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Dîner pour les vainqueurs d’un concours européen de dégustation à l’aveugle vendredi, 24 novembre 2023

Une habitude avait été créée il y a quelques années de proposer à des étudiants de grandes écoles de participer à l’Académie des Vins Anciens en bénéficiant d’un tarif préférentiel. Plusieurs étudiants de diverses écoles, HEC, Normale Sup et autres, en avaient profité. J’avais revu certains étudiants lors de dîners privés et j’ai appris qu’ils avaient formé un groupe qui participait aux compétitions ouvertes aux grandes écoles européennes de dégustation de vins à l’aveugle.

J’avais dit à ces candidats : si vous gagnez la compétition, j’ouvrirai pour vous de belles bouteilles. Il se trouve qu’ils ont gagné. Je n’ai pas vu le diplôme, je fais confiance.

Nous avons échangé des messages pour mettre au point le programme des vins. L’un des lauréats a proposé un restaurant que je ne connais pas, le restaurant Passionné, fondé il y a un an. Le personnel est prévenu que je viendrai vers 17 heures ouvrir les vins.

Lorsque je me présente, l’accueil est sympathique. On sent le personnel très intéressé et concerné par notre dîner.

J’ouvre les vins. Le serveur ou sommelier qui accompagne mon travail vient avec plusieurs carafes et je lui dis que je ne les utiliserai pas. Pendant l’ouverture, je me fais expliquer les plats conçus par le chef Satoshi Horiuchi et je fais modifier l’ordre de service, j’ajoute un plat et certains ingrédients seront évités, comme la vanille ou la vinaigrette. Cela se fait dans un climat ouvert.

Le Montrachet Caves Nicolas 1928 a un verre très clair qui permet de voir que le vin est trouble. Le nez n’est pas parfait mais il faut attendre avant de juger. Le Kébir Rosé Frédéric Lung probable 1947 a un nez qui me rappelle de beaux souvenirs. Un sourire illumine mon visage.

Le Chambertin Clos de Bèze Pierre Damoy 1961 a un parfum qui promet du bonheur et La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1963 promet de la grandeur.

J’ouvre maintenant le vin parmi les trois que j’ai apportés qui est le cadeau symbolique pour mes amis gagnants du concours : le Cru de Coÿ Enclave Yquem Sauternes 1923. Il a cent ans tout juste et il a vécu dans le berceau d’Yquem. Il y a un fort symbole dans ce cadeau. Son parfum est d’une justesse parfaite.

L’ami qui a apporté son vin, le Château Siran Margaux 1929 est un héritier des propriétaires. La bouteille a été reconditionnée au château en 2002. On sent que le parfum est plus jeune que celui d’un 1929, même si le vin est authentiquement de 1929.

Les deux champagnes sont ouverts au dernier moment car je ne voulais pas les ouvrir avant l’arrivée de leur apporteur.

Les bouteilles étant ouvertes, j’ai le temps de me rendre au siège de la Banque J.P. Morgan où le cognac Hennessy va faire goûter des cognacs d’exception en présence du Maître Assembleur Renaud Fillioux de Gironde. Je bavarde avec plusieurs personnes invitées en grignotant des petits canapés sympathiques et en buvant un champagne du groupe Moët Hennessy. Devant repartir assez vite, je demande à Renaud de me faire goûter un seul cognac avant le début de la dégustation. C’est un Cognac Richard Hennessy qui m’est tendu. Quel grand cognac. Il ne peut se boire que religieusement.

Je reviens vite au restaurant Passionné. Le menu du repas est : Le menu : amuse-bouches: saint Jacques, crabe, tourteau et betterave / saint Jacques dans sa coque, ormeaux avec aubergine / déclinaison autour du champignon, comme un café gourmand / lieu jaune / ris de veau et crevettes / canard / lièvre à la royale / Tatin / cannelés exotiques.

Parmi les deux champagnes Pol Roger Demi-Sec nous commençons par le Champagne Pol Roger Extra Cuvée de Réserve Demi-Sec années 50. C’est la mauvaise pioche car en voulant le plus sec des deux, nous nous sommes méfiés de la notation « goût français », mais le plus dosé est l’extra cuvée de réserve. Le champagne en soi est follement intéressant, mais il le serait plus sur le dessert que sur les entrées. La coquille Saint-Jacques crue n’est pas à l’aise avec lui aussi nous précipitons le service des blancs. Le Montrachet Caves Nicolas 1928 a un nez incertain que l’un d’entre nous trouve bouchonné. Je lui suggère de passer outre ce sentiment, car en milieu de bouche le vin est extrêmement agréable. Il est riche et puissant, et en laissant de côté le très léger défaut de nez, on se régale.

Le Kébir Rosé Frédéric Lung probable 1947 est un vin absolument plaisant aux goûts exotiques. Les ormeaux sont magnifiquement réussis et trouvent un écho avec le vin algérien. Les ormeaux pourraient cohabiter avec un vin rouge et l’essai avec le Château Siran Margaux 1929 est concluant. Ce vin de Bordeaux est frais avec des accents jeunes. Il est riche et cohérent. Je le trouve accompli comme un 1929 doit l’être.

