou japonaises. Michael Broadbent, le plus grand connaisseur en vins de la planète est là, Serena Suttcliffe et son mari écrivain du vin, Jancis Robinson ravissante dans des couleurs de vert et mauve, Clive Coates, auteur d’analyses percutantes sur le vin, retiré maintenant en France, James Suckling, critique œnologique aux analyses polémiques dans le Wine Spectator, Michel Bettane à la culture historique unique et des collectionneurs de grande pointure comme Wolfgang Grünewald, Josh latner et ce dégustateur fou, John Kapon avec qui j’avais partagé de belles bouteilles à New York qui marche sur les traces de Bipin pour organiser des combats plutôt excessifs entre les plus beaux vins de la terre.
L’expérience que l’on va vivre est bien loin de la philosophie de wine-dinners. Car ici on va comparer des années, les juger, quand dans mes dîners aucun vin n’est en compétition avec un vin identique. Bien sûr on vote en fin de dîner, mais on classe des liquoreux avec des bourgognes et des bordeaux, ce qui ne porte pas atteinte à leur valeur intrinsèque. Alors que là, on va dire que 1959 est meilleur que 1961 ce qui rabaisse un des deux vins qui est splendide. L’exercice est intellectuel, car on aura vu de telles variations entre les deux bouteilles d’un même millésime qu’il y a plus d’écart entre deux vins d’une même année qu’entre deux années. Il y a eu presque toujours plus de 5 points d’écart dans l’échelle de Parker entre les deux vins de la même année, et bien souvent dix points, ce qui est énorme, rendant moins définitive la hiérarchie des années.
Mais l’exercice présente un intérêt majeur, car c’est un moyen unique de mieux comprendre un domaine. Et à ce titre, l’expérience vaut d’être vécue. Je ne boirai plus jamais Montrose de la même façon après ce que j’ai vécu. Le propriétaire était extrêmement ému à la fin de cette expérience, car en 44 ans de direction d’un domaine acheté par son arrière grand père, c’est seulement la deuxième fois qu’il a réuni des vins de ce niveau. Il complimentera Bipin d’avoir su assurer la cohérence des séries de services, donnant une pertinence gustative unique.
Tout commence au déjeuner au restaurant Taillevent dans le magnifique salon lambrissé rajeuni d’un modernisme élégant et discret. Le champagne Taillevent (un Deutz) et les gougères préparent le palais. Nous passons à table. Je vais reproduire mes notes de dégustation prises au fil de la plume pour ne pas altérer la spontanéité du reportage. On sait qu’il y a des redites, car on note vite. Mais c’est l’image de l’instant.
Les nez de la première série : le 2003 est un vin frais, jeune, plein de charme. Le 2002 crée un fort contraste. Le nez est chaud, très brûlé, comme d’un Porto. Le 2000 a un nez discret, on sent l’immense potentiel. Le 1996 est un peu acide, évoquant des fruits noirs. Le 1990 est magnifique, assez semblable au 2000 mais plus ouvert. Le 1989 a une belle structure d’arômes. A ce stade, je n’avais pas encore trempé mes lèvres. Allons-y.
Le Montrose 2003 a une attaque magistrale. Il y a du fruit flamboyant, puis le bois arrive. La longueur est belle car le vin rebondit en bouche. Ce sera un très grand vin, avis qui n’est pas partagé par tous les convives dont Clive Coates. Le 2002 est moins excitant. Il est déjà formé, alcoolique, rond, et il raconte moins d’histoires. Le 2000, quel vin ! Dans 20 ans il sera grandiose. Après une attaque très Montrose, il s’installe et s’élargit en bouche de façon splendide.
