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Dégustation des 2017 du Domaine de la Romanée Conti mercredi, 2 juin 2021

La société Grains Nobles organise chaque année une dégustation des vins du domaine de la Romanée Conti du millésime qui va être mis sur le marché, après sa mise en bouteille. Nous aurions dû goûter le millésime 2017 à la fin de l’année 2020 mais du fait du Covid, c’est seulement maintenant que cette dégustation est organisée en un lieu au centre de Paris qui permet des tables de trois ou quatre convives, espacées comme il convient.

Pascal Marquet dirigeant de Grains Nobles nous accueille et sur l’estrade Aubert de Villaine, Michel Bettane et Bernard Burtschy vont commenter les vins.

Aubert de Villaine raconte l’histoire du climat de 2017 qui est détaillée dans la brochure qui nous est remise. Mars a été un mois chaud, la vigne a eu un printemps précoce et sans gel avec beaucoup d’énergie pour les fruits, donnant des grains résistants. Le sucre a monté très vite. La chaleur a créé des blocages mais heureusement des averses salvatrices ont permis un beau développement. Le Montrachet est très généreux après l’année 2016 quasiment perdue. Aubert de Villaine dit que ce qui est important, c’est la maîtrise naturelle des rendements, ce qui est lié notamment à l’âge des vignes.

Le millésime 2017 est le dernier fait par Bernard Noblet qui avait succédé à son père en 1985.

Le Corton GC Prince Florent de Mérode 2017 a une belle robe violette et un nez discret. En bouche il se signale immédiatement par sa fraîcheur. Il est distingué et son finale offre de beaux fruits noirs. C’est un vin magnifique qui deviendra grand et gourmand. Il est agréable à boire dans cette jeunesse. Michel Bettane dit que c’est un vin raffiné, très frais qui vieillira bien et Bernard Burtschy dit qu’il est très tanique.

L’Echézeaux GC Domaine de la Romanée Conti 2017 a une couleur d’un rouge plus soutenu. Le nez est aussi discret mais cela doit tenir de la forte chaleur qui règne sous la verrière. Il pétille à la prise en bouche. C’est un vin qui n’a pas encore trouvé son équilibre. Sa texture est soyeuse avec un peu d’amertume. On sent qu’il deviendra charmeur, mais pas aujourd’hui.

Le Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2017 a une robe identique à celle de l’Echézeaux. Il a le même perlant à l’attaque de la première gorgée. Il a de l’amertume dans le finale. Mais il a plus de maintien. C’est un vin dense qui sera grand avec un fort fruit. Il devient de plus en plus impressionnant car il est fort et puissant. Bernard Burtschy dit que la violette est sa signature. S’élargissant dans le verre il montre de plus en plus sa grandeur.

Pour une première fois, au lieu de la Romanée Saint Vivant, le vin qui suit est le Richebourg Domaine de la Romanée Conti 2017. Il a une belle couleur et un nez fermé par la chaleur. En bouche c’est un ravissement. Le saut par rapport aux trois premiers est immense. Il est superbe, de beau volume, gourmand. Tout en lui est équilibré, intégré et déjà brillant. C’est une belle réussite.

La Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanée Conti 2017a une couleur plus violette que les trois vins précédents. Cette Romanée joue sur sa finesse. C’est un vin féminin et gracieux, jeune et frais, au finale très long et imprégnant. On sent un travail très pur vers la légèreté et la fraîcheur. J’entends que l’on dit qu’il a « une floralité très homogène ». Voilà qui est bien dit ! C’est un vin qui fait saliver et montre son charme.

La Tâche Domaine de la Romanée Conti 2017 a une couleur plus rouge que celle de la Romanée Saint Vivant. C’est à ce stade le nez le plus expressif. La bouche est très douce, voire charmeuse, ce qui n’est pas le cas de toutes les La Tâche. Michel Bettane évoque le millésime 2000 qui lui ressemblerait. Aubert de Villaine signale un petit côté mentholé et dit que ce vin a moins de corps mais promet énormément. Ce sera un grand vin, généreux et joyeux.

La Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 2017 a une couleur magique (quand on aime …) Le nez est noble. Immédiatement je reconnais une Romanée Conti avec un charme fou. Le vin est noble, magique, du velours pur. Michel Bettane dit que ce vin a un toucher de bouche raffiné. C’est pour moi l’archétype de la Romanée Conti parfaite. Ce vin n’est que du bonheur et je suis ému.

A ce stade de leurs vies, car l’avenir ne sera peut-être pas le même pour tous, je classe en premier et de loin la Romanée Conti, puis La Tâche, puis le Richebourg et ensuite le Corton qui m’a impressionné par sa belle personnalité.

Le Montrachet Domaine de la Romanée Conti 2017 a une couleur claire mais qui n’est pas blanche. Le nez est puissant et conquérant. Le vin n’a pas de botrytis. C’est un montrachet superbe qui combine force, fraîcheur et charme. Le finale est un peu plus dur et je trouve en lui un peu de perlant, signe de jeunesse. Il n’est pas encore totalement intégré mais il promet beaucoup. L’absence de botrytis lui donne de la tendresse. Il a une belle tension. C’est un blanc très pur qui ne joue pas dans le registre de la puissance comme en certains millésimes. Il aura un très grand charme fondé sur sa fraîcheur. La rémanence en bouche est forte et noble.

Il est amusant d’écouter les amicales joutes verbales entre Michel Bettane et Aubert de Villaine, Michel Bettane dans l’affirmation du sachant et Aubert de Villaine dans la réserve de celui qui est en recherche permanente de la perfection.

Les propos d’Aubert de Villaine montrent à quel point chaque élément, fût-il le plus petit, est examiné avec le souci de faire un vin conforme à l’expression désirée la plus aboutie de son terroir.

Tous les vins sont subtils, gracieux, en suggestions plus qu’en affirmation, et cette diabolique Romanée Conti, monstre de charme suggéré, va alimenter mes rêves, et me pousser à ouvrir ses sœurs plus âgées.

Cette dégustation annuelle est toujours un grand moment d’émotion.

Déjeuner à l’hôtel du Marc de Veuve Clicquot dimanche, 23 mai 2021

Après le dîner au château de Saran et le déjeuner au siège du champagne Salon, événements dont j’étais l’organisateur ou l’instigateur, le troisième jour en Champagne est organisé par Stanislas, un ami du groupe Moët Hennessy que je connais depuis une vingtaine d’années. Il propose que notre petit groupe d’amis se retrouve à l’hôtel du Marc de Veuve Clicquot.

Une telle proposition ne se refuse pas, car j’ai en ce lieu des souvenirs intenses, lorsque j’avais organisé un dîner en ce lieu pour que l’on goûte un Champagne veuve Clicquot 1840 trouvé dans la mer Baltique. C’était le 196ème dîner, marqué par un sublime Veuve Clicquot 1947 en magnum.

Nous nous retrouvons donc, les amis des deux repas d’hier et avant-hier avec Stanislas et Didier Mariotti, le chef de caves, que je connaissais lorsqu’il était en poste chez Mumm.

La décoration de l’hôtel du Marc est enthousiasmante, mêlant le classicisme des lieux à un modernisme débridé de bon goût. C’est ce côté extravagant qui a conduit Veuve Clicquot à adopter une étiquette créée par l’artiste japonaise Yayoi Kusama pour son champagne La Grande Dame. L’artiste aux cheveux couleur rouge sang a fait une œuvre magnifique montrée dans le salon de l’hôtel du Marc. J’adore. Et je ne suis pas le seul car notre amie chinoise entre en pamoison devant sa sculpture.

