D’autres Meursaults dimanche, 6 janvier 2002

Après les fêtes, pour vérifier le voyage en Meursault, deux Meursault de Coche Dury : le Meursault les Rougeots Coche Dury 1997 et le Meursault Coche Dury 1998. Le fait d’avoir bu des jeunes et des vieux en si peu de temps confirme l’intérêt de la démarche de wine-dinners : Coche Dury fait des vins splendides, et ses jeunes vins expriment l’authenticité du Meursault. Mais des vins plus anciens font apparaître des palettes de goûts complémentaires si riches et si profonds que l’on doit explorer cette autre facette du vin, qui n’est pas en compétition, mais en addition de saveurs à découvrir.

Dîner de réveillon lundi, 31 décembre 2001

Arrive enfin le réveillon du 31, où le parti pris fut aussi, entre amis, de faire des expériences plus risquées que d’habitude, tout en recherchant quelques plaisirs rares. Magnum de Dom Pérignon 1992. La sensualité de cette bouteille est un facteur de séduction certain auprès des femmes. Très agréable champagne, bien solide, mais sans folie. Ensuite trois Meursault : un Meursault 1953 de Louis Chevalier (encore une fois), vraiment très agréable, un Meursault 1942 de Patriarche : mort et un Meursault Goutte d’Or des petits fils d’Henri de L’Euthe 1945 : une pure merveille. De ces vins qui font frémir tant on atteint la perfection gustative. Il y avait tout dans ce Meursault. Sans doute l’un des plus grands Meursault que j’aie bus. Le Richebourg de Charles Noëllat de 1929 que j’avais ouvert quelques heures plus tôt m’avait fait peur. Il n’est jamais revenu à la vie. Bien que mort, il n’a jamais été imbuvable, ni immédiatement ni quelques jours plus tard, conservé en carafe pour voir comment il évoluerait. Faisant partie d’un achat décevant, je savais le risque pris. En revanche La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1943 fait partie de ces bouteilles qui marquent une vie. C’était un clin d’œil au réveillon d’un an auparavant où j’avais ouvert Richebourg DRC 1943. Grandissimes bouteilles. Le Richebourg était plus grand encore que La Tâche, qui est malgré tout à un niveau stratosphérique dans la hiérarchie des Bourgognes. Un magnifique Coteaux du Layon 1936 a ravi tous les palais. Ces vins sont si beaux quand ils ont de l’âge. Beaux arômes, belles palettes de saveurs subtilement douces. Magnifique vin qui préparait l’arrivée d’un Suduiraut 1928 grandiose mais supportait bien la comparaison dans la différence. Ce Sauternes d’une couleur si belle, tout de subtilité, légèrement moins bon que celui du dîner de juillet, mais splendidement grand quand même. Une vieille quetsche du début de siècle a clôturé ce voyage dans de nombreuses années de rêve : 53 / 45 / 43 / 42 / 36 / 29 / 28.

Bulletins 2001 – De 1 à 22 lundi, 31 décembre 2001

Le rythme des bulletins était un peu plus calme aux débuts.
Voici les tout premiers bulletins que j’ai écrits, au moment du lancement de wine-dinners.

Lors de ce premier numéro, est-ce que je m’imaginais dépasser un jour le N° 200 ???

(bulletin WD N° 001 001217) Bulletin n°  1     :   1 – diner RVF – 2 – diner de l’Union des Grands crus de Bordeaux – 3 – diner à domicile pour judokas de Sydney – 4 – diner JLB au Crillon – 5 – diner avec Alain Marty  (ce premier bulletin est du 17 décembre 2000)

Bulletin n°  1     :   6 – déjeuner au Quincy – 7 – dégustation chez Artus – 8 – diner d’Alexandre Lazareff

(bulletin WD N° 002 010102) Bulletin n°  2     :   1 – dîner *WD au Maxence 20/12/00

(bulletin WD N° 003 010108) Bulletin n°  3     :   1 – réflexion sur la Romanée Conti – 2 – idées de dîners à thèmes

(bulletin WD N° 004 010213) Bulletin n°  4     :   1 – dîner à domicile – 2 – dîner chez Philippe Parès

(bulletin WD N° 005 010221) Bulletin n°  5     :   1 – voyage à Maury – 2 – dîner impromptu au Maxence

(bulletin WD N° 006 010315) Bulletin n°  6     :   1 – dîner au Maxenceavec Domaine de Chevalier 1907

