Archives de catégorie : dîners ou repas privés

Déjeuner au Relais Plaza de l’hôtel Plaza Athénée lundi, 16 octobre 2023

Daniel est un anglo-saxon vivant à Dubaï qui est l’un des dirigeants d’un groupe qui possède des hôtels et des clubs dans beaucoup de pays dits émergents. Il anime les clubs et essaie d’offrir à une clientèle fortunée des événements hors du commun. Il m’a contacté pour étudier ce que je pourrais offrir à cette clientèle.

Nous avons rendez-vous au Relais Plaza. Lorsque j’arrive à l’hôtel Plaza je vois François Delahaye le directeur général de l’hôtel qui met quelques secondes à me reconnaître. Il me guide vers le Relais que je ne connaissais pas. Ce restaurant ouvert en 1936 est d’une décoration que j’adore de pur Art Déco. Un panneau mural au-dessus du bar représente Diane chasseresse. J’adore. Les assiettes ont aussi un design de grande beauté.

Sur la carte inspirée par Jean Imbert, je choisis un velouté de cèpes et un turbot. Daniel me laisse choisir les vins. Pour l’entrée, ce sera un Champagne Louis Roederer Collection 244 sans année fait de vins de la réserve perpétuelle créée en 2012, de vins de réserve allant de 2012 à 2018 et de vins du millésime 2019. Pour savoir sa composition entre les trois cépages de la Champagne il faudrait aller sur internet. Le sommelier me l’a chuchotée mais je l’ai oubliée. Ce champagne me plait beaucoup dans sa fraicheur et sa droiture. Il est un peu jeune pour mon palais mais tient sa place. Nous l’avons pris au verre.

Pour le turbot j’ai commandé, avec l’accord de Daniel qui m’invite, un Hermitage Jean-Louis Chave 2005. Je l’attendais un peu plus mûr et je me réjouis de sa jeunesse. Un Hermitage de Chave ce n’est que du bonheur, avec une belle richesse et une présence noble. C’est un grand vin.

Le dessert aux figues est très bon. Jean Imbert est un chef généreux dont les recettes copieuses s’adressent à des Gargantuas. Le cadre est rassurant et invite à revenir en ce lieu accueillant.

Nous avons exploré des pistes de collaboration pour des dîners dans des pays que je ne connais pas. J’adorerais de me lancer dans les aventures que nous avons évoquées. Daniel va dîner ce soir au restaurant gastronomique de Jean Imbert. Je lui ai suggéré de ne pas prendre le « grand » dessert, s’il veut rentrer chez lui vivant. Une bien agréable et prometteuse rencontre.

Visite de l’usine Amorim et déjeuner dans la maison de famille samedi, 7 octobre 2023

Carlos de Jesus de la société Amorim vient me chercher à l’hôtel Sheraton pour que nous allions visiter l’usine Amorim et comprendre comment se fabriquent les bouchons. L’usine est gigantesque. Je discute avec deux scientifiques qui étudient la structure et la chimie des bouchons pour arriver à une pureté absolue et j’en vois la concrétisation dans les opérations faites dans l’usine.

L’examen des lièges est incroyable. Les grandes feuilles de liège sont découpées en morceaux classés selon la qualité du liège. Toutes les imperfections sont détectées par des appareils qui voient, qui radiographient, et qui sentent même les lièges pour écarter ceux qui pourraient créer des goûts de bouchon. Chaque morceau de liège est donc sondé, en aspect, en profondeur et en odeur, et les tris successifs conduisent à des classes de qualités. La robotisation est impressionnante.

Quittant cette ruche industrielle nous nous rendons dans l’ancienne maison des ancêtres d’Antonio Amorim, d’une décoration raffinée, et nous nous rendons dans la grande salle d’exposition où l’on présente toutes les variétés de lièges et les phases de la fabrication et l’on peut voir une longue table basse de six mètres de long où sont exposés les plus de 4000 bouchons de ma collection, avec un panneau présentant qui je suis et un joli tableau des capsules que j’ai données. C’est beau et artistiquement fait.