J’avais vanté les qualités du Chambertin Clos de Bèze Pierre Damoy 1961 que j’avais massivement acheté il y a une quarantaine d’années. Damoy était le nom d’une chaîne de magasins et peu de gens s’intéressaient à un chambertin doté d’un tel nom. Quelle erreur, car ce vin que j’ai mis souvent dans mes dîners finissait presque chaque fois en premier ou en second des votes des convives. Alors après tant de compliments, mes jeunes amis étaient curieux.

Sur le ris de veau, bonheur absolu, car ce chambertin est d’un accomplissement total. Il a des notes salines qui suggèrent un peu celles des vins de la Romanée Conti. Il est riche, droit, serein. Une merveille et mes amis comprennent mon amour pour ce vin. Ils sont conquis.

Pour beaucoup, La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1963 est le premier vin du domaine de la Romanée Conti qu’ils découvrent. Et ils ont une immense chance car cette Tâche est exceptionnelle. Par un hasard de l’histoire, il y a le même nombre de vins mis en bouteilles pour les millésimes 1963 et 1966. Comme la donnée du nombre de bouteilles produites est la seule permettant une identification je pourrais choisir 1963 ou 1966, mais le caractère gracieux et délicat de ce vin subtil me suggère de le dater en 1963. La rose et le sel sont présents avec grâce et raffinement. C’est une Tâche qui ne joue pas sur sa puissance mais sur son élégance. Un immense vin, idéal pour le lièvre à la royale que j’ai préféré à celui du Train Bleu beaucoup plus gibier. Celui-ci, plus doux mais très goûteux, est idéal pour le vin. Du bonheur.

Le Cru de Coÿ Enclave Yquem Sauternes 1923 est un sauternes d’une grande délicatesse. Il est subtil et délicieux mais il n’a pas le coffre des vins d’Yquem. Ce qui est intéressant c’est qu’il a atteint un équilibre qui le rend sans âge. A l’aveugle, personne ne s’aventurerait à lui donner cent ans. C’est un vin d’un bel équilibre. J’avais demandé pour ce vin une Tarte Tatin, mais j’ai trouvé qu’elle ne faisait pas Tatin et n’apportait pas sa douceur appuyée au vin. Boire ce vin centenaire est un grand moment.

Le Champagne Pol Roger Grand Vin Goût Français Demi-Sec années 50 est absolument charmant. On regrette qu’il n’ait pas été en tête de repas, car il est beaucoup plus sec que le premier que nous avons bu. Dommage car ce champagne raffiné est très grand.

Il y a quelques mois quelqu’un a remis au restaurant L’Ecru de France un petit flacon à mon intention. On peut lire sur le verre : Pure Single Rum Renaissance Distillery Isle of Formose Single Cask. Je ne sais pas du tout qui me l’a adressé et s’il lit cet article, qu’il me contacte pour que je le remercie. Nous buvons ce rhum comme point final de notre repas, mais ce breuvage m’évoque beaucoup plus un excellent Bourbon qu’un rhum. Agréable à boire, large d’épaules, mais très peu rhum.

Que dire de ce repas ? Mes amis sont charmants, ils ont l’avenir devant eux et ils aiment le vin ce qui est un atout de plus. Je suis heureux de leur avoir fait découvrir deux bourgognes dans leur plus belle expression. Le restaurant a été très réactif, dans une ambiance de belle coopération. Les apports de mes amis ont été généreux. Les ormeaux et le lièvre à la royale m’ont séduit.

Ce grand moment d’amitié avec des jeunes prometteurs est très important pour moi.


Après mon compte-rendu il est intéressant de voir les comptes rendus des participants. C’est très intéressant de voir ces approches différentes.

Compte-rendu d’un des convives :

(1)         Pol Roger demi-sec, années 1950 : la robe est claire, brillante et orangée. L’on dirait un sauternes de vingt ans tant la couleur est sirupeuse. Le premier nez est opulent, encore sur les fruits jaunes et la mangue. C’est très surprenant, avec encore un peu de brioché qui donne de la jeunesse. Le nez s’arrondit sur la cire, le menthol : mon ami à ma gauche me dira que cela fait penser aux salons nouvel-empire. Je ne peux qu’y souscrire.

La bouche est surprenante. Une légère bulle soutient le vin et lui donne de l’ampleur. La longueur est immense, avec un sucre épais et massif. On peut hésiter entre 100 et 200 grammes de sucre résiduel. Je m’attendais avec la mention « demi-sec » à moins, mais avec l’âge le sucre est suffisamment patiné pour que le vin ouvre le bal sans heurter les suivants.

Il me rappellera un cidre de glace fait par Antoine Marois et dégusté il y a quelques semaines. Un merveilleux vin.

(2)         Le montrachet est d’une robe jaune léger. Elle est intemporelle. Le nez est initialement fatigué, avec un voile liégeux. Si l’on passe outre, on a un bouquet tout à fait terrien. Les notes de fruits secs sont belles et légères, la truffe blanche est opulente.

La vraie magie opère en bouche. Le vin n’a pas la moindre trace de bouchon et la structure est proprement magistrale. On croirait une cathédrale. La rétro-olfaction est une définition extrêmement précise de la morille, cette précision est magique. Le vin est puissant, ample, il se déploie de façon concentrique puis ramène à l’essentiel par une acidité salvatrice. C’est un vin de méditation qui se marie merveilleusement avec la Saint-Jacques. C’est un vin merveilleux par ce qu’il donne, si on accepte cette légère imperfection du nez.