Le 1996 est un peu coincé. Il ne s’écarte pas de sa trace médiane. Il est relativement peu inspiré. Le 1990 a une merveilleuse complexité. Il suggère des tonnes de choses, sans les imposer. Du boisé bien construit, une pesanteur en bouche réelle, une longueur qui se révèlerait plus si l’on mangeait. Le 1989 semble plus agressif, plus envahissant, mais développe un charme encore plus redoutable. En fait, on peut aimer 1989 et 1990 et l’un des convives fit lever les bras pour l’un ou pour l’autre et ce fut un 50-50 quasi parfait. J’ai un petit faible pour le 1989, aussi mon classement de cette série sera : 1989, 1990, 2000, 2003, 1996, 2002. Il convient de dire que les bouteilles étaient tellement variables que ces jugements et classements s’appliquent à ce que j’ai bu, soit du verre qui m’était servi, soit du partage que je fis avec un voisin.
La deuxième série arrive et je commence par les nez. Le 1964 a un nez merveilleux, splendide, épanoui. Le 1961 est une bombe aromatique folle. Le 1959 que j’ai est bouchonné. Le 1955 a un raffinement certain et le 1953 est magique. Le 1952 sent trop la vieille armoire normande.
En bouche, le 1964 est un joli vin, à pleine maturité. Il ne ressemble pas tellement à Montrose, il est très chaleureux. Le 1961 est aqueux. On me dit qu’il titre 11,9°. Il est grand, mais pas flamboyant. Il finit un peu court et ce sera le plat qui le remettra à son niveau. Le 1959 que je goûte, pas celui qui m’est servi, est magistral. C’est un vin magique. C’est un vin intense, légèrement fumé, qui laisse une trace indélébile.
Le 1955 a trop le goût de soufre, ce qui gêne la dégustation. Le 1953 a une race énorme. Il est de la race du 1959 mais en plus léger. Il a un immense caractère. Il me fait penser à Jean Cocteau, ce génie non conventionnel à la subtilité conceptuelle infinie. Des amis auront aimé le 1952. Le nez de grenier dissuade de le boire, et même s’il a souffert on trouve effectivement quelques messages intéressants. Compte tenu des grandes variations de bouteilles on ouvrit un autre 1959 et un autre 1953. Le 1959 est parfait, le 1953 est bouchonné.
Je classe cette série dans cet ordre : 1959, 1953, 1964, 1961, 1955, 1952, mais le plat a propulsé le 1961 à de beaux sommets.
La troisième série nous fait franchir un monde. Le 1918, comme l’indique avec justesse Michel Bettane a un nez de Bourbon. C’est parfaitement juste. J’avais pensé à un bois du Canada. En bouche on sent du cassis, de l’alcool. C’est assez fabuleux. Le 1916, après le Schwarzenegger de 1918, a un nez plus attendu et en bouche, c’est chaud, c’est plein, c’est chaleureux, c’est délicieusement vivant. Je n’en peux plus car le 1911, malgré un nez un peu pétroleux et une couleur un peu trouble est en bouche beau comme il n’est pas permis. En trois vins j’emploie trois fois le mot fabuleux.
Le 1906 a un nez un peu amer, mais en bouche il est bon. Le 1898 sent le vomi de bébé. D’une autre bouteille nettement meilleure, il y a quand même du gibier. Le 1890 mériterait d’avoir été dépoussiéré par un oxygène correcteur, car sous le gibier on sent que c’est jeune, et même très bon. Le 1888 a un joli nez, une couleur plate, rosée. Il n’y a plus grand-chose dans ce vin.
J’écris sur mon papier : le 1911 est géant, le 1916 est grand et le 1918 est jeune et je classe : 1911, 1918, 1916, 1890, 1898, 1906, 1888.
Pendant ce temps le déjeuner se déroulait et nous montrait toute la finesse de la cuisine de cette prestigieuse maison. Le menu du déjeuner : Légumes du moment étuvés, truffe écrasée et fleur de sel / Bar de ligne aux cèpes, cappuccino de châtaignes / Ossau Iraty aux épices (fromage basque) / crêpes craquantes aux fraises des bois. Subtilité extrême des recettes. La sauce des légumes embellissant le jeune 2003 pour le rallonger, et le bar enchantant le 1961 qui ne demandait que cela pour montrer son immense talent, mal révélé dans une dégustation froide de millésimes en série. La petite mise en bouche consistait en une gelée d’une délicatesse infinie. Le concombre en dés n’est pas forcément l’ami du vin, mais la gelée ravissait l’âme.
