Dîner avec des amis le jour le plus long samedi, 21 juin 2014

Les ouvriers rassemblés pour un barbecue de fin de chantier ont été six fois plus attirés par le Pibarnon rosé que par le rouge. Il restait deux rouges ouverts. J’appelle des amis proches pour les inviter à dîner le lendemain.

L’apéritif se prend avec le Champagne Salon 1999. Cela fait un an que je n’avais pas goûté ce millésime de Salon et je constate avec plaisir que le champagne s’est épanoui et offre une belle personnalité. Vineux, fort, il m’impressionne par sa profondeur. Il passe en force dans le palais et laisse une trace profonde et persistante. Confronté à la viande de bœuf Cecina de Léone, il se place bien devant cette viande forte. Il devient romantique lorsqu’il est associé à de l’andouille.

J’ouvre des pots d’anchois au goût intense et très salé. Le champagne s’adapte merveilleusement bien. Asséché assez vite, il est doublé.

La chair des pintades est très marquée et le Château de Pibarnon Bandol rouge 2000 virevolte de son charme méditerranéen. Garrigue, romarin, poivre intense, concentration, force pénétrante, tout est là pour convaincre. C’est un vin charpenté et de plaisir.

Sur un camembert Jort de compétition affiné idéalement, le vin nous entraîne dans une ronde folle.

Le Crumble aux abricots assez acides nous fait quitter le territoire des vins. Le jour le plus long de l’année n’a pas été pour nous la fête de la musique mais celle de grands vins.

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Dîner au restaurant Hiramatsu mardi, 27 mai 2014

Dîner au restaurant Hiramatsu. Arrivé en avance j’ai le temps de consulter la carte des vins riche et intelligente. Le soir le menu est déjà tracé, avec le choix possible entre un dîner à cinq ou à neuf plats dans lesquels on compte l’amuse-bouche et le pré-dessert. Le plat principal est proposé avec deux variantes. Le vin que j’ai choisi est le Champagne Laurent Perrier Grand Siècle dont le très sympathique sommelier – qui m’a fait visiter la cave bien fournie – me dit qu’il a quatre à cinq ans de cave. C’est cette particularité qui a entraîné le choix de ce vin.

L’amuse-bouche est d’une poudre de petits pois qui arrive trop glacée mais qui est goûteuse. Les asperges sont très bonnes, le rouget est succulent et les desserts sont gourmands, avec de jolies évocations de caramel. Cette cuisine est rassurante, experte, et comme la décoration du lieu est très apaisante, on se sent bien. Le personnel est d’une amabilité particulière. C’est un endroit à recommander.

Le Champagne Laurent Perrier Grand Siècle est très romantique. J’aime ses évocations de fleurs blanches et ses subtilités discrètes. Ce n’est pas un champagne puissant, c’est un champagne raffiné. Il est très agréable et gagnerait encore s’il avait quelques années de cave de plus. Hiramatsu, restaurant courtois et raffiné est une table que je devrais fréquenter plus souvent.

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Une élève de Cordon Bleu commente les vins de l’académie des vins anciens dimanche, 25 mai 2014

Béatrice, l’une des deux élèves de Cordon Bleu, m’a envoyé ses commentaires sur les vins qu’elle a bus lors de la séance du 22 mai 2014. Elle était à la table du groupe 1. Je les mets bien volontiers sur ce blog :

Champagne le Brun de Neuville Brut sans année 

La bulle est fine et vive, arômes de brioche et d’amande fraiches, l’attaque en bouche est généreuse et tapisse le palais de gourmandise. Il fut une excellente mise en bouche.

 Jéroboam Champagne Pommery & Gréno 1943* La robe ambrée a perdu son effervescence, le premier nez sur des arômes tertiaires de pommes à surmaturité, de noix, l’aération à rendu le bouquet de plus en plus intense et complexe (j’ai conservé mon verre plus de 4 heures) vers des arômes délicats de fruits secs, de raisins de Corinthe d’abricots, et de figues. A ma grande surprise la bouche est ample et la structure acide toujours là. Le milieu de bouche est généreux, les bulles invisibles à l’œil crépitent encore et apportent de la fraicheur, la finale est longue et persistante sur des arômes agréables ranciotés. Voyage au cœur de l’histoire, 1943, la France n’est pas encore libre (un champagne de femmes sans doute …), maman venait d’ouvrir les yeux.

Meursault Patriarche 1942.

Je suis servie en dernier, le dépôt s’écoule dans mon verre …Qu’en sera t-il? La robe jaune paille aux reflets ambrés est encore cristalline. Le premier nez est incroyablement intense sur des arômes d’amandes et noisettes grillées, la bouche est encore vive, la structure a perdu de la chair mais l’acidité se défend encore et prolonge le plaisir de la dégustation ! Je suis partie à 23H30, il embaumait encore …Sacré « Meursault ».

Muscat sec de Kelibia Tunisie # 1980* 

Quelle surprise, moi qui suis alsacienne ! Une flute de Muscat Tunisien 1980! La robe est dense, couleur papaye aux reflets tuilés, le nez est puissant et net sur des arômes de fruits exotiques confiturés avec une note mentholée, la bouche est ronde avec une certaine amertume, la finale assez courte. J’ai respiré ce nez toute la soirée, et toujours fidèle il ne m’a jamais quitté ! Quelle persistance, une très belle découverte.

Vin du Château Katsunuma Japon 1938.

Ce vin m’interpelle ….Japon 1938 ? La robe est encore bien intense couleur framboise écrasée, peu dégradée pour un vin de 76 ans … le nez est incroyablement puissant sur des arômes d’encens, d’épices cannelle, girofle, et cardamome, la bouche est ronde et la chair encore pulpeuse. Ce vin n’a cessé de me surprendre toute la soirée.

 Varennes Franc de Pied Chinon Domaine Charles Joguet 1989 La robe est encore bien intense rubis profond, le premier nez est encore fermé quelques notes de poivre noir apparaissent cependant, la bouche est tendue les tannins sont fondus mais toujours présents. Deux heures s’écoulent …le vin s’est ouvert, les notes de fruits noirs compotés se sont réveillés !Il faut toujours être patient.

