Archives de catégorie : dîners ou repas privés

Return back from Las Vegas samedi, 10 novembre 2007

On the right, the last picture taken from the taxi going to the airport. On the left, the last gamble machines in the airport.

 

Last views taken from the terminal, with the Pyramide and the MGM hotel.

 

Last views of Las Vegas from the plane.

 Being in transit in Los Angeles, what do I see ? Wolfgang Chef, the brilliant chef of Spago, who gives his name to a bistrot in a terminal !

restaurant Picasso au Bellagio Las Vegas vendredi, 9 novembre 2007

A gauche l’ami qui a organisé le dîner chez Joël Robuchon, à droite un agent de grands vins de Bordeaux au Nevado.

Puligny-Montrachet Le Cailleret domaine de Montille 2004.

Chateau Grand-Puy-Lacoste 1962 et Chateau Croizet-Bages 1961

Chateau La Tour Figeac 1961 et Pedro Ximenez 1961

les plats du menu

les plats du menu

les plats du menu

Je suis avec Julian Serrano chef du restaurant Picasso devant une toile magnifique de Picasso.

dîner au restaurant Picasso de Las Vegas vendredi, 9 novembre 2007

Mon programme « officiel » est terminé. J’avais changé mon vol vers Paris en tenant compte de ce crochet par Las Vegas mais je m’étais trompé sur la date du dîner chez Robuchon. Il me reste un jour et j’invite mon ami de Las Vegas à dîner avec l’agent des plus grands vins de Bordeaux qui est en amont de l’immense Southern Wine & Spirits visité il y a deux jours. Le rendez-vous est pris par mon ami dans l’un des bars du Bellagio qui jouxte la zone de jeu, « le Fix ». Les serveuses de ce bar sont de véritables gravures de mode, de tous les métissages possibles, et leurs robes, si on peut appeler ainsi le minimum de tissu qui les couvre, doit avoir pour fonction de donner envie de consommer ou de jouer. Après un apéritif dont la discussion est sans cesse interrompue de coups d’œil coquins, nous allons au restaurant Picasso, restaurant deux étoiles dont le chef est le sympathique Julian Serrano qui bavardera longuement avec nous après le service. L’immense salle est entièrement décorée de tableaux de Picasso d’une rare beauté et d’une valeur impressionnante. Le restaurant paie chaque année plusieurs centaines de milliers de dollars pour avoir le droit d’utiliser le graphisme exact de la signature de Picasso. Notre table en extérieur est sur une terrasse au bord d’un lac. Nous avons la même impression que celle du grand restaurant qui borde le lac d’Enghein, ou que celle d’un élégant lac italien. La seule différence est qu’ici nous avons en face de nous la Tour Eiffel et l’Arc de Triomphe côte-à-côte, d’une taille divisée par trois. Un spectacle aquatique de centaines de jets d’eau synchronisés avec la musique ambiante va me pousser à prendre une myriade de photos. Quand le final de chaque morceau projette en l’air des tonnes d’eau à cent mètres de hauteur ou plus, nous avons par la suite une délicieuse brise fine comme un brumisateur. Le menu a déjà été composé par mon ami et nous commençons par un champagne Laurent Perrier rosé non millésimé qui se marie à la perfection au caviar Osciètre posé sur des tranches de pommes de terre. Nous goûtons ensuite un Puligny-Montrachet 1er cru le Cailleret, domaine de Montille 2004 qui est plaisant riche et de belle longueur. Mon ami a apporté trois rouges que nous goûtons à l’aveugle. Je trouve la région mais je me trompe de vingt ans sur les années. Il s’agit de Château Grand Puy Lacoste 1962, de Château Croizet-Bages 1961 et de Château La Tour Figeac 1961, domaine que j’avais visité, qui enjambe le Pomerol et le Saint-émilion, mais est un saint-émilion. Le menu est assez spectaculaire : filet de flétan, sauce safran et mousseline de chou-fleur / salade tiède de caille, salade frisée à la truffe et cœur d’artichaut / pigeon rôti, asperges vertes, risotto de riz sauvage et pignons de pin / mignon d’agneau, ragout de flageolets au jus / assortiments de fromages, saint-marcellin, époisses, camembert, fleur de maquis, manchego, cabrales / symphonie de desserts Las Vegas. L’exécution est très semblable à celle de Patrick Pignol. C’est de la cuisine bourgeoise élégante. Les vins sont d’une belle jeunesse, le 1962 étant moins épanoui que les 1961. Je crois que c’est le meilleur Croizet-Bages que je n’aie jamais bu et le La Tour Figeac est le meilleur des trois, avec un velouté charmant. Les desserts sont accompagnés d’un Pedro Ximenez Emilio Lustau 1961 que je devine rien qu’à son odeur, sans avoir besoin de goûter. Non loin de nous, nous voyons une table avec deux hommes et quatre jeunes filles qui ressemblent à s’y méprendre aux playmates de Play Boy. Le corps est bodybuildé, le bronzage est aussi précis que la cuisson des œufs coque, l’usage du silicone est largement distribué, et le sourire de gorge indique que le petit cadeau de fin de soirée sera royal. Cette vision entraîne de la part de mes jeunes convives des réactions exorbitées qu’on ne voit que dans les dessins animés, et chaque fois qu’une de ces beautés aux émotions tarifées traverse la salle, ce que nous voyons à travers les vitres car nous sommes en terrasse, c’est une traînée de langues pendues et de silence qui accompagne leur démarche aussi discrète que sur la scène du Crazy Horse. Rappelons que le Fix et le Picasso sont dans mon hôtel, le Bellagio, dans une aile que je n’avais pas encore visitée. Le retour à ma chambre est une promenade digestive, au milieu de milliers de tables de jeu fréquentées pas des milliers et des milliers de personnes. Las Vegas est une ville superlative. Lorsque je me rends à l’aéroport pour rejoindre Paris, j’ai une petite tristesse, car cette ville de toutes les extravagances est attachante, justement du fait de ses exagérations. La pluie à Paris et ma valise perdue sifflent la fin de la récréation.