S’il fallait mêler les trois séries et donner un classement je dirais à ce stade : 1959, 1911, 1989, 1990. On se quitta pour quelques heures, les femmes changèrent leurs atours, et le dîner allait nous faire rencontrer de pures merveilles de Montrose.
Commençons par la cuisine. Le menu du dîner : petit velouté à la crevette assez risqué sur le vin, mais qui trouve sa place, crème brûlée de foie gras de canard aux fèves de Tonka / Saint-Pierre clouté au basilic / pigeon rôti au raisin de chasselas, girolles et jus d’armagnac : fourme d’Ambert à la cuiller / déclinaison de poires. La crème brûlée n’a trouvé aucun accord avec aucun millésime sauf un peu avec le 1970. Ils ne se sont pas parlés, alors que le Saint-Pierre est un magique multiplicateur de Montrose. J’ai particulièrement apprécié le pigeon traité d’une façon austère mais diablement précise. C’est du pigeon que l’on a en bouche, légèrement gibier, et la précision clinique du goût transcende les derniers vins qui sont – ce qui ne gâte rien – les plus grands des six séries.
Le premier groupe comporte des vins encore jeunes. Le 1986 a un nez d’un classicisme rassurant, très riche. Le 1985 est gravement bouchonné, le 1982 est opulent au nez, mais pas très complexe. Le 1975 fleure bon, joli, élégant et léger. Le 1970 a un nez convenable, un peu en dedans, légèrement bouchonné.
Le 1986 est un vin agréable, rond, élégant, raffiné, sans aspérité, sans défaut et sans extravagance. C’est le gendre idéal. Le 1985 non bouchonné est un peu court, sec, alcoolique. Il n’a pas de vraie longueur. Le 1982 est très aqueux, comme un tissu trempé. Voilà un vin qui comme le 1961 réclame un plat. Hélas, le velouté de crevettes et chou-fleur le coince plutôt. Il est à noter qu’il a un vrai message et s’élargit un peu avec le temps.
Le 1975 est aussi aqueux, avec un très joli parfum. Il m’a évoqué le clou de girofle. Le 1970 est un peu poussiéreux, astringent, à peine bouchonné, ce qui limite l’analyse.
Je classe ainsi : le 1986 et de loin, puis 1982, 1975, 1970, 1985.
La deuxième série comporte des millésimes rares. Je n’ai pas la bonne 1949, mais l’autre sent bon. Le 1948 a un nez superbe, comme un grand porto. En bouche, le 1949 souffre un peu, mais on sent qu’il a une richesse qui ne demanderait qu’à s’exprimer. L’autre 1949 est immense. C’est un beau vin de grande persistance. Le 1948 parait plus léger mais il développe une intensité et une complexité remarquables. C’est inhabituel, mais absolument passionnant. Le 1947 a le nez d’un vin ouvert tard. Avec de l’air, il se débarrasserait de sa capuche de champignon. En bouche c’est exceptionnel. C’est grand, expressif, et d’une longueur extrême. Quelle trace en bouche. C’est un immense vin. Il m’a rappelé de merveilleux 1947 que j’ai bus.
Le 1937 a un nez un peu fatigué. On sent que la trie a été peu sélective. Il est assez agréable, un peu astringent. Le 1934 a le nez transformé par le poisson qui m’est servi. Il est très grand en bouche. Un peu austère mais formidablement présent. Le poisson est évidemment un bonheur sur ces vins. Je classe 1948, 1947, 1934, 1937, 1949 ce dernier figurant ici à cause de la bouteille.
Mon orgueil gaulois a chaviré quand mon voisin de Hong-Kong aux racines chinoises me dit : vous devriez manger votre olive, car elle élargit le 1934. J’avais prudemment repoussé ce fruit sur le bord de l’assiette, craignant une mésalliance, et c’est un homme du soleil presque levant qui me donne une leçon de gastronomie. Le coq gaulois vacillait d’un coup. Car mon compère avait raison !