Nous revenons ensuite dans la maison de famille où nous allons déjeuner avec des commerçants de la société. Les amuse-bouches d’apéritifs sont raffinés et les plats bien cuisinés, dont un poisson particulièrement bien cuit. Les vins que nous boirons sont un Quinta Nova de Nossa Senhora do Carmo Blanc de Noirs 2022, un Taboadella Encruzado Dâo blanc 2022 et un Taboadella Touriga Nacional Dâo rouge 2020.

Ce qui est manifeste pour moi c’est que les deux vins de 2022 affichent plus le fait qu’ils sont très jeunes que leurs propres qualités. Au contraire, le vin rouge de 2020 choisi spécialement pour moi, puisque j’aime le vin rouge avec le poisson, s’exprime fort élégamment, avec une belle subtilité.

La maison familiale permet que plusieurs groupes y déjeunent. Antonio Amorim déjeunait dans une autre salle.

la salle d’exposition

usine et laboratoire

déjeuner dans la maison de famille

Vol vers Porto et dîner dans un restaurant de poissons samedi, 7 octobre 2023

J’ai fait don de ma collection de bouchons et capsules à la société Amorim installée au Portugal qui est le plus grand fabricant au monde de bouchons de liège. A ma mort, cette collection aurait probablement disparu alors qu’au sein de cette société, elle va intéresser tous ceux qui veulent prendre conscience de la longévité des bouchons. Mes bouchons ont été transportés au Portugal et arrangés de façon très artistique au siège de la société où sont reçus tous les visiteurs. Je vais me rendre à l’inauguration de cette collection qui porte mon nom.

Allant vers Charles-de-Gaulle, puisqu’on ne parle plus de Roissy, je vois sur une pancarte, au moment où les routes se séparent vers les différents terminaux, « terminal 2
E : 30 minutes ». Or pour atteindre mon terminal il faut passer par ce terminal. Le chauffeur de taxi a un Plan B, comme on dit aujourd’hui, et fait un détour de plus de cinq kilomètres pour arriver au terminal souhaité.

Roissy est une ruche invraisemblable. Une application de mon téléphone compte mes pas. Elle me dira que dans les deux aéroports, Roissy et Porto, j’aurai fait cinq kilomètres. Car pour chaque étape d’enregistrement ou de contrôle des bagages, on fait la queue qui serpente comme en un labyrinthe. C’est ahurissant.

Je suis accueilli à l’aéroport par une charmante jeune femme qui travaille à la direction de la communication d’Amorim et m’accompagne jusqu’à l’hôtel Sheraton dont l’accueil est froid comme dans ces grandes organisations très professionnelles mais impersonnelles. Nous bavardons autour d’un Mojito plat et sans émotion, pour évoquer le programme de mon séjour.

J’apprends qu’Antonio Amorim, le président de la société éponyme, sera présent au dîner de ce jour, alors que le dîner officiel avec lui était seulement demain. Rien ne peut me faire plus plaisir.

Et j’ai trouvé quand même un côté humain à cet hôtel car ayant un problème de connexion informatique, un souriant Pablo m’a dit que je pourrais l’appeler à tout moment et qu’il viendrait m’aider.

Carlos de Jesus, directeur de la communication de la société Amorim me conduit près du port de Porto dans un quartier où fleurissent les restaurants de poissons. Le restaurant Gaveto ne paie pas de mine et la décoration intérieure est très simple. Mais de grands aquariums d’une présentation impeccable montrent qu’ici, le traitement des poissons est sérieux.

Nous sommes conduits à une table où nous rejoint Antonio Amorim tout souriant qui me dit : « cette table, c’est ma table » lorsqu’il vient en ce restaurant. Le propriétaire, Joao Carlos, arrive, me reconnaît, mais d’où, et me dit qu’il me suit sur Instagram et souhaite que l’on fasse une photo de nous deux à la fin du repas. L’ambiance est créée comme on le verra plus loin.

Antonio Amorim suggère que l’on prenne des crevettes, des gambas et des langoustes. Il me demande comment je souhaite la cuisson des langoustes. Je réponds : grillées pour s’accorder avec un vin rouge. Carlos et Antonio me regardent comme si je proposais un sacrilège mais acceptent mon choix.

Les plats sont simples mais gourmands. Le vin Porta dos Cavaleiros Reserva Dâo blanc 1984 est une belle surprise du fait d’une longueur quasi infinie. Le vin est rond, joyeux, fort agréable et accompagne bien les crevettes et les gambas sans assaisonnement.