L’apéritif se prend avec le Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame 2012. Il a une belle énergie et se boit bien, indiquant une année très équilibrée.

Nous passons ensuite à la belle salle à manger aux murs noir et or. Le menu composé par le chef Christophe Pannetier est : les légumes de printemps, herbes potagères et poutargue / le bar de ligne, sauce ponzu et caviar / les fromages affinés selon Philippe Olivier / la rhubarbe, hibiscus et pain de Gênes.

Le Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame Magnum 1990 est large et vif, montrant combien l’âge profite aux champagnes quand on pense au 2012 si accueillant mais encore pré pubère. Ce 1990 a un profil de gagnant.

Le Champagne Veuve Clicquot Cave Privée Magnum 1995 est d’une philosophie différente de La Grande Dame. Il s’agit de vins de réserve qui sont dégorgés et sélectionnés lorsque l’on estime que l’on a atteint un optimum. Et ce champagne montre un raffinement certain et une forte personnalité.

Alors qu’il n’avait pas été indiqué que l’on apporte nos propres vins, Tomo a eu la curieuse initiative d’apporter un Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame 1975. En anglais on disait « it is like bringing coal to Newcastle », c’est à dire apporter du charbon dans la capitale du charbon. Mais cette initiative a eu d’heureux effets puisque Didier Mariotti a décidé de comparer le vin de Tomo avec le même qui provient de la cave de l’hôtel du Marc et n’a jamais bougé.

La comparaison est intéressante car le Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame 1975 (origine hôtel du Marc) a strictement le même ADN que celui de Tomo, et les différences sont infimes. Il y a toutefois un peu plus de fraîcheur dans celui de la cave de l’hôtel du Marc, qui sera mieux classé dans les votes, mais cela montre que les pérégrinations de celui de Tomo n’ont pas entamé ses qualités. Les deux vins sont sublimes, dans un état de grâce.

Le Champagne Veuve Clicquot Cave Privée rosé Magnum 1996 est un rosé qui me plait énormément. Je ne suis pas toujours en accord avec les champagnes rosés, car je préfère nettement les blancs, mais ce rosé gourmand m’inspire particulièrement. Il est magistralement gastronomique. Et on en redemande, tant on a envie de le boire.

Tomo a aussi apporté un Morey Saint Denis Clos de la Bussière 1er Cru Georges Roumier 1993. C’est un agréable intermède dans cette succession si brillante de champagnes. Ce vin est élégant et subtil, qui trouve un écho avec les fromages.

Le Champagne Veuve Clicquot Demi-Sec sans année accompagne le dessert de belle façon. Il est très jeune et très vif. C’est assez déroutant, ces saveurs doucereuses, mais on s’habitue vite.

L’esprit étant à la générosité débridée, Didier Mariotti qui était obligé de nous quitter et n’a pas participé aux votes a fait chercher pour nous un Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame 1985 qui confirme que l’année 1985 est en ce moment une année exceptionnelle. C’est un champagne de sérénité et d’ouverture sur une palette de goûts exceptionnelle.

Nous sommes six à voter et nous avons voté pour les vins avant les deux derniers, le demi-sec et le 1985, qui aurait figuré en haute place s’il avait été inclus. Trois vins ont été nommés premiers. Le 1975 de la cave de l’hôtel du Marc a quatre votes de premier. Le 1990 et le 1975 de Tomo ont chacun un vote de premier.

Il est à noter qu’un des amis, fidèle de mes dîners, a strictement le même vote que moi ce qui est assez rare et que ce vote est aussi strictement le vote du consensus ce qui aussi assez rare.

Le vote du consensus est : 1 – Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame 1975 (origine hôtel du Marc), 2 – Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame 1975 (origine Tomo), 3 – Champagne Veuve Clicquot Cave Privée 1995 Magnum, 4 – Champagne Veuve Clicquot Cave Privée rosé 1996 Magnum, 5 – Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame 1990 Magnum, 6 – Morey Saint Denis Clos de la Bussière Georges Roumier 1993.

Mon vote est : 1 – Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame 1975 (origine hôtel du Marc), 2 – Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame 1975 (origine Tomo), 3 – Champagne Veuve Clicquot Cave Privée 1995 Magnum, 4 – Champagne Veuve Clicquot Cave Privée rosé 1996 Magnum, 5 – Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame 1990 Magnum.

Ce repas a été marqué par la générosité de la maison veuve Clicquot. Il a donné envie qu’on s’y retrouve pour un de mes dîners où j’ouvrirais (peut-être) un de mes champagnes de la Baltique.

Ces trois jours ont montré les effets de l’amitié avec des maisons de champagne que j’adore, et leur générosité incommensurable. Vive la Champagne et le champagne.

Déjeuner de Dom Pérignon au château de Saran jeudi, 8 octobre 2020

Cela fait des mois et des mois que nous cherchions une occasion de nous rencontrer, Vincent Chaperon et moi. Vincent est le successeur de Richard Geoffroy maître de chais de Dom Pérignon et j’avais été invité à la passation de pouvoir entre les deux à Hautvillers puis lors d’un dîner extraordinaire au Plaza Athénée. C’était il y a un peu plus de deux ans, à l’occasion de la sortie du Dom Pérignon 2008 qu’ils avaient créé en commun.

Au-delà du plaisir de se revoir nous avons un sujet de réflexion, le futur 250ème dîner. C’est grâce à Jean Berchon, l’un des cadres dirigeants du groupe Moët & Chandon que j’avais eu l’honneur et le plaisir d’organiser en 2008 le 100ème dîner de wine-dinners au château de Saran, demeure de réception du groupe Moët Hennessy. Ce fut un succès qui me poussa à organiser le 150ème dîner en ce beau château en 2011.

J’aurais volontiers poursuivi la séquence des chiffres en faisant le 200ème dîner au même endroit mais une massive restructuration du château qui a duré cinq ans rendait le château indisponible. Le 200ème dîner a été fait au Pavillon Ledoyen avec Yannick Alléno en cuisine et fut, lui aussi, un grand succès.

Nous allons nous retrouver Vincent Chaperon et moi au château de Saran que je découvre après sa transformation. Le chef actuel de la cuisine du château et des autres lieux de réception du groupe est Marco Fadiga que je dois rencontrer aussi. Comme il est italien j’ai pensé à apporter deux vins italiens que j’ai choisis avec l’espoir qu’il n’en connaisse aucun.

J’arrive au château une heure avant le rendez-vous prévu, afin de pouvoir ouvrir mes vins. Je suis accueilli par Emmanuel Pérignon manager du château, dont le patronyme est un heureux hasard. Il me fait visiter les importantes modifications des espaces dont une me cause une grande perplexité. La structure extérieure du château n’a pas changé, mais les bâtiments annexes ont été détruits ou transformés. On y accède par la cour d’entrée ou bien par un tunnel souterrain et la salle à manger de réception se trouve au sous-sol de ce bâtiment annexe. Alors que le château de Saran jouit d’une vue imprenable sur des dizaines de kilomètres de vignobles champenois, la salle à manger, au lieu de profiter de cette vue, sera aveugle, en sous-sol. Bien sûr elle est magnifiquement décorée, mais malgré les explications techniques qui me sont données, je suis décontenancé.

