Dîner chez une amie vendredi, 11 novembre 2016

Avec ma femme je vais dîner chez une amie qui a invité des amis que nous n’avons pas revus depuis plus de vingt ans. C’est un grand plaisir de voir ressurgir des souvenirs comme s’ils étaient d’hier. Mais bien sûr on constate que la marche du temps change significativement les corps et beaucoup moins les esprits, car nous avons ri comme jadis.

Notre amie a ouvert deux bouteilles de son défunt mari de Château L’Angélus 1984. La première a une belle matière, mais des traces de poussières gustatives empêchent de l’aimer. La seconde est beaucoup plus pure et montre que même de 1984, des vins peuvent avoir une belle structure, lourde et charpentée. C’est un vin qui évoque la truffe et la mine de crayon. Il est fort agréable sur la cuisine bourgeoise succulente de notre amie.

J’ai apporté une Côte Rôtie La Landonne Guigal 1997 car je ne voulais pas prendre une année trop puissante pour notre amie habituée aux vins de Bordeaux. Le vin est tout en discrétion, même presque trop, comme s’il souffrait de timidité. Mais le finale de grande fraîcheur en fait un vin sympathique et gourmand qui nous a séduits.

Dégustation de 5 vins du domaine Comte Liger-Belair sur deux millésimes vendredi, 11 novembre 2016

Le syndicat international des vignerons en culture biodynamique (SIVCBD) tient salon sous le nom BIODYVIN dans des salons de l’hôtel Intercontinental Opéra. Soixante vignerons ont chacun un stand, de toutes les régions de France. Ce qui m’intéresse plus particulièrement c’est une dégustation en petit comité, une quinzaine de personnes, de vins du domaine Comte Liger-Belair. C’est Louis-Michel Liger-Belair lui-même qui m’a demandé d’y assister, honneur que j’apprécie.

Les dix vins qui seront dégustés sont déjà servis dans les verres, ce qui est une bonne chose, car les verres ne sont pas trop froids et il n’y a pas le mouvement incessant des serveurs. Avant de démarrer, un petit film montre les vendanges 2016. L’usage de drones qui survolent les vignes et les vendangeurs donne des images du plus bel effet.

Louis-Michel nous laisse libres de choisir l’ordre de dégustation des cinq vins présentés sur deux millésimes, 2008 et 2013. Je choisis pour chaque vin de commencer par le 2013, suivi immédiatement après par le 2008.

Louis-Michel a commencé la démarche en biodynamie en 2008 et dit que la première année où il sent les effets de ce qu’il recherchait dans la biodynamie est 2013.

Le Vosne-Romanée Clos de Château Monopole Domaine Comte Liger-Belair 2013 a un nez très fort, puissant, un peu pétrolé. Le nez du Vosne-Romanée Clos de Château Monopole Domaine Comte Liger-Belair 2008 est moins fort mais plus intense. Le 2013 a beaucoup de personnalité, un peu de fumé. Il est très joli, fort et riche. Le 2008 est plus calme, plus assis. Il a moins de tension que le 2013. Le 2008 manque un peu de corps. Le 2013 est très vif. Je classe 2013 / 2008.

Le Vosne-Romanée 1er Cru Les Suchots Domaine Comte Liger-Belair 2013 a un nez tout en charme, séduction, douceur. Il évoque la luxure. La bouche est bien fluide, le vin a beaucoup de charme, il est racé. La persistance aromatique est très forte, avec du velours.

Le Vosne-Romanée 1er Cru Les Suchots Domaine Comte Liger-Belair 2008 a un nez plus intense que le 2013 ce qui est l’inverse de la situation du Clos du Château. C’est un beau vin qui profiterait de vieillir, car il est dans une phase ingrate qui limite son accomplissement. Les deux vins ont une grande personnalité. Je classe 2013 / 2008.

Le Vosne-Romanée 1er Cru Aux Reignots Domaine Comte Liger-Belair 2013 a une couleur très foncée. Le nez est plus calme. L’attaque est assez acide. Le vin a un beau corps. Le finale est beaucoup plus agréable. C’est un vin profond.

Le Vosne-Romanée 1er Cru Aux Reignots Domaine Comte Liger-Belair 2008
a un nez aussi calme. C’est un vin qui n’est pas totalement intégré. Il est dans une phase de fermeture. Le 2013 est beaucoup plus charmeur et le 2008 est un peu amer dans le finale. Je classe 2013 / 2008.

L’Echézeaux Grand Cru Domaine Comte Liger-Belair 2013 a un nez discret. L’attaque est noble. La bouche est superbe. Il y a pas mal d’amertume dans ce vin.

L’Echézeaux Grand Cru Domaine Comte Liger-Belair 2008 a un très joli nez. L’attaque est d’un petit fruit rouge aigrelet. Le finale est noble. Je ressens du sel. Ce vin est beaucoup plus agréable. Je suis donc tenté de classer enfin le 2008 devant le 2013 mais le 2013 qui s’est ébroué a maintenant un finale très brillant. Pour ne pas retomber dans les mêmes classements, je vais mettre ex-aequo les deux vins.

La Romanée Grand Cru Domaine Comte Liger-Belair 2013 a un nez très subtil. Tout est contenu. C’est un vin tout en douceur dont j’aurais tendance à dire qu’il est parfait, au finale très grand. C’est un vin de douceur subtile, de charme et de sensibilité.

La Romanée Grand Cru Domaine Comte Liger-Belair 2008 a un nez qui n’est pas totalement net. Il a de la grâce, mais un peu d’étable aussi. Le bouche est claire, fluide, charmante et fruitée. La robe a un soupçon de tuilé. Le finale n’est pas assez long pour un vin de ce niveau. Il est soit dans une mauvaise période, soit la bouteille a un léger problème.