(3)         Le Kebir rosé années 1940 est tout l’inverse. C’est une perfection au nez, avec des notes de fleurs enivrantes. On a toute l’opulence de la datte. Le vin semble intemporel. La bouche est puissante et alcooleuse, mais je lui trouve de légers écarts. C’est trop crayeux, trop huîtré. Je retrouve cela sur certains vieux vins blancs ou rosés, et je ne pense pas que cela provienne du terroir. La nourriture lui fait le plus grand bien, notamment l’ormeaux qui réalise avec ce vin un mariage d’amour.

(4)         Le Siran 1929 a été reconditionné au domaine il y a moins de dix ans. Le nez est éclatant, c’est un cigare et des notes de fumées merveilleuses. Le vin est précis et net en bouche, avec une puissance de l’alcool et des fruits compotés que l’on n’imaginerait.

(5)         Le chambertin clos de Bèze 1961 de Pierre Damoy arrive, et l’on pourrait croire à un miracle. Le vin est d’une puissance sans commune mesure. Dès le nez dans le verre, impossible de s’en sortir. On sent la figue rôtie, une très légère olive noire, de la fumée… A l’aveugle, qui dirait que ce vin n’a pas 20 ans ? La bouche est stratosphérique, il est difficile de pouvoir lui trouver une comparaison dans mon parcours. Elle est tannique, d’une longueur interminable.

Le vin est puissant, terrien, il impose son monde. Quelques rires nerveux caractérisent l’atmosphère de la table. C’est ça un grand cru de bourgogne. Quel vin.

(6)         La Tache 1963 domaine de la Romanée Conti. Après de tels propos dithyrambiques sur Clos de Bèze, vous allez me dire que je vais faire encore au-dessus avec la Tache. C’est plus nuancé, mais je n’arriverai pas à mettre un de ces deux vins au-dessus de l’autre. La Tache joue sur un autre registre. Le nez est merveilleux sur la rose, des fruits noirs très légers, de la cannelle. C’est incroyablement frais, un parfum subtil. La bouche est tout le contraire du Chambertin, elle n’impose rien, elle est aérienne. Elle passe d’une senteur à une autre, des fruits aux épices, de la fumée au sel.

La Tache est un vin qui n’a plus de chair, c’est un pur esprit. Et ca le rend magnifique.

(7)         Clos de Coÿe 1923 enclave d’Yquem est surnaturel, car on ne peut pas lui donner d’âge. On y trouve de la mandarine, du citron vert, une fraicheur et un exotisme d’une grande exubérance. Le nez est aussi dominé par des notes de plastique brulé, de noix de coco grillée, de torréfaction puissante. Je suis persuadé que ce vin a séjourné longtemps dans un fut très neuf, car ces notes sont puissantes. En bouche, la mache est immense, le sucre est massif avec une acidité mordante qui étend longuement le vin.

(8)         Pol Roger années 1950 « goût français » a du mal à passer avec Coÿe, car nous l’attendions extrêmement sucré, encore plus que le premier champagne et le clos de Coÿe. C’est l’inverse qui se produit, il est moins sucré et plus fatigué que le premier champagne.

Compte-rendu d’un autre participant

Bonjour à tous, je tiens tout d’abord à vous dire un grand merci pour ce dîner dantesque et dont je me souviendrai longtemps. Puisse le vin continuer à nous rassembler à l’avenir comme il le fait avec tant de complicité. Mon classement est le suivant :

-Chambertin 1961

-La Tâche 1963

-Montrachet 1928

-Cru de Cöy 1923

-Château Siran 1929

-Le premier Pol Roger années 1950

-Kébir Rosé 1950

-Le dernier Pol Roger « goût français » années 1950

Je mets le Chambertin juste au-dessus de La Tâche en raison du choc ressenti au moment de plonger mon nez dans le verre. C’était une expérience sensorielle rare, un tremblement de terre après les premiers vins qui étaient alors déjà excellents. Surtout après le Siran. En goûtant ce dernier, c’est un peu comme si j’avais eu en moi la preuve que l’univers est immense et que nous ne sommes qu’un point infime perdu dans sa totalité ; mais le Chambertin m’est apparu comme l’infini, il m’a montré que l’univers était en fait au-delà de notre conception des distances. La couleur cuivre sublime attire instantanément le regard avant de révéler des arômes de viande rôtie et de poivre chaud, de ceps et de truffes noires. La bouche était d’un velours soyeux et ample, avec une sensation poivrée sur la langue que je n’avais jamais ressentie.

J’avais en bouche un vrai vin épicé. Un vin très viril, inoubliable.

La Tâche était au même niveau, soyons francs, mais il venait après un titan, ce qui a réduit la distance de surprise dans la dégustation entre les vins. Le Chambertin avait en plus l’avantage de correspondre davantage à mes goûts personnels. La Tâche était plus subtile, plus aérien, magistral de longueur et de fraîcheur en bouche. Chambertin est un Delacroix, La Tâche un Chagall. Deux conceptions de la noblesse et de l’excellence. Le nez de roses surannées est unique en son genre, enivrant et profond. Le gros sel est d’une fraîcheur impressionnante. En bouche, la structure était celle d’une cathédrale : long et tout en oraison. En effet, le vin rebondissait sur la langue, montait vers le palais pour redescendre dans un va-et-vient incontrôlable, joyeux : divin.