Le Château Carbonnieux rouge 1961* Un vieux Carbonnieux de 1961 ….. habillé d’un manteau « couleur du passé » m’a livré tout l’orgueil qui lui restait mais je l’ai trouvé malgré tout bien fatigué.

 Château Fougueyrat Saint Emilion 1961 Même Millésime sur l’autre rive, avec plus de chair et d’élégance.

 Château Ausone 1953* Dommage qu’il fut bouchonnée, ce flacon m’a néanmoins fait rêver, quelques heures…..Nous nous presque rencontrés !

Château Canon Grand Cru classé Saint Emilion magnum 1955* la robe grenat est encore intense, le nez puissant, giboyeuse, de sous-bois a vraiment fière allure, la bouche n’a pas à rougir, elle est ronde et toujours généreuse l’équilibre est encore au rendez-vous.

Vosne-Romanée Camille Giroud 1949

Je suis déjà surprise par la couleur de la robe …65 ans …Encore intense, grenat au reflets tuilés, le bouquet m’étonne encore plus, des notes de cerises si caractéristiques d’un jeune pinot noir ? l’aération complexifie les arômes, humus, feuilles d’automne apparaissent peu à peu, la bouche est généreuse et délicate, la structure des tannins soyeuse, la finale est longue et racée, quelle chance d’avoir dégusté une telle merveille !

Le Château de Beaucastel Chateauneuf-du-Pape rouge 1959 est une merveille. Je partage cet avis, un vrai cadeau, souvenir fixé dans ma mémoire pour longtemps, je n’ai pas manqué de remercier la personne qui avait apporté ce merveilleux flacon !

 Côte Rôtie Brune & Blonde Chapoutier 1955, Les Côtes du Rhône à l’honneur, ce soir ….Micaschistes ou Artzel, qui des deux sera le mieux nous restituer ce vieux millésime? Encore concentrés et puissants, la Syrah s’exprime …Le terroir aussi, j’ai cependant une préférence pour la Côte Brune pour sa longueur en bouche et son nez de poudre à canon couplé à des notes de poivre noirs. J’ai pris un cliché de ces deux bouteilles je ne manquerai pas d’en faire l’éloge au Domaine Chapoutier la semaine prochaine!


22ème séance de l’académie des vins anciens vendredi, 23 mai 2014

La 22ème séance de l’académie des vins anciens se tient au restaurant Macéo où nous avons nos habitudes. Nous serons 34 au dîner, avec des fidèles, beaucoup de nouveaux dont deux vignerons, et deux élèves de l’école « le Cordon Bleu » où j’ai fait récemment une conférence-dégustation.

A 16h30, je commence l’ouverture des vins et certaines bouteilles me donnent tant de soucis qu’à 19h, heure d’arrivée des premiers académiciens, il me reste encore plusieurs bouteilles à ouvrir. Trois fois le bouchon du vin est tombé dans le liquide avant même que je ne touche à la bouteille. Il s’agit d’accidents de parcours entre la cave et le lieu du dîner. De nombreux bouchons sont venus en charpie.

Comme je l’ai fait lors d’une précédente réunion, j’ai apporté beaucoup plus de vins que je n’aurais dû, 16 flacons représentant l’équivalent de 22 bouteilles, parmi lesquelles des bouteilles sont de bas niveaux. De ce fait, il est logique que certaines m’aient inspiré de fortes craintes que j’ai évoquées dans mon discours d’introduction de la séance : les deux Meursault 1942 et la Mission Haut-Brion 1943.

Nous sommes répartis en deux tables de 17 personnes et chacun aura accès à 22 vins, ce qui est une chance toute particulière. Voici les vins dans l’ordre de service, les vins dont l’année est suivie d’une astérisque étant mon apport :

Les vins du groupe 1 : Champagne le Brun de Neuville Brut – Jéroboam Champagne Pommery & Gréno 1943* – Meursault Patriarche 1942* – Muscat sec de Kelibia Tunisie # 1980* – Vin du Château Katsunuma Japon 1938 – Varennes Franc de Pied Chinon Domaine Charles Joguet 1989 – Château Carbonnieux rouge 1961* – Château Fougueyrat Saint Emilion 1961 – Château Fougueyrat Saint Emilion 1947 – Château Ausone 1953* – Magnum Château Canon Grand Cru classé Saint Emilion 1955* – Volnay Les Caillerets Tête de Cuvée Félix Clerget 1971* – Volnay Ph. Meunier Négociant 1949* – Vosne-Romanée Camille Giroud 1949 – Corton Ph. Bouchard 1937 – Moulin à Vent Château du Moulin-à-Vent 1967 – Château de Beaucastel Chateauneuf-du-Pape rouge 1959 – Côte Rôtie Brune & Blonde Chapoutier 1955 – Rioja Viña Real – Bodegas CVNE Haro 1964 – Royal Kébir Frédéric Lung années 40 – Château Closiot Sauternes 1929 – Fine Champagne Château de Flaville # 1920.

Les vins du groupe 2 : Champagne le Brun de Neuville Brut – Jéroboam Champagne Pommery & Gréno 1943* – Château Carbonnieux blanc 1996 – Meursault Patriarche 1942* – Château La Mission Haut-Brion 1943* – Château Talbot 1975 – Château Phélan-Ségur 1975 – Château Nénin 1975 – Cos d’Estournel 1970 – Château Ausone 1953* – Magnum Château Canon Grand Cru classé Saint Emilion 1955* – Volnay Les Caillerets Tête de Cuvée Félix Clerget 1971* – Volnay Les Caillerets Tête de Cuvée Félix Clerget 1971* – Bourgogne Beaunes Grèves Chanson 1964 – Pommard Ph. Bouchard 1937 – Pommard Epenots Moingeon-Ropiteaux Négociant 1938* – Vosne Romanée Le Roy Négociant 1949* – Corton Clos du Roi Emile Chandessais 1957 – Varennes Franc de Pied Chinon Domaine Charles Joguet 1996 – Rioja Viña Tondonia – Bodegas Lopez de Heredia Haro 1954 – Château de Malle Sauternes 1979 – Fine Champagne Château de Flaville # 1920.