Les trois vins qui sont au sommet sont la Romanée 2013 et les deux Echézeaux. Tous les autres sont globalement nobles et raffinés. C’est une très belle dégustation mais il n’y a pas eu de réel combat entre les deux années.

Juste après cette dégustation je rejoins « Rhône en Seine » Place Vendôme où 41 vignerons présentent généralement leurs 2014 mais aussi des années plus anciennes. Comme chaque année je constate que les vins du Rhône ont atteint des niveaux très significatifs en matière de précision, même pour des appellations moins en vogue. Les vins sont chargés en alcool mais ils jouissent d’une belle fraîcheur. La proximité des deux dégustations montre à quel point les vins de Liger-Belair sont dans un registre de noblesse et de complexité par rapport aux vins du Rhône plus solaires, gourmands et directs. Les directions sont très opposées mais il faut aimer les deux.

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A fantastic vertical tasting of Pol Roger Winston Churchill in 15 vintages, in magnums and Jéro lundi, 7 novembre 2016

The dinner that justifies my presence in London is held in the Intercontinental Park Lane at Theo Randall Restaurant. A crazy collector of champagne, Peter, has collected all the years that have been made of Pol Roger’s Cuvée Winston Churchill, and present them tonight in magnum or for 1988 in Jeroboam.

We are 18 around a table with fifteen glasses in front of us, for the « serious » part, that of the tasting. There will then be a dinner where we can continue to taste the wines during the meal.

We are greeted by a non-vintage Champagne Pol Roger magnum which is very nice and expressive.

Peter is proud to be able to realize this event of which James, the director of Pol Roger U.K. tells us that such a vertical has never been organized. It recalls the history of this cuvée. The figures he quotes about champagne consumption by Winston Churchill are quite staggering, the first order of champagne from this great man to Pol Roger dating back to 1908. What he consumed Pol Roger is in tens of thousands of bottles.

The champagnes will be served in sets of three, in order of years, from the youngest champagne to the oldest. The Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill is made of about 80% Pinot Noir and 20% Chardonnay. He spent about ten years on the lees.

The Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 2004 has a rather discreet nose. It evokes hazelnuts. He is very fluid and has a very strong personality.

The Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 2002 has a superb nose. It is a little less lively than the 2004. It has a lot of grace.

The Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 2000 is unfortunately corked. I prefer the 2004 at this stage of his life, but the 2002 will grow. My ranking is 2004/2002/2000.

The Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1999 has a superb nose, the most beautiful of the following three. He has a very strong personality, with hazelnuts in a superb finish. It is a champagne of pleasure.

The Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1998 is lighter and more fluid, less assertive than the 1999 that I prefer. But it is noble and beautiful and is best when it asserts itself in glass

The Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1996 has a fragrance so strong that it explodes aromas. It does not have the presence that one would expect from a 1996. This is due to the bottle that is not perfect. Although the 1999 is definitely a champagne of pleasure, I rank 1998/1999/1996.

The Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1995 has a superb and noble nose. It has a very nice attack with croissant and suggested milk bread, but it lacks a tiny bit of vivacity.

The Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1993 has a delicate nose and a floral mouth that evokes me the lily of the valley. It is so romantic that it is a divine surprise.

The Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1990 is good and plays on its vinosity and its strength but it is perhaps a little too « good soldier ». This series contains three wines of very high quality and strong personality. I rank 1993/1995/1990 which would not be obvious according to the fame of the vintages. This series impressed me.

The Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill 1988 Jeroboam has a fantastic nose amplified by the format. This wine is absolute perfection. It is monumental, evoking honey. I am so impressed that I shut myself in my bubble to enjoy it. I tell Peter that this wine alone justifies my trip to London because we are faced with an unusual emotion. Tonight, I touched perfection.

The Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1986 is very difficult to pass after the 1988. Its nose is weak.

The Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1985 is beautiful but the remanence of 1988 keeps me from loving it as it should be. The classification of this series is 1988/1985/1986.

The Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1982 has a very amber color. The nose is that of an ancient wine. The wine is nice, and interesting, but it is much older than what should be 1982.

The Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1979 has a slightly amber color. The wine is corked. The finish is unpleasant. It is impossible to drink it.

The Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1975 is a champagne that is not perfect but I find it madly interesting. He evokes for me all that the Winston Churchill can give when he is old. It is not very long but inspiring. The series is classified as follows: 1975/1982/1979.

The strong personality of this champagne is impressive, and this tasting exceeds in quality last night with the Bollinger Vieilles Vignes Françaises and the Salon. The 1988 in Jeroboam is so exceptional that it illuminated the tasting. Then there is the 1993 superbly romantic and the 2004, very assertive. Let us add the 1975 that prefigures the ancient champagnes. The Cuvée Winston Churchill is undoubtedly a great champagne very typical.

There are so many champagnes that we continue to drink between participants while our table is prepared for dinner.

The menu is Italian-inspired: panfried Scottish scallops with Cima di rape / ravioli of roasted delica squash, ricotta and marjoram with butter and sage / roasted rack of Somerset lamb with Jerusalem artichokes, carrots, baby leeks, fennel, turnips with salsa d ‘Ebe and jus / cheese served with mostarda and homemade crackers / Sicilian chocolate and orange cake with roasted almond ice cream.

I obviously come back to the Winston Churchill Jeroboam 1988 and around 1993 which have major gastronomic virtues. But Peter added to the program a very pleasant Beaune Clos des Mouches red Joseph Drouhin 2011 on the excellent cuisine of the restaurant, then the Champagne Pol Roger 2008 and the Champagne Pol Roger rosé 2008, but I no longer minded the analyze.

There were a few problem bottles, but that’s a small thing when you can retain the perfection of a few wines that made this evening a memorable one.

The 1988 will be very high in my champagne Pantheon.