Arrive une série de légende, le feu d’artifice. Le 1945 a un nez totalement exceptionnel, très largement au dessus des autres. Son goût est incommensurable, fantastique. Le 1929 a un nez plutôt serré. Il fut ouvert tard. Magnifique en bouche avec du velours. C’est chaud, sucré, c’est grand. Il se développe avec bonheur. Le 1928 a un nez moins grand, pour celui qui m’est servi. Mais en bouche, c’est d’une jeunesse incroyable. C’est grandiose, c’est un vin immense (devant tant de splendeurs le vocabulaire se rétrécit, car on veut passer moins de temps à écrire qu’à boire). A ce stade, on se dit qu’avec 45, 29 et 28, on tient ce qui se fait de mieux. Attendez donc ! Le 1926 a un nez très pur et joli, et en bouche il est brillant, jeune, d’une structure remarquable. Le 1921 a un nez chaleureux comme il est impossible d’imaginer. C’est de la vanille, du Porto, c’est chaud. En bouche, c’est un peu plus déstructuré, fumé, sucré comme un fruit confit avec du litchi. C’est le plus oriental des Montrose de ce soir. Le 1920 exhale une merveille de précision. En bouche c’est plus court qu’au nez, mais c’est imprégnant et solide. Le 1900 appelle ce mot actuel : « respect ». C’est un témoignage de la perfection du vin, même s’il a un peu souffert. Le 1893 a un nez de prime abord soufré, ce qui aurait disparu à l’oxygène. Dès qu’on attend, on trouve un vin magistral, d’une dimension encore nouvelle.
Les 21, 20, 28 et 26 sont faits du même moule, sucrés, chauds, chaleureux, comme si quelque vin algérien était venu fauter. Je fais un classement : 1926, 1928, 1893, 1945, 1921, 1929, 1920, 1900, à cause de cette opacité sur le 1900. Mais en faisant un nouvel essai le 1900 se découvre et rappelle combien cette année est grande. Le 1921 est le moins Montrose de tous, le 1926 est gigantesque. Ce qui me frappe, c’est que le 21 et le 26 puissent être du niveau du 28. J’ai été frappé que la dernière série, que le pigeon adore, est souriante, ensoleillée, quand la série précédente avait produit des vins plus austères, plus encyclopédiques.
Faire un classement global est quasi impossible, d’une part du fait des variations de bouteilles mais aussi parce que chaque série produit une impression par elle-même. Le 1945 placé dans le dernier wagon n’aurait pas donné la même réaction s’il avait figuré avec ses congénères de la série précédente. Je hasarde cet ordre : 1959, 1926, 1928, 1986, 1948, 1989, 1893, etc. Mais je pourrais aussi bien mettre le 1926 en premier.
Le sommelier nous fit goûter un Coteaux du Layon 1928 dont deux bouteilles avaient des variations de couleur invraisemblables. L’une jaune citron, l’autre rose bonbon. Et c’est le même vin ! Il voulait ainsi rappeler les variations que nous avions vécues pour chaque millésime.
Jean Louis Charmolüe est un être sensible, fin, qui vivait cet événement avec une émotion intense. Il nous donnait de son vin une approche unique, car on en sait maintenant beaucoup. Il a parlé avec passion et amour de son vin. Sa sensibilité a rendu ma dégustation encore plus émouvante. Bipin Desai avait organisé brillamment la ronde des millésimes et a rendu un hommage appuyé et justifié à l’ensemble de l’équipe de Taillevent. De tels événements uniques marquent la vie d’un dégustateur.

fabuleux dîner de l’association des grands crus classés au chateau d’Yquem dimanche, 19 juin 2005

Un événement aura lieu à Yquem. Il se prépare très tôt. Un long bain en piscine est destiné à rafraîchir mon corps pour pouvoir revêtir un smoking plus adapté au Groenland qu’au Mali. Il fait en effet très chaud. Mais une bonne fée veille sur cette soirée car la température fut clémente, ce qui permit à chacun de profiter de cet instant unique dans les meilleures conditions. La grille toujours ouverte de l’accès au château d’Yquem est aujourd’hui fermée. A un carrefour quatre gendarmes nous orientent vers un parking aménagé dans les bois au sommet de la colline d’Yquem. Des voiturettes électriques en noria nous mènent à la porte d’entrée. Des hôtesses, toutes plus belles les unes que les autres, nous accueillent et nous indiquent le numéro de table pour le dîner.