Dès mon arrivée je rejoins Marco Fadiga en cuisine et j’ouvre devant lui deux de mes trois vins. J’ouvre d’abord le Vin de l’Etoile Vins Blancs Fins du Jura 1929 en une bouteille dont le volume doit être de 50cl ou peut-être de 62,5cl sans toutefois avoir la forme d’un clavelin, mais plutôt d’une petite bouteille de Bourgogne. Le bouchon vient avec quelques brisures mais entier et sent notoirement plus fort que le vin lui-même. Il est très prometteur.

J’ouvre le vin Ciclopi Vino Etna Bianco 1968, vin blanc que je souhaite confronter à des Dom Pérignon, et j’offre au chef l’autre vin italien, Vino Rosato Di Berchidda Vini di Sardegna 1968 que j’espère boire avec lui en une autre occasion, car j’imagine volontiers qu’il y aura beaucoup de champagnes à table ce midi. Le bouchon du vin blanc italien vient lui aussi entier malgré quelques brisures qui se produisent lorsque le goulot n’est pas un cylindre parfait. Le parfum du blanc italien est d’une intensité extrême et évoque un vin jaune puissant. Voilà qui promet. Inutile de préciser que Marco ne connaissait aucun de ces deux vins de 1968.

En attendant Vincent Chaperon, je rencontre Pierre-Louis Araud, responsable des relations avec la clientèle privée, qui sera le troisième convive de notre table. Il me propose un verre de Champagne Dom Pérignon Vintage 2008 que je trouve beaucoup plus vif que ceux que j’ai eu l’occasion de boire jusqu’ici. Est-ce dû à une température idéale ou à une évolution qui épanouit le 2008, je ne sais pas. Toujours est-il que je le trouve particulièrement brillant, large et ensoleillé.

Nous quittons le confortable salon de réception pour nous rendre dans une salle à manger proche de la grande salle à manger. Nous avons conservé nos verres du 2008 absolument délicieux et convivial.

Le menu préparé par le chef avec Vincent Chaperon est : carpaccio de gambas, Pitaya / risotto N’Duja Burrata / Abgoosht d’agneau / sélection de fromages (camembert de Normandie – Comté affiné 24 mois – Beaufort affiné 12 mois – Brie de Meaux) / tarte Tatin ananas.

Le premier plat de gambas crues est prévu pour le Champagne Dom Pérignon Vintage 2010 que je goûte pour la première fois. Il est très différent du 2008. Il est romantique, gracieux, très long et surtout lisible. C’est un champagne racé qui est déjà très agréable à boire. Si le 2008 est soleil, le 2010 est plutôt fleur blanche. L’accord est subtil, en suggestions. L’idée me vient de confronter ce 2010 avec le Vin de l’Etoile Vieux Vins du Jura 1929. Ce vin du Jura est un blanc et pas un jaune, frais et long en bouche, plus puissant que le champagne. Je propose à Vincent et à Pierre-Louis de boire le champagne, boire ensuite le vin blanc et de revenir au champagne. C’est fou comme le 2010 gagne en largeur et en opulence dans cette expérience. Cela me ravit car j’aime quand champagne et vin blanc se fécondent. Le 2010 me plait énormément et le vin du Jura est un seigneur, d’une année exceptionnelle. Sa complexité est infinie. L’accord avec les gambas est pertinent.

Le risotto à la Buratta est associé au Champagne Dom Pérignon Rosé Vintage 2006. Une première bouteille a un petit défaut. Elle est vite remplacée par une autre qui montre un rosé généreux, agréable mais qui, à mon goût, manque un peu d’âge. Dom Pérignon rosé mérite d’avoir plus de vingt ans. La mâche croquante du risotto gêne un peu l’accord, même si le plat est délicieux.

J’ai envie d’essayer le Ciclopi Vino Etna Bianco 1968 avec le rosé 2006. La juxtaposition est possible même si elle n’apporte pas grand-chose aux deux compères. Le vin blanc qui a fort curieusement tout d’un magnifique vin jaune trouvera des résonnances avec les autres champagnes blancs et surtout avec les plus anciens.

Sur la délicieuse viande d’agneau, le Champagne Dom Pérignon Plénitude 2 Vintage 1996 est brillant. J’ai normalement un palais qui est fait pour les éditions originales des champagnes, plus que pour les rééditions lors de plénitudes ultérieures, mais je suis conquis par la fraîcheur vive de ce 1996 exceptionnel. Il est grand, il est vif et il est hautement gastronomique. C’est un seigneur de la table. Il justifie pleinement la démarche de créer des rééditions lors de nouvelles plénitudes. Ce champagne est un solide guerrier capable de pratiquer l’amour courtois. Il a toutes les qualités.

Le Champagne Dom Pérignon Plénitude 3 Vintage 1982 est d’une année subtile que j’adore, mais je suis moins convaincu de l’apport de la plénitude 3. Il est grand, mais sa pertinence s’impose moins à mes yeux ou plutôt à mon palais.

Le Champagne Dom Pérignon Œnothèque Vintage 1966 a une attaque qui m’impressionne mais le milieu de bouche me gêne un peu. Vincent me trouve un peu dur et il a en partie raison car le vin demandait à s’épanouir dans le verre. Il se trouve que 1966 est pour moi l’une des plus grandes réussites de Dom Pérignon et je suis heureux de l’apercevoir sur cette bouteille, même si ce n’est pas le meilleur 1966 que j’ai bu (j’ai bu 24 fois ce millésime).

Le Champagne Dom Pérignon Plénitude 3 Vintage 1990 dessine un large sourire sur mon visage. Voilà, je le tiens, c’est lui le Dom Pérignon parfait. Tout en lui est miraculeux. Il a tout pour lui. Quelle présence, quelle race, quelle joie de vivre. C’est une bénédiction. J’ai bien aimé les autres et ce n’est pas les critiquer que de dire que ce 1990 est transcendantal. C’est le Dom Pérignon parfait. Il a réussi à cohabiter avec grâce avec les deux blancs que j’ai apportés. La tarte à l’ananas est idéale pour mettre en valeur la sublime acidité de ce champagne qui m’a conquis.

Le chef est venu nous rejoindre pour que nous fassions quelques commentaires sur les orientations à donner pour un futur dîner. Sa cuisine conviendra aux exigences des vins anciens avec quelques adaptations, comme avec tous les chefs qui ont cuisiné pour mes dîners.

Classer les vins de ce repas serait difficile. Le 1990 s’impose en premier, suivi du 1996. Je mettrais ensuite à égalité le 2008, le 2010 et le vin du Jura de 1929. Ensuite je mettrais ensemble le vin de l’Etna de 1968 et le 1966.

Merci à Vincent Chaperon d’avoir choisi ces millésimes qui tous composaient un voyage dans le monde magique de Dom Pérignon. J’ai été obligé de repousser le 245ème dîner du fait des contraintes faites aux restaurants relatives à la taille maximale des tables en période de Coronavirus. Il reste à croiser les doigts pour que se tienne bientôt le 250ème dîner dans ce beau château, sans doute au printemps.

le salon d’entrée et de réception

une jolie salle à manger de petite taille

les vins que j’avais préparés dans ma cave. Celui de Sardaigne a été gardé au château par le chef, pour une prochaine rencontre. Les vins sont ouverts en cuisine

l’apéritif de bienvenue

les vins du repas

les couleurs dont celle du rosé

les vins

les vins rapportés dans ma cave et qui seront bus en famille

Dégustation du champagne Ruinart 2011 en visio-conférence dimanche, 7 juin 2020

Le confinement a multiplié les visio-conférences d’une façon très importante. Dans une de ces conférences, le directeur d’une grande maison de champagne a dit qu’il a parlé depuis deux mois et demi de confinement à autant d’amateurs et de professionnels que lors de deux ans de voyages.