Par un hasard récurrent que j’ai du mal à expliquer, la table où je suis, la numéro 1, compte un nombre beaucoup plus important de femmes. C’est sans doute un genre dont il faudra que j’étudie la théorie. Je n’ai pas pris de notes pendant ce dîner ce qui veut dire que ma mémoire n’a retenu que des esquisses et des émotions.

L’apéritif débute par le Champagne le Brun de Neuville Brut sans année dont l’un des membres fidèles est propriétaire. Il est simple, facile et sans histoire et permet de croquer des gougères tout en bavardant avec les académiciens.

Chacun ayant repéré sur les listes que j’avais apporté un Jéroboam Champagne Pommery & Gréno 1943* on me presse de le faire servir à l’apéritif. Le bouchon ne donne aucun pschitt, la couleur est d’un ambre discret. Les premières gorgées qui me sont servies sont marquées par une amertume qui n’empêche pas de percevoir que le vin est grand. L’amertume se dissipe et l’on prend conscience que la matière vineuse de ce champagne est superbe. Il est élégant et je suis heureux car tout le monde l’apprécie, alors que le monde des champagnes anciens est un monde particulier qu’il n’est pas facile d’apréhender.

Le menu préparé par le restaurant est : carpaccio de lotte fumée / gaspacho de concombre au lait de coco / la gambas craquante, grattée de condiment exotique / romsteak de Salers façon tournedos, galette de pommes de terre et fèves / fromages (apportés par des académiciens généreux) / panna cotta de fruits rouges et fleur d’hibiscus.

Nous passons à table. Je suis persuadé que le Meursault Patriarche 1942* sera mort. A ma grande surprise, non seulement son nez est engageant, riche de beaux fruits, mais le goût est aussi très précis. Ce n’est pas un vin éblouissant mais il est agréable à boire et tient bien la route.

Pour le Muscat sec de Kelibia Tunisie # 1980* je n’ai absolument aucun repère. Ce vin est énigmatique mais délicieux. Je ne vois aucun vin qui pourrait lui ressembler. Il y a un peu de barbe d’artichaut, de foin, et le charme agit. J’adore des vins inclassables qui offrent de si belles surprises. Il y a de beaux fruits jaunes dans ce vin.

En matière de surprises, nous sommes servis, car une amie journaliste japonaise avait reçu d’un vigneron japonais une bouteille de deux litres de l’année de naissance du vigneron. Celui-ci a reconditionné le vin dans des bouteilles de 75cl récentes, appliquant juste une étiquette sur la bouteille fermée d’un bouchon neutre. Le Vin du Château Katsunuma Japon 1938 est une énigme totale. Pendant de longues minutes, je ne peux pas croire que ce vin aurait plus de 75 ans. Il est d’un rouge d’une jeunesse extrême fruité comme un gamin. Là aussi la palette de saveurs étranges et indescriptibles est très fournie et sans fin. Ce vin me plait énormément car il amène dans l’inconnu. L’amie ne croyait pas que le vin serait bon. Elle est toute émue de voir que ce vin, fort symbole pour elle, est au rendez-vous. Nous avons eu coup sur coup deux surprises extrêmes, diablement excitantes.

Le Varennes Franc de Pied Chinon Domaine Charles Joguet 1989 est un vin de la propriété de ma voisine de table. L’attaque est de pur charme. Le vin a une belle charpente et une complexité remarquable. C’est un vin qui fait plaisir à boire, rassurant par sa solide structure. La vigneronne a aussi apporté un 1996 affecté au deuxième groupe. J’ai pu le goûter et c’est un vin très canvaincant et -forcément – rabelaisien.

On me fait goûter le Château La Mission Haut-Brion 1943* de l’autre table que j’avais annoncé probablement mort et à ma grande surprise, il est comme monsieur de la Palice, encore bien vivant.

Le Château Carbonnieux rouge 1961* est un vin encourageant, car il a une matière très riche et très dense, à la limite de la torréfaction mais le charme prime. Cette bouteille avait un niveau très bas mais ne souffre pas de ce défaut, tant le vin est solide.

Le Château Fougueyrat Saint Emilion 1961 est de la même année que le Graves. Il a plus de grâce et de subtilité que le Carbonnieux.

Nous allons diverger autour de la table pour dire si nous préférons le Château Fougueyrat Saint Emilion 1947 ou bien le 1961 qui le précédait. Beaucoup vont aimer le 1947. Je diffère, car le 1947 est exactement ce qu’on attendrait d’un 1947 mais il est trop dans la ligne du parti, alors que le 1961 est un peu plus canaille pour mon palais.

L’aventure du Château Ausone 1953* se termine avant de commencer car le vin est bouchonné. Je n’ai pas eu d’information sur l’autre bouteille de ce vin que j’avais apportée pour le groupe 2.

Le Château Canon Grand Cru classé Saint Emilion magnum 1955* est d’une année que j’adore. Le vin sent assez bon, il est assez agréable à boire mais je ne retrouve pas le charme enthousiasmant d’un Canon d’une grande année. C’est dommage et je n’ai pas su ce qu’a donné l’autre magnum que j’avais apporté.

J’avais fourni trois bouteilles du Volnay Les Caillerets Tête de Cuvée Félix Clerget 1971* dont deux pour le groupe 2. J’avais été agréablement surpris des parfums des trois bouteilles. La notre est profondément bourguignonne, avec des accents que l’on trouve dans les vins du domaine de la Romanée Conti : la rose et les sel. J’adore ces vins bourguignons simples et authentiques.

Le Volnay Ph. Meunier Négociant 1949* ne m’a pas laissé un réel souvenir, alors que le Vosne-Romanée Camille Giroud 1949 est généreux, joyeux, très bourguignon encore une fois. Il est dans une plénitude agréable.

Le Corton Ph. Bouchard 1937 est désespérément mort, mais son apporteur, et c’est sympathique, le trouvera délicieux. Comme quoi tous les goûts sont dans la nature. J’aime ces optimismes.

Le Moulin à Vent Château du Moulin-à-Vent 1967 est de la propriété du jeune vigneron qui me fait face à table, vin fait par sa famille. C’est un beau Moulin à Vent, encore très jeune et de belle personnalité mais je le trouve un peu perlant, ce que ne perçoivent pas les deux vignerons de la table.