(bulletin WD N° 007 010331) Bulletin n°  7     :   1 – dîner chez Guy Savoy

(bulletin WD N° 008 010406) Bulletin n°  8     :   1 – dîner *WD chez Patrick Pignol

(bulletin WD N° 009 010421) Bulletin n°  9     :   1 – déjeuner au cercle Maxim’s – 2 – dîner parisien au Bristol – 3 – dîner privé

(bulletin WD N° 010 010526) Bulletin n°  10     :   1 – dîner de JLB au Maxence

(bulletin WD N° 011 010703) Bulletin n°  11     :   1 – Vinexpo – 2 – réception à Yquem

(bulletin WD N° 012 010705) Bulletin n°  12     :   1 – dîner *WD chez Laurent

(bulletin WD N° 013 010707) Bulletin n°  13     :   1 – dîner *WD chez Guy Savoy

(bulletin WD N° 014 010907) Bulletin n°  14     :   1 – vins de vacances – 2 – réception d’un américain à Paris

(bulletin WD N° 015 010911) Bulletin n°  15     :   1 – dîner *WD au Maxence avec Bipin Desai

(bulletin WD N° 016 010926) Bulletin n°  16     :   1 – dîner *WD au Maxence

(bulletin WD N° 017 011010) Bulletin n°  17     :   1 – vins bus lors de dîners

(bulletin WD N° 018 011127) Bulletin n°  18     :   1 – dîner de JLB au Maxence

(bulletin WD N° 019 011130) Bulletin n°  19     :   1 – dîner *WD au Carré des Feuillants

(bulletin WD N° 020 011206) Bulletin n°  20     :   1 – cadeau d’un Calon 55 – 2 – salon des caves particulières – 3 – expériences diverses

(bulletin WD N° 021 011213) Bulletin n°  21     :   1 – dîner *WD au Pré Catelan

(bulletin WD N° 022 011229) Bulletin n°  22     :   1 – diverses expériences – 2 – dîner de l’Union des Grands crus de Bordeaux – 3 – déjeuner chez Guy Savoy – 4 – dîner à domicile – 5 – dîner de Noël

Bulletin n°  22     :   6 – dîner de St Sylvestre

Dîner de Noël lundi, 24 décembre 2001

Pour Noël, en famille, des essais de vins de toutes provenances et valeurs, essais plus faciles en famille que dans un dîner officiel. Bollinger grande année 1990, juste pour se remémorer que 90 est vraiment grand. Montrachet Grand Cru Guichart Potheret 1988 en magnum. Belle structure et épanouissement d’un Montrachet, grand vin juteux et savoureux. Chassagne Montrachet les Embrazées premier cru Bernard Morey et fils 1991. Juste pour vérifier qu’un Montrachet est plus grand. Coustolle Canon Fronsac 1982. Là aussi pour vérifier qu’un de mes maîtres, qui vénère ce vin a bien raison, tant ce vin est bien fait, Black Noble de Bortoli, vin australien botrytisé de 17°5. En fait trop puissant pour le boire dans un repas. Lafaurie Peyraguey 1961 en demie bouteille affreusement bouchonnée. Grande tristesse tant j’avais déjà aimé ce vin. Quelques vins ont été finis le lendemain midi, auxquels j’ai ajouté Besserat de Bellefon rosé 1966, splendide champagne déjà madérisé, mais si agréable quand on aime cela (les grands champagnes madérisés sont un type de vin en soi). Château Chalon Désiré Petit 1992 (médaille d’or). Splendide. Rivesaltes ambré 1994 Cazes à comparer au Plénitude de Mas Amiel, grenache de 1998 : deux intéressantes expressions gustatives, débordantes de saveurs variées de soleil. A noter que le Lafaurie Peyraguey 61 rebu le lendemain avait quasiment perdu tout son goût de bouchon et m’a rappelé toute sa valeur. Entre les fêtes un Mouton-Rothschild 1993, si difficile à classer, car c’est un solide guerrier que n’aide ni l’année ni son jeune âge.

Dîner d’amis, façon wine-dinners dimanche, 23 décembre 2001

Et puis un dîner de type wine-dinners où l’on commence par Bollinger grande année 1992, qui s’exprime plus avec un peu de chaleur, grand sans atteindre le 90. Un Beaune du Château de Bouchard vers 1960. Ce vin blanc n’est pas millésimé. Je suis un amoureux de ce blanc dont j’ai bu le 28 et des bouteilles des années 50 avec tant d’émotion. Un Rivesaltes Cuvée Aimé Cazes 1976. Ce vin est tellement agréable ! Bien sûr, je suis un inconditionnel de ces vins si beaux, mais quand même, quelle race. Prévu sur un gâteau au chocolat, je n’ai pas trouvé qu’il s’éclatait. J’ai demandé un dessert aux agrumes. Et là, quelle merveille : une grenade dégoupillée de saveurs infinies.