Plus protocolairement, le Président des Grands Crus Classés, le Président de Moët Hennessy et le souriant Pierre Lurton donnent à chacun, par de larges accolades, l’impression qu’il est important. Un bouquet d’arbres nous offre une ombre fort utile, où des stands de dégustation sont installés pour que l’on puisse comparer certains des plus grands Sauternes et Barsac des années 1998 et 1999. De délicieux petits toasts préparés par un grand chef brillent avec ces liquides dorés. Une musique de chambre en plein air, d’un orchestre de plus de vingt musiciens nous fait aimer ces vins chaleureux. Je déguste le Climens 1999 avec la propriétaire de ce château qui voulait faire ma connaissance car elle avait appris que Climens 1923 avait été le déclic de mon amour des vins anciens. Nous nous sommes promis de nous revoir. Nous retrouvons de nombreux convives de la magnifique fête de Pichon Longueville Comtesse de Lalande, dont May Eliane de Lencquesaing et Gildas d’Ollone souriants de la réussite de leur fête d’hier. Mon épouse discute avec une charmante jeune chinoise, écrivain du vin, fort spirituelle. Je salue avec plaisir les plus grands sommeliers du monde, des journalistes qui comptent et des propriétaires de grands vins.
Une armée de vigiles cerne nos vagabondages. Le vrombissement d’un hélicoptère annonce une personnalité. Est-ce Bernard Arnault et son épouse ou bien Philippine de Rothschild qui arrivent par la voie des airs sous les claquements des flashes des innombrables photographes ? Ils répondent, comme certains personnages importants du vin, aux interviews. Je suis présenté à Bernard Arnaud qui me gratifie de propos de circonstance. Je ne regarde que son épouse tant sa beauté fascine. Sa fille promène son fiancé qu’elle épousera ici en septembre (on en saura plus dans Voici ou Gala). Albert Frère me reconnaît car nous avons un passé commun du temps où il était dans l’acier. Mais on ne parle ici que de vins.
Une photo va immortaliser les producteurs de vins présents. Corinne Mentzelopoulos me remercie de mes mots aimables du bulletin 143. Ce sont mes amis du restaurant Laurent qui m’ont « trahi » en lui faisant lire. Elle est venue avec sa fille d’une rare beauté. Le long des remparts du château les sujets de conversation et les motifs de rencontres ne manquent pas. Valérie Lailheugue gère tout son monde d’un talkie-walkie autoritaire. La musique s’arrête et l’on nous prie de rejoindre le lieu du dîner. Longeant le château, avec la vue sublime sur les vignes et la vallée, on descend vers une halle métallique immense de belle ferronnerie où tout va se passer.
Je ne peux m’empêcher de penser qu’en ce jour de l’année qui est le jour le plus long, j’ai regardé les mêmes vignes avec Alexandre de Lur Saluces avec cet éclairage magique où le soleil de 21 heures envoie des rayons rasants sur les vignes et les colore de façon inimitable. Les feuilles deviennent diaphanes, rosissent et dégagent une vibration unique. En marchant j’essaie de faire passer cette émotion à une convive que je ne connais pas. Elle a dû se demander qui est ce doux rêveur qui poétise devant ces vignes. J’ai pensé que cet éclairage unique, je ne le verrai plus avec le Comte. Mais j’en garderai la grâce. Pour lui, et pour l’histoire d’Yquem dont mon palais a lu de nombreux chapitres.
Nous sommes à la table de Charles Chevallier, l’homme qui fait Lafite, et son épouse. Nous retrouvons Emmanuel Cruse et son père, propriétaires d’Issan, le sémillant propriétaire des Caves Legrand, une ravissante journaliste de Munich et Emmanuel cache à mes yeux un américain dont je ne découvrirai qu’à la fin du repas un incroyable point commun : nous nous parlons virtuellement depuis longtemps sur un même forum de vins.