Le Château de Beaucastel Chateauneuf-du-Pape rouge 1959 est une merveille. C’est l’archétype de ce que l’on vise à l’académie des vins anciens. Quelle richesse, quelle ampleur de goûts. C’est le Beaucastel idéal, celui que l’on rêve de boire. Ce vin est authentiquement rhodanien mais a aussi des accents bourguignons de bon aloi.

Le match va être dur avec la Côte Rôtie Brune & Blonde Chapoutier 1955, vin lui aussi merveilleux. Selon les gorgées, lorsque l’on passe de l’un à l’autre, on va préférer tantôt l’un, tantôt l’autre. Ma préférence changera et se fixera sur la Côte Rôtie, mais la différence avec le Châteauneuf est d’un cheveu.

Tout se complique lorsqu’entre en scène le Rioja Viña Real – Bodegas CVNE Haro 1964 qui a une aisance et une facilité où se mêle la complexité d’un vin de soleil. Il est peut-être un peu moins subtil que les vins du Rhône, mais ça se joue à la nième décimale !

Celui qui va régler tous les problèmes de classement, c’est le Royal Kébir Frédéric Lung années 40. L’ami qui a apporté ce vin sait que je suis un inconditionnel des vins algériens de Lung. Pour mon goût, il coiffe au poteau ses trois prédécesseurs. Tout le monde dans notre groupe applaudit au tir groupé de ces quatre vins exceptionnels. Le Royal Kébir a une aura extrême, une majesté démocratique et se boit comme un vin de pur plaisir. Je l’ai encore en bouche en écrivant.

Le Château Closiot Haut-Barsac 1929 est incroyablement foncé, plus qu’un caramel foncé. Le nez évoque les pomelos. Mais fort curieusement, ce nez ne me donne pas envie de le goûter, sans doute parce que je voudrais continuer à passer d’un verre à l’autre pour me repaître des quatre vins rouges sublimes. C’est donc plus tard que j’ai goûté ce sauternes agréable et sans grande complexité.

La Fine Champagne Château de Flaville # 1920 a un nez fort agréable. Le goût est un peu éventé mais l’alcool se goûte avec plaisir.

La cuisine a été de bonne qualité mais a péché sur la viande de Salers trop ferme. Le service est toujours aussi motivé et efficace.

Si je dois classer les vins, je ferai une mention spéciale aux deux vins les plus originaux : 1 – Vin du Château Katsunuma Japon 1938, 2 – Muscat sec de Kelibia Tunisie # 1980*.

Sur le plan du plaisir pur, ce sera : 1 – Royal Kébir Frédéric Lung années 40, 2 – Côte Rôtie Brune & Blonde Chapoutier 1955, 3 – Château de Beaucastel Chateauneuf-du-Pape rouge 1959, 4 – Rioja Viña Real – Bodegas CVNE Haro 1964, 5 – Jéroboam Champagne Pommery & Gréno 1943*.

L’académie des vins anciens a tenu une fois de plus une réunion passionnante avec des vins de grande qualité. Les quelques vins défaillants font partie de la démarche et nous devons viser d’aller toujours plus haut dans la recherche de vins de légende à partager, puisque c’est l’esprit de l’académie.

Vins du Groupe 1 :

Champagne le Brun de Neuville  Brut

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Jéroboam Champagne Pommery & Gréno 1943*

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Meursault Patriarche 1942*

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Muscat sec de Kelibia Tunisie # 1980*

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Vin du Château Katsunuma Japon 1938

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Varennes Franc de Pied  Chinon Domaine Charles Joguet 1989

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Château Carbonnieux rouge 1961*

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Château Fougueyrat Saint Emilion 1961

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Château Fougueyrat Saint Emilion 1947

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Château Ausone 1953*

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Magnum Château Canon Grand Cru classé Saint Emilion 1955*

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Volnay Les Caillerets Tête de Cuvée Félix Clerget 1971*

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Volnay Ph. Meunier Négociant 1949*

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Vosne-Romanée Camille Giroud 1949

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Corton Ph. Bouchard 1937

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Moulin à Vent Château du Moulin-à-Vent 1967 (venant du domaine, sans étiquette)

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Château de Beaucastel Chateauneuf-du-Pape rouge 1959

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Côte Rôtie Brune & Blonde Chapoutier  1955

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Rioja Viña Real – Bodegas CVNE Haro  1964

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Royal Kébir Frédéric Lung années 40

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Château Closiot Sauternes 1929

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Fine Champagne Château de Flaville # 1920

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Vins du grouper 2 :

Champagne le Brun de Neuville  Brut

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Jéroboam Champagne Pommery & Gréno 1943*

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Château Carbonnieux blanc 1996

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Meursault Patriarche 1942*

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Château La Mission Haut-Brion 1943*

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Château Talbot 1975

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Château Phélan-Ségur 1975 (réel 1974)

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Château Nénin 1975

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Cos d’Estournel 1970

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Château Ausone 1953*

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Magnum Château Canon Grand Cru classé Saint Emilion 1955*

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Volnay Les Caillerets Tête de Cuvée Félix Clerget 1971*

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Volnay Les Caillerets Tête de Cuvée Félix Clerget 1971*

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Bourgogne Beaunes Grèves Chanson 1964 (appellation illisible)

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Pommard Ph. Bouchard 1937

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Pommard Epenots Moingeon-Ropiteaux Négociant 1938*

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Vosne Romanée Le Roy Négociant 1949*

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Corton Clos du Roi Emile Chandessais 1957

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Varennes Franc de Pied  Chinon Domaine Charles Joguet 1996

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Rioja Viña Tondonia – Bodegas Lopez de Heredia Haro 1954

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Château de Malle Sauternes 1979

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Fine Champagne Château de Flaville # 1920

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les bouchons

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les plats (dessert sans photo)

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Dîner de vins jeunes et vieux au restaurant Laurent dimanche, 18 mai 2014

Il y a trois ans j’avais partagé un déjeuner avec un musicien canadien et son père, grands amateurs de vins. Nous nous retrouvons à dîner au restaurant Laurent avec eux et un couple de canadiens que je ne connais pas. Après quinze jours du mois de mai qui ont fait mentir le proverbe : « en avril ne te découvre pas d’un fil et en mai fais ce qu’il te plait », dîner dans le magnifique jardin du restaurant, c’est un privilège dont on jouit avec empressement.