La maison Ruinart, à l’initiative du maître de cave Frédéric Panaïotis, organise une dégustation en vidéo conférence du Champagne Ruinart 2011. Nous sommes plus d’une trentaine d’amateurs et professionnels reliés par internet. Chacun de nous a reçu par la poste une bouteille du champagne, avec un verre de dégustation et un carnet de notes. La bouteille que j’ai reçue a été gardée au frais, entourée d’un nouvel habillage qui garde le frais, protège de la lumière et allège l’emballage des vins de 320 grammes par bouteilles, ce qui réduit l’empreinte écologique de ce vin. Frédéric est très fier de cette innovation.

Le champagne est fait de 51% de chardonnay et 49% de pinot noir, il est dosé très bas mais n’est pas nommé extra brut, et il a été dégorgé en février 2019. Frédéric nous parle des spécificités particulières de 2011 qui n’a pas été vinifiée par toutes les maisons de champagne.

A la dégustation, le Champagne Ruinart 2011 est très frais, avec un nez engageant. Je sens de la pâtisserie, mais c’est lié au fait que j’avais bu un café juste avant la liaison avec le groupe. Peu après, de belles notes végétales apparaissent, nobles. Il y a aussi la présence d’épices et Frédéric parle d’anis et de fenouil que je ne vois pas si prononcés. Ce 2011 a une belle consistance.

Lors de cette dégustation, faite entre 11 heures et midi, je l’ai apprécié, imaginant des accords gastronomiques possibles. Ceux suggérés par la maison Ruinart, autour de poissons et de fruits de mer sont judicieux. J’étais un peu anxieux, craignant que les échanges par internet soient un peu froids en comparaison avec les contacts « en chair et en os ». Mais cet exercice s’est très bien passé et peut encourager à le recommencer, car l’empreinte carbone est particulièrement faible, puisque personne ne se déplace. Le confinement va donner de nouvelles idées.

Ayant gardé la bouteille, j’ai bu ce champagne le soir. La fiche donnée par la maison Ruinart dit que ce champagne en dentelle se déguste à l’apéritif et ce jugement est justifié. C’est plus un champagne d’apéritif que de repas, car il manque un peu de largeur. Il est globalement très plaisant et se boit bien maintenant, sans nécessité particulière de le laisser vieillir plus.

Ce type de dégustations, en prévoyant peut-être un peu plus de dialogue entre les participants, est appelé à un bel avenir, et je m’y joindrai volontiers.

Bourgogne Aligoté et les Peulons lundi, 4 mai 2020

Lors de mes rangements j’ai trouvé une bouteille si curieuse que je ne résiste pas au plaisir de la raconter. C’est un Bourgogne Aligoté, appellation contrôlée, Sélection des Peulons, Sté Poinsot & Fils – Vermenton 1964.

Le texte qui accompagne le dessin est : « à la nuit tombante, alors qu’ils s’étaient portés en masse, malgré la pluie, à l’entrée du village dans l’espoir d’assister au passage du régiment du 6ème Lanciers, les habitants crurent être récompensés de leur longue attente en voyant un mouvement se dessiner à l’horizon… lorsqu’un éclaireur revint en criant : « c’est pas le 6ème, c’est les lanciers Peulons » (vignerons chargés de leurs instruments, au retour des travaux) ».

Et l’on voit sur le dessin un groupe de gens qui se promènent et qui voient à l’horizon un autre groupe qui n’est pas le régiment attendu mais des vignerons.

C’est assez étonnant et sur Google, la définition des Peulons n’est pas donnée, alors que le mot est utilisé. J’adore ces énigmes.

un lecteur du blog a apporté ces précisions :

PEULONS : nom des vignerons de la région d’Auxerre qui retournaient la terre avec une pelle-bêche (une peule)

Si plus au sud on parle de paulée, à Chablis, on parle de « peulée »!

https://www.chablis.fr/decouvrez/des-traditions-bourguignonnes/la-peulee/la-peulee,1241,6985.html?

Saint Vincent de vignerons à l’Assiette Champenoise avec 5 chefs totalisant 14 étoiles mercredi, 22 janvier 2020

Un groupe de vignerons comprenant les maisons Alexandre Chartogne, Bérêche et Fils, Frédéric Savart et Pierre Péters organise la célébration de la Saint-Vincent au restaurant de l’Assiette Champenoise à Tinqueux. Les vignerons invitent leurs distributeurs, des professionnels du monde du vin et leurs amis pour des dégustations à partir de 17 heures, un apéritif à partir de 19 heures et un dîner dans la grande salle du restaurant.

Pour la cuisine, les organisateurs ont fait très fort, car le menu est réalisé par cinq chefs étoilés cumulant 14 étoiles ce qui est assez impressionnant. Il y a Arnaud Lallement, le chef du restaurant qui nous reçoit, Arnaud Donckele le chef du Cheval Blanc Saint-Tropez et bientôt du Cheval Blanc Paris à la Samaritaine, Christophe Bacquié le chef de l’hôtel du Castellet, Emmanuel Renaut le chef du Flocon de Sel à Megève et Olivier Nasti le chef de l’hôtel Le Chambard à Kaysersberg.

Je suis invité par Rodolphe Péters qui organise à partir de 17 heures une dégustation des champagnes rosés de sa maison. Nous pouvons boire les Champagnes rosés Pierre Péters sur des bases de 2014, 2013, 2012, 2010, 2008 et 2007. Il y a donc six champagnes différents qui ne renferment pas de pinot noir dans leur construction, pour garder l’esprit du Mesnil, Mecque du blanc de blancs. Ces champagnes ont été dégorgés au bout de deux ans pour les trois plus anciens et au bout de trois ans pour les plus récents.

De cette dégustation je retiens le 2014, qui me plait pour sa fraîcheur joyeuse et sa spontanéité, et le 2008 pour la richesse de sa construction. Autour de moi beaucoup ont aimé le 2013 qui est très prometteur mais demandera quelques années pour s’exprimer. Tous ces rosés montrent des aptitudes gastronomiques certaines, du fait de leur précision.

A l’apéritif qui suit on peut boire le Champagne Ambonnay Grand Cru Bérêche et Fils 2014, le Champagne Accomplie Frédéric Savart sur base 2009 et le Champagne Chemin de Reims Alexandre Chartogne 2013. Il y avait tellement de gens à rencontrer et avec qui discuter que je n’ai pas eu une attention suffisante aux bons champagnes qui nous ont été proposés. J’ai le souvenir d’avoir été très favorablement impressionné par le Chartogne. J’ai discuté avec des invités du Canada, de Suède, des Etats-Unis vivant en France, des asiatiques vivant aussi en France, des restaurateurs de Montpellier, un vendeur de vins de Monaco, un gestionnaire d’hôtels des Maldives et beaucoup d’autres encore.

