Dîner féérique à l’Auberge du Vieux Puits de Gilles Goujon vendredi, 31 mai 2019

Nous prenons la route vers Fontjoncouse, petit patelin de 150 habitants peut-être, que l’on atteint par des routes étroites et sinueuses, dans un paysage sauvage de toute beauté. L’hôtel de l’Auberge du Vieux Puits étant complet quand nous avions réservé, nous sommes logés à deux minutes à pied dans le « Logis », où les chambres ont les noms de grands chefs que Gilles Goujon a rejoints dans le Panthéon de la cuisine française. Nous avons la chambre Jacques Maximin et nos amis la chambre Alain Chapel. Les chambres sont minuscules. On est loin du standard des hôtels qui sont associés à des restaurants trois étoiles.

Aussi bien au logis qu’à l’hôtel la décoration est majoritairement réalisée en ferronnerie, avec des thèmes de clous et pour le portail de l’hôtel des boîtes de conserve ouvertes de sardines où trône le logo du chef qui est une arête de sardine stylisée.

L’apéritif se prend à l’extérieur sur une petite terrasse où la décoration est faite de tonneaux de vins et de douelles comme dossiers. Pour l’apéritif nous commandons un Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill 2008. Il est déjà très affirmé, solide, et se montre plaisant par son équilibre. La puissance qu’il développe est spectaculaire. Il va nous suivre pour les amuse-bouches de l’apéritif mais aussi pendant tout le repas.

Sur un chevalet lui aussi en ferronnerie il y a quatre petites portions pour chacun, un carré de pain à la crème de truffe, un rond de pain soufflé d’une autre crème, une patate de mer au violet et une tartelette avec asperge, agrume bille de mozzarella di buffala et une gelée à l’ail des ours. C’est délicieux et cela plante bien le décor.

Nous choisissons le menu « Air de fête en Corbières, confiance et plaisirs canailles » dont le détail n’est pas donné. Dans ce contexte le choix des vins n’est pas facile, mais le sommelier m’a intelligemment suggéré de ne prendre que du blanc. Il a eu raison. Il voulait que je choisisse un blanc de la région, ce que j’aurais fait volontiers, mais j’ai vu sur la liste des vins un Chablis Grand Cru Moutonne Long-Dépaquit Albert Bichot 2015 que je ne pouvais pas laisser passer. Le sommelier m’a dit qu’il l’avait entré en cave le matin même. Coïncidence.

Sur la table il y a deux pains d’un artisan boulanger de Perpignan et divers beurres à la betterave, à l’algue ou au jus d’huitre et au piment d’Espelette.

Le menu que l’on ne connait pas est ainsi rédigé sur le document que l’on m’enverra le lendemain : Huître Tarbouriech perlée, légèrement fumée au bois de hêtre, en gelée de son eau / L’œuf poule Carrus « pourri » de truffe melanosporum, sur une purée de champignons, briochine tiède et cappuccino à boire / Des Petits Pois ?… des Petits Pois ! Quels Petits Pois ?… Ceux de William Saury bien sûr ! / Mitonnée aux jeunes pousses de salade, première cèbe de printemps en croûte de sel et cardamome, quelques fraises acidulées / Laitue celtuce, farcie en mousseline de champignon premiers cèpes, saint Georges, giroles et mousserons en salade et vinaigrette à l’huile de noix / Filet de rouget barbet, pomme bonne bouche fourrée d’une brandade à la cébette en « bullinada », écume de rouille au safran / Pomme de ris de veau, morille fourrée en mousseline de foie gras et ris de veau, pointes d’asperges / Chariot de fromages, affinés des Corbières surtout… mais aussi d’ailleurs / Vrai faux citron de Menton délicatement cassant, sorbet citrus bergamote et kumquat du Japon du Mas Bachès crème thym citron, meringue croustillante / Les mignardises du Vieux Puits

L’huître de l’étang de Thau est surmontée par une petite boule de sucre transparente. Avec un marteau en métal on doit doucement casser la sphère et sentir l’effluve qui évoque la fumée de cheminée. C’est amusant et l’huître avec sa gelée est délicieuse. Le champagne Pol Roger s’accorde à merveille avec l’huître délicieuse à l’iode calme. Le maître d’hôtel ramasse rapidement les marteaux que nous avons utilisés. On n’est jamais trop prudent !

L’œuf est un des plats incontournables de Gilles Goujon. Quand on perce le blanc on a l’impression que le jaune est « pourri » comme le dit le titre du plat mais c’est gourmand au possible. Le Chablis Grand Cru Moutonne Long-Dépaquit Albert Bichot 2015 a un nez époustouflant combinant richesse et noblesse. En bouche il est brillant et sa majesté fait un peu d’ombre au champagne pourtant incisif. La petite crème laiteuse que l’on boit à la pipette fait un peu fade à côté de l’œuf si brillant.

Un maître d’hôtel vient découper devant nous deux croûtes d’argile qui renferment des oignons dont il ne prend que les cœurs. Et ces cœurs accompagnent des petits pois à se damner. Ce plat est irréellement bon. On pourrait croquer les jeunes petits pois sans s’arrêter ad vitam aeternam. Le champagne est plus adapté sur ce plat.

Le plat de laitue et de champignon est d’une exécution inimaginable. Comment peut-on mettre tant de talent et de brio dans un plat aux composants si simples ? Il faut un talent fou. Nous nous régalons et tout particulièrement de la racine de la laitue qui est fourrée. Douceur et merveille. Le chablis est joyeux sur ce plat.

Le miracle arrive maintenant. Une cuiller est en surplomb de l’assiette du rouget. On vient asperger d’un jet fort la rouille qui est dans la cuiller et elle inonde le rouget et le cube de pomme de terre qui renferme le foie du rouget. La richesse épicée de la rouille fondue est une merveille absolue. Elle propulse le chablis à des hauteurs incroyables. Le vin est vif et étincelant tant les épices l’excitent. Des plats de ce niveau sont rares. Modestement Gilles Goujon nous dira plus tard que ce n’est pas le plus difficile à faire. Je n’en crois rien car ce niveau de perfection est quasi inatteignable.

Le ris de veau avec ses morilles et ses asperges vertes est un plat beaucoup plus classique mais son exécution est parfaite. Le chablis devient quasiment doux à côté de ces saveurs viriles. Le ris de veau à peine cuit est tellement bon sous cette forme !

Le plateau de fromage est gigantesque et présenté avec élégance. J’ai passé mon tour.

Le dessert au citron, véritable prouesse technique, est aussi un incontournable du lieu. La meringue est fondante et l’acidité citronnée est rafraîchissante. Le champagne reprend le leadership sur le dessert et les mignardises.

Les salles sont immenses. Le service virevolte mais manque un peu de coordination au point que l’on attend parfois longtemps avant que quelqu’un ne s’aperçoive que notre table exprime un désir. Le service de notre sommelier a été appréciable. Il y a parmi les maîtres d’hôtel des personnalités de grand talent. C’est la première fois que je vois dans un restaurant que des lampes implantées dans le plafond s’allument au moment où l’on est servi et s’éteignent quand on a fini le plat. Ça a le mérite de permettre de prendre de belles photos des plats, même si ces variations de luminosité sont parfois surprenantes.

Le chef est un passionné. Nous avons bavardé à la fin du repas et l’on sent à quel point sa cuisine est fondée sur la pertinence des produits. Il suit avec un soin jaloux tous ses fournisseurs et avec quelques chefs étoilés du pourtour méditerranéen ils mettent ensemble leurs expériences et leurs approvisionnements. Il y a dans la cuisine de Gilles Goujon un talent dans l’exécution et une générosité qui sont exceptionnels. Ce repas est un très grand repas.

Classer les plats serait très difficile tant ils sont différents. Je mettrais en premier le rouget, en second les petits pois et le troisième laitue et champignon. Bravo à ce grand chef qui nous a régalés.

le logis où nous avons nos chambres, annexe de l’hôtel

porte serviette et couteau avec le sigle maison en arête de poisson

encore le sigle

Déjeuner à Narbonne à La Table Saint-Crescent vendredi, 31 mai 2019

En 2013, je m’étais rendu à l’hôtel Les Crayères à Reims pour un dîner à quatre mains avec en cuisine Philippe Mille le chef du lieu et Gilles Goujon, le chef de l’Auberge du Vieux Puits à Fontjoncouse. Les deux sont MOF et avaient réalisé un repas qui m’avait donné envie de me rendre à cette auberge.

De bon matin nous prenons à quatre l’avion pour Montpellier. Ranger les bagages de cabine de tous les passagers dans des espaces restreints nous a retardé d’un quart d’heure de plus que le retard annoncé du départ. L’espace vital dans les avions devient de plus en plus petit, ce qui est assez désagréable. A Montpellier il fait beau et un ami de notre petit groupe recherche un restaurant sur notre trajet. Il trouve sur internet à Narbonne La Table Saint-Crescent dont le chef Lionel Giraud a obtenu une étoile au guide Michelin.

Le chef a orienté sa cuisine sur les produits locaux et c’est une volonté affirmée. Nous prenons tous des plats différents. Les miens son : naturalité d’artichauts violets de l’amie Jo, cuits en coque d’argile dans son écosystème de la racine à la feuille, hollandaise au beurre / fagottinis d’agneau Allaiton de Yohann de la ferme de Mejtac confit à l’ail fermenté, jus de cuisson à l’olive / le miel de garrigue du rucher narbonnais en glace, sur un gâteau moelleux à la cerise de Céret et au thym de la Clape.

La grande salle est une ancienne orangerie avec des poutres centenaires. Nous déjeunons sur la terrasse couverte ouvrant sur un joli petit jardin. Le service est attentif et souriant et présente les plats d’une façon un peu appuyée mais pertinente. La carte des vins est assez limitée mais le chef nous dira après le repas qu’il vient d’acheter le caviste voisin ce qui lui permettra d’offrir une plus grande diversité.

Je choisis sur la carte des vins un Vin des Côtes Catalanes Vieilles Vignes Domaine Gauby 2015. Avant cela nous goûtons l’huile d’olive Lionel Giraud au café Lavazza qui est bio. L’huile est bonne et le pain aussi mais le café est un peu trop marqué.

Le Gauby est un vin jeune au nez riche et ouvert, l’attaque en bouche est belle mais le vin se resserre en milieu de bouche pour finir assez court. On peut comprendre pourquoi ce vin est célèbre et en fait il a besoin d’un plat. Il va se montrer très large, de l’attaque au finale, sur l’agneau.