Le Buçaco Branco 2001 est un vin blanc fluide et frais, mais qui n’atteint pas le plaisir du 1984. Alors qu’il est semble-t-il plus capé que le Dâo, il m’émeut beaucoup moins.

Sur la délicieuse langouste cuite judicieusement arrive le Casa Ferreirinho Reserva Douro Vinho Tinto 1989 qui forme un accord parfait avec le crustacé. Mes hôtes me regardent avec des yeux incrédules. Comment est-il possible que l’accord soit si parfait alors qu’ils avaient toujours cru que les crustacés appellent un vin blanc. Ils me regardent comme si j’avais fait un tour de magie qu’ils n’arriveraient pas à comprendre. Bien sûr nous en avons ri.

Nous commandons nos desserts. Je choisis une glace vanille et Joao Carlos vient vers nous et ouvre devant nous une Malvasia Madeira 1899. C’est un cadeau incroyable, apparemment lié à ma présence sur Instagram. Et nous avons fait la photo qu’il souhaitait. La probabilité qu’on me connaisse dans un restaurant de poissons du port de Porto était très faible. La malvoisie est très agréable et délicatement sèche, ce qui la rend expressive. Un pur délice.

Antonio Amorim nous avait rejoint car il devait avoir un dîner qui s’est annulé. Son sourire est communicatif.

Demain, c’est l’inauguration de la collection de bouchons. A suivre…

Déjeuner au restaurant Abysse samedi, 7 octobre 2023

Un ami m’invite au restaurant Abysse situé au rez-de-chaussée du Pavillon Ledoyen. Ce restaurant fait partie du groupe de Yannick Alléno et est animé par le chef Yasunari Okazaki. Il est probablement le seul chef qui a réussi à obtenir deux étoiles en offrant une cuisine à base de sushi.

Nous choisissons de prendre le menu qui est le choix du jour du chef. Cela s’appelle Omakase qui signifie : « je m’en remets à vous ». Les intitulés sont peut-être abscons, mais voici la liste en trois parties. 1 – émotions salées : Tsukemono de saison / Shinjo et fleur de courgette, floraison de printemps / soupe de pépins de tomate et algue, glace de riz très iodée / Somen froid au bouillon et caviar, bourgeons Junsai gélifiés / Sashimi. 2 – collection de sushi Nigiris : tofu maison / langoustine au feu et algue croustillante / consommé. 3 – Amamis : prune en croûte de sucre, vinaigrette épicée / ananas fumé au bois de litchi, sauce fermentaire perlée Mizuna / champignon glacé et condiments, nougatine au sobocha / tempura moderne de shiso.

Ce menu ne rend pas compte de la variété de poissons traités de façon impressionnante. Mon ami, familier du lieu m’a donné quelques intitulés plus explicites : thon rouge, feuille de Shiso / sashimi de turbot extraction de céleri / maquereau, algue Kombu / sériole / saint-pierre / turbot / seiche / rouget / dorade royale / béryx / thon Maguro / truite / tartare de thon / oursins / œufs de brochet fumés / thon gras « otoro » / feuille de Nori. C’est évidemment plus expressif.

Je n’ai jamais mangé un thon aussi goûteux que celui présenté. Et à tout moment on est impressionné par l’intelligence de la présentation des saveurs.

Le sommelier veut nous orienter seulement vers les vins blancs, mais nous ne suivons pas son avis en choisissant un Champagne Pierre Deville Pinot Noir Grand Cru 2019. Je n’ai pas bien compris qu’on l’ait mis sur la carte des vins en non millésimé alors que l’étiquette du dos de bouteille indique : vendange 100% 2019, dégorgé en janvier 2023. Je ne connaissais pas ce vigneron et mon choix était orienté vers le pinot noir. Ce champagne est une grande et belle surprise. Il s’est adapté aux saveurs subtiles des plats. Un grand vin de champagne, rond, expressif, de forte personnalité.

Dans la carte des vins aux vins très jeunes mais très copieuse, j’ai choisi un Chablis Grand Cru Les Clos des Hospices domaine Christian Moreau 2020 qui offre une belle fluidité agréable, mais qui n’a pas le coffre d’un grand cru et manque de complexité, mais c’est peut-être dû à son jeune âge.