(pictures of this tasting can be seen in the article in French on this subject)

Brillantissime verticale de Pol Roger Winston Churchill lundi, 7 novembre 2016

Le dîner qui justifie ma présence à Londres se tient dans l’hôtel Intercontinental Park Lane au restaurant Theo Randall. Un collectionneur fou de champagne, Peter, a rassemblé toutes les années qui ont été faites de la Cuvée Winston Churchill de Pol Roger, et les présente ce soir en magnum ou pour le 1988 en jéroboam.

Nous sommes 18 autour d’une table avec quinze verres devant nous, pour la partie « sérieuse », celle de la dégustation. Il y aura ensuite un dîner où nous pourrons continuer à goûter les vins pendant le repas.

Nous sommes accueillis par un Champagne Pol Roger magnum non millésimé qui est très agréable et expressif.

Peter est fier de pouvoir réaliser cet événement dont James, le directeur de Pol Roger U.K. nous dit qu’une telle verticale n’a jamais été organisée. Il rappelle l’histoire de cette cuvée. Les chiffres qu’il cite de la consommation de champagne par Winston Churchill sont assez ahurissants, la première commande de champagne de ce grand homme à Pol Roger datant de 1908. Ce qu’il a consommé de Pol Roger se compte en dizaines de milliers de bouteilles.

Les champagnes seront servis par séries de trois, dans l’ordre des années, du plus jeune champagne au plus ancien. Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill est fait d’environ 80% de pinot noir et 20% de chardonnay. Il passe environ dix ans sur lies.

Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 2004 a un nez assez discret. Il évoque les noisettes. Il est bien fluide et a une personnalité très forte.

Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 2002 a un nez superbe. Il est un peu moins vif que le 2004. Il a beaucoup de grâce.

Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 2000 est hélas bouchonné. Je préfère le 2004 à ce stade de sa vie, mais le 2002 va s’étoffer. Mon classement est 2004 / 2002 / 2000.

Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1999 a un nez superbe, le plus beau des trois suivants. Il a une très forte personnalité, avec des noisettes en un finale superbe. C’est un champagne de plaisir.

Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1998 est plus léger et plus fluide, moins affirmé que le 1999 que je préfère. Mais il est noble et beau et se révèle meilleur lorsqu’il s’affirme dans le verre

Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1996 a un parfum si fort qu’il explose d’arômes. Il n’a pas la prestance que l’on attendrait d’un 1996. Cela tient à la bouteille qui n’est pas parfaite. Même si le 1999 est décidément un champagne de plaisir, je classe 1998 / 1999 / 1996.

Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1995 a un nez superbe et noble. Il a une attaque très agréable avec croissant et pain au lait suggéré, mais il manque d’un tout petit peu de tranchant.

Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1993 a un nez délicat et une bouche florale qui m’évoque le muguet. Il est tellement romantique que c’est une divine surprise.

Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1990 est bon et joue sur sa vinosité et sa force mais il est peut-être un peu trop « bon soldat ». Cette série contient trois vins de très haute qualité et de forte personnalité. Je classe 1993 / 1995 / 1990 ce qui ne serait pas évident sur le papier. Cette série m’a impressionné.

Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill jéroboam 1988 a un nez fantastique amplifié par le format. Ce vin est la perfection absolue. Il est monumental, évoquant le miel. Je suis tellement impressionné que je me renferme dans ma bulle pour en profiter. Je dis à Peter que ce seul vin justifie mon voyage à Londres car on est en face d’une émotion hors du commun. Ce soir, j’ai touché la perfection.

Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1986 a bien du mal de passer après le 1988. Son nez est faible.

Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1985 est beau mais la rémanence du 1988 m’empêche de l’aimer comme il le faudrait. Le classement de cette série est 1988 / 1985 / 1986.

Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1982 a une couleur très ambrée. Le nez est celui d’un vin ancien. Le vin est agréable, et intéressant, mais il est beaucoup plus vieux que ce que devrait être 1982.

Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1979 a une couleur un peu ambrée. Le vin est bouchonné. Le finale est désagréable. Il est impossible de le boire.

Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill magnum 1975 est un champagne qui n’est pas parfait mais je le trouve follement intéressant. Il évoque pour moi tout ce que le Winston Churchill pourra donner lorsqu’il sera ancien. Il n’est pas très long mais inspirant. La série est classée ainsi : 1975 / 1982 / 1979.

La forte personnalité de ce champagne est impressionnante, et cette dégustation dépasse en qualité celle d’hier soir avec le Bollinger Vieilles Vignes Françaises et le Salon. Le 1988 en jéroboam est tellement exceptionnel qu’il a illuminé la dégustation. Il y a ensuite le 1993 superbement romantique et le 2004, très affirmé. Ajoutons le 1975 qui préfigure les champagnes anciens. La Cuvée Winston Churchill est incontestablement un grand champagne très typé.

Il reste tellement de champagnes que nous continuons à trinquer entre participants pendant que l’on prépare notre table pour le dîner.

Le menu est d’inspiration italienne : panfried Scottish scallops with Cima di rape / ravioli of roasted delica squash, ricotta and marjoram with butter and sage / roasted rack of Somerset lamb with Jerusalem artichokes, carrots, baby leeks, fennel, turnips with salsa d’ebe and jus / cheese served with mostarda and homemade crackers / Sicilian chocolate and orange cake with roasted almond ice cream.

Je reviens évidemment vers le Winston Churchill jéroboam 1988 et vers le 1993 qui ont des vertus gastronomiques majeures. Mais Peter a ajouté au programme un Beaune Clos des Mouches rouge Joseph Drouhin 2011 fort agréable sur l’excellente cuisine du restaurant, puis le Champagne Pol Roger 2008 et le Champagne Pol Roger rosé 2008, mais je n’avais plus l’esprit à les analyser.