La vraie surprise, c’est la cuisine du chef. Elle est cohérente, goûteuse et brillante. De nombreuses fois en cours de route je me suis dit que les plats tutoyaient la deuxième étoile. Je suis bien tenté d’écrire au Guide pour que cela devienne réalité. L’artichaut cuit en croûte d’argile est fondant et rend sublime le goût de ce légume, l’agneau est aussi fondant et superbe et propulse le vin. Le miel est un amour de dessert.

Ce restaurant n’est pas sur nos routes habituelles, mais il mérite le détour. On ne peut que le recommander.

déjeuner dominical en famille mercredi, 29 mai 2019

La conjonction de planètes est forte : élections européennes, fête des mères, anniversaire de ma fille aînée. Voilà un beau prétexte pour un déjeuner dominical en famille. Ma femme a mis au centre de la table de salle à manger un nid avec trois oiseaux très colorés qui symbolisent nos trois enfants.

A l’apéritif nous aurons des petits cubes de mimolette, des copeaux de chou-fleur que l’on trempe dans une crème à la noisette, des radis et champignons crus, du saucisson en fines tranches et des crackers pimentés. Le Champagne Salon 1996 m’oblige à prendre un casse-noix pour faire tourner le bouchon, tant il colle à la paroi. Le pschitt est vif et la couleur du champagne est étonnamment claire alors qu’il a déjà 23 ans. La bulle est active. Ce qui frappe dès la première gorgée, c’est la noblesse de ce champagne. Il est frais, aérien, plein de grâce. Et il est extrêmement raffiné. Il est encore d’une jeunesse folle et l’on sent qu’il sera grandiose dans vingt ans.

Le repas consiste en des pintades cuites avec des abricots secs et du couscous en graines de chia et citron. J’ai choisi un Château Haut-Brion 1967 au niveau très haut dans le goulot. A l’ouverture, le parfum indiquait clairement que le vin serait grand. Je le sers sans que mes filles ne voient la bouteille et si le nez leur suggère bordeaux, la puissance du vin évoque pour elles les riches Côtes Rôties de Guigal. C’est un indice intéressant qui montre que dans cette année peu tonitruante, Haut-Brion a réussi un vin riche et puissant. Il est remarquable d’aisance. C’est James Bond, interprété par nul autre que Roger Moore. Il a une jolie évocation de truffe et le mariage est parfait, même si un vin blanc eut aussi été plausible.

Le camembert bien fait est agréable avec le champagne et pour le dessert qui est une mousse au chocolat servie en même temps que des mangues fraîches mélangées à un sorbet à la mangue, j’ai choisi un Rivesaltes Henry Sauvy 1914 d’une bouteille d’un litre marquée ‘L’an 1914’ et ‘Puerta del Sol’. Ce Rivesaltes n’a pas d’âge car il est d’une vivacité extrême. Il est doux mais aérien. Il a de beaux fruits bruns comme en une marmelade, une présence alcoolique très fluide. L’accord naturel est avec la mousse au chocolat car ce sont deux complices évidents, mais en fait la mangue donne un coup de fouet de fraîcheur au vin qui devient encore plus jeune et aérien.

Un champagne Salon d’une rare noblesse et d’une belle jeunesse, un Haut-Brion au sommet de son art et un Rivesaltes de 105 ans follement frais, que demander de mieux pour un beau repas de famille ?

centre de table

la couleur du Haut-Brion

237th dinner in Hotel Les Crayères dimanche, 26 mai 2019

Sarah, an American from North Carolina, is currently the most assiduous of my dinners. She wants to celebrate the forty years of two of her friends and asked me to propose her a restaurant, without it being obligatorily Parisian. For a long time I dreamed of having dinner with Philippe Mille, the talented chef des Crayères. Opportunity arises, Sarah agrees. As it is the first dinner with this chef, I planned to have lunch the day of the dinner to check some dishes, as I had just done at Belle Epoque House two days ago. My wines had been delivered two days ago because I made a hook by Reims before going to Epernay. I asked that the wines be put up so that I can open them around 16 hours.

At the bar of the hotel Les Crayères I discuss with Philippe Mille and we agree that I will make my comments after lunch. Here is what I found. The three appetizers are delicious. The ham of the Ardennes deserves to be presented in shavings much smaller and the one I ate is too salty. Philippe Mille will seek more tender parts. The chicken is delicious. It is served hot which would be good for a red wine. As it is accompanied by a champagne it is advisable that the dish is warm and not hot. The cooking of the saint-pierre is perfect. We should remove the sabayon which is too dominant next to the fish. Asparagus should be shorter, to avoid tails that are too bitter. The duck is perfect and there is nothing to change. The dessert is a soufflé in which is plunged a spoon that carries a sorbet that will refresh the soufflé. It seems to me that the combination of hot and cold will affect the tasting of the masterful Filhot 1929. It is Philippe who will find the right solution, to put the sorbet on a plate apart.

After this delicious meal, we speak, Philippe and me, of my comments. Mutual understanding is immediate and my suggestions are adopted. Such an open mind is particularly pleasant.

I thought to start the opening of the wines around 15:30 and I gave appointment to the sommeliers. Fatigue has turned my nap into a deep sleep. An angel guardian of my internal clock allowed me to be at 16 hours on foot to open the wines of the 237th dinner.

The White Pavilion of Château Margaux 1979 seems to me to have the richest perfume of the wines of the dinner and we will see that the reality in a few hours will be very different, but I do not know it. The Chablis 80s has a beautiful fragrance. Other scents are promising. I was expecting from Filhot 1929 that it has a thundering nose and it’s quite the opposite. He has a dusty and shy nose. I have no fear, but I do not know how much he will be reborn. A large majority of corks come with sectional breaks. Does time play a role, hygrometry or barometric pressure, I do not know, but these concordances intrigue me more and more.

At 7 pm my guests arrive, all Americans, Boston, North Carolina or Miami. Sarah is the organizer of this group that wants to celebrate the forty years of two women. We are seven of which only two men. It is quite rare that women are so dominant in my dinners.

We have an aperitif on the terrace of the hotel with Champagne Dom Ruinart magnum 1990. The appetizers, a potato cromesquis, a gamba and a preparation made of corn are superb. The champagne is a beautiful color of a light honey gold. The bubble is still active and the champagne is serene, broad, full and balanced. The magnum effect is sensible. This champagne is the first of the class, the one that always has everything good. Its length impresses. Ardennes ham chips blend well with him. We sit down to table and we have the nice table in the alcove of the restaurant room, from where we can see the beautiful garden.

The menu composed by chef Philippe Mille is: chicken and chanterelles, served with a yellow wine sauce / wild knives selected by Jean Marc, creamy cauliflower cooked on the grill, cabbage vegetables iodized caviar / Yeu Island chalk and stone quarries, white asparagus and mushroom emulsion / roast veal, salt-crusted potatoes, crispy nuts / duck from Tilloy Farm and artichokes, cooked with wine of Coteaux de la Montagne Reims / honey and blown tradition of Crayères, pickled grapefruit and candied.

Champagne Mumm Cuvée René Lalou 1979 is powerful and virile, contrasting with Dom Ruinart. He accompanies very well the sweetest parts of chicken. He has a beautiful presence when Dom Ruinart has charm. To choose between the two is not easy because the two play on different registers. On the dish there is a slight advantage to the Mumm whereas in pure charm, Dom Ruinart wins.

The 1979 Château Margaux White Pavilion, which had a scent that led to the opening, now has a cork nose. It is drinkable because the defect in the mouth is very low compared to the defect in the nose, but nothing drives us to continue to drink it because the Chablis Premier Cru Louis Latour (80s) who lost his collar year has powerful aromatic aromas. Chablis as conquering, it is rare. The dish of knives that I had not tasted at noon is exceptional. The expressive, sliced knife is domesticated by caviar, which, like the creamy, enhances the happy wine of this conjunction. The harmony knife and Chablis is superb.

The Corton Charlemagne Grand Cru Domaine Bonneau Martray 1972 is a totally surprising wine that deviates from the usual pattern of Corton-Charlemagne. He is strange and terribly attractive. It is a journey into the unknown with a lot of charm. There are so many things in this wine that separate us from Chardonnay that I listen to it religiously to try to impregnate it. There are evocations of tea, green and gray vegetables, but at the same time there is a particular vivacity and well-controlled acidity. We cannot speak of default, because the wine is excellent. But it’s off-piste. He will be third in the group vote and fourth for me, which confirms its interest.

The Château Mouton Rothschild 1979 is a wonderful surprise. We must quickly forget that it is 1979 because it seems born in a great year. Richness and subtlety, romance and affirmation, this wine is rich and noble. He is so reassuring. He has the soul of Mouton.

On the veal of a rare sweetness, it is associated with the Beaune Grèves Vine of the Child Jesus Bouchard Father & Son 1962. This wine is rich, dense, almost roasted as it is concentrated. He even gives suggestions – in traces – of coffee and chocolate that are not his markers. It is very well refocused by the sweetness of the veal chews. It is atypical but I put it in my vote, because I have a weakness for the Beaune Grèves Vine of the Child Jesus of which I have witnessed over more than 150 years.

We will live now an anthology agreement. The duck is like lacquered with a thick cream and we recognize chocolate notes in this delicious ointment. The Vega Sicilia Unico Réserve Especial bottled in 1992 is usually composed of three or four years but that of 1992 is only two years, two large, 1970 and 1972. Rich and at the same time very fresh, it has notes of chocolate that are strictly those of duck and small sketches of coffee. By some notes, the Spanish wine cousin with the wine of Beaune. The fresh finish of Vega Sicilia Unico is exceptional and the agreement is unique.

Before the dessert two candles are presented to both persons celebrating and blown for their birthday.

At the opening, the Chateau Filhot Sauternes 1929 had surprised me by its discretion and a nose slightly dusty. In service, all that has disappeared. The wine has a powerful and noble fragrance. It is complex with notes of exotic fruits. Rich and seductive, its color is almost black. It is not thundering like some Sauternes, because it is in the soul of Filhot to play the finesse more than the affirmation. The honey and grapefruit soufflé and the delicious sorbet that we taste separately are naturally complicit with the great Sauternes.

It’s time to vote. We are seven and we are voting for our five favorite among nine wines. All the wines had votes, except of course the White Pavilion corked. Three wines were named first, Filhot four times, Corton Charlemagne twice and Vega Sicilia once. The Filhot appeared on the 7 voting sheets and Corton Charlemagne and Vega Sicilia appear on 6 voting sheets.

The consensus ranking is: 1 – Château Filhot Sauternes 1929, 2 – Vega Sicilia Unico Réserve Especial put in bottle in 1992, 3 – Corton Charlemagne Grand Cru Domaine Bonneau du Martray 1972, 4 – Château Mouton Rothschild 1979, 5 – Champagne Dom Ruinart magnum 1990, 6 – Champagne Mumm Cuvée Rene Lalou 1979.