au Joël Robuchon de Las Vegas, Yquem et Cheval Blanc jeudi, 8 novembre 2007

A 19 heures précises, j’arrive au restaurant de Joël Robuchon situé au centre de l’hôtel MGM. Il faut bien un kilomètre entre la dépose du taxi et cet endroit. Nous en ferons bien deux avec des amis au retour, car nous nous sommes perdus dans les méandres des allées qui serpentent entre les tables de jeu. La décoration du lieu est luxueuse, avec des teintes noires, jaune vif et cristal. Les matériaux sont beaux. Tout ici donne une impression de luxe serein. Nous serons peu nombreux à ce dîner, pas plus d’une quinzaine. Je reconnais l’acheteur de vins du Caesar’s Palace dont j’avais fait la connaissance impromptue dans les caves de la Romanée Conti. Pierre Lurton est tout sourire, et bavarde avec la responsable des relations publiques de Joël Robuchon et la journaliste d’une revue de luxe de Las Vegas. Je suis avec Bipin Desai venu exprès pour ce dîner de Los Angeles, un ami suisse, l’agent pour le Nevada de plusieurs grands châteaux bordelais et mon ami de Las Vegas qui a organisé ce dîner est venu avec sa ravissante épouse. Il y a aussi des propriétaires de restaurants ou leurs sommeliers.

Ce dîner fait partie de la tournée de promotion qu’effectue Pierre Lurton dans l’ouest américain. En voici le titre : dégustation de Chateau Cheval Blanc and Chateau d’Yquem. Dîner du jeudi 8 novembre 2007, imaginé par Joël Robuchon. Invité d’honneur : Pierre Lurton.

Le menu : L’avocat – Dans une infusion juste prise aux herbes et une caillebotte à l’huile d’olive / Les crustacés – La langoustine truffée à l’étuvée de chou vert, le homard rôti à la citronnelle avec une semoule végétale, l’oursin accompagné d’une purée de pomme de terre au café / Le Matsukaté – Aux capucines en ravioli, escorté d’un bouillon parfumé au gingembre / Le thon blanc – Confit à l’huile pimentée et relevé d’une nage d’endives aux pistils de safran / Le veau de lait – En mille-feuille de tofu aux délices d’Alba sous une voilette parmesane / Le bœuf de Kobe – Grillé aux matsukatés, cristalline au poivre, cresson en tempura, raifort à la moutarde / La poire William – Glacée aux saveurs fruitées et confite à la crème de cassis / Le Victoria – Ananas parfumé au praliné- noisette givré de thé au jasmin.