Il y a eu quelques bouteilles à problèmes, mais c’est peu de chose quand on peut retenir la perfection de quelques vins qui ont fait de cette soirée un moment mémorable. Le 1988 s’inscrira très haut dans mon Panthéon du champagne.

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Deux petites verticales de Bollinger VVF et Salon lundi, 7 novembre 2016

Peter, écossais collectionneur fou de champagnes a organisé un week-end de champagne à Londres. Il nous a donné rendez-vous au restaurant Elystan Street pour un dîner dont le thème est : Bollinger Vieilles Vignes Françaises et champagne Salon. C’est un restaurant tout nouveau créé par un français amateur de vin. Nous avons un espace particulier pour une table de huit dont Peter écossais, deux finlandais, un turc, un allemand, deux anglais et moi. Ce sont de solides connaisseurs des champagnes. Tout ce qui sera goûté est apporté par les convives.

Le menu est plus un support que le fruit d’une recherche d’accords. J’ai pris dans les choix possibles un tartare de bœuf avec cœur d’artichaut et truffe / ravioli de langoustine / daurade avec un risotto noir et champignons / tarte au citron. La cuisine est agréable mais notre intérêt est ailleurs.

Le Champagne Bollinger Vieilles Vignes Françaises 1998 a un nez de noisette et un goût prononcé de noisette. C’est un beau champagne avec un peu de gras. Avec un peu de pain et de beurre il perd son côté torréfié pour prendre de la largeur. Il est bon, mais pas transcendant.

Le Champagne Bollinger Vieilles Vignes Françaises 1999 qui est mon apport est plus frais, plus romantique. Il est d’une belle couleur, d’un beau parfum et très agréable. Il est doux.

Le Champagne Bollinger Vieilles Vignes Françaises 2000 est d’une couleur ambrée. Le nez fermé n’est pas très agréable. Il est lourd et manque d’équilibre. Ce doit être un problème de bouteille.

Le Champagne Bollinger Vieilles Vignes Françaises 2002 est frais, d’une belle vigueur et d’une grande vibration. Ce champagne a tout pour lui. C’est le plus vibrant de tous.

Le Champagne Bollinger Vieilles Vignes Françaises 2005 a de la fraîcheur mais il n’est pas très ouvert. Il est un peu serré, avec une légère amertume.

Le classement de ces champagnes serait pour moi : 2002 / 1999 / 2005 / 1998 / 2000.

Le Champagne Salon 1996 marque un saut qualitatif. Il est très grand. Très pur, il est vif et cinglant. On peut sentir un peu de lait et de citron. Sa longueur est extrême. Par curiosité, je reviens sur le Vieilles Vignes Françaises 2002 qui s’est un peu éventé dans le verre et sa matière vineuse est parfaite. Il a un peu de lacté. Il est brillant.

Le Champagne Salon 1997 est un champagne très agréable et frais. Autour de la table certains vont le préférer au 1996.

Le Champagne Salon 1999 est un bon champagne mais qui ne révèle pas des qualités hors norme.

Le Champagne Salon 2002 que j’ai apporté me surprend car s’il est bon, il manque un peu de vigueur et se situe en dessous des récents 2002 de Salon que j’ai bus. Il est un peu trop doux et n’a pas la vibration que j’attendais.

Le classement que je ferais est : 1996 / 1997 / 1999 / 2002.

Un participant anglais d’origine allemande a apporté une demi-bouteille de Eiswein Joh. Jos. Prüm Graacher Himmelreich 2002. C’est un vin très frais comme tous les vins de glace avec une acidité extrême. Il est très complexe et finit de jolie façon ce repas, bien adapté à la tarte au citron.

Pour le classement final nous sommes quasiment tous d’avis de classer le Bollinger Vieilles Vignes Françaises 2002 devant le Salon 1996.

Ce repas montre que les deux champagnes connaissent selon les millésimes des variations de qualité très importantes. Lorsqu’ils sont grands, ces deux champagnes sont de très haut niveau. Ce n’est pas le cas lorsqu’ils sont d’une année plus faible ou subissent la variabilité des bouteilles. Ce dîner cosmopolite fut intéressant même si je pense que chacun de ces champagnes aurait mieux brillé s’il avait été en situation de réelle gastronomie.

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Casual Friday de folie au 67 Pall Mall Club de Londres lundi, 7 novembre 2016

Lorsqu’en 2011 Moët & Chandon a fait une importante opération de communication sur le Moët 1911 vendu le 11 novembre à 11 heures dans 11 capitales de la planète, j’avais rencontré Peter, un jeune écossais fou de champagne que j’ai revu quelques fois pour partager de belles bouteilles. Il organise une dégustation verticale du champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill à Londres et la veille de cet événement, un dîner amical à thème avec apport de bouteilles des participants.

Je vais profiter de ce voyage pour apporter au 67 Pall Mall Club les bouteilles de l’un des trois dîners que je ferai en décembre dans ce club. Arrivé à la gare de Saint Pancrace, je me rends directement au club avec mes deux lourdes valises pour donner les vins à Terry, le chef sommelier. Passant par le bar je suis salué par quelqu’un qui devine qui je suis. Il me montre des bouteilles ouvertes de barolos aux années très anciennes et me dit qu’il va les boire ce midi en petit comité avec des amis grands collectionneurs de vins. Je ne sais pas par quel miracle je me trouve invité à me joindre à eux.

Julian qui a apporté les barolos est rejoint par Grant Ashton, gérant du club et deux de ses associés puis par deux autres amateurs. Nous serons sept pour un déjeuner qui est strictement dans le format qui préside aux Casual Friday que nous organisions à Paris avec quelques amis. Grant fait ouvrir par Terry un Champagne Dom Pérignon rosé 1990. Le nez de ce champagne de forte réputation est fantastique. Le goût est un peu serré. Mais lorsque le champagne s’étend dans le verre, il est glorieux. C’est un grand champagne de plaisir conforme à sa réputation.