My vote is: 1 – Vega Sicilia Unico Réserve Especial put in bt in 1992, 2 – Château Filhot Sauternes 1929, 3 – Chablis Premier Cru Louis Latour (90s), 4 – Corton Charlemagne Grand Cru Domaine Bonneau du Martray 1972 ; 5 – Beaune Grèves Vigne de l’Enfant Jésus Bouchard Père & Fils 1962.

All dishes were perfectly adapted to the wines. The most beautiful agreement is that of the duck with the Vega Sicilia. The most innovative dish for my taste is that of knives, well accompanied by Chablis. The service was of high quality and the cooking of the chef of very high level. Pleasing my friend Sarah and her guests was my goal. I believe it has been achieved. Her loyalty to my dinners is impressive.

As I was leaving the table with my guests who are going back to their hotel, who do I see, Peter, a Scotsman crazy fan of champagnes with whom I shared extraordinary champagnes. There are five of them at their table, all young in their late 30s or early 40s, and have just drunk five Salon champagnes and five Krug Clos du Mesnil champagnes, lined up on a console. They kindly offer me to taste the Champagne Krug Clos du Mesnil 1990 that I find a little unbalanced and Champagne Krug Clos du Mesnil 2002 that I find noble and superb, a great champagne. Tomorrow they will make the same comparison between the two houses Salon and Krug but with other vintages at the Assiette Champenoise of Arnaud Lallement. They offer me to join them. I refuse, because the concentration of meals over three days is already excess. Whatever the temptation to taste wonders with them, all good things come to an end.

(see pictures in the article in French below)

237ème dîner à l’hôtel Les Crayères samedi, 25 mai 2019

Sarah, américaine de Caroline du Nord, est en ce moment la plus assidue de mes dîners. Elle veut fêter les quarante ans de deux de ses amies et m’a demandé de lui proposer un restaurant, sans qu’il soit obligatoirement parisien. Depuis longtemps je rêvais de faire un dîner avec Philippe Mille, le talentueux chef des Crayères. L’occasion se présente, Sarah accepte. Comme c’est le premier dîner avec ce chef, j’ai prévu de déjeuner le jour du dîner pour vérifier quelques plats, ainsi que je venais de le faire à la Maison Belle Epoque. Mes vins avaient été livrés il y a deux jours car j’avais fait un crochet par Reims avant d’aller à Epernay. Je demande que les vins soient mis debout afin que je puisse les ouvrir vers 16 heures. Au bar de l’hôtel Les Crayères je discute avec Philippe Mille et nous convenons que je lui ferai mes commentaires après le déjeuner. Voici ce que j’ai constaté. Les trois amuse-bouches sont délicieux. Le jambon des Ardennes mériterait d’être présenté en copeaux beaucoup moins grands et celui que j’ai mangé est trop salé. Philippe Mille fera rechercher des parties plus tendres.

Le sot-l’y-laisse est délicieux. Il est servi chaud ce qui conviendrait bien à un rouge. Comme il est accompagné d’un champagne il convient que le plat soit tiède et non chaud.

La cuisson du saint-pierre est parfaite. Il faudrait enlever le sabayon qui est trop dominant à côté du poisson. Les asperges devraient être plus courtes, pour éviter les queues trop amères.

Le canard est parfait et il n’y a rien à changer. Le dessert est un soufflé dans lequel au service on plonge une cuiller qui porte un sorbet qui va rafraîchir le soufflé. Il me semble que la combinaison de chaud et de froid va nuire à la dégustation du magistral Filhot 1929. C’est Philippe qui trouvera la bonne solution, de mettre le sorbet sur une assiette à part.

Après ce délicieux repas, nous parlons, Philippe et moi, de mes commentaires. La compréhension mutuelle est immédiate et mes suggestions sont adoptées. Une telle ouverture d’esprit est particulièrement agréable.

Je pensais démarrer les ouvertures des vins vers 15h30 et j’ai donné rendez-vous aux sommeliers. La fatigue a transformé ma sieste en un sommeil profond. Un ange gardien de mon horloge interne m’a permis d’être à 16 heures à pied d’œuvre pour ouvrir les vins du 237ème dîner.

Le Pavillon blanc de Château Margaux 1979 me semble avoir le parfum le plus riche des vins du dîner et nous verrons que la réalité dans quelques heures sera toute autre, mais je ne le sais pas. Le Chablis des années 80 a un magnifique parfum. Les autres senteurs sont prometteuses. J’attendais du Fihot 1929 qu’il ait un nez tonitruant et c’est tout le contraire. Il a un nez poussiéreux et timide. Je n’ai aucune crainte, mais je ne sais pas apprécier à quel niveau il renaîtra.

Une grande majorité de bouchons sont remontés avec des brisures sectionnelles. Le temps joue-t-il un rôle, hygrométrie ou pression barométrique, je ne sais pas, mais ces concordances m’intriguent de plus en plus.

A 19 heures mes convives arrivent, tous américains, de Boston, de Caroline du Nord ou de Miami. Sarah est l’organisatrice de ce groupe qui veut fêter les quarante ans de deux femmes. Nous sommes sept dont seulement deux hommes. Il est assez rare que les femmes soient autant majoritaires dans mes dîners.

Nous prenons l’apéritif sur la terrasse de l’hôtel avec le Champagne Dom Ruinart magnum 1990. Les amuse-bouches, un cromesquis à la pomme de terre, une gamba et une préparation à base de maïs sont superbes. Le champagne est d’une magnifique couleur d’un or de miel clair. La bulle est encore active et le champagne est serein, large, plein et équilibré. L’effet magnum est sensible. Ce champagne, c’est le premier de la classe, celui qui a toujours tout bon. Sa longueur impressionne. Le jambon d’Ardennes en copeaux se marie bien avec lui.

Nous passons à table et nous avons la jolie table dans l’alcôve de la salle du restaurant, d’où l’on peut voir le magnifique jardin.

Le menu composé par le chef Philippe Mille est : sots-l ‘y-laisse et girolles, servis avec une sauce au vin jaune / couteaux sauvages sélectionnés par Jean Marc, crémeux de choux fleurs cuits sur le gril, choux maraîchers iodés de caviar / carrières de craie et saint-pierre de ligne de l’île d’Yeu, asperges blanches et émulsion de champignons / pièce de veau rôti, pommes de terre cuites en croûtes de sel, croustillant de fruits à coques / canard de la ferme de Tilloy et artichauts, cuisinés au Coteaux de la montagne de Reims / miel du domaine et soufflé tradition des Crayères, pamplemousse mariné et confit.

Le Champagne Mumm Cuvée René Lalou 1979 est puissant et viril, contrastant avec le Dom Ruinart. Il accompagne bien les sots-l ‘y-laisse. Il a une belle présence quand le Dom Ruinart a du charme. Départager les deux n’est pas facile car les deux jouent sur des registres différents. Sur le plat il y a un léger avantage au Mumm alors qu’en charme pur, le Dom Ruinart l’emporte.

Le Pavillon blanc de Château Margaux 1979 qui avait un parfum entraînant à l’ouverture a maintenant un nez de bouchon. Il est buvable car le défaut en bouche est très faible par rapport au défaut au nez, mais rien ne nous pousse à continuer de le boire car le Chablis Premier Cru Louis Latour (années 80) qui a perdu sa collerette d’année a une puissance aromatique époustouflante. Un chablis aussi conquérant, c’est rare. Le plat de couteaux que je n’avais pas goûté à midi est exceptionnel. Le couteau au goût expressif et tranché est domestiqué par le caviar qui, comme le crémeux mettent en valeur le vin heureux de cette conjonction. L’harmonie couteau et chablis est superbe.

Le Corton Charlemagne Grand Cru Domaine Bonneau du Martray 1972 est un vin totalement étonnant qui s’écarte du schéma habituel du Corton-Charlemagne. Il est étrange et terriblement séduisant. C’est un voyage dans l’inconnu avec beaucoup de charme. Il y a tant de choses en ce vin qui nous écartent du chardonnay que je l’écoute religieusement pour essayer de m’en imprégner. Il y a des évocations de thé, de légumes verts et gris, mais il y a en même temps une vivacité particulière et une acidité bien maîtrisée. On ne peut pas parler de défaut, car le vin est excellent. Mais il fait du hors-piste. Il sera troisième dans le vote du groupe et quatrième pour moi, ce qui confirme son intérêt.

Le Château Mouton Rothschild 1979 est une magnifique surprise. Il faut vite oublier qu’il est de 1979 car il semble né d’une grande année. Richesse et subtilité, romantisme et affirmation, ce vin est riche et noble. Il est tellement rassurant. Il a l’âme de Mouton. Sur le veau d’une rare douceur, il est associé au Beaune Grèves Vigne de l’Enfant Jésus Bouchard Père & Fils 1962. Ce vin est riche, dense, presque torréfié tant il est concentré. Il donne même des suggestions – en traces – de café et de chocolat qui ne sont pas ses marqueurs. Il est très bien recentré par la douceur de la mâche du veau. Il est atypique mais je l’ai mis dans mon vote, car j’ai un faible pour le Beaune Grèves Vigne de l’Enfant Jésus dont j’ai bu des témoignages sur plus de 150 ans.

Nous allons vivre un accord d’anthologie. Le canard est comme laqué d’une crème épaisse et on reconnaît des notes de chocolat dans cet onguent délicieux. Le Vega Sicilia Unico Réserve Especial mis en bouteille en 1992 est généralement composé trois ou quatre années mais celui de 1992 l’est de seulement deux années, deux grandes, 1970 et 1972. Riche et en même temps très frais, il a des notes de chocolat qui sont strictement celles du canard et de petites esquisses de café. Par certaines notes, le vin espagnol cousine avec le vin de Beaune. Le finale frais du Vega Sicilia Unico est exceptionnel et l’accord est unique.

Avant le dessert deux bougies sont présentées aux deux fêtées et soufflées pour leur anniversaire.

A l’ouverture, le Château Filhot Sauternes 1929 m’avait surpris pas sa discrétion et par un nez légèrement poussiéreux. Au service, tout cela a disparu. Le vin a un parfum puissant et noble. Il est complexe avec des notes de fruits exotiques. Riche et séducteur, sa couleur est presque noire. Il n’est pas tonitruant comme certains sauternes, car c’est dans l’âme de Filhot de jouer la finesse plus que l’affirmation. Le soufflé au miel et au pamplemousse ainsi que le délicieux sorbet que l’on goûte séparément sont naturellement complices du grand sauternes.