Le service est intelligent et compétent et me fait penser au service du restaurant Mazzia à Marseille. L’ambiance est agréable, les saveurs sont si nombreuses que notre palais virevolte. C’est une expérience qu’il faut recommander et refaire pour comprendre ce monde culinaire raffiné.

Déjeuner aux vins disparates mardi, 19 septembre 2023

Ce déjeuner au restaurant Pages a pris des tours et des détours. Ce devait être un déjeuner d’amis offert par Stanislas, mais quand j’ai proposé un vin il me fut répondu comme dans la publicité : « pas assez cher mon fils ». Et on me fit savoir qu’il y avait du ‘beau monde’. Titillé par cette incertitude j’ai pensé qu’il fallait taper fort et j’ai choisi un Haut-Brion rouge 1947 au niveau quasiment dans le goulot. Et comme je venais d’acquérir des vins de la Romanée Conti dont certains avaient des bas niveaux, je me suis dit que l’occasion était bonne pour ouvrir une des bouteilles, un Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1969 au niveau bas, sans garantie de résultat.

Je viens à 10 heures au restaurant Pages pour ouvrir mes vins. Le Haut-Brion 1947 a un nez qui promet un épanouissement progressif et positif. L’Echézeaux 1969 a une couleur qui paraît terreuse et le nez n’est pas engageant. Il paraît fatigué. Le vin s’améliorerait-il, je ne saurais le dire.

Je vais voir Stanislas à l’Appartement Moët Hennessy et nous nous rendons ensemble chez Pages. J’apprends qu’il y aura un français qui a fait fortune dans les télécommunications, un espagnol d’une banque mondialement connue, en relation d’affaire avec un chinois immensément riche qui possède six vignobles essentiellement bordelais, venu avec un collaborateur, une collaboratrice qui fera traductrice et un ami de Singapour qui possède plusieurs hôtels et est aussi membre du gouvernement de Singapour. Il y a aussi un indien qui vit à mi-temps au Japon et en France et qui a assisté à mes dîners et mon ami Tomo.

Les vins arrivent en désordre et tard ce qui rend quasiment impossible de faire un menu cohérent puisqu’il est déjà fait sans connaître les vins, et rend difficile de faire un ordre de service des vins qui soit pertinent. Vogue la galère, nous ferons au mieux.

Pour les amuse-bouches nous commençons avec un Magnum de Champagne Dom Ruinart Blanc de Blancs 2007 agréable et salin. Un bon point de départ.

Le Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame magnum 1995 fait un saut gustatif impressionnant car ce champagne est dans une phase d’accomplissement absolu. Son parfum est pénétrant et le champagne est merveilleusement équilibré. Il accompagne un carpaccio de Wagyu et c’est magnifique.

Pour le homard accompagné de fenouil, nous buvons un Montrachet Domaine Comtes Lafon 2012. Le vin est magnifique, équilibré, plein et frais, mais le homard trop froid à la sauce trop acide ne rend pas service au vin, au contraire. Mais le chef Ken ne peut pas être tenu pour responsable car il ne connaissait aucun des vins.

Nous poursuivons avec un filet de morue doté d’une sauce aux légumes verts. Je connais cette sauce et je sais qu’elle ira avec un vin rouge. Nous avons un Vosne-Romanée La Colombière Domaine du Comte Liger-Belair 2016 et je dis au richissime chinois que l’on nomme Dragon d’essayer ce vin avec la sauce seule. Il se trouve qu’il me suit sur Instagram et ma suggestion, qu’il vérifie, le comble d’aise.

Le veau aux giroles et à la sauce lourde me fait penser que c’est peut-être le moment de faire servir l’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1969. La couleur terreuse n’est pas une bonne nouvelle. Le vin est buvable mais fortement fatigué. Je dis à tous qu’il est mort, mais qu’il mérite qu’on essaie de le boire à cause de la sauce. Pour moi, le vin s’accorde avec la sauce typée qui le réveille. Mais je n’insiste pas, car deux vins vont apparaître.

Le Chapelle Chambertin Domaine Cécile Tremblay 2017 est un vin très expressif, mais l’Echézeaux ‘du Dessus’ Domaine Cécile Tremblay 2017 est absolument sublime. Quelle structure, quelle largeur et quelle plénitude ! Alors que c’est un vin très jeune, il est porteur d’une grandeur hors du commun.