Mike apporte des vins récents. Je pourrais limiter mon apport à une bouteille, mais j’ai envie de puiser dans les bas niveaux de ma cave. Avec trois bouteilles, j’espère qu’il y en aura une bonne et si ce n’est pas le cas, je compléterai avec un vin de la carte du restaurant. Mes vins ont été livrés il y a trois jours et à 17h30, je les ouvre. L’Evangile 1955 a un bouchon qui vient en pièces détachées mais heureusement offre un très joli parfum prometteur. Ça démarre bien. Je saisis le Vosne Romanée 1949 et je vois que le bouchon flotte dans le liquide. C’est certainement le transport de ma cave au restaurant qui a fait chuter le bouchon car j’avais inspecté les bouteilles en prenant les photos en cave et le bouchon tenait encore. Je carafe le vin et la couleur est rebutante. Le vin a toutes les chances d’être mort. Le Corton Clos du Roy 1929 a, lui aussi, un bouchon qui sort en charpie. Le bouchon est imbibé et de vilaine odeur. Le vin a une odeur peu aimable. Ce résultat me conduira à offrir à mes amis un vin de la carte.

Nous choisissons le menu de saison : salade de coques et petits pois, velouté glacé / homard rissolé dans ses sucs, jus coraillé, gnocchis et mousserons / morilles farcies, écume d’une sauce poulette au savagnin / pigeon à peine fumé et rôti, pissaladière de jeunes primeurs, sauce piquante / fromages / soufflé chaud au citron-basilic.

Le Champagne Pol Roger 2002 que j’ai commandé de la cave du restaurant est un champagne d’un confort extrême. Il est bien charpenté, équilibré, et n’offre que du bonheur. On se sent bien avec lui, de belle longueur, d’acidité maîtrisée, et de beaux fruits jaunes.

Le Criots-Bâtard-Montrachet domaine Blain-Gagnard 2008 est une magnifique surprise. Il sent la noisette, évoque des odeurs lactées, et envahit la bouche avec une générosité rare, associée à une grande finesse. C’est un vin très élégant et très abouti. On le mangerait presque, tant il est riche.

Lorsqu’on me sert les premières gouttes du Château L’Evangile Pomerol Hannapier & Peyrelongue 1955, je ressens une torréfaction qui pourrait gêner la dégustation. Mais en fait il s’agissait des premières gouttes et le vin s’est montré sous son meilleur jour. La couleur est d’un rouge foncé intense, le nez est profond et la bouche évoque la truffe, les fruits secs noirs. Sa longueur est belle. C’est un très beau vin.

A côté de lui le Clos de Vougeot Pierre Bourée Fils 1988 joue en dedans. Il est bien fait et j’aime beaucoup ce domaine, mais il ne s’exprime pas. Comme s’il était timide. Alors, il laisse la vedette au Bordeaux, à la fois sur le homard et sur les délicieuses morilles.

Nous devrions avoir maintenant trois vins rouges, mais j’annonce que le Vosne Romanée Clos du Roy, Leroy & Cie 1949 est désespérément mort. Evidemment, tout le monde veut vérifier. Deux seulement goûteront ce vin et confirmeront le diagnostic de mort. Une demi-heure plus tard, ce vin que je n’ai pas bu sentira le bouchon.

Sur le pigeon, nous allons goûter deux mêmes vins. Le Corton Clos du Roy, L.A. Montoy 1929 me fait une belle surprise, car il a complètement effacé les odeurs qui me faisaient douter. Il est magnifique et Lynn se découvre un amour pour les vins anciens car elle avait adoré l’Evangile et se régale de ce 1929. Il est riche, opulent et sa couleur est d’un noir profond bordé d’un cercle rouge au contact du verre. A côté de lui, le Corton Clos du Roy domaine Antonin Guyon 2010 a une couleur beaucoup plus claire. Le vin est joyeux dans sa jeunesse fruitée mais il semble souffrir du même mal que le Vosne Romanée, car il paraît simplet à côté de son aîné. Le 1929 est enthousiasmant, complexe, distribuant les saveurs et arômes avec générosité. Vin charnu d’une jeunesse rare.

Mike s’aperçoit que le liquoreux que nous allons boire est le même que celui qu’il avait apporté il y a trois ans. Le Kracher Welschriesling Nummer 11 Trockenbeeren Auslese 1998 n’a pas changé. Il a une robe dorée et attaque le palais par un sucre épais. Il est doucereux, assez monolithique même s’il est agréable. C’est le sucre qui tapisse le palais, et malgré ses 7,5° il en impose. Les évocations sont celles de thé.

A côté de lui c’est un Château Climens en 1/2 bt 2001. Le vin est encore étonnamment jeune mais lorsque l’on s’habitue à ce côté un peu brut de forge, il expose des subtilités et des complexités de fort bon aloi. Il montre à quel point l’année 2001 est une année propice aux liquoreux bordelais.

Comme la dernière fois, Mike sort une fillette déjà entamée d’un Whisky Duncan Taylor single malt 1968 mis en bouteille en 2004. Il est absolument délicieux, doucereux et légèrement sucré comme un Bourbon. Un grand plaisir.

Mon classement serait : 1 – Corton Clos du Roy Montoy 1929, 2 – Criots-Bâtard-Montrachet Blain-Gagnard 2008, 3 ex aequo : Champagne Pol Roger 2002, Château L’Evangile 1955 et Climens 2001.

Le menu du restaurant Laurent est remarquable. Ce fut un bien beau dîner.

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une deuxième étiquette est mise pour rendre plus lisible le nom du vin

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bouchon de l’Evangile 1955 et du Clos du Roy 1929

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method for opening old bottles lundi, 12 mai 2014

The pictures have been taken in chateau de Saran where the 100th dinner of wine-dinners was held.

There was a photographer who took these pictures. It is an opportunity to explain my method to open old bottles.

The pictures below show the tools that I use, consisting mainly in normal corkscrews used by sommeliers, and in long spirals which are the inside tool of manual screwpull.