Il est temps de voter. Nous sommes sept et nous votons pour nos cinq préférés de neuf vins. Tous les vins ont eu des votes, sauf bien sûr le Pavillon Blanc bouchonné. Trois vins ont été nommés premier, le Filhot quatre fois, le Corton Charlemagne deux fois et le Vega Sicilia une fois. Le Filhot a figuré sur les 7 feuilles de votes et le Corton Charlemagne et le Vega Sicilia figurent sur 6 feuilles de votes

Le classement du consensus est : 1 – Château Filhot Sauternes 1929, 2 – Vega Sicilia Unico Réserve Especial mis en bt en 1992, 3 – Corton Charlemagne Grand Cru Domaine Bonneau du Martray 1972, 4 – Château Mouton Rothschild 1979, 5 – Champagne Dom Ruinart magnum 1990, 6 – Champagne Mumm Cuvée René Lalou 1979.

Mon vote est : 1 – Vega Sicilia Unico Réserve Especial mis en bt en 1992, 2 – Château Filhot Sauternes 1929, 3 – Chablis Premier Cru Louis Latour (années 90), 4 – Corton Charlemagne Grand Cru Domaine Bonneau du Martray 1972.

Tous les plats ont été parfaitement adaptés aux vins. Le plus bel accord est celui du canard avec le Vega Sicilia. Le plat le plus innovant pour mon goût est celui des couteaux, bien accompagné par le chablis. Le service a été de grande qualité et la cuisine du chef de très haut niveau. Faire plaisir à mon amie Sarah et ses invités était mon objectif. Je crois qu’il a été atteint. Sa fidélité à mes dîners est impressionnante.

Au moment de raccompagner mes convives qui rentraient ensemble à leur hôtel, qui vois-je, Peter, un écossais fou de champagnes avec qui j’ai partagé des champagnes extraordinaires. Ils sont cinq à leur table, tous jeunes dans la trentaine finissante ou quarantaine commençante, et viennent de boire cinq champagnes Salon et cinq champagnes Krug Clos du Mesnil, alignés sur une console. Ils m’offrent gentiment de goûter le Champagne Krug Clos du Mesnil 1990 que je trouve un peu déséquilibré et le Champagne Krug Clos du Mesnil 2002 que je trouve noble et superbe, un grand champagne. Demain ils vont faire la même comparaison entre les deux maisons Salon et Krug mais avec d’autres millésimes à l’Assiette Champenoise d’Arnaud Lallement. Ils me proposent de me joindre à eux. Je refuse, car la concentration de repas sur trois jours a frisé l’excès. Quelle que soit la tentation de goûter des merveilles avec eux, toutes les bonnes choses ont une fin.


le déjeuner de vérification des plats :


les vins

magnifique dîner

après le dîner, rencontre avec des amis qui boivent Salon et Krug

déjeuner et dîner à l’hôtel Royal Champagne vendredi, 24 mai 2019

Je suis invité à un déjeuner à l’hôtel Royal Champagne pour mieux connaître un champagne d’exception dont le projet a été lancé il y a dix ans. Je connaissais le Royal Champagne. Il est complètement transformé, façon blockhaus. L’immeuble fait très froid et le lieu est réchauffé par l’incroyable vue sur les vignes en pente et sur la vallée d’Epernay. La terrasse est spectaculaire.

La salle à manger est d’une même froideur qu’un couloir d’aéroport. La table est agréable et le service est pertinent. La carte des menus ne me semble pas à la hauteur des ambitions qu’un tel hôtel pourrait avoir. Je choisis de prendre des huîtres spéciales Gillardeau n° 3 / asperges rôties, œuf parfait, copeaux de magret, crémeux chaource / dos de cabillaud doré, lentillons bio de la Champagne / cheesecake framboise, sablé pistache et framboises fraîches. La cuisine est bonne.

Ne sachant pas si le plan de communication de cette maison permet que j’en parle. Mais je signalerai que leur volonté de perfection est certaine. Ils visent d’être présents dans les endroits les plus prestigieux du monde, car leur production est limitée. Ils font tout pour correspondre aux envies d’une clientèle exigeante. Je leur souhaite de réussir.

Le 236ème dîner était hier, le 237ème dîner est demain. J’ai prévu de rester dans cet hôtel pour la nuit. J’ai un après-midi pour me reposer. Ma chambre est spacieuse et très belle. Les alentours intérieurs sont très beaux. Le spa est gigantesque et je profite du hammam, du sauna et d’un massage très vivifiant. Je me présente au restaurant pour dîner et qui vois-je ? Daniel le sommelier du restaurant Laurent qui m’avait accompagné dans de très nombreux dîners. Il me sourit et me dit : ce midi je faisais le service dans une autre partie de l’hôtel et tout-à-coup j’ai entendu un rire qui ne pouvait être que le vôtre. Daniel est heureux. Il me fait porter un verre de Champagne Lenoble Brut Grand Cru Blanc de Blancs fait sur une base de 2014. Il ne savait pas que j’avais encore les restes des quatre champagnes du déjeuner ! Ce Lenoble est un beau blanc de blancs qui manque peut-être un peu de vivacité. Il est transcendé par le meilleur des quatre champagnes de cette maison que je ne cite pas.

Faute de plats qui me tenteraient, je reprends strictement le même menu que ce midi et c’est curieux de constater les très grandes différences dans l’exécution des plats entre le midi et le soir. L’œuf était parfait ce midi et il est plutôt mollet ce soir. Les asperges sont plus croquantes et vivantes ce soir. Le cabillaud est beaucoup plus épais ce soir et mieux cuit, c’est-à-dire peu. Seul le cheesecake est aussi parfait et constant.

La nuit fut bonne. Direction les Crayères, pour le 237ème dîner.

la merveilleuse vue

236th dinner in Maison Belle Epoque of Perrier Jouët mercredi, 22 mai 2019

The genesis of the 236th dinner is quite special. In October 2018 I had organized the 228th dinner at Akrame restaurant in Paris. The restaurant is narrow and inside we should have had a table in length which I do not like because three discussions are formed at very long tables. I would rather have dinner in the garden, with a square table. The probability of rain is 40% and the head of the restaurant accepts this solution. The table is covered with umbrellas and hangings to prevent any eventuality. In the middle of the meal, a tornado breaks out and the hanging curtains pour water on guests. We try to sit in the protected areas. All this makes me uncomfortable because I try to make my dinners as perfect as possible.

I interrupt the discussions and I declare that all the participants will be invited to a new dinner that I offer them, to compensate for this misadventure. The guests are happy, both wet and dry, and two guests from the Pernod-Ricard group propose that the compensation dinner be held at the Belle Epoque House of Perrier-Jouët in Epernay. A generosity responds to a generosity.

I came in November to better know the places and study the cuisine of Joséphine Jonot, chef of the place and we have built together a menu for the wines I have planned and for the champagnes of Perrier-Jouët and Mumm.

When the day comes, I arrive around 11 am in Epernay at the Belle Epoque House, so nicely decorated. I have lunch with Alexander to check some dishes to be sure that Josephine Jonot’s cuisine matches what the old wines ask.

Thierry, the friendly and efficient butler responsible for the house serves us Champagne Perrier Jouët Cuvée Belle Epoque Blanc de Blancs 2004 that seduces me with its balance. It is also gourmet, generous and square.

I start the meal with beautiful oysters very iodic, giving the impression of sea waves that slap my face. Then the lobster is served with bisque. The dish as it is designed would be suitable for a white wine, while it is assigned to a red wine. It will take a less assertive cooking and on the contrary a more virile bisque to face a red wine. The pigeon and its pie with a stuffing seem to me absolutely perfect and do not require any adaptation. The crispness that should accompany the mango is replaced by a cream more delicate. While having lunch in the kitchen, we can talk to the chef and I am convinced that tonight’s menu is in good hands.

I have time for a micro-nap before answering the questions of the filmmakers who are filming the event and I’m ready at 3 pm to open the bottles of the 236th dinner.

As we will be fourteen, which is more than usual, I planned several magnums, which pushes me to open the wines from 15 hours. Corks come without any particular surprise and the only uncertain is that of Gevrey-Chambertin Bouchard Aîné & Fils Magnum 1961 which shows a cork scent that seems quite tenacious. Ten minutes later the cork nose is noticeably alleviated but I am not yet reassured. The most thundering perfume is that of Fargues 1989, much more majestic than that of Yquem 1970.

The guests will visit the spectacular cellars of the house Perrier Jouët. We meet at the bar for aperitif with a Champagne Perrier-Jouët Belle Epoque 2008. What strikes is its balance and ease. He does not seek to impose himself, he is there, consensual and rewarding. It accompanies with pleasure the small nibbles of aperitif.

There are fourteen of us at the table, eleven of whom were present at dinner at the Akrame restaurant, which was disturbed by the rain, which justified that I invite all present for this dinner, and three are from the house Perrier-Jouët or his group.

The menu composed by Josephine Jonot is: gougères, Pata Negra, parmesan / oysters with seafood flavors / langoustines just seized, small vegetables / saint-pierre with lemon butter / lobster American sauce / low temperature veal, mashed potatoes / pigeon and stuffing of confit legs / poached foie gras / stilton / roasted mango, yogurt cream with green herbs.

Oysters are deliciously marine, iodized, and are perfectly suited to the Champagne Perrier-Jouët Belle Epoque 1982 which is of a rare complexity and a romanticism assumed. The champagne is titillated by iodine and finds a nice energy. It is a champagne that is distinguished by the range of its complexities.

The langoustines are absolutely perfect, delicate and subtle and the Chablis Grand Cru Bougros William Fèvre Magnum 1998 is mineral, the archetype of a vibrant Chablis. The agreement is superb. If we alternate the Belle Epoque 1982 and the Chablis 1998, we see that they fertilize and Chablis widens the champagne.

It probably would have been necessary for the Saint-Pierre to be without its pure butter, so that the agreement with the Montrachet Grand Cru Guichard-Potheret Magnum 1988 would have been naturally found. It is a fairly calm Montrachet, low fat and without any botrytis. It is well made and well built, but it does not have the spark of energy we would have liked to find.

The lobster is perfect. It is simple and subtle, much less cooked than at lunch, which gives it a rare charm, and the Corton Grand Cru Bouchard Father & Son Magnum 1959 leaves everyone speechless. The wine has a grain and a chew of absolute plenitude. He is rich, fills the mouth and conquers it. We are facing an immense wine and a transcendental agreement. I expected a lot but I did not suspect he could be so rich. This wine is conquering.

The low temperature calf is divine. Cramant Champagne Mumm 1955 is a marvel of complexity and elegance. It has intonations of white currants and its acidity breathes on the calf. It is a rare champagne by its diversity and the agreement is of a natural which delights us.

The pigeon is superb. While I was afraid he had a cork nose, the Gevrey-Chambertin Bouchard Elder & Son Magnum 1961 as it is more than five hours later does not have a gram of defect. This wine is Burgundy as I adore it, without concession, with a peasant grater, which does not try to please. It is clear that it is a ‘Villages’, but it is so alive and rich that we can only be conquered.