Je suis venu surtout pour retrouver la cuisine de Joël Robuchon, mais les vins valent le détour. J’étais un habitué des restaurants de Joël Robuchon d’abord rue de Longchamp chez Jamin puis avenue Raymond Poincaré. Joël était mon Dieu vivant de la cuisine et lorsqu’il a voulu prendre du recul, ce que je comprenais, je n’ai pas voulu me rendre à l’Atelier car l’image immaculée que j’avais de ce chef eût été écornée. J’étais donc impatient de le retrouver avec l’envie de vaincre et d’accrocher trois étoiles à son carnet de notes. En buvant le champagne Dom Pérignon 1999, les petits canapés qui nous sont proposés sont dans la droite ligne du talent que j’ai connu. Il y a des saveurs pesées au trébuchet qui n’appartiennent qu’à son génie. Le Dom Pérignon 1999, malgré l’avis de l’homme qui le fait, Richard Geoffroy, ne m’émeut pas beaucoup. Il est bien fait, mais sans cette pointe de charme et de folie qui doit caractériser ce champagne de fête. Nous passons à table, et l’avocat est tout simplement divin. Joël est le seul qui peut définir des goûts d’une justesse absolue. La langoustine est extraordinaire et ce qui m’intéresse c’est que les emprunts aux cuisines orientales ne nuisent en rien à une expression purement européenne du goût. C’est de la cuisine bourgeoise sublimée. Le champagne Dom Pérignon 1996 est un de ceux que j’aime. Sa personnalité est forte. C’est un grand champagne de gastronomie. L’oursin traité en crème n’a pas l’explosion iodée qu’il pourrait avoir et le homard est relativement conventionnel.

Le Matsutaké est délicieux et met en valeur le Petit Cheval 2001. Si ce vin était seul à boire, le nez affirmé et le goût, même un peu sec, nous pousseraient à l’aimer. Mais il va servir de faire valoir au Cheval Blanc 2001 qui n’en paraît que meilleur. C’est un grand vin. Le thon blanc est moins convaincant que certains autres plats, même si la dextérité est évidente. Le délicieux veau de lait met en valeur deux vins, le Cheval Blanc 1989 et le Cheval Blanc 1990. Alors que le match était sans conteste à l’avantage du 1990, je trouve qu’aujourd’hui le 1989 a retroussé ses manches et sort enfin un grand jeu. Les deux vins sont d’un épanouissement total et je mettrais volontiers ex aequo les deux, même si la feuille de match couronnerait le 1990 plus élégant et charmeur par rapport au 1989 plus puissant et massif.

Le bœuf de Kobe est fondant en bouche, avec un gras extraordinaire. Il est accompagné de deux vedettes, le Cheval Blanc 1998 et le Cheval Blanc 2000. Cette soirée serait-elle révolutionnaire ? Car le Cheval Blanc 2000 ce soir est plus épanoui que le 1998. Ceci montre à quel point les avis ne sont jamais définitifs, car les conditions dans lesquelles on boit les vins changent. Malgré cela, je continue de penser que 1990 est au dessus de 1989 par son charme et son équilibre et que 1998 est au dessus du 2000, même si c’est une extraordinaire réussite, parce qu’il est plus pur, l’exemple historique de ce que Cheval Blanc doit être.

Les desserts ont montré des pistes intéressantes pour explorer Yquem. La crème de cassis est à exclure car les fruits rouges et noirs n’aiment pas Yquem. Mais les autres saveurs mettent en valeur Yquem.

Le château d’Yquem 1996 est assez limité pour mon goût alors que le château d’Yquem 1988 est en pleine force. Il est puissant, équilibré, serein et passe en force tout en ayant une palette aromatique large. Le château d’Yquem 2001 a toujours, c’est vrai, le potentiel de devenir un immense Yquem mais je trouve que ces trois essais en une semaine déboulonnent un peu le 2001 de son piédestal. Je ne le vois plus aussi stratosphérique que l’image que je m’étais forgée.

L’Yquem qui vient maintenant est un Yquem de connaisseurs, d’aficionados. Le Château d’Yquem 1962 en magnum a du thé et de l’abricot. Il est très complexe, énigmatique même. C’est un vin qui surprend à chaque goutte. En dégustation comparative, il aurait de mauvaises notes car il a perdu de son sucre. Les suggestions de thé le rendent assez amer. Mais sa finale d’une fraîcheur invraisemblable en fait un Yquem envoûtant, pour celui qui sait le lire. Car il faut de la patience et de la sérénité pour apprécier cette énigme et cette déroutante expression. Le 1988 et lui sont deux Yquem opposés, le 1988 dans la joie et l’épanouissement, le 1962 dans l’ésotérisme et l’énigme. Quel bonheur.