Nous passons à table. Sur des huîtres bien goûteuses, Terry sert un Puligny-Montrachet Les Folatières Bachelet-Monnot 2011 qui a un très joli fruit et me fait une très bonne impression. Il est plein en bouche. Nous avons ensuite trois terrines, l’une au saumon, une autre à la grouse et une autre de gibier, qui s’expliquent par le fait que Grant et un de ses associés sont chasseurs. Le Château Gruaud-Larose 1959 a un nez fantastique. La couleur est un peu trouble mais le goût est superbe. L’attaque est parfaite et le finale est un peu amer mais cela s’arrange avec la grouse, le finale devenant très beau.

Le Château Latour 1962 est frais et fait beaucoup plus jeune que le 1959. Il est absolument équilibré mais il est trop « attendu », trop « bon élève » aussi est-ce le 1959 qui retient plus l’attention. Nous allons maintenant boire les cinq barolos de Julian.

Le Barolo Fontanafredda 1945 a un nez incroyable. On dirait un madère. L’alcool ressort. La couleur est très claire. Le goût est celui d’un vin fort en alcool et de café.

Le Barolo Borgogno Riserva 1937 a une couleur plus tuilée. Le nez est discret. J’adore ce vin doucereux, tout en velours. Il est plus vieux mais plein de charme. Le 1945 est plus vif, plus complet mais j’ai un petit faible pour le 1937 qui a des goûts qui évoquent des vins beaucoup plus vieux comme ceux des années 1910.

Le Barolo Cappellano 1935 a été « coraviné » depuis plusieurs mois car ici, ces amateurs ouvrent un grand nombre de bouteilles en utilisant le « Coravin » cet outil qui permet de prélever du vin dans la bouteille avec une seringue et de le remplacer par un gaz inerte. Ce mode de consommation n’entre pas dans ma philosophie mais mes convives n’ont pas mes réserves peut-être trop prudentes. Le vin est très subtil en bouche, élégant et un peu sec dans le final. La plus belle couleur est celle de 1945 et la plus vieille celle du 1937. Sur les giroles, le 1935 devient très vivant et je classe 1935 / 1945 / 1937 car le 1935 est celui qui colle le plus au goût des giroles.

Les deux barolos suivants sont servis sur un risotto à la truffe car dans ce club, apparemment, on ne se prive pas. Le Barolo Ceretto Riserva 1964 est parfait, sa couleur est belle et il a tout pour lui. Le Barolo Oddero 1967 est plus tuilé que le 1945 ce qui est étonnant. Des cinq barolos c’est le 1964 qui gagne, le tiercé étant 1964 / 1935 / 1945. Lorsque Julian me dit qu’il a plus de cinq mille barolos dans sa cave, j’ai l’impression d’être sur une autre planète.

Le Vega Sicilia Unico 1948 est réputé pour être l’un des plus grands Unico qui aient été faits et cette bouteille va conforter cette réputation. Le nez suggère des petits fruits rouges comme le font des bourgognes du début du 20ème siècle. Il est extrêmement délicat. Il allie puissance et velours, c’est un des très grands Unico.

Le Valbuena 5 Bodega Vega Sicilia 1977 a un nez de café et fait vraiment plus vieux que son âge. Il va se réveiller sur la viande. Il n’est pas aussi noble que l’Unico mais il est bon.

Le Château Léoville-Poyferré 1982 est superbe, magnifique, dans un état glorieux. C’est une très belle bouteille. Le Château Gruaud-Larose 1982 est bon, mais je préfère le Poyferré.

Le Château Haut-Brion rouge 1998 est un grand vin avec un très joli fruit, mais son finale est trop jeune aussi ne brille-t-il pas autant que cela en face des 1982 alors qu’il est d’une plus noble matière.

Le vin est un être vivant puisque par la suite, sur l’excellente viande, je préfère le Gruaud-Larose au Poyferré. Grant Ashton ajoute un vin mystère à découvrir . L’un des convives le trouve. Il s’agit du Château Haut-Brion rouge 1995 que j’aurais imaginé beaucoup plus vieux notamment à cause de la lie dans le verre.

L’ambiance de ce petit groupe est amicale et généreuse. L’usage du Coravin permet de multiplier les vins puisque ceux qui sont ouverts pourront être bus une nouvelle fois. La nourriture est excellente, le vin du repas, c’est le Vega Sicilia Unico 1948. Dans l’ambiance communicative de ce genre d’évènements nous avons pris date pour une revanche où j’aurai l’occasion d’apporter du vin. Londres est la patrie des amateurs de grands vins.

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Interview dans ma cave lundi, 7 novembre 2016

Une journaliste et une « camerawoman » viennent m’interviewer dans ma cave. J’ai parlé plusieurs heures, répondant aux questions de la journaliste, qui va trier dans ce que j’ai dit de quoi faire huit minutes de portrait pour une télévision câblée. Pour le déjeuner dans mon local, des sushis sont été livrés. J’ouvre un Champagne Krug Grande Cuvée que je dois avoir depuis sept à huit ans en cave. Le bouchon est particulièrement court. La bulle est très active, la couleur est d’un beau jaune clair. Ce champagne est d’un confort absolu. Il est franc, facile à comprendre mais il est aussi noble, riche, varié, porteur de bonheur. Il laisse une belle trace en bouche franche et marquée. C’est le champagne qu’on boirait chaque jour sans se lasser.