Nous passons à table et nous sommes 62 répartis généralement en tables de huit. Je suis à la table de Rodolphe Péters et son épouse où il y a une majorité féminine. Avant le repas, les vignerons font ensemble un discours de bienvenue en se présentant et ensuite chaque chef annonce le plat qu’il a conçu. Le menu ne sera donné qu’en fin de repas, aussi est-ce l’aventure malgré les présentations initiales.

Voici le menu avec entre parenthèses le chef qui a conçu chaque plat : endive en pleine terre D. Grifffon, condiment fruits secs, jus de saké (Arnaud Lallement) / langoustine royale, citron caviar M. Bachès, nage réduite (Arnaud Lallement) / homard bleu, miel de châtaignier et romarin, artichauts et grenailles délicates au jus (Arnaud Donckele) / cardon épineux de Plainpalais, comme un risotto, truffe noire du Périgord (Emmanuel Renaut) / merlu de ligne en filet, cuisiné au beurre mousseux, pomme de terre ratte aux éclats de truffe noire (Christophe Bacquié) / dos de biche des chasses d’Alsace, griottes, sauce rouennaise (Olivier Nasti) / gnocchis de pomme de terre, vin jaune, comté (Arnaud Lallement) / faisselle de Megève, fine coque de meringue suisse, salade de fruits et légumes (Emmanuel Renaut) / vanille, feuilletage craquant (Grégory Masse de Reims).

Ce fut un festival de talents variés. Avec trois ‘trois étoiles’, un ‘deux étoiles’ et trois MOF (meilleur ouvrier de France) sur les cinq chefs, on a la crème de la crème de la gastronomie française. L’endive est une magnifique réussite, savoureuse tout en étant fortement typée et le Champagne Les Montjolys Grand Cru Pierre Péters magnum 2012 se marie très bien au plat dans un accord viril.

La langoustine royale est d’une cuisson exceptionnelle et d’une tendreté admirable. Le Champagne Heurtebise Alexandre Chartogne 2016 a déjà une maturité surprenante. C’est la première fois que je bois un champagne de ce millésime si jeune et je suis conquis. Beaucoup d’autres vins auraient convenu à ce plat emblématique.

Le homard bleu est d’une rare subtilité. Le Champagne Les Noues Premier Cru Frédéric Savart 2015 est agréable, mais le plat aurait demandé un champagne plus ancien ou un vin blanc vif.

Le cardon, légume ancien proche de l’artichaut m’a surpris, car il est coupé en minuscules dés, comme la truffe, et la mâche est difficile, ce qui ne rend pas le plat plaisant, du moins pour mon goût, avis partagé par plusieurs à ma table. Le Champagne Le Cran Premier Cru Bérêche et fils magnum 2008 est riche et plein mais à ce stade du repas, un champagne ancien m’aurait plu. Heureusement, il va venir.

Le merlu de ligne est présenté dans une énorme coque noire qui a conservé tous les arômes du plat délicieux, d’une belle cohérence. Jean-Marc Roulot, présent à cet événement, nous a fait un cadeau appréciable car toutes les tables ont été servies d’un Meursault Les Perrières Jean-Marc Roulot magnum 2009. Quel beau vin ! Il est riche, fluide, à la minéralité bien maîtrisée. Le format magnum lui donne de l’ampleur et son âge est idéal. L’accord est superbe car la présentation de la chair du merlu en gros pavé lui donne une mâche idéale.

Le dos de biche avec ses accompagnements est, à mon goût, le plus beau plat du repas car c’est le plus gourmand et généreux. La vigneronne toute menue et souriante qui est assise à la droite de Rodolphe Péters, Maria Teresa Mascarello, a apporté des magnums de Barolo Bartolo Mascarello magnum 2009 qui est un vin très féminin comme la vigneronne, d’une délicatesse extrême, comme la vigneronne, avec des accents superbement bourguignons. Tout en ce vin est subtil et fin. Il est ensorceleur.

Les gnocchis sont d’un goût virevoltant. Le plat interpelle et on l’adore. Le Champagne Réserve Familiale Blanc de Blancs Pierre Péters 1969 est magnifique, d’une grande personnalité et incisif et dompte les gnocchis pour un accord enthousiasmant. Accord subtil et grand champagne.

Le dessert à la fine meringue est frais et enjoué. Il est accompagné d’un alcool surprenant, une liqueur d’abricots, L’Abricot du Roulot. Et l’accord se trouve très bien avec la salade de fruits et légumes mais aussi avec la vanille.

J’avais apporté dans ma musette un Muscat Mas d’Eu mis en bouteille en 1889. J’ai fait préparer au bar une vingtaine de verres de ce muscat, afin qu’il soit bu par ma table bien sûr, mais aussi par tous les vignerons présents et par tous les chefs. Tous ceux avec qui j’ai parlé de ce muscat sont surpris de sa force, de sa puissance et de la richesse de ses évocations. C’est un muscat qui rappelle pour certains de très vieux madères. Ce vin a une longueur infinie. J’ai fait des heureux, ce qui était l’objet de mon apport.

Après le repas, les vins ont coulé à flot car les vignerons avaient apporté de très nombreuses bouteilles à partager. J’ai discuté avec quelques convives et je me suis éclipsé alors que d’autres convives insatiables ont continué à boire et à deviser jusque tard dans la nuit.

Que dire de cet événement unique à plus d’un titre ? Il faut tout d’abord signaler la générosité de ce groupe de vignerons, la générosité de Jean-Marc Roulot et de la charmante piémontaise Maria Teresa Mascarello. Ensuite la visible complicité entre des chefs talentueux, heureux de se trouver ensemble pour créer des plats formant un repas inoubliable. Ensuite encore le caractère cosmopolite de cette assemblée d’amis ou partenaires de vignerons. Ensuite encore l’implication de tout le personnel de cuisine et de service, car d’un part l’immense cuisine d’Arnaud Lallement, envahie par cinq chefs et leurs adjoints, ce n’est plus une ruche, c’est une manif ! et un service de 62 personnes lorsque les cuissons sont faites à la seconde près, cela implique un personnel de service surnuméraire pour que chacun profite de la cuisson parfaite des plats au même moment.

De tels événements font honneur à la gastronomie française. Tout fut amitié, complicité et talent. Vive la Saint-Vincent de ces chaleureux vignerons.


la dégustation des rosés de Pierre Péters

les vignerons et les chefs présentent le programme du dîner

mon apport

belle photo des chefs

Déjeuner à l’Assiette Champenoise avec Richard Geoffroy mardi, 24 décembre 2019

Richard Geoffroy, l’homme qui a fait Dom Pérignon pendant plus de deux décennies se reconvertit dans le saké. Il veut apporter à ce breuvage sa philosophie. Il sait que le saké est millénaire aussi ne cherche-t-il pas une révolution mais une évolution. J’avais prévu de l’inviter dans ma cave pour lui faire goûter des vins aux saveurs inhabituelles. Du fait des grèves le train que comptait prendre Richard pour me rejoindre est supprimé et il me propose de remettre notre rendez-vous. Je ne voudrais pas remettre notre rencontre aussi je lui propose qu’on se retrouve à l’Assiette Champenoise d’Arnaud Lallement qui est un ami commun. Richard réserve une table et je choisis des vins dans ma cave.