Au moment de goûter le Montrachet, j’ai eu peur à cause des effluves de bouchon qui s’en dégageaient. Mes craintes furent vites dissipées à mesure que le vin s’ouvrait dans le verre. Car j’avais devant moi un vin presque centenaire d’une fraicheur désaltérante. L’acidité du vin soutenait et amplifiait des arômes de vieille poire et de tabac blond.

Le côté suranné offrait à la dégustation une profondeur mystérieuse et insaisissable. L’accord avec les ormeaux l’aura rendu incontournable pour ce classement.

Le cru de Cöy est quant à lui au rang des vins éternels. Sa robe or-cuivre avec des reflets rouges était d’une beauté incomparable. S’il eût pu en acheter, Sardanapale aurait bu de ce vin à son image : un vin opulent, d’une richesse démesurée. Plonger le nez dans ce verre, c’est se perdre dans des plaisirs exotiques violents, mélange ahurissant de fruits et d’encens, d’épices et de sucre. En bouche, je fus agréablement surpris par un taux de sucre maitrisé, équilibré par une acidité qui n’a pas pris une ride. Est-il vraiment nécessaire que je fasse l’éloge de sa longueur en bouche ? L’homme n’a pas encore inventé l’outil capable de la mesurer.

Château Siran est le vin qui m’a séduit au premier nez. Le goûter m’en fit tomber amoureux. D’une élégance aristocratique, sa robe pourpre fut confectionnée par une maison de haute couture et lui rend la beauté de ses vingt ans. On ne se lasse pas de son bouquet de pivoines et de fruits rouges mûrs. C’est un vin divinement féminin, digne de Margaux.

La bouche est suave, caressante. On reste sur un mélange de cerise confite, de vanille et de cardamome. Et moi qui pensait que le Bordeaux serait plus dominateur que le Bourgogne ! Le Siran fait la révérence tandis que le Chambertin jette ses armes sur la table.

On peut dire qu’un dîner commence bien lorsqu’il s’ouvre sur un Pol Roger demi-sec années 1950. Davantage demi que sec, le vin se love entre les papilles et vient chatouiller le palais. C’est doux, c’est frais, d’un gras fin et gourmand à la fois. Je prenais plaisir à remuer régulièrement mon verre tout au long du repas car s’en dégageaient des arômes nostalgiques de boiseries anciennes. Un vin joyeux et mélancolique à la fois :  la classe à la française.

Boire un Kebir c’est remettre un képi. Le temps d’un repas, hors du temps. La sensation incroyable de boire un vin produit à Alger dans les années 1950 est difficile à décrire. On s’attend à tout, sauf à ça. Le nez est expressif, un subtil mélange de groseille et de cumin. La bouche est chaude, on sent tout de suite la tenue du vin : stricte, d’une grande dignité. C’est un rosé dans toute sa splendeur : ni blanc, ni rouge, il ne prend pas parti. C’est le vin à part de la sélection, étonnant, fascinant, indépendant.

Le Pol Roger « goût français » m’a finalement semblé plus fermé par rapport aux autres. Mais il faut reconnaitre qu’être servi en dernier après cette ascension de l’Olympe est un rôle ingrat. Mon attention quelque peu distraite en cette fin de repas n’y est aussi probablement pas étrangère. Le vin était néanmoins très agréable, gourmand, beurré. D’un beurre vieilli, affiné. La bouche ne ment pas et vient clore en beauté ce dîner spectaculaire.

Je tiens à saluer le travail du chef Horiuchi et toute l’équipe du Passionné pour l’organisation de ce cette expérience inoubliable.

L’intelligence est une question de goût.

Commentaire d’un autre participant

Merci encore pour ce moment merveilleux. Les mets étaient délicieux, les vins spectaculaires et la compagnie de grande qualité. Je me souviendrai toujours de ce lièvre à la royale avec la Tache 63.

Voici mon classement qui reflète avant tout mes goûts, car tous les vins étaient excellents.

  1. La Tâche (Pour sa complexité au nez et sa douceur en bouche)
  2. Chambertin (Pour sa puissance et ses épices)
  3. Siran (Pour son fruit et son côté féminin)
  4. Montrachet (Pour son acidité et son intemporalité)
  5. Pol Roger demi-sec (Pour son équilibre et son côté gourmand)
  6. Cru de Coy (Pour ses notes de noix et sa couler cuivrée)
  7. Kébir Rosé (Pour son nez majestueux et sa jeunesse)
  8. Pol Roger goût français (Celui que j’ai le moins apprécié car je le trouvais vieux au nez et pas très équilibré en bouche)

Gauthier, merci encore pour l’organisation. Le restaurant était clairement à la hauteur et ce fut une belle découverte. François, merci de nous avoir fait découvrir ces trésors !

déjeuner à la Manufacture Kaviari vendredi, 24 novembre 2023

Une amie américaine était présente au dîner au château d’Yquem. Elle est encore à Paris aussi nous allons ensemble déjeuner à la Manufacture Kaviari. Karin Nebot reçoit des chefs étrangers de Corée et du Danemark aussi déjeunerons-nous dans la cuisine qui est un espace fort agréable.

Nous allons déguster du Caviar Osciètre que j’aime beaucoup, du Caviar Baeri français, du Caviar Osciètre gros grains et du Caviar Cristal. Les préférences sont différentes pour chacun de nous. L’Osciètre gros grains que je mets en premier est mis en dernier par ma voisine. Ma femme préfère le Baeri à l’Osciètre alors que je fais le choix contraire. Peu importe et cela prouve que ces caviars ont tous bons.