Bernard Arnault fait un discours fort volontaire où la langue de bois est absente. J’ai déjà entendu ses propos en d’autres lieux. Il ne mâche pas ses mots. J’aime ces propos toniques car notre pays en a besoin. M. Castéja, le président des crus classés, fait un discours plus adapté à la circonstance. Bernard Arnault a sobrement et délicatement mentionné Alexandre de Lur Saluces. Ce fut bien.
Le menu est élaboré par trois chefs, Michel Guérard, le chef de Potel & Chabot, et Michel Trama. Autant dire que la qualité est au rendez-vous. Ce fut tout simplement superbe. Le premier service des vins se fait avec Château d’Issan 1999 et Duhart-Milon 1996. Nous disons en riant que ceux qui les ont faits étant à notre table, les vins sont forcément excellents et en fait ils le sont. Le Issan est bien agréable alors que le Duhart Milon est strict comme un clergyman. Leurs aînés les suivent peu après, Issan 1989 et Duhart Milon 1989. L’épanouissement est spectaculaire et ces deux vins sont manifestement fort bons. Servis longtemps avant que le plat n’arrive et contingentés par un serveur qui refusait de faire ce que veut dire son nom, c’est-à-dire servir, ces deux vins agréables eurent un goût de trop peu sur une viande délicieuse. J’attendis pour la finir qu’on commence à servir la série de prestige.
Imaginez cinq verres en cercle devant vous (la photo vous y aide). Cinq vins rouges. Ce sont : Margaux 1983, une délicatesse, un charme redoutable. Mouton-Rothschild 1982, une structure d’une rare précision, un vin de grande définition. Lafite-Rothschild 1979 en magnum, servi un peu frais et d’une année plus austère, on reconnaît Lafite, mais un Lafite discret. Château Latour 1978, un prodige de distinction et de raffinement. Des journalistes avaient voulu créer une sensation en se demandant si le vin de Latour serait représenté car son propriétaire n’est pas véritablement l’ami du tycoon qui nous reçoit. C’eût été une faute de goût de ne pas l’inclure en ce jour. Je suis sûr que la question ne s’est même pas posée. Haut-Brion 1975 en magnum, un nez inimitable d’un raffinement unique. Mais en bouche une petite déception que ne connaîtront pas des tables voisines. En d’autres circonstances, j’aurais délivré un classement de ces cinq vins. Je l’ai d’ailleurs fait sur l’instant. Mais ne serait-il pas convenable de ne pas les classer ce jour là ? Avoir en face de soi cinq vins de génie, n’est-ce pas un cadeau qui ne se divise pas. Ils furent grands, tous ensemble. J’aurais évidemment préféré les avoir sur la viande plutôt que sur un fromage. Mais qu’importe !
L’orchestre berçait nos émerveillements et soudain le ton se fit impératif. Une armée de cinquante serveurs, chacun portant une bouteille de Yquem 1967 pourfendit les allées. Les flacons jetaient des ors plus beaux les uns que les autres. Un orange profond et des variations de l’un à l’autre. Quand l’armée fut en place, un feu d’artifices perça le ciel pour ponctuer cet événement impensable : servir lors d’un même dîner cinquante bouteilles d’Yquem 1967, le plus grand Yquem depuis 1950.
La différence incroyable qu’il y a entre Yquem et ses cousins du précédent service, c’est qu’on ne se pose aucune question. Pour le Lafite, pour le Haut-Brion on peut se demander : est-il en forme, est-il à maturité, se montre-t-il sous son bon jour ? Avec Yquem, pas de ces questions. Il est parfait, idéal en toutes circonstances. Et ce soir il est éblouissant. Alors que les fruits rouges sont proscrits, voilà que des fraises des bois légères, grâce à une gelée délicieuse et adaptée, s’offrent le luxe d’embellir Yquem. Quel tour de magie de Michel Trama ! La crème de l’étage du dessous plaisait aussi à l’Yquem qui bouda la mangue au coulis trop sucré.