Tout d’abord il faut un champagne qui soit inconnu de Richard. Je trouve une bouteille dont l’origine et l’année sont, je le pense, à coup sûr inconnus de Richard. Je prends ensuite une bouteille d’un vin du Rhône d’une année difficile et de niveau très bas. Il faut jouer la difficulté. Enfin je choisis parmi les bouteilles anciennes d’avant 1870, dans une case où aucune indication n’existe sur les bouteilles un flacon qui pourrait bien être du 18ème siècle, qui voisinait avec le Madère vers 1740 qui m’a tant impressionné par sa perfection. Si nous étions dans ma cave, j’aurais pu ouvrir d’autres bouteilles en cas de pépin. Ce sera impossible à Tinqueux, mais je crois en ma bonne étoile.

J’arrive au restaurant l’Assiette Champenoise un peu avant 11 heures alors que notre rendez-vous est à 12h30. J’ouvre l’Hermitage Jaboulet 1939 au niveau bas. La bouteille n’a ni capsule ni cire aussi est-ce la première fois de ma vie que je vois un bouchon qui a accueilli un petit ver qui s’est niché dans le bouchon et y a rendu l’âme. L’étiquette du vin est illisible à un point qui ne peut que me surprendre, comme si une limace active et vorace avait voulu tout effacer. La petite étiquette du millésime est parfaitement lisible. Le nom du vin ne peut se lire que sur les autres bouteilles de ce vin que j’ai acquises en même temps. Le bouchon vient sans problème. Il a quand même été goulument mangé par son locataire, ce qui explique en partie la perte de volume. Le nez est beaucoup plus inspirant que ce que l’on pourrait craindre. Nous verrons. Je n’ouvre ni le champagne ni la bouteille antique car je souhaite pour celle-ci que Richard sente le premier nez du vin, celui de l’éclosion.

En attendant Richard je bois des mètres cubes d’eau pour estomper les effets du dîner au Relais Louis XIII. Richard arrive et je fais ouvrir le Champagne Le Mesnil Blanc de Blancs Réserve Sélection Union des Propriétaires Récoltants 1957. Je n’ai bu qu’une seule fois un champagne de 1957, un Abel Lepitre. Richard me confirme qu’il n’a jamais bu ce champagne et jamais bu cette année et me dit que fort curieusement il avait déjeuné il y a deux jours avec le président de l’Union des Propriétaires Récoltants. La couleur du champagne est d’un ambre très joli, ensoleillé. C’est sur la fin de la bouteille que l’ambre sera plus sombre. La bulle est absente mais le pétillant est présent. Je suis très content car Richard est un dégustateur positif. Ensemble nous ne voyons que les beaux aspects de ce champagne, car ils existent. Le champagne est chaleureux, ensoleillé et des petites traces de poussière, infimes, ne gênent pas la dégustation.

Nous prenons le menu « saveur » qui semble le plus adapté aux vins : oursin et fenouil / Saint-Jacques de Bretagne, betterave, crème persil / blettes de D. Vecten, croquant au seigle, jus mélilot / anguille et cresson / barbue des côtes bretonnes, raviole de chou, crème Vermouth / tourte de gibier à plumes, mâche, jus réduit de gibier.

Les petits amuse-bouches sont délicieux et parfaitement adaptés au champagne ce qui est logique puisqu’on est dans la région. Le champagne, sans être tonitruant, joue bien son rôle et délivre une largeur sympathique. Il a une assez belle intensité et une largeur plaisante.

On nous sert d’une bouteille noire le saké qui est le fruit des recherches de Richard. Il n’a pas encore de nom et je suis invité à ne pas le photographier. Mais je donne mes commentaires, qui intéressent Richard, car j’ai la spontanéité de quelqu’un qui n’a aucune expertise en saké. La couleur est limpide comme celle d’une eau. Le nez est engageant, mesuré. L’attaque est d’une grande fraîcheur pour un liquide qui titre 15° d’alcool. Le milieu de bouche est précis et la fin de bouche est plus épaisse mais fluide aussi. La longueur est belle sans être envahissante. Je résume mon impression en disant que ce saké est « lisible », ce qui plait à Richard. Ses vertus gastronomiques sont évidentes car il n’est pas agressif. Il convient aussi bien à l’oursin, aux Saint-Jacques et aux blettes. Le champagne cohabite et aucun des deux ne se nuit. Au contraire, le champagne élargit le saké.

L’anguille a été ajoutée au menu par Arnaud Lallement et permet l’entrée du vin rouge. L’Hermitage Jaboulet 1939 a une belle couleur. Le nez sent un peu la poussière, mais il est expressif. En bouche je ressens un peu de poussière mais la mâche est riche, large, très rhodanienne. Et je mesure encore à quel point Richard est un dégustateur positif, car il accueille ce vin légèrement blessé avec amitié. Ce sera sur la tourte que l’Hermitage se montrera sans défaut, mais c’est aussi sur ce plat divin qu’entre en scène le vin que je souhaitais que Richard découvre.

La bouteille est cylindrique, totalement opaque car couverte d’une poussière collée qui a probablement plus de deux siècles. La bouteille est surmontée d’une cire verte que je casse en petits morceaux, car c’est maintenant que j’ouvre ce vin. Le cul de la bouteille est incroyablement profond. Je l’ai mesuré à 7,5 cm. Je suis éberlué de voir que le bouchon est d’une pureté extrême sans aucun signe d’âge alors qu’aucun doute n’est possible, ce vin n’a jamais été rebouché car il fait partie de la collection que j’ai achetée dont tous les vins sont dans leur complet état d’origine. La bouteille soufflée pourrait bien être du 18ème siècle.

Je verse le liquide à la couleur admirable. Il y a des reflets rouges intenses, d’autres jaunes d’or, d’ambre doré. Cette couleur est unique, montrant une vie intense de ce vin. Le parfum est celui d’un parfum tant il est complexe et multiforme. C’est un nectar. En bouche on est surpris par la lourdeur combinée à une légèreté liée à une acidité merveilleuse. Le vin est riche, large, puissant et la fin de bouche est une bombe de poivre. Nous éliminons la piste de Madère et assez rapidement je suis convaincu qu’il s’agit d’un vin de Chypre. Je changerai d’idée ce soir en goûtant ce vin avec mon fils, mais à cet instant, nommons le Chypre ~ 1790, pour donner une année tardive dans le 18ème siècle. Je voulais absolument que Richard voie à quel point ces vins antiques qui n’ont pas d’âge ont des palettes aromatiques infiniment plus riches que tous les autres vins. L’image qui me vient est celle de vieux Byrrh, de vieux Quinquinas, qui seraient passés par un alambic pour qu’ils se concentrent encore plus et mélangés à des tonneaux de poivre. Ces vins sont pour moi le Graal du vin car leur complexité comme leur pureté sont infinies.

Nous avons longuement discuté et ce qui n’arrive que dans les grands restaurants de province, à 16 heures tout le monde est encore à table. Il faut dire que l’ambiance créée par Arnaud Lallement pousse au bien-être. En milieu de repas nous sommes allés visiter la nouvelle cuisine, refaite il y a peu. Elle est impressionnante.

Que dire du repas ? Une chose ne trompe pas. Les blettes sont accompagnées de trois biscuits de seigle. J’ai voulu les mettre de côté pour goûter le plat sans eux. Et je me suis aperçu qu’ils sont indispensables. C’est donc une cuisine élégante, sans heurt gustatif, où tout est cohérent. J’y ajouterai que c’est la cuisine d’un homme heureux, car une cuisine aussi mesurée et accomplie ne peut être que l’œuvre d’un homme heureux. Par goût personnel c’est l’anguille que j’ai adorée, parce que j’aime ce poisson qui accepte les vins rouges, mais tout mérite les plus grands compliments.