On les goûte d’abord avec des blinis et des œufs de truites, des œufs de saumon viennent compléter nos amuse-bouches avec du saumon présenté en deux formes différentes, l’une très douce et l’autre plus typée.

J’ai apporté un Champagne Dom Pérignon Magnum 1992 qui est d’une belle sérénité. Lors de son lancement ce champagne n’avait pas été encensé, car d’une petite année, mais aujourd’hui son équilibre non ostentatoire en fait un champagne adorable.

Dom Pérignon est vraiment l’ami des caviars du fait de cette aisance accueillante. Mais j’ai aussi apporté un Château Chalon Désiré Petit & Fils à Pupillin 1992. Son nez est intense et puissant avec une forte marque alcoolique mais aussi un petit soupçon de caramel.

Avec une tartine smorrebrod danoise, l’accord avec le Château Chalon est impressionnant aussi je vais le faire goûter aux danois présents dans la grande salle de la Manufacture. Ils sont comme moi éblouis de cet accord.

Nous allons dans la salle de dégustation réfrigérée faire la traditionnelle dégustation avec Alexis qui nous suit ou nous précède dans notre périple.

La suite du repas se fait à la cuisine avec de délicieuses tartes, et un dessert à base de citron. L’atmosphère chez Kaviari est toujours aimable et ouverte au partage.

L’amie américaine aura participé au diner à Langon, au déjeuner à Yquem avec l’équipe qui fait Yquem, au dîner à Yquem et à ce déjeuner. Elle a vécu une belle expérience.

Déjeuner dominical au Train Bleu vendredi, 24 novembre 2023

Le dimanche nous allons faire un déjeuner de famille au Train Bleu le mythique restaurant de la Gare de Lyon à Paris. Il est géré à la façon d’une brasserie avec une cuisine très traditionnelle. Le gigot d’agneau est découpé devant le client sur le chariot appelé « voiture de tranche », les crêpes Suzette flambent au Grand Marnier devant la table. C’est vraiment « à la française ». Nous sommes sept, chacun fait son menu. Pour moi ce sera une royale de foie gras au topinambour, un lièvre à la royale façon Michel Rostang, sauce poivrade et taglierini à la crème et des crêpes Suzette. Ma balance va en garder le souvenir pour plusieurs jours tant c’est copieux.

Nous commençons par une Champagne Collet Esprit Couture Brut Premier Cru 2012 d’une bouteille très originale. Une amertume prégnante m’a empêché d’en profiter comme j’aurais voulu. Les deux vins qui suivent ont été choisis après que deux demandes n’ont pu être satisfaites car les vins n’étaient plus en cave. C’est assez désagréable mais le restaurant a réagi en octroyant une remise sur la note finale.

Le Châteauneuf-du-Pape Clos de l’Oratoire des Papes blanc 2022 est vin simple, jeune mais déjà agréable, qui a bien suivi mon premier plat qui ne m’a pas vraiment séduit.

Le lièvre à la royale est d’une puissance extrême. C’est l’expression gibier dans toute sa grandeur et c’est bon. On ne peut pas dire délicieux, car le plat est guerrier. Et le Clos Vougeot Grand Cru Domaine Jacques Prieur 2017 est idéal, car sa jeunesse gracieuse et délicate fait un contrepoint à l’envahissante grandeur du lièvre. La combinaison est idéale. J’ai beaucoup aimé ce vin gracieux et ce lièvre sauvage.

Nous étions nombreux à avoir commandé des crêpes Suzette aussi deux serveurs sont venus avec leurs chariots pour flamber les crêpes. L’un a eu la main lourde sur le Grand Marnier. L’autre l’a eu légère. Les deux versions sont agréables.

L’ambiance est très brasserie. On sent la volonté de bien faire et le dimanche pour un déjeuner de famille, c’est cela la France que nous aimons.

Deuxième jour avec mon fils mardi, 7 novembre 2023

Le lendemain, après les agapes de la veille, nous ne ferons qu’un seul repas. Il sera consacré au Wagyu que j’ai acheté en très grande quantité. Pour cela j’ai prévu un Chambolle-Musigny probable Barthod Noëllat 1929 car j’adore ce millésime. Le nom du vigneron n’est pas lisible mais c’est grâce à Instagram que j’ai pu le nommer car quelqu’un a reconnu l’écusson du centre de l’étiquette.

Je l’ouvre vers 13 heures. La bouteille est belle et saine, le bouchon vient dans de bonnes conditions et le parfum promet un grand vin.

Nous commençons avec le Champagne Mumm Cordon Rouge 1937 ouvert la veille et une fois de plus il apparaît que le champagne du lendemain est meilleur que le champagne de la veille. C’est intéressant de voir que ce Mumm est plus large, plus épanoui et plus généreux. On goûte des petits sticks au parmesan et des fromages qui côtoient bien le 1937.

Le repas est essentiellement composé de Wagyu sans aucun accompagnement. Le Chambolle-Musigny probable Barthod Noëllat 1929 est brillantissime. Son parfum est élégant et le vin a une carrure de 1929 serein, fort et élégant. Ce vin, c’est Cary Grant, le symbole absolu de l’élégance. L’accord avec le Wagyu est idéal et le gras de la viande donne une ampleur particulière au vin. Un régal qui me conforte dans l’idée que 1929 est l’année la plus belle du 20ème siècle.