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Un expert en vins dans ma cave lundi, 7 novembre 2016

Pour une raison que je n’ai pas mémorisée, un important marchand de vins danois que je connais m’avait confié il y a sept ans une dizaine de vins très rares en me demandant de les garder pour lui pendant quelques mois. Voici qu’il se manifeste après tant d’années et me demande de lui restituer les vins. Fort heureusement, les vins sont toujours dans ma cave. Il me demande de les faire authentifier par un expert et je suppose que ce n’est pas par défiance à mon égard mais plutôt pour pouvoir les vendre, car ce sont des vins qui tentent les faussaires du fait de la facilité à les copier. Un expert que je connais bien pour avoir acheté par son intermédiaire de grandes quantités de vins vient dans ma cave et en profite pour la visiter. Il s’applique à son expertise qui s’avère positive et en nous promenant ensuite dans ma cave, nous parlons de vin. A un moment, j’évoque Vega Sicilia Unico, dont je suis amoureux. Alors qu’il a une grande expérience des vins, mais surtout français, il n’a jamais bu ce vin. Ma réponse est immédiate : « nous allons arranger ça ».

Je choisis en cave un Vega Sicilia Unico 1995 car il faut un vin jeune si on le boit froid de cave et juste ouvert. Mon ami expert a besoin de temps pour s’acclimater alors que je suis à l’aise avec ce vin que je connais comme ma poche. Il est puissant, vif, conquérant, mais sa grâce vient d’un fraîcheur rare et d’un final frais comme il n’est pas permis. Je me régale et mon ami commence à apprécier ce vin jeune et ensorcelant. Nous continuons à bavarder et après deux verres versés à chacun je referme la bouteille pour l’affecter à mon dîner.

A la maison je suis seul car ma femme est partie dans le sud. Un gruyère puis un fromage très typé feront mon dîner. Le vin s’est épanoui, et je suis fasciné tant il a de grâce. Il est juteux comme on ne le croirait pas, avec des évocations de cassis et de myrtille. Il a une fraîcheur à se damner et son équilibre est enthousiasmant. J’en laisse un peu pour le lendemain, pour prolonger le plaisir. Il est sûr que l’on boit ce vin trop tôt car dans quinze ans il sera impérial, mais le crime d’infanticide est pardonné car il apporte un plaisir rare de vin velouté d’une grâce infinie. Mon amour pour ce vin espagnol s’est encore renforcé.

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dîner des amis de Bipin Desai au restaurant Laurent dimanche, 30 octobre 2016

Le dîner des amis de Bipin Desai, grand collectionneur de vins et professeur de physique nucléaire à Berkeley est devenu une institution. C’est la seizième année consécutive que je l’organise. Selon la tradition je compte ce dîner dans les dîners de wine-dinners. Ce sera le 204ème. Des vignerons participent et apportent des vins. Nous serons moins nombreux cette année car la date choisie par Bipin est très tôt et ne permet pas à certains vignerons encore en vinification de venir.

Nous serons sept au restaurant Laurent, Caroline Frey de Paul Jaboulet Aîné, Frédéric Barnier de la maison Louis Jadot, Jean-Luc Pépin du domaine Georges de Vogüé, Gilles de la Rouzière de la maison Henriot et de la maison Bouchard Père & Fils, Aubert de Villaine du domaine de la Romanée Conti, Bipin Desai et moi. Richard Geoffroy de Dom Pérignon s’est désisté la veille mais nous a demandé de boire son vin.

J’arrive à 17 heures pour ouvrir les vins. Le bouchon du montrachet va vers le bas lorsque je veux le piquer avec mon tirebouchon. Je suis obligé de pointer sur le bord du bouchon le long du verre pour empêcher tout recul. Le bouchon a souffert sur la moitié supérieure, il est gras sur cette partie. Fort heureusement son parfum ne montre aucune trahison du bouchon. Deux vins ont été reconditionnés, le Richebourg 1954 en 1995 et l’Hermitage Sterimberg 1991 en 2016. Le Beaune 1964 semble avoir son bouchon d’origine, attaqué sur la partie supérieure mais très sain en bas. Aucun vin ne semble avoir un problème. Tout se présente au mieux.

Caroline Frey est arrivée en avance et nous comparons son Hermitage Chevalier de Sterimberg Paul Jaboulet Aîné magnum 1991 avec l’Hermitage Chave blanc 1992 gardé de la veille au restaurant Piège. Caroline avait choisi sa bouteille car une dégustation récente l’avait éblouie. Elle ne reconnaît pas son vin et comme tous ceux qui veulent faire plaisir, elle est furieuse. J’ai beau lui dire que son vin va s’ouvrir et s’épanouir avec le plat prévu, elle n’écoute pas. Or j’aurai raison.

L’apéritif dans la rotonde d’entrée se prend avec le Champagne Henriot Cuvée des Enchanteleurs magnum 1959. Sa bulle est très active sa couleur très claire. Le goût est profond, toasté et de pâtisserie. La signature « Enchanteleurs » est très sensible. C’est un très grand champagne de sérénité et d’affirmation. Il est assez incroyable qu’il ait cette vivacité et profondeur à 57 ans. C’est l’une des plus grandes réussite de la cuvée des Enchanteleurs.

Nous passons à table. Le menu créé par Alain Pégouret est : Saint-Jacques marinées, lait crémeux au goût fumé, salade potagère aux noisettes / Langoustines cuites au naturel et servies dans un consommé clair de bonite et d’algues kombu, pleurotes et borage / Ris de veau, poêlée de cèpes / Pièce de bœuf poêlée, servie en aiguillettes, pommes soufflées « Laurent », jus aux herbes / Soufflé chaud au calisson d’Aix.

Les Saint-Jacques sont crues et superbes et accueillent deux vins. Le Montrachet Domaine Louis Jadot magnum 1990 est, « tout simplement », une bouteille exceptionnelle. Ce Montrachet est un soleil radieux. On ne peut pas l’imaginer meilleur et il est très au-dessus du Montrachet Leflaive 1999 bu la veille. On sent quand on est en face de la perfection, alors, on n’analyse plus, on profite du moment et de la longueur incroyable de ce vin. Il a du miel, de la pâtisserie, mais surtout, c’est un vin ensoleillé d’une rare pureté.