Le saké de Richard Geoffroy va me donner envie de l’associer à des vins dans mes dîners, pourquoi pas ? Les trois vins que j’ai apportés, avec des risques pour les deux premiers, ont intéressé Richard et j’ai apprécié son ouverture d’esprit. Ce repas figure parmi mes grands moments par la qualité des échanges avec ce grand homme du vin.

Je suis rentré à la maison avec ce qui reste des trois vins pour dîner avec mon fils. C’est son dernier dîner en France avant l’an prochain. Ma femme a prévu des joues de porcs cuites dans un bouillon de légumes. Nous allons constater à quel point le vin peut être miraculeux, car aussi bien le champagne que l’Hermitage vont se montrer très au-dessus de ce qu’ils étaient au déjeuner, et tous leurs petits défauts de poussière ont disparu.

Le champagne Le Mesnil 1957 est ample, très blanc de blancs, et vif et mon fils l’adore. Et l’Hermitage 1939 est un vin du Rhône comme mon fils les aime, avec une vivacité très supérieure à celle de ce midi. Quel bonheur de constater une fois de plus la résistance des vins anciens.

Le possible Chypre ~ 1790 est tout aussi brillant que ce midi. Mon fils a bu avec moi plusieurs Chypre 1845 et il me dit que la couleur de ce vin est plus rouge que celle des Chypre, qui sont plus jaunes, et il ne retrouve pas dans le poivre des intonations des Chypre que nous connaissons. Je pense alors aux Malvoisies des Canaries de 1828 que j’ai bues plusieurs fois. Il y a des évocations plus proches que le vin de Chypre. Alors, nommons ce vin Malvoisie ~ 1790. Il en reste encore pour le repas de Noël avec mes filles. Ces vins éternels sont tellement riches qu’il est difficile de les identifier précisément.

Les vins que j’ai partagés avec Richard Geoffroy ont été adorés par mon fils. La vie est belle.

l’étiquette a été rongée comme si une limace avait voulu la manger. On voit bien l’insecte qui a pris ses aises dans le bouchon au point qu’il s’émiette.

la couleur du vin est splendide

le cul de la bouteille est incroyablement profond, ce que la photo ne rend pas vraiment

je suis absolument surpris que les bords du bouchon soient aussi nets, alors qu’il n’y a pas de doute que le bouchon a été posé il y a plus de 140 ans.

la cuisine

les compères

Boutique éphémère pour les champagnes RSRV de la maison Mumm samedi, 21 décembre 2019

La maison de champagne Mumm organise pour quelque temps dans Paris une « boutique éphémère » où l’on peut goûter ses champagnes R.S.R.V. Ces quatre lettres correspondent aux bouteilles que l’on réservait en cave pour des clients ou pour des occasions, et les quatre lettres marquées à la craie en cave signifient « RESERVE » dont on a enlevé les « E ». Je suis impressionné par la qualité de la décoration qui fait tout sauf éphémère tant elle est réussie.

Nous allons goûter quatre cuvées R.S.R.V. qui sont destinées à des amateurs qui sont parrainés dans le club R.S.RV. plus la cuvée de prestige, Cuvée Lalou. Le traiteur Maison Lacaille a travaillé avec la maison Mumm pour créer des accords subtils. L’intention est louable. Il faudrait travailler encore les supports de pâtisserie qui parfois empêchent la légèreté des accords, mais globalement, le résultat est remarquable.

Cuvée RSRV Blanc de Blancs Mumm est associé à un croquant de homard, pointe de mayonnaise au raifort / pic de thon rouge et cébettes / pince de bar en ceviche. Le nez est très pur et la bulle très fine. L’attaque est de belle acidité. La minéralité est parfaite et le champagne évoque les fleurs blanches avec un finale de noisette.

Cuvée RSRV 4.5 Mumm fait la route avec Involtini speck et ricotta / œuf de caille et gelée aux herbes / croquant de foie gras au spéculos. Fait de 100% de grands crus ce champagne est fait de 60% de pinot noir et 40% de chardonnay. Le nez est plus doux. Le champagne est superbe avec une bouche plus ronde. Il est très agréable avec un peu moins de longueur que le précédent.

Cuvée RSRV Blanc de Noirs 2009 Mumm est accompagné de croquemonsieur au jambon truffé et vieux comté / tonneau de pomme de terre, veau et crème aux morilles / gambas en croûte de pétale de maïs. Le vin est noble et racé. Il est vif. C’est un champagne de plaisir, très masculin.

La Cuvée Lalou Mumm 2006 est bue sans accompagnement. Le nez est intense et grand. La bouche est à la fois puissante et douce. C’est un champagne harmonieux de grande qualité.

Cuvée RSRV rosé Foujita Mumm cohabite avec croustille de saumon gravlax, aneth et airelle / sucrine de chèvre et confiture de cerise noire / tartelette diplomate aux fruits rouges. Ce rosé est absolument superbe, viril et de belle texture.

Deux champagnes ont illuminé la dégustation, le Lalou et le rosé. Cette initiative de « Popup store » est une réussite.

Dégustation des 2016 de la Romanée Conti et dîner à Grains Nobles dimanche, 15 décembre 2019

Chaque année, Aubert de Villaine, gérant de la Romanée-Conti, vient présenter au siège de « Grains Nobles » les vins qui viennent d’être mis en bouteille. Il s’agira du millésime 2016. Trois vins n’ont pas été produits du fait de fortes grêles, aussi seront-ils remplacés par des 2007.

Dans la cave de dégustation Pascal Marquet gérant de Grains Nobles accueille les participants qui sont le plus souvent des habitués, Aubert de Villaine, Bernard Burtschy et Marie-Ange Gorbanevsky la réalisatrice d’un film « l’Âme du vin » qui l’a conduite à passer trois ans en Bourgogne et à recueillir les propos de nombreux vignerons dont Aubert de Villaine.

Aubert de Villaine présente le contexte du millésime 2016 : « la nature nous a causé du tracas ». L’année a eu deux visages. Un début d’année difficile, puis un printemps très difficile. Début avril il y a eu du beau temps mais le vent du nord a apporté le gel. Le 27 avril Echézeaux et Grands Echézeaux ont gelé à 90%. Le mauvais temps a continué et il a fallu lutter contre le mildiou et l’oïdium. La floraison ne s’est pas trop mal passée mais elle a duré trois semaines, ce qui a créé des hétérogénéités. A partir du 15 juillet il y a eu le deuxième visage de l’année avec un temps très beau jusqu’aux vendanges. Les orages du 15 août étaient nécessaires car il y avait une canicule. Deux pluies du début septembre ont apporté de l’humidité. La maturation a été très rapide à la fin. Le pinot noir a mûri très vite. On était prêt à vendanger dès le 15 septembre mais on a attendu et on a vendangé le Corton le 22 septembre. Les vendanges des rouges se sont poursuivies jusqu’au 30 septembre. Des 10% restants des Echézeaux et Grands Echézeaux on a obtenu des grappes qui ont fait des vins magnifiques qui seront gardés en magnums et seront « libérés » dans quelques années.