Nous goûtons ensuite le Château Monlot Saint-Emilion Grand Cru 2017 qui est la propriété de Dragon. Ce vin jeune sera à juger avec quelques années de plus.

Pour le délicieux Wagyu nous avons deux vins. Le Château Haut-Brion 1947 a un nez noble et riche et en bouche il est très grand. Mais je ne le trouve pas au sommet de ce qu’il devrait être. A côté de lui, le Château Latour 1990 montre une belle jeunesse rafraîchissante et un épanouissement certain, mais comme pour le Haut-Brion, je ne trouve pas que le vin est à son sommet.

C’est alors que je goûte l’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1969 et je sursaute. Le vin n’est plus du tout le même. Il commence à devenir vraiment expressif et même si le vin est fatigué, il a vraiment le message du domaine. Tomo est de cet avis. Une remontée aussi rapide est surprenante.

Le fromage convient aux deux bordeaux et pour le dessert nous revenons au Veuve Clicquot La Grande Dame magnum 1995 peut-être moins cinglant qu’au début, mais d’une qualité extrême.

Je n’ai pas demandé que l’on vote pour ne pas couper les conversations animées. Mon vote serait : 1 – l’Echézeaux ‘du Dessus’ Domaine Cécile Tremblay 2017, 2 – Château Haut-Brion 1947, 3 – Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame magnum 1995, 4 – Montrachet Domaine Comtes Lafon 2012, 5 – Château Latour 1990, 6 – Vosne-Romanée La Colombière Domaine du Comte Liger-Belair 2016 et 7 – l’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1969.

Mon voisin de table était sceptique que je donne la place de second au Haut-Brion. Or il se trouvait que j’avais versé dans un verre le fond de la bouteille à la lie quasiment inexistante. Je lui ai versé la moitié de mon verre et il a pu constater que le vin du fond de bouteille transcendait ce qu’il avait pu boire auparavant de cette belle bouteille.

Il convient de noter l’engagement de Pierre-Alexandre et des serveurs qui se sont occupés des vins. Naoko, la femme du chef Teshi, toujours attentive, a accompagné notre repas de tous ses soins.

Le déjeuner fut un peu brouillon puisque l’on ne connaissait pas les apports de chacun, mais les discussions passionnantes ont fait de ce repas un grand moment, promettant des retrouvailles avec plusieurs convives.

mon apport :

Dernier dîner dans la maison du sud lundi, 11 septembre 2023

C’est le dernier dîner qui se tiendra avec des amis dans la maison du sud où j’ai résidé pendant trois mois. Un ami à qui j’avais conseillé d’acheter en salles de ventes des lots disparates à bas prix, car on a parfois de bonnes surprises, m’annonce qu’il viendra à ce dîner avec six demi-bouteilles de vins de Bordeaux que l’on essaiera par curiosité.

Avec ma femme nous avons prévu pour l’apéritif du foie gras décongelé et une caillette et pour plat principal un Parmentier de canard. De nombreux fromages suivront, puis des desserts individuels aux goûts très différents.

J’ai ouvert le Champagne Laurent Perrier Cuvée Grand Siècle que je situe dans les années 70 une heure avant le repas. Sous la cape, le pourtour du goulot est assez sale, d’un liquide noir et gras que j’essuie. Le bouchon vient entier, net et propre accompagné d’un sympathique pschitt. Le nez est encore fermé.

Au moment où je sers le champagne, le nez est beaucoup plus affirmé, la couleur est d’un or clair et la bulle fine est présente. La première gorgée est un choc. Comme un coup de massue. Je suis fortement touché par la perfection et la force de ce champagne extraordinaire. C’est une bombe de fruits. A chaque gorgée je me dis : « mon Dieu qu’il est grand » et je pense que c’est le plus grand champagne que nous avons bu de tout l’été. Un bonheur infini. Avec le foie gras aérien l’accord est fusionnel, alors que la caillette très forte raccourcit le champagne.

La caillette donne envie de goûter les apports de mon ami. Il y a six demi-bouteilles qui ont été ouvertes il y a trois heures. Les vins sont chauds, ce qui gêne le palais. Nous ne goûterons que trois vins sur les six, car j’ai prévu un autre vin rouge.