Quelques bouteilles bues en diverses occasions dimanche, 23 décembre 2001

Voici quelques bouteilles bues en diverses occasions, qui jalonnent un parcours de recherche dans beaucoup de directions différentes. Mission Haut-Brion 1979. Année variable mais grand vin. Très grande complexité : de ces vins difficiles à comprendre, mais qui révèlent d’énormes potentialités. Une dégustation de nombreux vins du millésime 1999. Parmi quelque 15 ou 16 vins bus, La Conseillante 1999 est apparu immensément prometteur, et Phélan Ségur 1999 fut une très belle surprise. La Lagune 1995 ne s’exprime pas encore, Pichon Longueville 1990 est déjà un beau vin puissant de grande réussite mais prometteur encore, Cos d’Estournel 1986 est splendide, un de ces vins à boire sans s’arrêter, envahissant de personnalité. Rayne Vigneau 1996 : impossible de l’apprécier quand on a adoré le 1949 : ce n’est pas le même « produit ». Ces vins, les 99 et ceux qui précèdent furent proposés dans une grande dégustation avec dîner. Un Meursault Louis Chevalier 1953 amusant, car il devrait être madérisé mais ne l’est pas. Un Vosne-Romanée les Rouges de Dominique Laurent 1997 : très fruité, agréable mais pas de réelle vibration. Un Jurançon Château Jolys 1989. Quelle splendeur. Doux, mais délicat, avec de belles suavités dans les registres citronnés. Un beau vin pour les foies gras ou les desserts. Dans un somptueux déjeuner impromptu chez Guy Savoy, les pistes du sommelier : un Chateauneuf du Pape blanc château de Vaudieu 1999. Brillant et intense : c’est comme cela que j’aime les découvertes de sommelier. Un Nuits Saint Georges premier cru des Forets Saint Georges domaine de l’Arlot-Prémeaux 1988. Le nom est plus long que la caudalie. Agréable et honnête. Un Château Chalon de Philippe Butin 1992. Je suis un aficionado de ce vin qui m’enchante par son goût en permanence décalé de noix jeune et amère.