Un époisses trouvera lui aussi le chemin du cœur du Chambolle-Musigny.

J’ouvre pour finir le repas un Champagne Dom Pérignon 1973. J’adore cette année fine et subtile. Ce 1973 est légèrement plus fatigué que ceux qui m’ont ébloui, mais le plaisir est grand. Nous le buvons sur un fromage Jort et aussi sur le Brillat-Savarin jeune et frais.

Il en reste la moitié, que nous envisageons de boire le lendemain.

Mon fils, très occupé dans sa journée ne revient qu’à 23 heures. Il a en main un Mont d’Or que l’on sert à la cuiller. Tous les deux nous avons mangé tout le fromage dont le crémeux a parfaitement convenu au Dom Pérignon, lui aussi meilleur le lendemain.

Faudrait-il ouvrir les champagnes anciens la veille ? Oserai-je le faire ? A suivre.

Ces deux jours avec mon fils ont permis d’ouvrir des vins inhabituels. Juste pour le plaisir voici les dates : 1903 – 1921 – 1927 – 1929 – 1937 – 1957 – 1969 – 1969 – 1973. Quel beau voyage dans le temps.

Dîner du premier jour avec mon fils mardi, 7 novembre 2023

Mon fils est venu de Miami chez moi, nous avons grignoté à l’heure du déjeuner. Il est temps de penser au dîner où ma femme a prévu des pieds de porcs et où j’ai ajouté du Wagyu. Il y aura aussi quelques fromages.

Vers 16 heures j’ouvre une bouteille de Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1927 que j’ai achetée car le niveau bas entraînait un prix attractif. Le vendeur en qui j’ai une grande confiance avait soulevé la capsule et avait pu lire 1927. Quand j’ai voulu vérifier la date, le bouchon était devenu illisible car un peu de moisissure était apparue, sans incidence sur le bas de bouchon.

La bouteille au cul profond rend plausible la période, ainsi que l’étiquette qui était utilisée dans les années 20. J’enlève le bouchon et le parfum est poussiéreux et d’une platitude décourageante. L’espoir d’un retour à la vie est extrêmement faible.

Aussi, à titre de secours, j’ouvre un Clos de Vougeot Château de La Tour Morin Père & Fils 1957. Le niveau est beau et le parfum est très engageant, d’une belle délicatesse.

J’ouvre aussi un Champagne Mumm Cordon Rouge 1937 au magnifique bouchon, au parfum prometteur.

Au moment du dîner nous commençons par le Champagne Mumm Cordon Rouge 1937. La couleur est foncée mais belle et le vin est agréable à boire. L’acidité est bien dosée et du fruit apparaît en fin de bouche. Il montre son âge mais on le boit bien.

La question était de savoir par quel vin commencer. Comme les pieds de porc passent avant le Wagyu, nous commencerons par le Clos de Vougeot Château de La Tour Morin Père & Fils 1957. Son parfum est très expressif et joyeux. Même si le vin manque un peu de corps, il est très agréable à boire avec un goût très franc et précis. Une expression très élégante.

Il est à noter que la sauce des pieds de porc s’entend bien avec le champagne.

C’est sur le Wagyu que va se présenter le Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1927. Le parfum est timide, mais acceptable et le goût est discret. Le gras du Wagyu est idéal pour ressusciter ce vin. Progressivement, on voit apparaître des marqueurs des vins du domaine. Il est subtil et complexe. Bien sûr, il est fatigué, mais le gras de la viande le rend beaucoup plus large. C’est de toute façon émouvant de chercher à recevoir le message d’un vin de 96 ans.

Mon fils m’a fait remarquer que les trois vins du dîner étaient de 1937, 1957 et 1927. Une symphonie improvisée en ‘7’.

l’année du Grands Echézeaux est impossible à lire

les deux repas

Premier repas avec mon fils mardi, 7 novembre 2023

Mon fils qui vit à Miami doit passer à Paris pour un sujet particulier et il logera chez moi pendant le week-end. C’est l’occasion rêvée pour ouvrir de grandes bouteilles. Je choisirai quelques vins à risque qui ne trouveraient leur place dans mes dîners, pour des raisons d’aspect ou de niveau dans la bouteille. J’ai acheté une quantité pantagruélique de Wagyu et ma femme a prévu des pieds de porc.

Le vin de réception de mon fils qui sort juste de l’aéroport est de son année de naissance. C’est un Champagne Pol Roger Brut Extra Cuvée de Réserve 1969 en demi-bouteille. La couleur est très claire et le vin a gardé un peu de bulles. Il a une belle longueur, une acidité plaisante et se montre d’un bel équilibre.

Nous buvons maintenant le reste du Champagne Duc de Roucher Extra Dry Cuvée England 1921 que j’avais ouvert il y a deux jours au restaurant Pages. Quelle transformation en deux jours ! Le champagne est beaucoup plus ambré et montre un fruit d’une présence telle qu’il est largement plus plaisant que le Pol Roger et a atteint un niveau que l’on ne trouvait pas il y a deux jours.

Nous n’avions pas prévu de réellement déjeuner mais ma femme apporte un Brillat-Savarin. Je n’avais ouvert aucun vin aussi je descends en cave, prêt à choisir le premier vin qui se présentera. Je vois un Château Mouton Rothschild 1969. Un vin de l’année de mon fils, je ne vais pas le laisser passer.