Le Château Léoville-Poyferré 1994 est franc, droit, sympathique à boire. Le Château Lynch-Bages 1995 est un peu plus épanoui et convient le mieux avec la caillette.

C’est à table que nous goûtons le Château Lestage Listrac 1995 qui trouve un accord charmant avec le joyeux Parmentier de canard. Ce Listrac est une belle surprise.

J’ai envie que le Vosne-Romanée Les Chaumes Méo-Camuzet 2002 soit servi maintenant avec un époisses. J’ouvre la bouteille au dernier moment pour que nous suivions l’éclosion du vin. L’époisses n’est pas très mûr mais l’accord est divin. Le fromage propulse le vin qui devient de plus en plus puissant.

Gracile, fragile, raffiné lors des premières gorgées, il s’affirme progressivement. Ce vin subtil est un pur bonheur. Avec un munster, l’accord est possible mais moins pertinent que celui créé par l’époisses.

Les gâteaux individuels ont des goûts différents. Ceux au citron meringué conviennent au champagne Grand Siècle alors qu’un dessert aux copeaux de noisettes et un Paris-Brest s’allient avec un vieux Mas Amiel Maury sans étiquette que je situerais volontiers dans les années 70.

Les discussions sur l’avenir de notre pays, particulièrement préoccupant, nous ont fait converser jusque très tard dans la nuit.

 

Un grand Richebourg avec des amis samedi, 9 septembre 2023

Un ami de longue date, grand collectionneur de vins, vient avec son épouse déjeuner dans notre maison du sud. Choisir des vins qu’il n’a probablement pas bus est un exercice excitant. Pour l’apéritif nous aurons une caillette et du pâté en croûte, le plat principal sera un navarin d’agneau aux petits légumes suivi d’un époisses et nous finirons par un gâteau au citron meringué. La viande a mijoté dès la veille avec un soupçon d’Yquem.

De bon matin j’ouvre le Richebourg Anne Gros 1996. Le parfum est très féminin, alors que cet adjectif ne s’emploie quasiment jamais pour décrire un Richebourg. Le Heidsieck Monopole Cuvée Diamant Brut Bleu 1975 s’ouvre sans qu’apparaisse le moindre pschitt. Le nez est expressif.

Lorsque je veux tirer le bouchon de Piper-Heidsieck rosé 1975, je vois que de fines bulles sortent doucement du goulot. C’est un signe qui me plaît.

Les amis arrivent. Le Champagne Heidsieck Monopole Cuvée Diamant Brut Bleu 1975 laisse voir de fines bulles quand on le sert. La couleur est d’un orange doré. Dès la première gorgée on ressent la majesté d’un grand champagne ancien. Il offre des myriades de fruits et même des accents floraux. Il est magique car les saveurs virevoltent. L’accord avec la caillette est idéal. Ce champagne me séduit au plus haut point.

Le Richebourg Anne Gros 1996 a un nez beaucoup plus imposant qu’à l’ouverture. En bouche il est puissant, tonique, rond et accompli. Ce qui fait son charme, c’est sa cohérence. Il est généreux et je sens quand même un peu de féminité dans ce grand vin comme je l’avais ressenti au nez à l’ouverture. C’est avec l’époisses de forte personnalité que le vin accepte le combat, pour un accord divin.

Pour la tarte au citron meringuée le Champagne Piper-Heidsieck rosé 1975 est le compagnon idéal du fait de sa forte acidité. Un vin de dessert n’aurait jamais convenu. Ce rosé de couleur très marquée est puissant et n’a pas d’âge. Il est fort, impressionnant et brille au contact de la tarte.

Je suis très embarrassé pour désigner un vainqueur parmi ces trois vins. Le champagne Diamant Bleu est l’idéal du champagne ancien fruité. Le Richebourg est d’un total accomplissement. Alors, comme j’ai plus souvent l’occasion de boire de grands champagnes à maturité, mon classement sera : 1 – Richebourg Anne Gros 1996, 2 – Diamant Bleu Heidsieck Monopole 1975, 3 – Piper-Heidsieck Rosé 1975.