En écrivant ces lignes, je grignote le cake qui nous fut donné au moment de notre départ, en souvenir de la délicate attention qui existait il y a vingt ans. En sortant du restaurant, Bipin Desai, mon ami suisse et moi nous nous demandions où situer cette cuisine. Joël Robuchon, qui aurait dû nous rejoindre n’est pas venu. C’est son adjoint, Claude Le Tohic, meilleur ouvrier de France, qui a fait la cuisine. Ce n’est sans doute pas la même que si Joël y avait mis la main, même si aujourd’hui ces différences sont peu sensibles. On peut dire que le guide Michelin qui va venir ausculter le lieu dans moins d’une semaine n’aura aucune difficulté à donner trois étoiles, car on est à ce niveau, sans hésitation. Mais est-ce le Robuchon que j’ai déifié ? Si certaines saveurs sont au niveau irréel que Joël a su atteindre, l’ensemble du dîner ne met pas Robuchon très largement au dessus des autres comme il l’était il y a vingt ans. Est-ce que sa table vaut le voyage ? Assurément oui, car c’est certainement l’une des plus grandes tables de la planète. Et faire sa connaissance avec les plus beaux fleurons de Cheval Blanc et d’Yquem, que demander de mieux ?

déjeuner au Ballagio jeudi, 8 novembre 2007

Je voulais déjeuner au caviar Petrossian, en écoutant la musique de cette pianiste. Mais personne ne s’est soucié de moi !

Je suis allé au sensi, sans l’hôtel. Très joli design et nourriture convenable.

Originale présentation des sorbets dans un manchon de glace.

 

Arrivée à Las Végas mercredi, 7 novembre 2007

The subburbs and the city.

In the airport, whom do I see on a huge picture ? Guy Savoy and Wolfgang Puck !

 

The main entrance of hotel Ballagio. This limousine is not for me !

 

The eyes are attracted by all these flowers or butterflies in colored glass. But looking on earth, here are all the people checking as I do !

 

The lobby is incredibly crowded.

 

As everywhere in town, thousands of tables to gamble and gamble…

The picture that I should not miss : a wedding in the hotel.

 

We live only once. How to be crazy mercredi, 7 novembre 2007

I was supposed to fly back from L.A. to Paris to go immediately for a tasting by Jaboulet and a dinner by restaurant Pic, prepared by the wonderful and brilliant chef Anne-Sophie Pic.

But while being in L.A., several friends announced that Pierre Lurton would continue his trip to Las Vegas for a great dinner by the restaurant Joël Robuchon.

I have heard that Joël has the same stamina, the same will to win in Vegas as he had when he managed his three stars restaurant.

It was a temptation. I was weak, I sais yes.

Here is the program :

Chateau Cheval Blanc and Chateau d’Yquem

Dîner du jeudi 8 novembre 2007

Imaginé par Joël Robuchon

Guest of Honor : Pierre Lurton

L’avocat

Dans une infusion juste prise aux herbes et une caillebotte à l’huile d’olive

Avocado puree in a thin herb gelée and olive oil flavoured curd cheese

Champagne Dom Pérignon 1999

Les crustacés

La langoustine truffée à l’étuvée de chou vert, le homard rôti à la citronnelle avec une semoule végétale, l’oursin accompagné d’une purée de pomme de terre au café

Truffled langoustine ravioli with chopped cabbage, lemon grass roasted lobster with vegetable semolina, sea urchin, potato purée with a hint of coffee

Champagne Dom Ruinart 1996

Le Matsukaté

Aux capucines en ravioli, escorté d’un bouillon perfume au gingembre

Grilled Matsuke mushroom, capucine flower ravioli and ginger bouillon

Le Petit Cheval 2001

Le thon blanc

Confit à l’huile pimentée et relevé d’une nage d’endives aux pistils de safran

White tuna confit in chili oil with endive and saffron broth

Chateau Cheval Blanc 2001

Le veau de lait

En mille-feuille de tofu aux délices d’Alba sous une voilette parmesane

Veal chop tofu mille feuille shaved Alba truffles with parmesan tuile

Chateau Cheval Blanc 1989 & 1990

Le boeuf de Kobé

Grillé aux matsukatés, cristalline au poivre, cresson en tempura, raifort à la moutarde