Ce vin est immédiatement plaisant riche de truffe et de charbon qui lui donne une belle épaisseur. Le vin est grand et équilibré, au-dessus de ce que j’attendrais d’un 1969.

J’avais acheté il y a quelques semaines une bouteille de Fine Normande Maison du Bonhomme Normand 1903. La bouteille est de la forme des bouteilles de bordeaux, avec un verre transparent. C’est le fait que cette fine a 120 ans qui m’a tenté.

Je pensais l’ouvrir pour Noël, mais comme mon fils est là et ne sera pas avec nous à Noël, je m’enhardis et j’ouvre la bouteille.

Je pense alors que j’ai dans l’armoire aux alcools une bouteille de Calvados que j’ai considéré comme le plus grand Calvados que je n’aie jamais bu. Je l’ai ouverte il y a deux ans et elle a apporté son charme à de nombreux repas. L’histoire déjà racontée est amusante : dans ma société qui vend des aciers à toutes les entreprises qui les utilisent, il y a des centaines de camions de livraison. Un chauffeur que je connaissais, c’était en fin des années 70, avait toujours sous son siège deux bouteilles de Calvados, parce que ses parents avaient le privilège de bouilleur de crus. Une bouteille était pour sa consommation personnelle et une autre pour pouvoir faire des cadeaux. Ce qu’il fit à mon égard.

La fraîcheur de ce Calvados est irréelle, alors c’est l’occasion de le confronter à la fine plus que centenaire. La Fine Normande Maison du Bonhomme Normand 1903 a un goût de calvados mais beaucoup plus raffiné que l’autre. Cet alcool est élégant, racé et a une personnalité plus forte que le calvados de chauffeur. Mais la fraîcheur du plus jeune est toujours aussi séduisante.

Le fait de goûter ensemble ces deux alcools est très enrichissant. C’est un festival de subtilités.

Ces deux alcools suggèrent une sieste, car ce soir, c’est dîner de gala.

déjeuner au restaurant l’Ecu de France vendredi, 3 novembre 2023

A peine trois jours plus tard, nous revenons déjeuner au restaurant l’Ecu de France où nous avons invité deux de nos petites filles, adultes toutes les deux. Je commande un Champagne Selosse Substance. Depuis peu d’année la date de dégorgement n’est plus indiquée et un code que l’on scanne permet d’accéder à un site de Selosse qui va donner toutes les informations sur cette bouteille. J’avoue que je suis peu favorable à cette pratique, surtout quand on est au restaurant.

La bulle est très active et la couleur est d’un blé doré très beau. En bouche le champagne me séduit par ses complexités. Il est moins sauvage et brutal que dans des expressions antérieures, mais il garde un côté énigmatique très plaisant. Le champagne est vif, cinglant, conquérant, et en même temps très noble et racé. Il est idéalement fait pour la gastronomie, hors des sentiers battus.

Je l’ai apprécié sur des coquilles Saint-Jacques élégantes et gourmandes.

Mon plat est un ris de veau cuit comme il convient. L’Hermitage Jean-Louis Chave rouge 2015 est jeune et puissant. Ce qui frappe, c’est son équilibre serein. C’est un grand vin, sans conteste. Mais comme j’adore cet Hermitage lorsqu’il a un âge affirmé, j’avoue que mon plaisir n’est pas total. Ceci n’enlève rien à la grandeur de cet vin que j’adore, mais plus que d’autres, il me pousse vers les vins anciens sir grands chez Chave.

Le Brie à la truffe s’exprime aussi bien sur l’Hermitage que sur le champagne. Les discussions fusaient. Ce fut un repas familial souriant et affectueux.

dîner au restaurant l’Ecu de France vendredi, 3 novembre 2023

Nous allons dîner au restaurant l’Ecu de France où nous n’étions pas revenus depuis le repas de mes 80 ans. Nous avons notre table habituelle, face à la Marne. L’accueil de la famille Brousse est toujours aussi chaleureux, très familial.

Je choisis un vin devenu rare et cher, un Châteauneuf-du-Pape Château Rayas blanc 2009. Tout dans ce vin est passionnant car il est hors de tout code. Énigmatique mais sympathique. J’aime la fraîcheur, les épices qui sont discrètes. J’aime quand un vin ne veut pas montrer qu’il est grand.

Pendant tout le dîner, cela a attiré mon attention car il était imprévisible. J’aime ça. Sur des coquilles Saint-Jacques et un turbot, un pur plaisir, même si le poisson était plus cuit qu’il ne faudrait.

Je ne dirais pas que ce vin est au-dessus de tout. Mais je l’attendais sauvage et il m’a apporté une émotion particulière.

Déjeuner d’anniversaire samedi, 21 octobre 2023

Ma fille vient déjeuner à la maison avec son compagnon et ses deux enfants. L’apéritif se fera avec une tarte aux oignons et le plat du repas sera poulet et gratin de pommes de terre.

Je propose à ma fille de boire soit un Salon 2006 soit un Ayala 1964. Elle irait volontiers vers le plus jeune mais elle préfère me laisser choisir. J’ai envie d’essayer l’Ayala.

Le Champagne Ayala 1964 a un bouchon qui se brise à la torsion et même s’il n’y a pas de pschitt, lorsque je verse le champagne dans les verres, la bulle est extrêmement active.