Dîner de wine-dinners au Pré Catelan jeudi, 13 décembre 2001

Ce dîner est raconté dans le vingt et unième bulletin. Des bonnes bouteilles auront encore quelques occasions de s’ouvrir cette année, mais ce sera dans d’autres contextes. Nous étions onze au Pré Catelan, où l’efficace équipe s’était intéressée à notre passion. Grande organisation, implication de tout le personnel concerné, travail de professionnels. Frédéric Anton a fait un menu remarquable de combinaisons, de traitement des mets et de création. Quel dommage que sa réserve, qui l’écarte de la salle, ne nous ait pas permis de le féliciter comme il convenait, et d’écouter ses choix. Il avait décidé de nous régaler, je vous laisse juge : l’étrille en coque et fine gelée au caviar, crème fondante d’asperge verte, la betterave parfumée à la muscade et vieux comté, jus gras, l’oursin cuit dans son test, fumet léger de céleri, la Saint-Jacques en coquille au cidre, noix écrasées et torréfiées, la langoustine en papillote croustillante, jus de romaine et crème d’échalotes, le pigeonneau poché dans un bouillon aux épices, cuisses en petites merguez, semoule de brocoli préparée en couscous et pois chiches, le cochon, poitrine braisée rôtie en cocotte, noisettes et salsifis confits dans un jus gras, les fromages fermiers, la poire en marmelade recouverte d’un zéphyr avec jus et croustillant à la vanille. Comme nous avons classé les vins, nous nous sommes amusés à classer ses plats. Le pigeon fut unanimement jugé comme grandiose, suivi de la betterave au comté et de l’oursin. Le pigeon fut l’un des plus grands que j’aie jamais dégustés. J’ai apporté un soin tout particulier à l’oxygénation des vins, cherchant à améliorer encore mes méthodes, et je me suis rendu compte que cela joue de façon essentielle sur l’image que l’on se fera du vin au moment du premier contact. J’ai pu constater que mes choix furent bons, fondés sur une analyse purement olfactive : je ne bois pour goûter que si ce prélèvement a un intérêt dans l’élargissement de la surface d’oxygénation, car je préfère de loin l’oxygénation lente à celle que procure une « facile » mise en carafe. Pour une fois, je vais m’étendre plus sur cet aspect, car cela pourrait donner des idées à ceux d’entre vous qui vont ouvrir de vieux précieux flacons pour les fêtes. Le Champagne Laurent-Perrier 1981 a délivré de belles et abondantes bulles, une couleur joliment dorée, un nez intense et imprégnant, et un goût charnu de champagne élégant marqué par le vin. Nous avons en fin de repas donné notre tiercé, le Top 3.
Ce Laurent Perrier étonnant a été non seulement nominé, mais aussi mis en premier par un convive. A noter que l’on a gardé les verres vides pour les sentir. C’est le champagne qui fut le plus brillamment persistant. Le Château Lagrave Martillac 1992 a été ouvert à 17h, bouchon enlevé en chambre froide à 10°. Rothschild à19h et mis à température de pièce une demie heure avant le service. Beau nez marin, dans les citrons, en bouche la glycérine qui s’estompe ensuite. Belle expression de Bordeaux, nettement meilleure que ce que nous attendions. Il a même été nominé. Le Chablis 1er cru les Vaudevay Domaine Laroche 1988 a été ouvert à 17h et rebouché. Débouché de nouveau à 19h il a été servi non carafé après mise en salle de 1/2 heure. Très classique Chablis de belle expression, là aussi meilleure que ce que nous attendions. Il faut dire que les entrées de Frédéric Anton ont été des « embellisseurs » de talent. Ayant assez rapidement asséché les blancs nous avons dû servir le Château Figeac Saint Emilion 1978 sur la langoustine, et ce fut un bon choix. Ouvert à 15h30, il a profité d’une oxygénation lente qui a évité de carafer. Vin extraordinaire de plénitude, élégant, adulte, beau comme Adonis. Un plaisir rare, bien au dessus de ce que mes amis experts et moi estimions devoir goûter. Plusieurs fois nominé, il a enchanté notre table. Le Château Calon Montagne Saint-Emilion 1955 que m’avait envoyé son propriétaire fut une ajoute au programme initial. Merci pour ce vin si beau. Ouvert à 15h30, il nécessitait une bonne oxygénation : je l’ai carafé à 19h, laissant le fond en bouteille. M. Boidron, contrairement à ce que vous m’avez dit, il n’y avait pas de dépôt. Vin très subtil, de très bonne structure, nous fumes frappés par son élégance et sa tenue. Il se montrait grand à coté du Figeac, même si moins complexe. Il a donné de belles émotions qui en ont fait le deuxième vin le plus nominé. Il a confirmé de belle façon le talent de l’année 1955. Le Château Gadet Médoc 1929 a été ouvert à 16h. Beau nez, même si poussiéreux, il s’est gentiment oxygéné en six heures. Une couleur si belle que David Rivière, le sommelier du Pré en fut ému. Très belle présence, attaque fraîche, puis l’acidité qui est le squelette d’un vin vieux, et son gage de longévité. Fin un peu courte, mais vraiment grand vin. J’ai été agréablement surpris de voir comment chaque convive acceptait ce vin pourtant si différent des vins actuels. Quand le Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1969 est apparu, quel choc positif ! Un vin qui embaume la pièce quand on le sert. Une odeur envahissante et capiteuse, un vin riche et puissant. Je l’ai ouvert à 16h et rebouché, tant l’odeur était parfaite. Très grand vin, mais qui allait rencontrer une rude compétition. Le Nuits Saint Georges Clos des Corvées Général Gouachon 1945 Tasteviné 1950 a été ouvert avec les autres et s’est aéré lentement. Sa jeunesse est époustouflante. Intensité de goût, avec moins de velouté que les deux autres et plus de caractère. Le plus souvent nominé. Un vin de grande émotion. Le Corton Soualle et Bailliencourt 1929 a été goûté trop tard et trop vite : nous n’avons pas pu l’apprécier autant qu’il le mérite, alors qu’il est aussi bon que celui ouvert il y a deux mois. Grand, subtil plus que les autres mais moins flamboyant que le 45. Il a de ce fait été moins nominé. Le Monbazillac Le Chrisly 1965 a étonné tout le monde. Belle couleur dorée. A l’aveugle, ce serait un grand Sauternes. Grand, long, persistant, caressant. Présenté à un stade idéal de dégustation. Le Château Gillette Crème de tête 1949 devait être la star absolue. C’est incontestablement une réussite, d’un ambre si beau. Mais je n’y ai pas trouvé la même émotion qu’avec le Rayne Vigneau 1949 récent. On parle ici de nuances, car ce vin a été souvent nommé premier par des convives. Mon classement personnel, rejoint presque par deux autres convives, alors que tous les classements furent différents est : 1 : Nuits Saint Georges 45, en 2 : Calon 55 et en 3 : Corton 29. Mais le champagne et le Figeac mériteraient des mentions comme le DRC et le Gillette, les deux stars « sur le papier ». Des soifs résiduelles ont été comblées par un Laurent Perrier Grand Siècle (qui a mis en valeur par différence le sublime 1981) et Laberdolive 1970, ce bel Armagnac. Les convives ne se connaissaient pas, et il y avait cinq d’entre eux qui participaient à leur deuxième ou troisième dîner, mais issus de trois dîners différents. Leur aisance a permis une ambiance gaie et décontractée tellement chaleureuse que tous – ou presque – ont décidé de se revoir à un prochain dîner le 24 janvier. On m’a même demandé d’ouvrir l’un de mes Chypre du 19ème siècle. Je vais y réfléchir, car j’aimerais dans la démarche d’initiation à des vins rares que l’on sache doser les étapes du voyage. Si l’on accède trop vite au Graal, que reste-t-il après ? J’y pense et proposerai un dîner pour cette date où des places seront sûrement disponibles.