In a discussion with some guests I said that the concept of age does not exist. If a wine manages to survive all the accidents that can affect the cork, then it is ageless. It looks like the Château Bouscaut Grand Cru Classé of Graves Magnum 1929 listened to me because it is incredible. Its color is very dark pigeon blood, which means that it does not have any trace of tile. It is of an incredible freshness. Here is a wine that refreshes, dense, consistent without the slightest defect. The drink quenches but also takes on a field of infinite flavors. I’m so happy. This wine is a miracle. The poached foie gras is not really poached and does not have a chew that benefits the 1929, even if the taste of the liver is good. This 1929 is a marvel and will be my favorite by far.

For stilton and the very successful mango dessert the two sauternes are served together. Château de Fargues Sauternes 1989 is rich and flamboyant. Some prefer the Château d’Yquem 1970 more erased. I prefer the Fargues more glorious and sunny.

No wine was weak. This is the moment of the votes. We are fourteen to vote for our five favorite among the ten wines. What’s interesting is that all the wines had at least one vote which proves that all deserved to be in the top five of at least one guest. Three wines had twelve votes out of 14 possible votes, Champagne Perrier-Jouët Belle Epoque 1982, Corton Grand Cru Bouchard Father & Son Magnum 1959 and Château Bouscaut Magnum 1929.

Four wines had the honor of being named first, Bouscaut 1929 seven times, Corton 1959 five times, Chablis and Mumm each once.

The vote of the consensus would be: 1 – Le Corton Grand Cru Bouchard Father & Son Magnum 1959, 2 – Château Bouscaut Great Classified Growth of Graves Magnum 1929, 3 – Champagne Perrier-Jouët Belle Epoque 1982, 4 – Champagne Mumm de Cramant 1955, 5 – Montrachet Grand Cru Guichard-Potheret Magnum 1988, 6 – Château d’Yquem 1970.

My vote is: 1 – Château Bouscaut Great Classified Growth of Graves Magnum 1929, 2 – Le Corton Grand Cru Bouchard Father & Son Magnum 1959, 3 – Gevrey-Chambertin Bouchard Senior & Son Merchant Magnum 1961, 4 – Champagne Mumm de Cramant 1955.

Joséphine Jonot made a cuisine particularly suited to wines. The two brightest dishes are lobster, which has created the most beautiful accord, and divinely cooked lobster. Oysters also deserve compliments, such as mango and cream.

The atmosphere was cosmopolitan with Americans, a Norwegian, a Londoner. We ended up with a great rum and those who wanted could smoke cigars in the beautiful garden of the Belle Epoque House.

This dinner was illuminated by great wines and champagnes.

Thank you to Perrier-Jouët for allowing the continuation of the 228th dinner at Akrame restaurant in a setting of such beauty. Long live to old wines.

(see pictures in the article in French)

236ème dîner à la Maison Belle Epoque de Perrier Jouët mercredi, 22 mai 2019

La genèse du 236ème dîner est tout-à-fait particulière. En octobre 2018 j’avais organisé le 228ème dîner au restaurant Akrame à Paris. Le restaurant est étroit et à l’intérieur nous aurions dû avoir une table en longueur ce qui ne me plait pas car trois discussions se forment à des tables très longues. Je préférerais que le dîner se passe dans le jardin, avec une table carrée. La probabilité de pluie est de 40% et le chef de salle accepte cette solution. On couvre la table de parasols et de tentures pour parer à toute éventualité. Au milieu du repas, une tornade se déclare et les tentures en pente déversent des trombes d’eau sur des convives. On se serre dans les parties protégées. Tout cela m’indispose car j’essaie que mes dîners soient les plus parfaits possibles. Je prends la parole et j’indique que tous mes convives seront invités à un nouveau dîner que je leur offre, pour compenser cette mésaventure. Les convives sont heureux, les mouillés comme les secs, et deux convives étant du groupe Pernod-Ricard nous proposent que le dîner de compensation se passe à la Maison Belle Epoque de Perrier-Jouët à Epernay. Une générosité répond à une générosité.

Je suis venu en novembre pour étudier les lieux et la cuisine de Joséphine Jonot, chef de cuisine du lieu et nous avons bâti ensemble un menu pour les vins que j’ai prévus et pour les champagnes de Perrier-Jouët et Mumm.

Le jour venu, j’arrive vers 11h à Epernay à la Maison Belle Epoque, si joliment décorée. Je déjeune avec Alexander pour vérifier quelques plats pour être sûr que la cuisine de Joséphine Jonot correspond à ce que les vins anciens demandent. Thierry, le sympathique et efficace responsable majordome de la maison nous sert un Champagne Perrier Jouët Cuvée Belle Epoque Blanc de Blancs 2004 qui me séduit par son équilibre. Il se révèle aussi gastronomique, généreux et carré.

Je commence le repas par de belles huîtres très marines, donnant l’impression d’embruns qui giflent mon visage. Ensuite le homard est servi avec sa bisque. Le plat tel qu’il est conçu conviendrait à un vin blanc, alors qu’il est affecté à un vin rouge. Il faudra une cuisson moins affirmée et au contraire une bisque plus virile pour affronter un vin rouge. Le pigeon et sa tourte avec une farce me semblent absolument parfaits et ne demandent aucune adaptation. Le croustillant qui devrait accompagner la mangue est remplacée par une crème plus délicate. En déjeunant en cuisine, nous pouvons dialoguer avec le chef et j’ai la conviction que le menu de ce soir est en de bonnes mains.

J’ai le temps d’une micro-sieste avant de répondre aux questions des cinéastes qui filment l’événement et je suis fin prêt à 15 heures pour ouvrir les bouteilles du 236ème dîner.

Comme nous serons quatorze, ce qui est plus que d’habitude, j’ai prévu plusieurs magnums, ce qui me pousse à ouvrir les vins dès 15 heures. Les bouchons viennent sans surprise particulière et la seule inconnue est celle du Gevrey-Chambertin Bouchard Aîné & Fils Magnum 1961 qui montre un parfum de bouchon qui paraît assez tenace. Dix minutes plus tard le nez de bouchon est sensiblement atténué mais je ne suis pas encore rassuré. Le parfum le plus tonitruant est celui du Fargues 1989, beaucoup plus majestueux que celui de l’Yquem 1970.

Les invités vont visiter les caves spectaculaires de la maison Perrier Jouët. Nous nous retrouvons au bar pour l’apéritif avec un Champagne Perrier-Jouët Belle Epoque 2008. Ce qui frappe, c’est son équilibre et son aisance. Il ne cherche pas à s’imposer, il est là, consensuel et gratifiant. Il accompagne avec bonheur les petits grignotages d’apéritif.

Nous sommes quatorze à passer à table, dont onze étaient présents au dîner au restaurant Akrame troublé par la pluie, qui a justifié que j’invite tous les présents pour ce dîner, et trois sont de la maison Perrier-Jouët ou son groupe.

Le menu composé par Joséphine Jonot est : gougères, Pata Negra, parmesan / huîtres aux goûts marins / langoustines juste saisies, petits légumes / saint-pierre au beurre citronné / homard sauce américaine / veau basse température, purée de pommes de terre / pigeon et farce de cuisses confites / foie gras poché / stilton / mangue rôties, crème de yaourt aux herbes vertes.

Les huîtres sont délicieusement marines, iodées, et conviennent parfaitement au Champagne Perrier-Jouët Belle Epoque 1982 qui est d’une rare complexité et d’un romantisme assumé. Le champagne est titillé par l’iode et y trouve une belle énergie. C’est un champagne qui se distingue par la palette de ses complexités.

Les langoustines sont absolument parfaites, délicates et subtiles et le Chablis Grand Cru Bougros William Fèvre Magnum 1998 est minéral, l’archétype d’un vibrant chablis. L’accord est superbe. Si l’on alterne le Belle Epoque 1982 et le Chablis 1998, on voit qu’ils se fécondent et le chablis élargit le champagne.

Il aurait sans doute fallu que le saint-pierre soit sans son beurre, pur, pour que l’accord avec le Montrachet Grand Cru Guichard-Potheret Magnum 1988 se trouve naturellement. C’est un montrachet assez calme, peu gras et sans aucun botrytis. Il est bien fait et bien construit, mais il n’a pas l’étincelle d’énergie qu’on aurait aimé trouver.

Le homard est parfait. Il est simple et subtil, beaucoup moins cuit que celui du déjeuner, ce qui lui donne un charme rare, et le Corton Grand Cru Bouchard Père & Fils Magnum 1959 laisse tout le monde sans voix. Le vin a un grain et une mâche d’une plénitude absolue. Il est riche, emplit la bouche et la conquiert. On est face à un vin immense et à un accord transcendantal. J’en attendais beaucoup mais je ne soupçonnais pas qu’il puisse être aussi riche. Ce vin est conquérant.

Le veau basse température est divin. Le Champagne Mumm de Cramant 1955 est une merveille de complexité et d’élégance. Il a des intonations de groseilles blanches et son acidité respire sur le veau. C’est un champagne rare par sa diversité et l’accord est d’un naturel qui nous ravit.

Le pigeon est superbe. Alors que j’avais peur qu’il ait un nez de bouchon, le Gevrey-Chambertin Bouchard Aîné & Fils Négociant Magnum 1961 tel qu’il est plus de cinq heures après n’a pas un gramme de défaut. Ce vin, c’est la Bourgogne telle que je l’adore, sans concession, avec une râpe paysanne, qui ne cherche pas à plaire. On voit bien que c’est un ‘Villages’, mais il est tellement vivant et riche qu’on ne peut qu’être conquis.

Dans une discussion avec quelques convives j’avais dit que le concept d’âge n’existe pas. Si un vin arrive à survivre à tous les accidents de parcours qui affectent le bouchon, alors il est sans âge. On dirait que le Château Bouscaut Grand Cru Classé de Graves Magnum 1929 m’a écouté car il est invraisemblable. Sa couleur est sang de pigeon très foncé, ce qui veut dire qu’il n’a pas la moindre trace de tuilé. Il est d’une fraîcheur invraisemblable. Voilà un vin qui rafraîchit, dense, cohérent sans le moindre défaut. Le boire désaltère mais aussi emmène sur un champ de saveurs infinies. Je suis aux anges. Ce vin est un miracle. Le foie gras poché n’est pas vraiment poché et n’a pas une mâche qui avantage le 1929, même si le goût du foie est bon. Ce 1929 est une merveille et sera mon préféré et de loin.