La couleur est très claire pour un champagne de cet âge. Cet Ayala se caractériserait volontiers par deux mots : jeunesse et cohérence. Car sa vivacité est extrêmement plaisante et sa rondeur est magnifiquement construite. Les oignons légèrement sucrés s’allient parfaitement au champagne.

Si ma fille avait des réserves pour un champagne de presque soixante ans, ces réserves tombent car le plaisir est là et l’âge ne se sent pas du tout. Je savais que les Ayala de cette époque sont grands. En voici une belle preuve.

J’ai ouvert aux aurores le Corton Renardes Michel Gaunoux 1974. Le choix de cette année est directement lié au fait que nous célébrons l’anniversaire de ma fille qui est de ce millésime. Mais il y a une autre raison. Lorsque ma fille était petite, j’avais acheté des vins de son année de naissance en me disant qu’on les boirait pour ses 18 ans. Je n’imaginais pas plus loin ! Et j’avais remarqué à quel point le 1974 de Michel Gaunoux était une spectaculaire réussite.

Ce qui fait que lorsque je me rends aux présentations des vins récents des domaines familiaux de Bourgogne, la plus belle présentation de vins qui soit, je ne manquais pas de dire aux Gaunoux présents : « vos 1974 sont de pures merveilles ». Ils riaient de mon insistance.

Et le miracle des 1974 se poursuit aujourd’hui. Ce Corton est très salin, mais d’un sel très différent de celui des vins de la Romanée Conti. Le sel est ici plus pénétrant et moins vagabond qu’à la Romanée Conti.

Le Corton Renardes est grand, épanoui et une fois de plus, voici un vin qui n’a pas d’âge. Il a atteint une sérénité idéale.

Il faudrait dire et redire que le poulet de qualité est un compagnon idéal des grands vins car il a l’intelligence de s’effacer pour laisser éclore parfums et subtilités.

Le dessert habituel des anniversaires est une reine de Saba, couronne où sont plantées les bougies qui, au fil du temps deviennent moins nombreuses que les années fêtées.

Deux vins superbes pour une célébration débordant d’affection.

Déjeuner à l’Assiette Champenoise vendredi, 20 octobre 2023

Le lendemain matin, à l’Assiette Champenoise, nous prenons le petit déjeuner dans la grande salle proche de la piscine où le service est souriant. J’ouvre mon vin cadeau pour notre groupe, un Hermitage Paul Etienne 1943 au niveau remarquable dans le goulot. Le nez est superbe et le couleur est belle.

Je regarde la carte des vins sur un support électronique intelligent et je choisis les vins du repas en fonction des plats. Mon choix est soumis au sommelier chef et à Arnaud Lallement qui le valident.

Nous prenons l’apéritif au bar avec un Champagne Legras & Haas Les Sillons 2013. Les amuse-bouches sont variés et délicieux. Le champagne est parfait et 2013 semble une année prometteuse.

Nous passons à table. Le menu écrit par Arnaud Lallement est ainsi rédigé : tourteau de Roscoff – laitue de mer / Saint-Jacques de Normandie – poireau B. Deloffre / turbot breton – caviar Kaviari / chou – Pontoise / homard bleu – hommage à mon papa / céleri confit – B. Deloffre / biche en filet rôti – légumes racines A. Deloffre /chocolat Tuma yellow – glace grué de cacao.

Ce repas est particulièrement réussi avec un talent et des cuissons de rêve. Pratiquement à chaque plat, Arnaud est venu vérifier si nous étions satisfaits et je l’ai senti sensible à mes commentaires. Le plat le plus excitant est celui des coquilles Saint-Jacques en trois parties dont une est faite des produits que mangent les coquilles dont des moules. En goûtant cette partie du plat, j’ai l’instinct qu’elle ira avec un vin rouge et je demande qu’on serve la Côte Rôtie Domaine Jamet 2017 et l’accord m’enthousiasme. Autour de moi, les avis sont partagés entre ceux qui agréent ma suggestion et ceux qui la récusent. A chacun son goût.

Dans l’ordre de service nous avons un Champagne Bérèche & Fils Mailly Grand Cru 2013 très différent du pur chardonnay de Legras & Haas. J’adore la vivacité et la force que donne le pinot noir.

Le Château Chalon A et M Tissot 2008 a une forte personnalité et répond au chou. La cuisson du turbot est irréellement belle et a appelé un vin rouge.

Les deux vins du sud, le Domaine de Trévallon 2013 et le Château Simone Palette 2019 sont parfaits pour le homard et le céleri. Deux vins de belles typicités.

La biche appelle l’Hermitage Paul Etienne 1943 qui se révèle transcendantal et très au-dessus de tous les autres vins. C’est un miracle que ce vin totalement épanoui et bâti pour l’éternité.

Un ami avait apporté un Armagnac 1943 que j’ai trouvé particulièrement jeune pour son âge, mais qui a accompagné avec pertinence le dessert au chocolat.

Je suis content d’avoir échangé avec Arnaud Lallement pour ce repas exceptionnel et les vins qui ont suivi le menu se sont montrés pertinents.

Cette ‘escapade’ champenoise avec un dîner chez Krug et un déjeuner à l’Assiette Champenoise fut un beau cadeau pour nos 80 ans.


ouverture de mon cadeau

avec Arnaud Lallement et son équipe