Aubert de Villaine estime que tout ce qui permet de faire de grands vins a été réuni en 2016. C’est ce que nous allons vérifier maintenant.

Aubert de Villaine, au siège de la société « Grains Nobles » a présenté le contexte du millésime 2016. Il considère 2016 comme un millésime solaire de belle maturité. Nous allons maintenant goûter les vins en commençant par deux exceptions. Les Echézeaux et Grands Echézeaux n’ayant pas été faits en 2016 du fait de la grêle, nous les goûtons sur le millésime 2007.

L’Echézeaux Grand Cru Domaine de la Romanée Conti 2007 a un nez superbe et franc. L’attaque est fraîche. Le vin est un peu léger mais vif. Aubert de Villaine dit que le nez très expressif annonce la qualité future de ce vin. Par le hasard du service je suis servi d’une deuxième bouteille meilleure et plus riche. Ce vin est très plaisant pour un millésime difficile. Il a un finale poivré. Je l’aime beaucoup.

Le Grands Echézeaux Grand Cru Domaine de la Romanée Conti 2007 a une couleur magnifique, assez claire d’un rose noble. Le nez est superbe et précis. Cela annonce un grand vin. La bouche est gourmande et joyeuse. Il a plus de densité que l’Echézeaux. J’adore car il a la jeunesse mais déjà une maturité qui le rend gourmand et gastronomique. Il est fluide et frais, au finale superbe.

Nous revenons au sujet du jour, les 2016 en commençant par le Corton Grand Cru Prince Florent de Mérode Domaine de la Romanée Conti 2016. Sa couleur est beaucoup plus foncée que celle des 2007. Le nez est très agréable. La bouche est suave. Le finale est précis avec un peu de salin. Il est jeune bien sûr mais grand et très doux. Il est d’une belle gourmandise et il évoluera en s’épanouissant. Il est racé. De mémoire, je ressens un saut qualitatif par rapport aux millésimes précédents de ce vin. Il prend de plus en plus le style du Domaine de la Romanée Conti.

La Romanée Saint-Vivant Grand Cru Domaine de la Romanée Conti 2016 a un nez très riche et puissant. Il est voluptueux, très agréable à boire. Il est salin, au finale très fort et à la belle persistance aromatique. Il est beaucoup plus profond que les précédents, vin élégant de beaucoup de charme. Il va devenir grandiose dans quelques années, avec sa douceur charmante et sa complexité noble.

Le Richebourg Grand Cru Domaine de la Romanée Conti 2016 a un nez intense et complexe. C’est un parfum. L’attaque est séduisante et généreuse. C’est vin massif et tannique. Bernard Burtschy dit qu’il est costaud, un peu réduit, évoquant le cuir. Il est riche, un peu fumé, c’est un guerrier. Il a une attaque douce et un corps d’athlète. Ce sera un grand vin.

La Tâche Grand Cru Domaine de la Romanée Conti 2016 a un nez d’un charme fou. La bouche est raffinée et son finale rebondit. C’est un vin noble et joyeux qui nous envoie des brassées de sourires. Il est joyeux et gourmand, magnifique de vivacité et très gourmand. Il a des évocations de poivre noir. Il se situe au-dessus des vins précédents.

La Romanée Conti Grand Cru Domaine de la Romanée Conti 2016 a un parfum incroyable, envoûtant, d’une force extrême. La bouche est très aérienne. La complexité est là, mais il faut la chercher car elle ne se veut pas évidente. Bernard Burtschy dit que c’est un vin déstabilisant. Il ajoute qu’il faut se laisser prendre par sa magie. Aubert de Villaine le dit évanescent, transparent, mais le vin s’anime et apparaît, frais et fluide. Il me fait la danse des sept voiles. Je ressens qu’il explosera de saveurs raffinées quand il aura vingt ans. Il s’anime à l’aération et le nez est fou. La bouche est folle elle aussi. Il y a une profondeur qui est hors norme et il suffit de goûter à nouveau le Richebourg et La Tâche pour sentir à quel point ce vin est d’un raffinement absolu.

Les 2016 rouges que nous avons bus sont d’une très grande qualité et Aubert de Villaine nous dit que le millésime 2016 sera le millésime le plus sous-estimé car il sera probablement plus grand que 2015, millésime encensé.

Le Montrachet Grand Cru Domaine de la Romanée Conti 2007 est servi car il n’y a pas de 2016. La grêle a permis à toute l’appellation de faire une très petite quantité qui a été vinifiée pour compte de tous les domaines par le Domaine Leflaive. Il ne sera pas commercialisé mais réparti entre les vignerons concernés. Le 2007 a déjà une couleur dorée qui s’explique par le léger botrytis que l’on ressent en bouche. Le nez est discret et la bouche est délicate. Ce n’est pas un vin tonitruant. Il a une belle matière mais pas de gras. Il est très subtil. Ses saveurs vont tous azimuts ce qui est assez exceptionnel. Aubert de Villaine le dit opulent mais je le trouve plutôt raffiné, jouant sur ses complexités. J’aime le raffinement de ses saveurs aériennes. Il a une belle acidité et de la fraîcheur. C’est un très grand vin.

Cette dégustation a été d’un niveau exceptionnel.

Selon la tradition nous nous retrouvons à quelques-uns à dîner dans la salle de restaurant de Grains Nobles, autour d’Aubert de Villaine, Bernard Burtschy et de Marie-Ange Gorbanevsky. La cuisine est très familiale avec des plats agréablement épicés. Le Champagne Cuvée des Caudalies de Sousa & Fils 1999 est du pur chardonnay de vignes de plus de cinquante ans, dégorgé en 2005. Il est très bien fait et de belle fraîcheur.

A côté de lui le Champagne Bollinger la Grande Année Bollinger 2002 se montre plus puissant, plus carré et cela est dû à la présence significative de pinot noir. Et les deux champagnes ne se combattent pas mais additionnent leurs talents, le de Sousa plus fluide et aérien, le Bollinger plus solide et incisif.

Le Corton Grand Cru Bouchard Père & Fils 2002 est servi après la dégustation des vins jeunes de la Romanée Conti aussi le passage est assez difficile, mais le vin s’en sort bien, d’un classicisme de bon aloi.

Le Sandrone Valmaggiore Nebbiolo d’Alba 2004, bien que d’une extraction moins noble que le Corton, est plus adapté à ce dîner et au délicieux bœuf mariné de longues heures. Il est simple, d’une belle mâche et riche, sans souci.

Le Quart de Chaume domaine des Baumard 1997 est d’une belle couleur dorée et peut accompagner les beaux fromages mais aussi le dessert mêlant fruit de la passion et des fruits jaunes, rouges et noirs. Il est vif et gourmand, ensoleillé et généreux.

J’ai apporté un Coteaux du Layon Marcel Leconte 1959 et j’ai commis l’erreur de ne pas l’ouvrir avant la dégustation de la Romanée Conti, car il se présente bouchonné, sans trop d’influence sur le goût, ce qui me laisse penser qu’avec trois ou quatre heures d’aération il aurait perdu ce défaut.

Ce repas sympathique d’après la présentation des derniers vins de la Romanée Conti mis en bouteilles est un moment d’amitié qui ajoute au plaisir d’une des plus belles dégustations de vins jeunes qui soit.

la couleur de deux des vins, un 2007 et un 2016

le repas qui a suivi