Pour le stilton et le dessert à la mangue très réussi les deux sauternes sont servis ensemble. Le Château de Fargues Sauternes 1989 est riche et flamboyant. Certains préfèrent le Château d’Yquem 1970 plus effacé. Je préfère le Fargues plus glorieux et ensoleillé.

Aucun vin n’a été faible. C’est le moment des votes. Nous sommes quatorze à voter pour nos cinq préférés parmi les dix vins. Ce qui est intéressant, c’est que tous les vins ont eu au moins un vote ce qui prouve que tous méritaient d’être dans les cinq premiers d’au moins un convive. Trois vins ont eu douze votes sur 14 votes possibles, le Champagne Perrier-Jouët Belle Epoque 1982, le Corton Grand Cru Bouchard Père & Fils Magnum 1959 et le Château Bouscaut Magnum 1929.

Quatre vins ont eu l’honneur d’être nommés premiers, le Bouscaut 1929 sept fois, le Corton 1959 cinq fois, le Chablis et le Mumm chacun une fois.

Le vote du consensus serait : 1 – Le Corton Grand Cru Bouchard Père & Fils Magnum 1959, 2 – Château Bouscaut Grand Cru Classé de Graves Magnum 1929, 3 – Champagne Perrier-Jouët Belle Epoque 1982, 4 – Champagne Mumm de Cramant 1955, 5 – Montrachet Grand Cru Guichard-Potheret Magnum 1988, 6 – Château d’Yquem 1970.

Mon vote est : 1 – Château Bouscaut Grand Cru Classé de Graves Magnum 1929, 2 – Le Corton Grand Cru Bouchard Père & Fils Magnum 1959, 3 – Gevrey-Chambertin Bouchard Aîné & Fils Négociant Magnum 1961, 4 – Champagne Mumm de Cramant 1955.

Joséphine Jonot a fait une cuisine particulièrement adaptée aux vins. Les deux plats les plus brillants sont le homard, qui a créé le plus bel accord, et la langoustine divinement cuite. Les huîtres méritent aussi des compliments, comme la mangue et sa crème.

L’ambiance était cosmopolite avec des américains, un norvégien, un londonien. Nous avons fini avec un superbe rhum et ceux qui voulaient ont tété des cigares dans le joli jardin de la Maison Belle Epoque. Ce dîner fut illuminé par de grands vins et de grands champagnes.

Merci à Perrier-Jouët d’avoir permis la suite du 228ème dîner au restaurant Akrame dans un cadre d’une telle beauté. Vive les vins anciens.

dans la maison Belle Epoque une étonnante table sur laquelle, comme des sensitives, les plaques de métal se couchent au passage des invités

la table du déjeuner est mise en cuisine pour que je puisse travailler avec la cuisinière chef

avant et pendant l’ouverture, les journalistes prennent des photos et des interviews

le dîner

on note la belle sobriété des plats. La table en fin de repas

la table pour le petit déjeuner

32nd session of the Academy of Ancient Wines samedi, 18 mai 2019

The 32nd session of the Academy of Ancient Wines is held at the Macéo restaurant. We are 31 announced but a late defection has brought our group to 30 guests, seven of whom are students of the school Cordon Bleu to whom I proposed to come after my conference-tasting done a few weeks ago in their premises. We are divided into three tables of which here are the wines, preceded by the wines of the aperitif.

Aperitif wines: Champagne Cuvée Brut Taittinger Jeroboam 70’s / 80’s – Champagne Colin Cuvée Castile Blanc de Blancs 90’s magnum – Champagne Pâques Gaumont Brut Imperial 80’s (2 bottles).

Group 1 wines: Château Carbonnieux white 1980 – Chateau Bouscaut white 1927 – Kebir Imperial white Frédéric Lung 30s – Arbois Fruitière Vinicole d’Arbois 1961 – Château Palmer 1975 – Chateau de l’Enclos Pomerol 1976 – Côtes de Beaune Bouchard Ainé et fils 1923 – Flory Old red wine 1953 – Red Algerian wine of the 40s / 50s (Médea) – F. Sénéclauze Wine Red Algeria presumed 1939 – Langoiran 1943 – Muscat de la Trappe Liqueur wine Presumed Algiers of the 50s – Tokaji Aszu Eszencia 1988 – Marc Blanc of the Domaine d’Ott 1929 (common to all three tables).

Group 2 wines: Champagne Mumm cordon rouge magnum 1960s – Pouilly Fuissé Julien Damoy 1947 – Kebir Imperial F. Lung white 40s – Moulin Haut Laroque Côtes de Fronsac 1964 – Cos d’Estournel 1960 – Chateau Cabrières, Châteauneuf-du-Pape 1971 – Minuto Riserva Special, Barolo 1964 – Barolo Marchesi Barolo 1961 – Royal Kebir Frederick Lung 1940 – Vouvray Clovis Lefèvre Great Year 1959 – Ste Croix-du-Mont GM Dumons & Co. 1943 – Tokaji Aszu Eszencia 1988 – Marc Blanc Ott Estate 1929 (common to all three tables).

Group 3 wines: Château Bouscaut white 1986 – Château de Fonsalette white 1990 – Châteauneuf-du-Pape white Mont-Redon 1970 – Chateau Saint Pierre Saint Julien 1970 – Chateau Destieux 1949 – Saint-Amour supposed 1947 – Royal Kebir Frédéric Lung red 1947 – Algerian wine (red / rosé?) La Trappe Algiers 1962 – Vouvray Clovis Lefèvre Great year 1959 – Château Pernaud Haut Barsac 1929 – Tokaji Aszu Eszencia 1988 – Marc Blanc of the Domaine d’Ott 1929 (common to all three tables).

Some remarks should be noted on the wines present. A few months ago, a descendant of Frédéric Lung contacted me. He is getting married soon, and he wants to be able to buy Frédéric Lung’s wines for his wedding. He went on the internet and looking for Frédéric Lung, invariably falls on my name. I told him that I do not sell these wines that I love because they are intended to be shared with amateurs. It turns out that neither he nor his mother drank wine from his family. I then told him: If you join the academy with your mother, she will be my guest. He registered and kept the secret to his mother until their arrival. The presence of descendants of a winemaker that I appreciate is a privilege so I asked other registered academicians to bring Algerian wines if they have them. This evening out of the 46 wines to share, there will be 8 wines from Algeria, including 4 from Frédéric Lung. Shortly after this announcement, a late registered academician told me, « You drank a lot of Frederic Lung’s wines, but I see you’ve never drunk Frédéric Lung’s White Imperial Kebir, so I bring one « . I like his generosity, but I also like the challenges so I brought also an Imperial White Kebir Frédéric Lung.

The day of the session, I’m at the restaurant at 4pm to open all the wines that had been grouped in my cellar. I am soon joined by four friends who help me open the wines, which is usually an opportunity to open other bottles for the openers, who will later be assigned to the different tables. There was a very large number of plugs that were sticking to the walls, forcing me to use a bimetallic strip coupled with a corkscrew, which more easily takes off the plugs. Is this recrudescence of glued corks linked to hygrometry and atmospheric pressure conditions, I do not know, but this is not the first time that we find corking behaviors oriented in the same direction for a large number of wines, either glued or, on the contrary, tending to fall into the bottle. The odors of the wines are generally very promising because the levels of the wines are most often perfect. The quality of the contributions is certain.

It is with a champagne Charles Heidsieck rosé 1981 that I am doped to open the wines. Brought by a faithful friend, it is a lively, energetic champagne that makes you optimistic. It would be hard to give an age to this beautiful round rosé, beautiful acidity. Another friend has taken out of his musette four off-program wines for the openers and who will then be assigned to the tables. I touched them only after having finished the openings. Tired, my attention for them was weak but I still felt that each of these wines is of interest.

The Château Magence Graves Dry Guillot de Suduiraut 1959 has a beautiful presence, young and flawless.

The Bourgogne Aligoté A. Noirot-Carrière 1962 is simple but also of good quality.

The unknown Bonnezeaux, end of the 50’s which has no indication on the bottle is slightly cloudy but I love a soft side and especially the fact that it is an enigma.

The Château La Vieille France Graves Superior bottled by Calvet 1962 is dry and lively, nice to wait for the guests of the 32nd session of the academy. At the Macéo restaurant, we opened about fifty bottles, we tasted with friends arrived early wines that support the morale of the openers. We are ready to welcome the thirty participants of the 32nd session of the Academy of Ancient Wines.

An hour before they arrive, I wanted to open the Champagne Cuvée Brut Taittinger Jeroboam 80s for a little air. The cork is very curled in its lower part and the smell is putrid, animal. Will he reconstitute himself? I’m pretty scared. It is appropriate that as an aperitif we start with the other champagnes.

Champagne Colin Cuvée Castille Blanc de Blancs magnum from the 90ies is very pleasant, relatively young and lively, which benefits from the delicious gougères served lukewarm, which is perfect for champagne. We are in a good mood.

Champagne Pâques Gaumont Brut Imperial 80s is served in two bottles. He has a happy maturity. It is more built and full than the Blanc de Blancs.

I warned everyone of the risk of difficulty of Champagne Cuvée Brut Taittinger Jeroboam 80s. I taste it and I feel that the perfume has become much more sociable. The color is dark, the bubble is non-existent and the sparkling is almost insensitive. Around me many friends like its originality but for me this wine is tired, even if it still expresses many complexities.

We go to the table and as usual, I give a welcome speech which, for once, will have no criticism as I am happy with the punctuality in the preparatory phases to the academy and the quality of the wines brought . I point out two facts that are important to me, the presence of seven students Cordon Bleu, all nationalities, and descendants of the family of Frédéric Lung, the largest winemaker Algerian, who for the first time will drink wines of their ancestor.

The menu composed by the restaurant is: mousseline of peas, chorizo and onions new / terrine of poultry way Macéo / shoulder of lamb confit, light cream of garlic and potatoes granailles / cheese of the restaurant and cheese of the participants / shortbread breton with buckwheat, smooth cream with salted butter caramel and cider sorbet.

Here are the wines we have at table 1, knowing that several other wines will be brought generously by their contributors. Château Carbonnieux white 1980 is incredibly clear for a wine that is 39 years old. It is fresh like a roach, precise, generous, of beautiful acidity.

The Château Bouscaut white 1927 amazes all those who have not had the opportunity to drink old wines. How is it possible for a 92 years old wine to have this beautiful precision? It is very assembled, consistent and lively, of good length. It has no age and would be younger than many dry white wines from Bordeaux.

The white Imperial Kebir Frédéric Lung 30s is rich, thick and you can smell notes of coffee, just melted. Florence Lung is moved to see that a white wine of her great-uncle can be so brilliant. I had also included a Frédéric Lung White Imperial Kebir 40ies at table 2, but we were lucky to be able to taste it. He is transcendental. It is so much richer than the other that it is incredible because everything is assembled to perfection and there is a fat that the first drunk has not. This fat irresistibly evokes a Montrachet, and if there was not the small trace of coffee, one could, mistakenly, blindly name a Montrachet. I think it’s one of the greatest white wines I’ve ever had, because it gave me a unique emotional flash.