dîner de wine-dinners au Pré Catelan jeudi, 13 décembre 2001

Dîner au Pré Catelan le 13 décembre 2001
Bulletin 21
Les vins :
Champagne Laurent-Perrier 1981
Château Lagrave Martillac 1992
Chablis 1er cru les Vaudevay Domaine Laroche 1988
Château Figeac Saint Emilion 1978
Château Calon Montagne Saint-Emilion 1955
Château Gadet Médoc 1929
Grands Echezeaux Domaine de la Romanée Conti 1969
Nuits Saint Georges Clos des Corvées Général Gouachon 1945 Tasteviné 1950
Corton Soualle et Bailliencourt 1929
Monbazillac Le Chrisly 1965
Château Gillette Crème de tête 1949

La cuisine de Frédéric Anton :
L’étrille en coque et fine gelée au caviar, crème fondante d’asperge verte
La betterave parfumée à la muscade et vieux comté, jus gras,
L’oursin cuit dans son test, fumet léger de céleri
La Saint-Jacques en coquille au cidre, noix écrasées et torréfiées
La langoustine en papillote croustillante, jus de romaine et crème d’échalotes
Le pigeonneau poché dans un bouillon aux épices, cuisses en petites merguez,
semoule de brocoli préparée en couscous, et pois chiches
Le cochon, poitrine braisée rôtie en cocotte, noisettes et salsifis confits dans un jus gras
Les fromages fermiers
La poire en marmelade recouverte d’un zéphyr avec jus et croustillant à la vanille