Grilled Kobe beef with matsukate mushroom, watercress tempura, horseradish mustard

Chateau Cheval Blanc 1998 & 2000

La poire William

Glacée aux saveurs fruitées et confite à la crème de cassis

Château d’Yquem 1996 & 1998

Le Victoria

Ananas parfumé au praliné- noisette givré de thé au jasmin

Pineapple with hazelnut-praline and orange Pekoe tea sorbet

Chateau d’Yquem 2001 & 1962 en magnum

The level of the wines is not the same as the one which existed with the wonderful events created by Bipin Desai and with a guest of honor who was also Pierre Lurton. But considering that I will more easily visit Jaboulet and Pic than I will visit Joël in vegas, I decided to go there.

In the description of the dishes, I have seen some components which will not necessarily match perfectly with the wines. It teases me to go. I will go.

oursins, langouste et chapon sur des vins du Rhône dimanche, 21 octobre 2007

Le lendemain, nous allons déjeuner avec d’autres amis au restaurant d’Yvan Roux. Le soleil est puissant, la visibilité est d’une rare précision et le spectacle qui s’offre à notre vue est particulièrement souriant.

Selon la tradition, nous commençons l’apéritif avec un champagne Laurent-Perrier Grand Siècle et du Pata Negra. Le champagne a une tranquillité parfaite, plaisant en bouche sans faire d’histoire inutile.

A table, ce sont des beignets d’anémones de mer combinant judicieusement acidité et douceur qui titillent gentiment le champagne. Nous recevons ensuite deux monticules d’oursins fraîchement pêchés, dont les langues glissent en bouche d’une trace marine. Le champagne est à l’aise, mais quand c’est le tour d’une brouillade d’oursin, j’ai envie de vin rouge, et le Chateauneuf du Pape Clos de Panisse de Madame Fournis à Courthezon non millésimé, que je situe vers 1971, vin fort simple qui a pris de la rondeur, de l’opulence veloutée se marie fort bien à cette préparation.

Le vin joue une partition très douce et chantante sur les deux demi-langoustes  que chacun reçoit, d’une cuisson idéale comme seul Yvan sait les faire. Le chapon fait les yeux rouges au Chateauneuf qui s’adapte comme il convient. Comme nous buvons peu, l’autre vin que j’avais apporté, un Côtes du Rhône Vinsobres 1985, mis en bouteille par la « Vinsobraise » des vignerons de Vinsobres, un peu fatigué mais puissant comme un jeune fou sera à peine entamé. La glace à la vanille minute d’Yvan ponctue souvent ces agapes. Encore un beau repas chez cet expert de la cuisson des poissons.

 

deux vins du Rhône sur la belle cuisine de Matthias Dandine samedi, 20 octobre 2007

L’ami gastronome, écrivain du vin et de la gastronomie, qui m’avait attiré à juste titre au restaurant Hiramatsu, me signale qu’il va passer un week-end à l’hôtel des Roches à Aiguebelle au Lavandou, avec l’intention d’écrire sur la cuisine de Matthias Dandine. Je n’allais pas laisser passer une telle occasion de le revoir dans un lieu si proche de mes bases méridionales. Au lever, devant chez moi, la mer est calme, les nuages sont bas et la pluie s’annonce. En arrivant à l’hôtel des Roches, c’est une mer grossie par des vents de Sud Est qui nous accueille. La plage aménagée devant l’hôtel, qui accueille des naïades aux peaux hâlées pendant l’été est ici balayée par une houle de plus en plus forte.

De la plateforme du bar, je vois sur la terrasse de sa chambre mon ami, coiffé d’une casquette d’étudiant anglais aux couleurs de gyrophare, qui écrit face à la mer.

Nous descendons. Le restaurant qui surplombe la mer est battu par les vagues qui projettent de l’écume par-dessus les vitres. L’émoi du personnel devant la violence des flots me fait penser à ces hôtesses de l’air qui blêmissent lors d’une turbulence particulièrement forte : il n’y a rien de moins apaisant.  C’est donc dans une ambiance Titaniquesque et non titanesque que nous allons passer ce déjeuner qui fut une réussite à tous égards.