L’Arbois Fruitière Vinicole d’Arbois 1961 is a superb Jura wine, with great richness and energy. What a pity he comes after the Lung, because he is brilliant but in the shadow of the Lung.

Château Palmer 1975 opens the road of reds in a very beautiful way. It is so rich and concentrated that it looks like truffle. It has grain and a truffle chews. He is 44 but he is a young warrior. There too certainties fall. A wine of 44 years also conquering, it should not exist.

The Château de l’Enclos Pomerol 1976 is a little shy after the Palmer, but he settles and is feminine when the Palmer is masculine to the highest degree.

The big shock arrives. The Côtes de Beaune Bouchard Ainé and son 1923 is a heavy velvet curtain that is thrown in my face. I am assailed with velvet. But I am also fondled, because this wine is extremely subtle. Everything is suggested, delicate and subtle, on a pile of velvet. Its length is extreme. We are here in what is « my » world of wine because for me, it is before 1930 that are located the « real » wines. It is a provocation of course to say that, and an approximation, but this 1923 is totally exceptional. This wine of a friend is for me the ideal of the academy.

The Flory Old Red Wine 1953 is a wine unknown to everyone, even the one who brought it. It comes from the Eastern Pyrenees and gives the impression of having a certain alcoholic strength. It is a simple wine, consistent because of its alcohol, and very pleasant to drink if one accepts its simplicity. He is happy.

The red Algerian wine of the 40/50 (Medea) has the characteristics of Algerian wines, solidity and coffee, but it speaks to me less than the F. Sénéclauze Wine Red end of Algeria presumed 1939 which may have less of complexity than Lung wines, but has a charm that I adore.

I had supplied in group 3 a Royal Kébir Frédéric Lung red 1947 and friends bring me a glass and for Florence Lung too. I miss fainting so much this wine is big. It is the perfect Algerian wine, rich, barely and subtly roasted, with evocations of coffee all in subtlety. This wine is a love.

The Langoiran wines are the first Côtes of Bordeaux that I like, because we never expect them to be as good a level of complexity. This Langoiran 1943 is pleasant, nicely sweet, but perhaps too discreet.

The Muscat de la Trappe Vin de Liqueur Alger presumed 50ies is amazing, because it is rich, enigmatic, playing on unknown registers. He is very pleasant.

I am brought a wine that I provided at table 3, a Château Pernaud Haut Barsac 1929. Incredible. I would be quoted for this wine the most famous names of Sauternes, I would not deny any. This wine is huge. He has an incredible fat and the year 1929 makes it sublime. This is the absolute perfection of Sauternes.

From another table I tasted a Minuto Riserva Speciale, Barolo 1964 which I enjoyed the freshness almost minty freshness, the Royal Kebir Frédéric Lung 1940 red that some preferred to 1947 which is not my case, because this exciting 1940 does not have the same liveliness as the 1947.

I was also given the Château de Fonsalette Blanc 1990 which is superb of youth and nobility but is a little young for the academy.

The Saint-Amour supposed 1947 is a noble Beaujolais. There is so much wealth in these ancient Beaujolais complexities that are so often forgotten.

My friends make fun of me, because each table has a Tokaji Aszu Eszencia 1988 and it’s the third or fourth time I’ve included it for each table in the sessions. They imagine that I have some dumpers that I would like to get rid of. They would do better to congratulate me because this Tokaji with the gracious wealth is penetrating while being subtle. He is particularly accomplished despite his young age.

The Marc Blanc of Domaine d’Ott 1929 ultra virile, limpid as water, concludes this dinner.

What to remember? This dinner calls into question all notions of age. « Age does not exist ». The received ideas fall and young people from all countries who will work in the world of wine and gastronomy, already challenged during my tasting at Le Cordon Bleu will no longer consider the wines in the same way. The academy changes the vision of wine.

In this dinner I felt some wines as being of the highest possible level of taste: 1 – Kebir Imperial white Frédéric Lung years 40, 2 – Château Pernaud Haut Barsac 1929, 3 – Côtes de Beaune Bouchard Ainé and son 1923, 4 – Royal Kebir Frédéric Lung red 1947.

If I put 1947 in fourth position, it’s because I know it by heart, having drunk it nine times. We can say that these four wines all deserve to be first.

Other wines of course were very brilliant like the Palmer 1975, the Arbois 1961, the Barolo 1964 and many others, but the four mentioned are transcendent. One of these four wines alone would justify the meeting that we lived.

The restaurant’s cuisine is of high quality, the dishes being readable and accompanied by good wines. The wine service has been smartly managed and Beatrice, who is helping me with the preparation of the event, has once again shown how essential she is to the success of this event.

The friendly atmosphere and the joie de vivre of everyone made this meeting one of the most successful and happy we have ever known.

(pictures of all the bottles can be seen in the articles below)


32ème séance de l’Académie des Vins Anciens samedi, 18 mai 2019

La 32ème séance de l’Académie des Vins Anciens se tient au restaurant Macéo. Nous sommes 31 annoncés mais une défection tardive a porté notre groupe à 30 convives, dont sept sont des élèves de l’école Cordon Bleu à qui j’ai proposé de venir à la suite de ma conférence-dégustation faite il y a quelques semaines dans leurs locaux. Nous sommes répartis en trois tables dont voici les vins, précédés par les vins de l’apéritif.

Vins d’apéritif : Champagne Cuvée Brut Taittinger Jéroboam années 70 / 80 – Champagne Colin Cuvée Castille Blanc de Blancs magnum années 90 – Champagne Pâques Gaumont Brut Impérial années 80 (2 bouteilles)

Vins du groupe 1 : Château Carbonnieux blanc 1980 – Chateau Bouscaut blanc 1927 – Kebir Impérial blanc Frédéric Lung années 30 – Arbois Fruitière Vinicole d’Arbois 1961 – Château Palmer 1975 – Château de l’Enclos Pomerol 1976 – Côtes de Beaune Bouchard Ainé et fils 1923 – Flory Vin rouge vieux supérieur 1953 – Vin Algérien rouge des années 40/50 (Médea) – F. Sénéclauze Vin Fin rouge d’Algérie présumé 1939 – Langoiran 1943 – Muscat de la Trappe Vin de Liqueur Alger présumée des années 50 – Tokaji Aszu Eszencia 1988 – Marc Blanc du Domaine d’Ott 1929 (commun aux trois tables).

Vins du groupe 2 : Champagne Mumm cordon rouge magnum années 60 – Pouilly Fuissé Julien Damoy 1947 – Kébir Impérial F. Lung blanc années 40 – Moulin Haut Laroque Côtes de Fronsac 1964 – Cos d’Estournel 1960 – Château Cabrières, Châteauneuf-du-Pape 1971 – Minuto Riserva Speciale, Barolo 1964 – Marchesi di Barolo Barolo 1961 – Royal Kebir Frédéric Lung 1940 – Vouvray Clovis Lefèvre Grande année 1959 – Ste Croix-Croix-Du-Mont G.M Dumons & Cie 1943 – Tokaji Aszu Eszencia 1988    – Marc Blanc du Domaine d’Ott 1929 (commun aux trois tables).

Vins du groupe 3 : Château Bouscaut blanc 1986 – Château de Fonsalette blanc 1990 – Châteauneuf-du-Pape blanc Mont-Redon 1970 – Château Saint Pierre Saint Julien 1970 – Château Destieux 1949 – Saint-Amour supposé 1947 – Royal Kébir Frédéric Lung rouge 1947 – Vin d’Algérie (rouge / rosé ?) La Trappe Alger 1962 – Vouvray Clovis Lefèvre Grande année 1959 – Château Pernaud Haut Barsac 1929 – Tokaji Aszu Eszencia 1988 – Marc Blanc du Domaine d’Ott 1929 (commun aux trois tables).

Il convient de faire une remarque sur les vins présents. Il y a quelques mois, un descendant de Frédéric Lung m’a contacté. Il va se marier bientôt, et il voudrait pouvoir acheter des vins de Frédéric Lung pour son mariage. Il est allé sur internet et en cherchant Frédéric Lung, on tombe invariablement sur mon nom. Je lui ai dit que je ne vendais pas ces vins que j’adore car ils sont destinés à être partagés avec des amateurs. Il se trouve que ni lui ni sa mère n’ont bu des vins de sa famille. Je lui ai alors dit : si vous vous inscrivez à l’académie avec votre mère, elle sera mon invitée. Il s’est donc inscrit et a gardé le secret à sa mère jusqu’à leur arrivée. La présence de descendants d’un vigneron que j’apprécie est un privilège aussi ai-je demandé aux autres académiciens inscrits d’apporter des vins d’Algérie s’ils en ont. Ce soir sur les 46 vins à se partager, il y aura 8 vins d’Algérie, dont 4 de Frédéric Lung. Peu après cette annonce, un fidèle de l’académie enregistré en retard me dit : « tu as bu beaucoup de vins de Frédéric Lung, mais je vois que tu n’as jamais bu le Kebir Impérial Blanc de Frédéric Lung, alors j’en apporterai un ». J’aime sa générosité, mais j’aime aussi les défis aussi ai-je apporté comme lui un Kebir Impérial Blanc de Frédéric Lung.

Le jour dit, je suis au restaurant à 16 heures pour ouvrir tous les vins qui avaient été regroupés dans ma cave. Je suis vite rejoint par quatre amis qui m’aident à ouvrir les vins, ce qui est généralement une occasion d’ouvrir d’autres bouteilles pour les ouvreurs, qui seront ensuite affectées aux différentes tables. Il y a eu un nombre très élevé de bouchons qui collaient aux parois, m’obligeant à utiliser un bilame couplé avec un tirebouchon, ce qui décolle plus facilement les bouchons. Est-ce que cette recrudescence de bouchons collés est liée à des conditions d’hygrométrie et de pression atmosphérique, je ne sais pas, mais ce n’est pas la première fois que l’on trouve des comportements de bouchons orientés dans le même sens pour un grand nombre de vins, soit collés, soit au contraire ayant tendance à vouloir tomber dans la bouteille. Les odeurs des vins sont généralement très prometteuses car les niveaux des vins sont le plus souvent parfaits. La qualité des apports est certaine.

C’est avec un Champagne Charles Heidsieck rosé 1981 que je suis dopé pour ouvrir les vins. Apport d’un ami fidèle, c’est un champagne vif, énergique qui rend optimiste. On serait bien en peine de donner un âge à ce beau rosé très rond, de belle acidité.