Le Musigny blanc Domaine Comte de Vogüé 1987 a un peu de mal à côté du montrachet mais il a beaucoup à dire car il est extrêmement typé et expressif malgré son année. C’est un vin de recueillement, gracile et complexe.

Les langoustines sont goûteuses et le bouillon réveillerait n’importe quel vin. Avec lui, l’Hermitage Chevalier de Sterimberg Paul Jaboulet Aîné magnum 1991 retrouve les qualités que ce vin doit avoir, avec cette amertume si caractéristique qui m’évoque celle de l’olive. Le plat est exceptionnel et met en valeur les trois blancs, avec la langoustine presque sucrée et le bouillon multiplicateur des goûts.

Le ris de veau est très nettement plus gourmand que celui mangé hier au « grand restaurant » de Piège. Il convient à merveille pour faire apparaître la délicatesse du Richebourg Domaine de la Romanée Conti magnum 1954. Aubert de Villaine sait que pour moi la signature des vins du domaine est le sel. Aubert est plus sensible au cuir, mais je ne le suivrais pas dans cette direction. Le vin est d’une rare subtilité, pour moi marquée par le sel. Tout est suggéré et le vin est d’un charme rare. Son fruit est délicat. Il y a de la truffe, presque charbonnée dans la lie. Ce vin est tout en évocation.

La pièce de bœuf accueille deux vins. Le Beaune Grèves Vigne de l’Enfant Jésus Bouchard Père & Fils magnum 1964 contraste avec le Richebourg. C’est un vin solide, carré, assis, fort sur ses assises. Il a une plénitude certaine, une belle mâche et le fait que son bouchon soit d’origine lui donne une authenticité et une grande pureté. J’adore son équilibre et une grande vivacité pour 52 ans.

Le Musigny rouge Domaine Comte de Vogüé 1986 me gêne un peu et on le sent un peu liégeux. Je ne serais pas éloigné de penser que son bouchon probablement changé récemment ait entraîné ce petit défaut. On sent malgré tout une belle personnalité un peu masquée par les deux vins précédents.

Le Champagne Dom Pérignon P3 magnum 1973 est une merveille. Le champagne est plus jeune que son âge du fait du dégorgement tardif, mais il combine parfaitement la puissance de la jeunesse avec l’accomplissement d’un champagne ancien. Sa bulle est vive, et son romantisme est là, vivant, expressif. C’est un très beau champagne, même si j’ai une tendresse pour les dégorgements d’origine.

Tous les vins donnés généreusement ont été grands. Trois ont mes faveurs, le montrachet Jadot 1990 exceptionnel, le Richebourg de la Romanée Conti 1954 d’une immense émotion et le Dom Pérignon 1973 au romantisme qui n’exclut pas la puissance de persuasion. Les autres ont été grands.

Dîner à sept permet des discussions auxquelles tout le monde participe. La générosité de tous est sans limite. Mais il convient de donner la palme à la cuisine d’Alain Pégouret. La justesse des plats, la cohérence des goûts qui apportent une plus-value aux vins a atteint ce soir un niveau exceptionnel. Le bouillon des langoustines a sublimé les blancs, le ris de veau parfait a projeté le Richebourg à des sommets, les pommes soufflées magiques ont fait briller les vins rouges. Alain s’est surpassé ce soir.

Le service des vins et des plats a été parfait. Philippe Bourguignon pourra se féliciter que l’esprit Laurent se perpétue aussi bien.

J’ai l’habitude de garder les bouteilles vides de mes repas. Ce soir, les magnums n’ont pas tous été finis. Ma fille est venue le lendemain dîner à la maison. Nous avons pu rendre hommage à ces vins splendides qui ont confirmé toutes leurs qualités. Ce dîner d’amitié avec des vignerons talentueux rassemblés autour de Bipin Desai est un des grands moments de bonheur dans mon parcours dans le monde du vin.

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dîner au Grand Restaurant, le restaurant de Jean-François Piège vendredi, 28 octobre 2016

Demain nous aurons le dîner des amis de Bipin Desai, dîner de vignerons que j’organise pour la seizième année consécutive. Lorsque Bipin Desai vient en France, il cherche des complices pour l’accompagner dans sa tournée des grands ducs. A plus de 80 ans comment fait-il pour être midi et soir pendant plus d’une semaine dans les grands restaurants ? Il me demande de partager avec lui un dîner au Grand Restaurant, le restaurant de Jean-François Piège. J’arrive à 19h50 et une jeune femme me barre la route en disant que je ne pourrai rentrer que dans cinq minutes. Je m’étonne car souvent les américains et les japonais viennent dîner dès 19h30. Elle me laisse entrer.

Le couloir d’entrée longe la cuisine que l’on voit bien à travers la vitre. C’est studieux et lumineux. Etant en avance je demande à rencontrer la jeune pâtissière qui a été nommée « pâtissier de l’année » par le guide Gault & Millau, pour la féliciter. Elle est charmante, enthousiaste et nous avons échangé quelques considérations sur les desserts. Je rentre ensuite dans la salle qui montre que le nom du restaurant est un clin d’œil, car c’est tout petit. Les murs sont en béton qui garde la trace des planches de coffrage. Le plafond est un entrelacs de polygones de verres colorés aux nombreuses inclinaisons. L’accueil est souriant. Je regarde la carte des vins qui est extrêmement fournie avec son lot de bouteilles incroyablement chères et des pépites à dénicher.