When you pull out the upper part of the capsule, remember that some capsules (here Pétrus 1953) are pieces of art. Think of keeping them as a memory

I use the sommelier corkscrew to lift the cork by only 2 to 5 millimetres. You can see on the right the two spirals on the table.

It is important that the spiral stays in the centre of the cork. Turn it slowly. It will go inside the cork and the end of the spiral will go further, but will not touch the wine.

Jean Berchon, the director for communication and estates of the Moët & Chandon Group looks at me with a great attention

Once again, quietness is required

These pictures below are very important, as they show how I use my hands to lift, having only my left hand to help the right hand to pull. The right thumb pushes hard on my left hand, and my other fingers make a lateral move to pull.

While pulling on the cork of Pétrus 1953, I show that the cork will break into pieces and I will try to lift every piece. Which I did !

This tool called “ahso” (in French : “bilame”), is something that I do not use, because I am confident in this method of lifting in two times : 2 to 5 millimetres with the sommelier’s corkscrew, and then lifting the cork with a spiral.

The second spiral is ready to be used if, by lifting some pieces stick to the glass. They will come when they are pulled extremely slowly.

 

One could think : is it so important to work so carefully, with these two steps. Let us have a look.

I was not able to take the upper part of the capsule of Pétrus 1953 complete.

This is Margaux 1959

This is Romanée Conti 1972

Not the slightest piece of cork fell in the wine for each of the wines opened with this method.

dîner de 12 vins en « 9″ de 1899 à 2009 mercredi, 7 mai 2014

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Champagne Clos des Goisses Philipponnat 1979

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Riesling Preiss Henny 1949

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Vin du Jura blanc 1929

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Montrachet Domaine de la Romanée Conti 1999

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Domaine de la Citadelle Gouverneur de Saint-Auban Vin du pays de Vaucluse 2009

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Château d’Issan 1899

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Cos d’Estournel 1909

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Château Mission Haut-Brion 1919

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Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1939

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Richebourg Jérôme Buffon 1959

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Côte Rôtie La Turque Guigal 1989

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Château d’Yquem 1969

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181ème dîner de wine-dinners au restaurant Ledoyen avec des surprises de taille mercredi, 7 mai 2014

Le 181ème dîner de wine-dinners se tient au restaurant Ledoyen. J’avais voulu, pour une fois, faire un dîner à thème, alors qu’habituellement mes dîners n’ont pas de thème sauf un seul : faire un dîner cohérent dans le choix des vins avec une grande variété d’âges, de régions, et de statuts.

Pour ce soir, j’ai choisi de proposer toutes les années finissant par « 9″ de 1899 à 1999. Mais au moment de faire les photos des vins, j’ai trouvé que ce serait bien que l’année 2009 soit elle aussi représentée. Nous aurons donc douze millésimes en neuf de 1899 à 2009.

L’idée a plu à trois canadiens, un suédois et quatre français. Nous serons neuf pour douze vins.

J’arrive à 17h30 au restaurant pour ouvrir les vins. Deux parfums pourraient correspondre à des vins à problèmes, ceux du riesling 1949 et celui de l’Issan 1899. Cette séance d’ouverture m’a donné l’une des surprises les plus colossales rencontrées lors des séances d’ouverture. Voici ce qui s’est passé.

J’ouvre le Richebourg du domaine de la Romanée Conti 1939. Son parfum est si extraordinaire que je me dis : « le dîner est déjà réussi rien que par cela ». Car 1939 n’est pas une année qui figure dans les plus grandes. Si ce vin a une telle stature, c’est un miracle qui va rejaillir forcément sur l’atmosphère du dîner.

Le vin suivant qui est à ouvrir est un Richebourg Joseph Buffon Négociant-Eleveur 1959. Je sens le vin et immédiatement j’ai cette curieuse pensée : « ce vin est plus représentatif du domaine de la Romanée Conti que le Richebourg du domaine ». Ça me paraît curieux, mais je ne vais pas plus loin dans cette pensée. Comme je photographie chaque bouchon après ouverture, mon appareil vise le bouchon du 1959. Quelle n’est pas ma surprise de lire sur le bouchon : « Richebourg, domaine de la Romanée Conti 1958″. Le bouchon est bon et sain. C’est invraisemblable. Je téléphone à Aubert de Villaine et je commence par l’informer du Richebourg 1939 car je sais que c’est son année de naissance. Le vin que je décris par son odeur est si beau qu’Aubert me demande si par hasard ce ne serait pas un vin de la vigne originelle française non reconstituée, et il ajoute : je n’ai jamais vu une de ces bouteilles, si vous en avez une, c’est une rareté absolue. Je regarde sur le bouchon et je vois cette mention que confirmera l’étiquette : « vigne originelle française non reconstituée« , ce qui la différencie de la quasi-totalité du vignoble bourguignon, replanté de vignes d’origine américaine après le phylloxéra. Je pose ensuite la question du Richebourg Joseph Buffon qui a un bouchon de toutes beauté de la Romanée Conti avec le millésime 1958. Aubert de Villaine m’indique qu’il a bu des 1958 du domaine qui l’ont marqué par leur grâce, mais à l’époque il n’était pas en charge du domaine. Aussi il imagine que le négociant a acquis des 1958, les a étiquetés à son nom et a mis 1959 parce que c’est plus valorisant que 1958.

Tout excité, je fais sentir les vins aux membres du personnel du restaurant qui sont autour de moi, j’appelle mon épouse pour lui dire ces deux invraisemblables découvertes, celle de la vigne particulière du Richebourg 1939 et le fait qu’un troisième vin du domaine de la Romanée Conti va figurer à ce dîner. Je me répète à moi-même : « la chance sourit aux audacieux ». La suite des ouvertures, sans surprise se fait dans une atmosphère enjouée où mon cœur bat comme un tambour.

Les convives arrivent et je leur raconte ces incroyables découvertes et la chance que nous aurons avec un Richebourg du domaine de la Romanée Conti de plus et je signale les deux incertitudes sur le riesling et l’Issan.