Mon ami annonce qu’il ne boira que du vin rouge. Il sort de sa musette un Hermitage La Chapelle Jaboulet 1996 qu’il veut nous faire partager. Pressentant que ce ne serait pas suffisant, je commande à Fabien Dandine un Château de Beaucastel 1990. Fabien ouvre les deux vins. Un premier Beaucastel est bouchonné, ce qui est d’une grande tristesse. Le second ne l’est pas, au nez superbe, mais je sens que cette bouteille a vieilli plus qu’elle n’aurait dû, ce qui sera confirmé par l’abondance du dépôt. Matthias Dandine, souriant, vient nous proposer de prendre des rougets et du rouquier, un poisson blanc qui vit en symbiose avec le rouget et par ailleurs, vu le temps, un chevreuil dont il traiterait séparément le filet, accompagné d’un farci traité à la royale. Ce programme nous convient. L’épouse de mon amie nous rejoignant et désirant une coupe de champagne rosé, c’est un Louis Roederer rosé 2002 qui lui est proposé. Pour trinquer et par curiosité, je prends une demi-coupe et nous restons sur notre soif, car ce champagne manque d’émotion.

Le choix de l’ordre des vins se pose pour le repas. La logique voudrait que le Beaucastel vienne en second, mais il est plutôt d’un naturel calme quand le Jaboulet est encore tout fou. Tout indique qu’il s’exciterait avec passion sur le chevreuil. Nous commençons par une brandade de morue sans ail, avec une émulsion au thym des collines, qui est délicieuse, aérienne, goûteuse. Ce plat roturier est toujours un plaisir gustatif. Le Beaucastel est relativement peu expressif, coincé si l’on pense à l’éclatante sérénité que je lui connais.

Le rouget accompagné de son copain de nage, le rouquier de roche, est posé sur un lit de topinambours remarquablement exécuté, et l’on a adjoint une crème de cresson aux petits croutons, très intense. Le tout est rehaussé par une vinaigrette légère aux truffes d’automne. Le Beaucastel commence à s’ébrouer et plus les gorgées passent et plus son réveil devient sensible. Il est bien en phase avec la chair des poissons. Mon ami ne tarit pas d’éloges sur la cuisine de Matthias Dandine et se prononce de nombreuses fois sur un niveau de deux étoiles. Je sens ce couple d’amis qui se délecte de la cuisine de Matthias. 

Le chevreuil est impeccablement traité. Le filet de gigue est saignant, sur une compote de coing. La sauce poivrade  du filet est divine. La logique voudrait que l’Hermitage La Chapelle, fringant, intense, joyeux, soit le compagnon idéal de cette viande goûteuse. Tout prêcherait pour lui et mes amis lui trouvent toutes les vertus. Mais je préfère en fait le Beaucastel même si je me réjouis de l’accord avec l’Hermitage. Car les notes sucrées, cacaotées, que l’on retrouve aussi bien dans la chair que dans le farci façon Royale à l’écume de genièvre, se lovent avec le Beaucastel enfin épanoui et d’une sérénité extrême. Les deux accords se conçoivent, l’Hermitage faisant ressortir le côté gibier du plat, pendant que le Beaucastel révèle l’élégance subtile du traitement des chairs par Matthias Dandine. Alors, disons que les deux accords se justifient.

Même si la tarte au chocolat se prête bien au Beaucastel – là, plus qu’à l’Hermitage qui ne s’embarrasse pas de ce plat – et même si l’exécution est parfaite comme notamment la glace au cacao pur, c’est une fin qui eût pu être évitée. On déguste la petite macération de fruits rouges au poivre au coulis langoureux pour mettre le mot « fin » à ce festin.

Je comprends l’enthousiasme de mes amis qui ont donné de pertinents conseils pour que Matthias pose son pied sur la marche de la deuxième étoile. Je laisserais peut-être faire le temps pour que ces étapes ne soient pas trop rapides, quelles qu’en soient les envies. Ce que je constate c’est qu’à chaque visite, la cuisine de Matthias gagne en maturité et en sérénité. C’est cette promesse de grands moments qui me séduit le plus.

En sortant du restaurant, la mer montrait de plus belle ses gros biceps de rugbyman. Sur deux grands vins du Rhône, nous avons vécu un beau moment de gastronomie.