Je savais que Bipin m’entraîne toujours vers des vins chers et il ne va pas manquer à sa tradition. J’ai choisi le vin du Rhône et lui le vin de Bourgogne. Nous prenons le menu dégustation à quatre plats dont les intitulés sont : pomme de terre Agria soufflée craquante, la pulpe foisonnée d’extraits de crustacés, nage concentrée, gelée, caviar / fleur de déleri rave cuit au four dans de la flouve odorante, beurre battu, bouillon infusé des peaux toastées, bergamote / homard bleu cuit en feuilles de figuier, concentré de figues, foie gras épicé, poivre sauvage / veau de lait mijoté sur des coques de noix, jus d’ail vert, aiguilles d’haricots verts grillés, mousseline de noix / brie de Meaux fondant, glace à l’oseille, sablé / blanc à manger / glace persil, banane, poivre noir, ravioli.

Nous avons commencé par trois amuse-bouche qui sont une introduction sur le talent du chef. J’ai voulu qu’on m’imprime le menu, ce qui fut fait et qu’on indique les trois amuse-bouche mais on m’a refusé au prétexte curieux que ça change tous les jours. Si on a été capable de les présenter au moment du service on devrait pouvoir en restituer la mémoire. D’autant qu’ils sont fort bons. Pour eux, nous prenons chacun un verre de Champagne Dom Pérignon 2006 que je trouve dans un état de grâce absolue. Il a un nez de pierre à fusil et combine minéralité et romantisme. C’est vraiment un beau Dom Pérignon.

Alors que nous voulions mettre le vin du Rhône avant le vin de Bourgogne que nous estimions plus puissant, le sommelier qui a goûté les deux nous a suggéré l’inverse et il a eu raison.

Le Montrachet Domaine Leflaive 1999 est un grand vin. Son parfum est racé, sa complexité est immédiatement sensible en bouche, mais il manque de puissance. Il est nettement moins puissant qu’un Bâtard-Montrachet de Leflaive. Nous nous régalons sur le caviar et sur le céleri, mais objectivement ce vin n’a pas le niveau d’un Montrachet Leflaive. Il va d’ailleurs s’affadir, comme fatigué, sur la deuxième partie de la bouteille. Le montrachet se réveille sur le homard et va laisser la place au Rhône.

L’Hermitage Domaine Jean-Louis Chave blanc 1992 est superbe, de prestance, de présence et d’affirmation. Il est tout en richesse et en joie de vivre comparé au montrachet. On sent qu’il est moins complexe que le vin de Bourgogne, mais il compense par sa vivacité et son affirmation. C’est un très grand vin plein, l’Hermitage au sommet de sa gloire.

La cuisine de Jean François Piège m’apparaît comme fondée sur une précision et une justesse totale des goûts. C’est une cuisine de goûts affirmés. Je pense qu’il y a peu de chefs qui ont cette affirmation des goûts. Ça n’empêche pas de créer des surprises et le brie fondant avec une glace à l’oseille, c’est particulièrement osé, mais j’adore cette provocation gustative. Ce chef est un grand chef et c’est sur les détails que les choses vont moins bien. Les trois amuse-bouche se prennent à la main. Comme le premier est poudré d’une poudre de couleur bordeaux, on en a sur les doigts, on s’essuie sur la serviette et la serviette devient poudrée. On se pose la question de la changer ou non.

Ensuite et c’est une mode actuelle, chaque plat a une vaisselle qui lui correspond. Il y a une recherche visuelle certaine comme pour le homard, mais les créateurs d’assiettes oublient que l’on doit aussi poser ses couverts et comme il n’y a pas de porte-couteaux, les couverts se brinqueballent dans l’assiette, au risque de s’y salir. Ce détail n’est pas propre à ce restaurant. C’est une tendance.

Une autre mode est que l’on ne sert jamais un plat sans que quelqu’un ne vienne ajouter une sauce, voire deux. Il y a bien longtemps que je n’ai pas vu un plat arriver en une seule fois. Cette mode retombera un jour. Car même si l’ajoute au dernier moment d’une sauce a une pertinence certaine, ces allées et venues lassent. Jean-François Piège a fait ajouter des petits détails que, selon son humeur, on trouvera charmants ou agaçants. La jolie jeune fille qui tient avec un gant noir le pain demande qu’on le rompe c’est-à-dire qu’on le déchire en tirant, elle tenant l’autre bout. Ensuite au moment du blanc-manger, une boîte complexe créée comme le sigle du restaurant est apportée sur la table. C’est le client qui ouvre le couvercle de la boîte et il a devant lui deux petits pots et deux cuillers. Le client prend une cuiller et un petit pot et la demoiselle referme la boîte avec le secret espoir qu’on lui demande pourquoi elle ne laisse pas prendre les deux.

Enfin, lorsque la table se clarifie, une autre jolie jeune fille arrive avec boule de chocolat sur un socle. Avec son gant, elle prend la boule et la jette sur la table pour qu’elle se brise et que nous picorions les débris. Encore une fois ce sera plaisant ou lourd selon l’humeur que l’on aura.

Je ne prétends pas représenter un jugement universel, mais autant je suis farouchement favorable au talent du chef, prince des goûts, autant je ferais volontiers l’impasse sur les extravagances de service. Mais je peux imaginer que l’on ne soit pas d’accord avec moi. Restons ronchon jusqu’au bout, j’éprouve une certaine répulsion quand on me parle de « plat signature du chef ». Imaginons que l’on ait vingt tableaux de Van Gogh dans une salle de musée. A quoi sert qu’on nous dise que ce tableau est le tableau signature du peintre ?

Le service du vin a été parfait, avec un sommelier compétent. Le service des plats est attentif, il n’y a qu’à s’en féliciter. De ce repas je plébisciterai les amuse-bouche même s’ils ne sont pas faciles à manger, le céleri absolument bien traité, et cet extravagant brie fondant et sa glace à l’oseille. Le Grand Restaurant est une belle table qui mérite qu’on retienne plus les compliments que mes remarques à la marge.

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