Dans un petit salon du premier étage du restaurant Ledoyen, nous buvons un Champagne Clos des Goisses Philipponnat 1979 sur de délicieux petits amuse-bouche follement complexes. Christian Le Squer aime planter le décor par des prouesses techniques délicieuses. Le champagne a une couleur à peine foncée. La bulle est discrète et le champagne est d’une grande complexité. Il a un parfum diabolique et intense. On sent sa maturité et peut-être un peu plus qu’un 1979 ne devrait montrer. Mais le champagne est glorieux, ravissant par sa complexité, car il fait entrer dans le monde des champagnes d’esthètes.

Nous passons à table. Le menu composé par Christian Le Squer est le suivant : araignée de mer en coque glacée, jus de presse / asperges blanches, abricots, sauce hollandaise au vin jaune / homard bleu rôti, beurre blanc / tranche de bœuf, charbon de bois, girolles / caneton de Challans poudré d’amandes crues, mûres / toasts brûlés d’anguille, réduction de jus de raisin / croquant de pamplemousse cuit et cru.

Le premier vin servi est le Domaine de la Citadelle Gouverneur de Saint-Auban Vin du pays de Vaucluse 2009. Il est extrêmement puissant et riche de beaux fruits touchés par le soleil. Pour bien profiter de l’accord avec l’araignée subtile à souhait, il faut boire le vin par toutes petites gorgées car sinon il écraserait le crustacé.

Le Vin du Jura blanc 1929 se présente dans une bouteille de forme bourguignonne au verre très lourd et ancien qui n’a pas de capsule et porte seulement deux mots : « blanc » et « 1929″ sur deuxx petites étiquettes séparées. Il n’y a aucune indication de région ou d’origine. Si j’ai mis « Jura » sur le menu, c’est que j’ai acheté ce vin dans le Jura, au sein d’un lot de bouteilles anciennes disparates. Son originalité m’avait séduit. Son parfum m’avait enthousiasmé à l’ouverture et il est toujours aussi pénétrant. Il est tellement puissant qu’on croirait boire un Xérès, mais le goût de noix nous ramène au Jura. Plutôt que blanc, je dirais volontiers que c’est un jaune. Car il a toutes les caractéristiques d’un beau vin jaune puissant à la longueur infinie. Les maîtres d’hôtel me connaissent parfaitement. Quand ils ont vu que je faisais la grimace car la sauce qui accompagne les asperges ne convient pas du tout au vin, l’un d’entre eux est allé chercher un comté 42 mois affiné par Bernard Antony qui a créé un accord divin avec ce glorieux inconnu.

Ne sachant pas quand doit apparaître le riesling dont j’ai eu peur qu’il ne soit pas à la hauteur, je l’ai placé en même temps que le vin blanc le plus glorieux du repas. Le Riesling Preiss Henny 1949 m’est servi et je suis totalement surpris par son parfum exceptionnel qui est même beaucoup plus riche que celui de son impérial voisin. Le parfum est chaleureux, évoquant un vin assez doux et l’on imagine volontiers qu’il y a du botrytis dans ce vin même s’il est sec. Et le vin est chaleureux au point qu’il figurera en bonne place dans mon classement et aura même un vote de premier. Le riesling d’une pureté cristalline et d’un charme doucereux.

A côté de lui, le Montrachet Domaine de la Romanée Conti 1999 est un seigneur. Ce vin a un nez moins flatteur mais plus profond. Le vin est riche intense, avec une longueur extrême. On boit un vin qui envahit l’âme. Il est d’une complexité enthousiasmante. Et les deux vins cohabitent bien mais n’ont pas le support du plat beaucoup trop complexe pour eux. La chair du homard est superbe, mais les accompagnements ne plaisent pas au vin. Aubert de Villaine m’avait dit lors de notre conversation d’il y a quelques heures que ce vin est promis à un long avenir et fait partie des plus puissants qui soient. Son nez opulent évoquait la pâtisserie et le lait. Au moment de le boire son parfum est plus strict, le vin montrant une noblesse quasi inégalable.

Les trois bordeaux sont servis ensemble sur le bœuf délicieux, et de gauche à droite nous avons 1899, 1909, 1919, ce qui, convenons-en, est une situation assez exceptionnelle. Le Château d’Issan 1899 a un nez de cerise légèrement aigrelette ce que l’on retrouve en bouche, le vin ayant un beau fruit à l’attaque et un final un peu suret. Il n’entraîne pas un grand intérêt de ma part mais l’un des convives l’inclura dans son vote.

Le Cos d’Estournel 1909 avait le plus beau nez des bordeaux à l’ouverture, avec de beaux fruits rouges et noirs. Il s’est un peu assagi au service. Le vin a une belle structure, fringant malgré ses 105 ans. C’est un grand vin qui va cependant être éclipsé par le suivant.

Le Château Mission Haut-Brion 1919 correspond à ce que l’on nommerait un très grand vin. Il est tout simplement parfait. Il n’est pas hyper puissant, mais on ne peut pas imaginer qu’il pourrait être mieux que ce qu’il nous offre. Bien construit, noble, équilibré c’est un vin de haute stature, un peu comme l’Ausone 1919 qui m’avait tellement impressionné et enthousiasmé il y a vingt ans. La superbe viande s’accorde à merveille avec les bordeaux.

Le Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1939 est une absolue merveille.. J’aurais tendance à dire que malgré une année qui n’est pas au Panthéon, ce vin s’y inscrit. Il fait partie des meilleurs vins du domaine que j’aie pu boire. Le parfum est intense, la bouche est précise, profonde, noble, et la longueur est éternelle. Il a ce caractère particulier des vins pré-phylloxériques qui est d’avoir une longévité plus grande que les post-phylloxériques et une intensité plus marquée.

De ce fait, lorsque je goûte le Richebourg Jérôme Buffon 1959 qui est en fait un Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1958, je commence à penser que si le vin est du domaine, il n’y a pas que cela dans cette bouteille. Car le doucereux du vin ne correspond pas à l’image que j’ai du Richebourg du domaine. Mais le vin est particulièrement bourguignon avec cette absence totale de concession. C’est un vin brut, noble, extrêmement séduisant. La présomption de manque de pureté fait que je ne le mettrai pas dans mon vote alors qu’il sera dans celui du consensus, du fait de ses qualités généreuses. Le canard est absolument gourmand.