Des bouteilles deci-delà jeudi, 6 décembre 2001

En dehors des dîners de wine-dinners, je bois quelques vins au hasard de suggestions ou d’envies. Un fournisseur de mon « métier de base » a ouvert un Meursault 1994 de Olivier Leflaive, fort agréable et un Gloria 1983 vraiment aimable, car à parfaite maturité, sans trop en faire. Le sommelier de chez Laurent m’a fait découvrir un Coteaux du Languedoc Prieuré de Saint-Jean de Bébian 1991 qui est absolument remarquable : de l’encre, du tannin, de la force. Belle preuve que beaucoup de travail se fait là.
J’ai ouvert deux vins qui peuvent expliquer l’hésitation que certains amateurs ont pour les Bourgognes entre deux ages : un Nuits-Saint-Georges 1er Cru La Richemone de A. Pernin-Rossin 1982 était franchement désagréable. Et un Griotte Chambertin 1976 de chez Joseph Drouhin avait de belles qualités, mais n’exprimait pas vraiment grand chose. Toute cette période, disons de 1968 à 1982 est en pleine mutation (non pas chimique mais historique) : le vin vit la fin de sa période de maturité, sans avoir vraiment développé ses qualités de vieillesse. Alors, selon les bouteilles, on aura des chances de trouver un vin encore bon, ou pas encore « séniorisé ». Un tel risque existe beaucoup moins avec les vins des années 30 à 50, qui ont déjà reçu la grâce du temps, sans parler des Bourgognes des années 10 et 20 qui sont de pures merveilles, quand ils ont eu la chance ou la qualité de savoir traverser le temps. Et il y en a plus que ce que l’on croit. Ce qui justifie wine-dinners.
Un Chablis 1er cru les Vaucopins du domaine Long-Dépaquit 1988 est toujours un vrai plaisir gustatif, et un Noble One d’Australie, vin botrytisé de 1996 m’a nettement moins emballé que lors de précédentes occasions : trop de sucre et pas assez de subtilité. L’atmosphère ? La présentation ? Tant de choses influent sur le jugement que l’on porte sur un vin : une grande dose d’humilité s’impose.
Pour finir, deux moments d’association mets et vins qui m’ont enchanté : au Cinq, sur les conseils d’Eric Beaumard, sur une grouse, un Hermitage de chez Chave 1998 : l’association est évidente, mais c’est parfois agréable de le vérifier. Et le plus magnifique fut sur un pied de porc chez Laurent, un Château Chalon de chez Jean Macle 1981. Ce Château Chalon est plus doucereux et moins marqué par l’astringence de noix habituelle. L’association fut grandiose. Si ce vin n’avait été le dernier de leur carte dans cette année, je vous aurais recommandé d’y courir. A propos du Cinq, le fruit du hasard : à la table voisine, on « testait » des Dom Ruinart en magnums. Par la magie des proximités, j’ai pu goûter Dom Ruinart 1990 et 1995. De petites merveilles en bulles. Mon Dieu que c’est bon.
Il y a eu en cette fin d’année une recrudescence de ventes de vins aux enchères. Cela frise l’excitation. Cela montre aussi que des vins vieux existent en quantité importante. Ce serait bien que wine-dinners, même s’il n’est pas le seul, fasse des émules, pour que ces trésors soient bus quand ils sont bons, plutôt que de passer de cave en cave, prenant seulement de l’âge, quelques secousses, et un peu de valeur. Ce n’est évidemment pas par wine-dinners seulement que ces vins trouveront l’avenir qu’ils doivent avoir : être bus avec la meilleure cuisine. Au moins, nous y participons.

Salon des Caves Particulières jeudi, 6 décembre 2001

Le salon des caves particulières vient de se tenir comme chaque année à Paris, et c’est l’occasion de découvrir de nouveaux vins, ou de rencontrer des amis. Comme un grand sommelier originaire du Languedoc Roussillon m’a initié à des vins de grande valeur, l’envie était grande de dire un petit bonjour à des viticulteurs qui sont devenus depuis des amis. Mas Amiel devient une star. Grande démarche d’innovation et de qualité. Des vins qui demain seront des vraies références. Même remarque pour Daumas Gassac : leur rouge 2000 est fantastique. C’est une réussite spectaculaire. Même souci de création éclectique chez notre ami Bernard Cazes qui fait de si beaux vins à Rivesaltes, sur plusieurs registres, comme le fait Mas Amiel. Au Domaine de la Coume du Roy, la jeune génération Volontat-Bachelet fait de belles choses, mais je m’intéresse bien plus aux vieilles reliques. J’ai goûté à nouveau avec bonheur ce 1948 Maury Doré si réussi, meilleur à mon palais que le 1925. J’ai eu la chance sur le stand (imaginez, sur un stand !!) de goûter un Rancio daté vers 1875 / 1885, d’une couleur inimitable qui ne peut être que du 19ème siècle. C’est si bon que j’ai acheté toutes les bouteilles qui avaient été soutirées du fût. J’avais vu ce fût lors de ma visite où j’ai acheté ce si magnifique Maury 1880. Le Rancio que je viens d’acquérir sera une vedette de plusieurs des prochains dîners. Bernard Cazes m’a aussi fait goûter de belles réserves comme un de ses vins de 1948, année importante pour lui, et René Monbouché, qui fait un si expressif Monbazillac et qui « distille » en petits lots à quelques amis des belles grandes années comme 1921, 1924 ou 1929 m’a fait goûter son Monbazillac 2000. Une bombe absolue. On se demande comment il est possible de faire apparaître autant de force. Un vin qu’il va falloir stocker à l’abri pendant 50 ans avant de le déguster.
Une petite remarque à ces talentueux vignerons que j’aime tant : faites bien attention de ne pas tomber trop radicalement dans le marketing de la rareté. Ce pourrait être un succès sur quelques années, puis porteur de déboires en une autre conjoncture. De plus, c’est plus que tentateur pour des vins étrangers qui ont aussi une certaine originalité, et peuvent venir concurrencer quelques uns des vins de ces belles régions.