Billecart-Salmon Brut rosé vendredi, 1 septembre 2023

Après la visite d’Alexandre Bader, j’ai la curiosité d’ouvrir le cadeau que j’avais reçu, un Champagne Billecart-Salmon Brut rosé. Comme d’autres maisons, Billecart a mis un code sur l’étiquette du dos et en l’écrivant sur un site on obtient les informations suivantes : vendange la plus récente 2019, vendange la plus ancienne 2014, avec 57% de vins de l’année de base et 43% de vins de réserve. Le champagne est fait de 33% de pinot noir, 43% de chardonnay et 24% de pinot meunier. J’avoue que j’ai assez mauvaise grâce à aller sur internet pour avoir ces renseignements. Et bien qu’étant un homme de chiffres, je trouve dans ces informations un peu de « tue l’amour ». Mais cela existe et peut intéresser certains.

Nous déjeunons avec une amie de ma femme qui a fait un poulet tout simple. A l’apéritif, gouda au pesto, jambon Belota, des fins gâteaux comme des hosties, poutargue et un peu de camembert Jort.

Le pschitt avait été dynamique, la couleur est d’un rose clair virginal. Et le goût est aussi virginal, tout en douceur et retenue. Il n’est pas très long et à mon goût il faudrait l’attendre au moins cinq ans pour qu’il gagne en largeur. Il a plu à notre invitée ce qui est le plus important.

Krug Grande Cuvée vendredi, 1 septembre 2023

Un ami, Alexandre Bader, est l’homme qui vante les mérites des champagnes Billecart-Salmon à la terre entière. Comme Olivier Krug et quelques autres, il est un serial globetrotter. L’occasion se présente de prendre l’apéritif dans ma maison d’été. Je choisis d’ouvrir un Champagne Krug Grande Cuvée étiquette crème qui est le deuxième plus ancien des Grande Cuvée apparues dans les années 70 pour remplacer les Private Cuvée. Ce champagne est composé de champagnes de nombreuses années dont beaucoup des années 70.

Il n’y a pas eu de pschitt à l’ouverture, mais la bulle existe. La couleur est orangée d’or. Le champagne est d’une complexité infinie, d’une acidité pimpante et d’une énergie sans pareille. Sa palette de saveurs est kaléidoscopique, offrant à chaque gorgée des saveurs nouvelles, riches, cinglantes. Un régal et Alexandre est sous le charme de ce champagne aux milles émotions. C’est avec une rillette que le vin est joyeux. Il est plus classique sur du jambon espagnol et trouve une vivacité vibrante sur un camembert Jort.

Nous avons bavardé de nos passions. Ce court apéritif impromptu fut très amical.

Couscous et Ridge samedi, 26 août 2023

Avec mon frère nous allons partager un couscous. Il avait, dans une récente discussion critiqué les vins californiens. Je n’avais pas répondu à sa réflexion et l’idée m’est venue de servir à l’aveugle un vin californien. Le Ridge Monte Bello 1994 a été ouvert quatre heures avant le dîner. Le bouchon au liège très peu dense est collé au goulot. Quand je plante le tirebouchon, il déchire le bouchon. Quelle que soit l’inclinaison du tirebouchon ou de la longue mèche, le bouchon reste collé et je retire des miettes. Alors la seule solution est de déchirer des petits morceaux de liège. Si j’avais eu le tirebouchon Durand, qui combine un tirebouchon et un bilame, il aurait été l’outil idéal. J’ai déchiré et déchiré et fort heureusement aucun morceau de liège n’est tombé dans le vin. Je sens et l’odeur est peu avenante, marquée par des signes d’acidité. Nous verrons.

Fort heureusement au moment de servir, l’acidité a disparu et le vin a un joli parfum, riche et conquérant. Je verse le vin. Avec l’agneau du couscous l’accord est parfait. Le vin est plein, riche. Mon frère dit que ce n’est ni un bordeaux ni un Bourgogne et s’oriente vers les vins de Provence. Quand je lui dis qu’il s’agit d’un vin californien, il convient sans hésiter que ses propos récents n’étaient pas adaptés à un vin de cette qualité. Plus le temps passait et plus des notes de garrigues apparaissaient, suggérées aussi par les épices du couscous, ce qui rendait pertinente la piste que mon frère avait avancée. Ce Ridge Monte Bello 1994 est un grand vin américain, peut-être pas le plus complexe, mais franc, joyeux et puissant.

Nous l’avons essayé sur un camembert Jort et l’accord fut pertinent. Une belle expérience