A l’ouverte, j’avais trouvé à la Côte Rôtie La Turque Guigal 1989 un nez étonnamment bourguignon. J’étais peut-être encore sur mon nuage. Il se présente maintenant comme un vin absolument parfait et totalement rhodanien. Dans un autre dîner il aurait la vedette. Quel beau vin charnu, joyeux et noble. Il forme avec l’anguille un accord diabolique. Je suis un amoureux fou de ce plat extraordinaire de Christian Le Squer, et la combinaison avec le vin est de pure anthologie. Démoniaque dirais-je, voire phénoménale.

Le Château d’Yquem 1969 est d’un bel or clair. Ce 1969 est particulièrement puissant. Le vin est parfait sans l’ombre du moindre petit défaut. Quel vin brillant ! Le dessert est délicieux, mais comme il est très froid, il faut attendre avant de boire l’Yquem qui fait partie des très solides Yquem.

Il est temps de voter. Le classement des douze vins est assez difficile, et je ne suis pas sûr que je voterais forcément de la même façon si on devait voter une deuxième fois. Nous notons cinq vins que nous avons préférés sur les douze. Un chose me fait toujours plaisir : onze vins sur les douze ont figuré dans au moins un vote. Celui qui n’a pas recueilli de vote est le 2009, non pas parce qu’il ne serait pas bon, mais parce qu’il est trop jeune dans un dîner de vins anciens. Quatre vins ont été choisis en numéro un : le Richebourg 1939 quatre fois, le Richebourg 1958 deux fois ainsi que la Côte Rôtie 1989 et le Riesling 1949 a été nommé une fois premier.

Le vote du consensus serait : 1 – Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1939, 2 – Montrachet Domaine de la Romanée Conti 1999, 3 – Château Mission Haut-Brion 1919, 4 – Côte Rôtie La Turque Guigal 1989, 5 – Richebourg Jérôme Buffon 1959 (DRC 1958).

Mon vote est : 1 – Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1939, 2 – Château Mission Haut-Brion 1919, 3 – Montrachet Domaine de la Romanée Conti 1999, 4 – Vin du Jura blanc 1929, 5 – Riesling Preiss Henny 1949.

Nous avons eu une chance rare d’avoir trois vins du domaine de la Romanée Conti et une Mission Haut-Brion de très haut niveau. Les plats les plus cohérents dans leurs palettes de goûts ont été exceptionnels pour les vins. L’asperge et le homard, traités de façon plus complexe ont eu du mal à cohabiter avec des vins très vieux, même si les plats sont très bons. Le menu a été de très haut niveau, avec un point culminant gastronomique qui est l’accord de l’anguille et de La Turque.

L’atmosphère était si plaisante avec ces amateurs de trois pays que nous sommes restés fort tard, personne ne voulant quitter la table. Le service du Ledoyen est toujours aussi attentionné. Ce fut un très grand dîner.

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bouchon du riesling 1949

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bouchon du Montrachet DRC 1999

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bouchon de lssan 1899 rebouché en 1999

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bouchon de Cos d’Estournel 1909

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bouchon de Mission Haut Brion 1919 rebouché en 1991

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bouchon du Richebourg DRC 1939

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bouchon du Richebourg Joseph Buffon 1959 qui est en fait un Richebourg DRC 1958

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les 2 Richebourg DRC

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DINER LEDOYEN 140507 2 001 DINER LEDOYEN 140507 1 001

amuse-bouche et les plats du dîner

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table en fin de repas

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Dîner à mon domicile avec Salon 1982 jeudi, 24 avril 2014

Mon fils étant de passage à Paris le dîner d’anniversaire s’impose à mon domicile. J’ai pris en cave une bouteille de niveau bas et dont l’étiquette est quasi illisible. On peut lire Bourgogne suggéré par quelques lettres puis « REUSES » très net. Ce pourrait donc être un Chambolle-Musigny Amoureuses comme celui de ce midi, mais plus vieux d’au moins un demi-siècle car la capsule le suggère. Probablement des années 20.

Le bouchon vient en charpie, éclaté en mille morceaux dont plusieurs tombent dans le vin, ce qui n’arrive que rarement. Nous goûtons le vin qui sent plutôt bon, mais le goût est trop dévié pour que nous ayons envie de poursuivre l’expérience.

Je vais chercher une Romanée Saint Vivant Pierre Jaeger négociant 1961. Le niveau dans la bouteille est très haut, la couleur est engageante et le parfum est superbe. Nous goûtons alors que mon fils n’a pas vu l’étiquette. Il suggère les années 80 ce qui montre la jeunesse de cette Romanée. En bouche, il y a une petite évocation de cerise, mais sans aucune acidité associée. Le vin est chaleureux et se régale d’être associé à une épaule d’agnelet et un gratin de pommes de terre. Le vin est gourmand, et s’accorde à merveille avec un camembert Jort de compétition. L’amertume du fromage titille le bourgogne.

Le Champagne Salon 1982 est une merveille. Sa couleur a des traces de thé. La bulle est fine et belle, le champagne pétille bien. En bouche, c’est la complexité vineuse qui frappe. Tout est élégance mais énigme, car il faut découvrir le message du vin. On dirait un parchemin antique dont il faut déchiffrer le texte. J’ai partagé beaucoup de 1982 de Salon avec mon fils et c’est une joie d’en goûter un nouveau qui délivre une palette d’émotions différente des autres, toujours au plus haut sommet de la hiérarchie des champagnes. Ce sont des fines tranches de mangue et framboises qui ont accompagné le Salon ainsi que de gourmands chocolat.

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Les vins du 179ème repas de wine-dinners mardi, 15 avril 2014

Champagne Henriot Cuvée des Enchanteleurs magnum 1996

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Château Léoville Las Cases 1945

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Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1967 (avec cette curieuse capsule de négoce)

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Chambertin Côtes Saint-Jacques vigneron inconnu 1923

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Grand Hermitage Chapoutier 1953 (n’a pas été utilisé pour ce repas, prévu en réserve)

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Château de Rayne Vigneau 1938

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Gewurztraminer Sélection de Grains Nobles Hugel 1976 du restaurant le Petit Verdot

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