Raffinement suprême, quand le crépitement du feu d’artifices cessa, à travers le nuage gris qui retombait, le château fut percé par l’éclairage de toutes les fenêtres, d’un ton orange strictement de la couleur du Yquem 1967. Si c’était voulu, c’est un magistral clin d’œil. Eblouis par les saveurs intenses de ce sublime repas on cherchait autour de soi avec qui partager ses impressions. Michael Broadbent était tout sourire, Philippine de Rothschild était aux anges. Une coupe de Dom Ruinart rosé 1990 allait préparer le retour vers nos voitures dans des allées où des torches remplaçaient les rosiers qui ponctuent les rangs de vignes.
De tout cet émerveillement, le collectionneur que je suis retiendra surtout les cinquante Yquem 1967. Mais, déguster ensemble cinq premiers grands crus classés, comme le suggère la photo à laquelle il ne manque que la palette des parfums, est aussi une grande rareté. La chaleur des rencontres de gens passionnants est la cerise sur le gâteau de cet événement inoubliable.
Un nouveau dîner de wine-dinners m’attendait. C’est le cœur rempli de toutes ces merveilles que je revins à Paris, heureux de cette chance d’avoir vécu le prestige du vin de Bordeaux magistralement honoré.

Garden party à Pichon Longueville Comtesse de Lalande samedi, 18 juin 2005

Nous partons vers la garden-party organisée au Château Pichon Longueville Comtesse de Lalande pour les 80 ans de May Eliane de Lencquesaing. Le thème est : chapeaux à fleurs. Des femmes ravissantes, aux bibis fleuris, égayent le magnifique jardin du château. Des mimes en échasses, bigarrés et insolites, une abeille, un paon, une beauté bleue ou une femme déguisée en vilaine botte de blé (on est encore dans le Magicien d’Oz) surgissent des buissons pour se faire admirer. Des stands aux trésors culinaires tentants malgré l’infernale chaleur, des numéros d’artistes à tous les bosquets. Une jolie trapéziste éprise d’amour pour son ara. Tout fleure bon la fête campagnarde au faste infini. Là-dessus, de très agréables champagnes et parmi de nombreux vins j’ai goûté le Pichon Longueville Comtesse de Lalande 1993, servi en magnum, fort agréable à boire et le 1996 à la saine et belle structure. Le soleil était de plomb, la chaleur d’un mois d’août transposée en juin portait plus à se soûler d’eau que des vins délicieux servis à profusion. Une belle chorale de jeunes enfants, dont j’observais avec amusement qu’elle chante et vibre au strict diapason de la personnalité de sa conductrice, un pianiste américain aux doigts agiles à la Jacques Loussier et à la gouaille de bateleur, les discours sobres des petits enfants de May-Eliane ponctuèrent une fête splendide et généreuse où le tout Bordeaux du vin et hors du vin, des artistes verriers et amis étrangers, se pressaient pour fêter une merveilleuse femme au dynamisme inépuisable.

visite à l’Eglise Clinet vendredi, 27 mai 2005

L’hôtel de Plaisance à Saint-Emilion est toujours charmant. J’ai une chambre dont la terrasse est ouverte sur la vallée. De toutes parts je ne vois que de la beauté. Le service est parfait et le petit déjeuner d’un raffinement poussé. A signaler.
Visite à Eglise-Clinet. Manifestement, il n’y a aucune envie de nous séduire. Les tableaux de l’épouse du maître des lieux créent une ambiance survoltée. On nous fait goûter plusieurs vins extrêmement modernes avant d’avoir le 2004 du grand vin, plutôt agréable, même s’il est dur à boire. J’apprends peu après que le magnum de 1996 nous a été facturé à un prix coquet. Ce voyage aura montré des générosités diverses.
Nous déjeunons dans un petit bistrot sympathique à Saint-Émilion et je conduis trois ou quatre fidèles chez un vigneron qui m’avait vendu quelques pépites (bulletin 136). Ils profiteront de bonnes aubaines sur des 1929, 1949 et 1947 de très grands vins à des prix inconnus aux USA.