Un autre ami a sorti de sa musette quatre vins hors programme pour les ouvreurs et qui seront affectés ensuite aux tables. Je n’y ai touché qu’après avoir fini les ouvertures. Fatigué, mon attention pour eux fut faible mais j’ai quand même senti que chacun de ces vins a de l’intérêt. Le Château Magence Graves Sec Guillot de Suduiraut 1959 a une belle présence, jeune et sans défaut.

Le Bourgogne Aligoté A. Noirot-Carrière 1962 est simple mais lui aussi de bon aloi.

Le Bonnezeaux inconnu, fin des années 50 qui n’a aucune indication sur la bouteille est légèrement trouble mais j’adore un côté assez doux et surtout le fait qu’il est une énigme.

Le Château La Vieille France Graves Supérieures mise Calvet 1962 est sec et vif, agréable pour attendre les convives de la 32ème séance de l’académie.

Au restaurant Macéo, nous avons ouvert une cinquantaine de bouteilles, nous avons goûté avec des amis arrivés tôt les vins qui soutiennent le moral des ouvreurs. Nous sommes fins prêts pour accueillir les trente participants de la 32ème séance de l’Académie des Vins Anciens.

Une heure avant qu’ils n’arrivent, j’ai voulu ouvrir le Champagne Cuvée Brut Taittinger Jéroboam années 80 pour qu’il s’aère un peu. Le bouchon est très recroquevillé dans sa partie basse et l’odeur est putride, animale. Va-t-il se reconstituer ? J’ai bien peur. Il est opportun qu’à l’apéritif on démarre avec les autres champagnes.

Le Champagne Colin Cuvée Castille Blanc de Blancs magnum années 90 est très agréable, relativement jeune et vif, qui profite bien des délicieuses gougères servies tièdes, ce qui convient parfaitement au champagne. Nous trinquons dans la bonne humeur.

Le Champagne Pâques Gaumont Brut Impérial années 80 est servi en deux bouteilles. Il a une joyeuse maturité. Il est plus construit et plus plein que le blanc de blancs.

J’avais prévenu tout le monde du risque de difficulté du Champagne Cuvée Brut Taittinger Jéroboam années 80. On me fait goûter et je sens que le parfum est devenu beaucoup plus sociable. La couleur est foncée, la bulle est inexistante et le pétillant est presque insensible. Autour de moi beaucoup d’amis aiment son originalité mais pour moi ce vin est fatigué, même s’il exprime encore beaucoup de complexités.

Nous passons à table et comme à l’accoutumée, je prononce un discours de bienvenue qui, pour une fois, n’aura aucune critique tant je suis heureux de la ponctualité dans les phases préparatoires à l’académie et de la qualité des vins apportés. Je signale deux faits qui ont de l’importance pour moi, la présence de sept élèves du Cordon Bleu, de toutes nationalités, et des descendants de la famille de Frédéric Lung, le plus grand vigneron algérien, qui pour la première fois vont boire des vins de leur ancêtre.

Le menu composé par le restaurant est : mousseline de petits pois, chorizo et oignons nouveaux / terrine de volaille façon Macéo / épaule d’agneau confite, crème d’ail légère et pommes de terre grenailles / fromages du restaurant et fromages des membres / sablé breton au sarrasin, crème onctueuse au caramel beurre salé et sorbet de cidre.

Voici les vins que nous avons bus à la table 1, sachant que plusieurs autres vins nous serons servis généreusement par leurs apporteurs. Le Château Carbonnieux blanc 1980 est d’une clarté incroyable pour un vin qui a 39 ans. Il est frais comme un gardon, précis, généreux, de belle acidité.

Le Château Bouscaut blanc 1927 émerveille tous ceux qui n’ont pas eu l’occasion de boire des vins anciens. Comment est-ce possible qu’un vin de 92 ans ait cette si belle précision ? Il est très assemblé, cohérent et vif, de belle longueur. Il n’a pas d’âge et ferait plus jeune que bien des vins blancs secs jeunes du bordelais.

Le Kebir Impérial blanc Frédéric Lung années 30 est riche, épais et on sent des notes de café, juste fondues. Florence Lung est émue de constater qu’un vin blanc de son grand-oncle peut être aussi brillant. J’avais inclus aussi un Kebir Impérial blanc Frédéric Lung années 40 à la table 2, mais nous avons eu la chance de pouvoir le goûter. Il est transcendantal. Il est tellement plus riche que l’autre que c’en est incroyable car tout est assemblé à la perfection et il y a un gras que le premier bu n’a pas. Ce gras évoque irrésistiblement un montrachet, et s’il n’y avait pas la petite trace de café, on pourrait, à s’y méprendre, nommer à l’aveugle un montrachet. Je pense que c’est un des plus grands vins blancs que j’aie pu boire, car il m’a donné un flash d’émotion unique.

L’Arbois Fruitière Vinicole d’Arbois 1961 est un superbe vin du Jura, avec une belle richesse et une belle énergie. Quel dommage qu’il passe après le Lung, car il est brillant mais dans l’ombre du Lung.

Le Château Palmer 1975 ouvre la route des rouges de bien belle façon. Il est tellement riche et concentré qu’on croirait croquer de la truffe. Il a grain et une mâche de truffe. Il a 44 ans mais il fait jeune guerrier. Là aussi des certitudes tombent. Un vin de 44 ans aussi conquérant, ça ne devrait pas exister.

Le Château de l’Enclos Pomerol 1976 fait un peu plus timide en passant après le Palmer, mais il s’installe et se montre féminin quand le Palmer est masculin au plus haut degré.

Le grand choc arrive. Le Côtes de Beaune Bouchard Ainé et fils 1923 est un lourd rideau de velours que l’on me jette en pleine figure. Je suis assailli de velours. Mais je suis aussi caressé, car ce vin est d’une subtilité extrême. Tout est suggéré, délicat et subtil, sur une trame de velours. Sa longueur est extrême. On est là dans ce qui est « mon » monde du vin car pour moi, c’est avant 1930 que se situent les « vrais » vins. C’est une provocation bien sûr que de dire cela, et une approximation, mais ce 1923 est totalement exceptionnel. Ce vin d’un ami est pour moi l’idéal de l’académie.

Le Flory Vin rouge vieux supérieur 1953 est un vin inconnu de tous, même de celui qui l’a apporté. Il vient des Pyrénées Orientales et donne l’impression d’avoir une force alcoolique certaine. C’est un vin simple, cohérent du fait de son alcool, et très plaisant à boire si l’on accepte sa simplicité. Il est joyeux.

Le Vin Algérien rouge des années 40/50 (Médea) a les caractéristiques des vins d’Algérie, solidité et café, mais il me parle moins que le F. Sénéclauze Vin Fin rouge d’Algérie présumé 1939 qui a peut-être moins de complexité que les vins de Lung, mais a un charme que j’adore.

J’avais fourni dans le groupe 3 un Royal Kébir Frédéric Lung rouge 1947 et des amis m’en apportent un verre ainsi qu’à Florence Lung. Je manque de m’évanouir tant ce vin est grand. C’est le vin algérien parfait, riche, à peine et subtilement torréfié, avec des évocations de café toutes en subtilité. Ce vin est un amour.

Les Langoiran sont des premières côtes de Bordeaux que j’aime, car on ne les attend jamais à un aussi beau niveau de complexité. Ce Langoiran 1943 est plaisant, joliment doucereux, mais peut-être trop discret.

Le Muscat de la Trappe Vin de Liqueur Alger présumé des années 50 est étonnant, car il est riche, énigmatique, jouant sur des registres inconnus. Il est très plaisant.

On m’apporte un vin que j’ai fourni à la table 3, un Château Pernaud Haut Barsac 1929. Incroyable. On me citerait pour ce vin les noms les plus renommés du sauternais, je n’en renierais aucun. Ce vin est immense. Il a un gras incroyable et l’année 1929 le sublime. C’est la perfection absolue du sauternes.

D’une autre table j’ai goûté un Minuto Riserva Speciale, Barolo 1964 dont j’ai apprécié la folle fraîcheur presque mentholée, le Royal Kebir Frédéric Lung rouge 1940 que certains ont préféré au 1947 ce qui n’est pas mon cas, car ce 1940 passionnant n’a pas la même vivacité que le 1947.

On m’a apporté aussi le Château de Fonsalette blanc 1990 qui est superbe de jeunesse et de noblesse mais fait un peu jeune pour l’académie. Le Saint-Amour supposé 1947 est un beaujolais noble. Il y a tant de richesse dans ces beaujolais anciens aux complexités que l’on a si souvent oubliées.

Mes amis se moquent de moi, gentiment, car chaque table a un Tokaji Aszu Eszencia 1988 et c’est la troisième ou quatrième fois que j’en inclus dans les séances. Ils imaginent que j’en ai des tombereaux dont je voudrais me débarrasser. Ils feraient mieux de me féliciter car ce Tokaji à la richesse gracile est pénétrant tout en étant subtil. Il est particulièrement accompli malgré son jeune âge.

Le Marc Blanc du Domaine d’Ott 1929 ultra viril, limpide comme de l’eau, conclut ce dîner. Que retenir ? Ce dîner remet en cause toutes de notions d’âge. L’âge n’existe pas. Les idées reçues tombent et les jeunes de tous pays qui vont travailler dans le monde du vin et de la gastronomie, déjà interpellés lors de ma dégustation au Cordon Bleu ne vont plus considérer les vins de la même façon. L’académie change la vision du vin.

Dans ce dîner j’ai ressenti quelques vins comme étant du plus haut niveau gustatif possible : 1 – Kebir Impérial blanc Frédéric Lung années 40, 2 – Château Pernaud Haut Barsac 1929, 3 – Côtes de Beaune Bouchard Ainé et fils 1923, 4 – Royal Kébir Frédéric Lung rouge 1947. Si je mets le 1947 en quatrième position, c’est parce que je le connais par cœur, l’ayant bu neuf fois. On peut dire que ces quatre vins mériteraient tous d’être premiers.

D’autres vins bien sûr ont été très brillants comme le Palmer 1975, l’Arbois 1961, le Barolo 1964 et bien d’autres, mais les quatre cités sont transcendants. Un de ces quatre vins justifierait à lui tout seul la séance que nous avons vécue.

La cuisine du restaurant est de haute qualité, les plats étant lisibles et de bon accompagnement des vins. Le service des vins a été intelligemment géré et Béatrice, qui m’aide à la préparation de l’événement a montré une fois de plus à quel point elle est indispensable à la réussite de cet événement. L’atmosphère amicale et la joie de vivre de chacun ont fait de cette réunion l’une des plus réussies et heureuses que nous ayons connues.

(les photos sont dans les cinq articles qui suivent)