Récidive à la table d’hôte d’Yvan Roux samedi, 5 juillet 2008

A peine quelques jours plus tard des amis me demandent les coordonnées d’Yvan Roux pour y aller dîner. J’aurais tellement envie de leur communiquer mon amour de ce chef que contre toute étiquette, je m’impose à leur table. Le rendez-vous est pris chez eux, dans leur sublime maison de la presqu’île de Giens où face à l’un des plus beaux panoramas qui soient, nous goûtons un Meursault 2002 d’un négociant de leurs amis (est-ce Fatien, je ne sais). Ce meursault a un nez d’une puissance et d’une expressivité remarquables. Il est tout en force, joyeux, goûteux, mais son envahissement exclut un peu trop la finesse. J’ai peur pour le vin que j’ai prévu d’apporter chez Yvan Roux, car c’est un peu l’opposé de ce meursault.

Nous nous rendons chez Yvan Roux avec un couple de leurs amis, lui américain, elle d’une des plus grandes familles historiques du vin de Bordeaux. Sur un Pata Negra bien gras et magistralement goûteux, le Chablis Grand Cru les Preuses William Fèvre 2006 en magnum se comporte avec une subtilité qui montre que l’on peut pianoter sans écraser les touches. Un demi-homard délicieux cohabite très bien avec le chablis, grâce au corail de sa tête, et un saint-pierre de taille raisonnable correspond à toutes mes envies. Une nouvelle préparation d’abricots est aussi talentueuse que le sabayon récent.

Par une soirée plus fraîche que les précédentes qui cache les jolies femmes sous des châles, nous avons une fois de plus bien dîné devant le spectacle féerique de cette séduisante maison.

 

visites du blog en juin 2008 mardi, 1 juillet 2008

Voici la statistique du mois :

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ce qui est assez spectaculaire en juin 2008, c’est le temps de visite moyen : 13 minutes 41 secondes. C’est assez exceptionnel.

Nous sommes maintenant à 70.000 heures de visite depuis la création du blog.

Merci à vous, visiteurs.

moment de paradis chez Yvan Roux mardi, 1 juillet 2008

Nous repartons dans le sud. Après une journée de soleil, au contact direct de la mer, se retrouver sur la belle terrasse de la maison d’Yvan Roux ajoute un paradis à notre paradis. Car la mer que l’on surplombe offre un panorama de rêve qui s’ajoute au plaisir de la mer quand elle clapote à nos pieds. Yvan découpe un Pata Negra d’un nouveau fournisseur, Senino de Montenegra. Très gras, au sel parfaitement dosé, c’est un jambon enjôleur. Le traditionnel champagne Laurent Perrier Grand Siècle surexpose sa verdeur sur le premier gras du jambon, mais quand le palais est habitué, le champagne trouve son assise. L’accord des deux est d’un naturel confondant.

Le menu est composé de : fleurs de courgettes en tempura / bisque araignée et langouste avec des beignets de sauge / homard femelle de 2,5 kilos particulièrement blanc, presque albinos, dont nous avons une moitié pour nous, rôtie avec une tartelette à la tomate confite au balsamique, pesto et Pata Negra / Yvan avait prévu pour moi un magnifique chapon, mais j’ai abandonné ce plat alors que j’adore le chapon / sabayon au thé vert à la menthe et vanille, abricots rôtis et sorbet abricot.

Tout est absolument délicieux, et la cuisson du homard est spectaculaire. Quand j’ai dit à Yvan l’ordre des plats que j’ai préférés : 1 – sabayon, 2 – fleurs de courgettes, 3 – homard, j’ai vu le sourire d’Yvan s’illuminer car il est fier d’avoir réussi un sabayon exceptionnel.

Le champagne est très à l’aise sur tout le repas, sauf sur le sabayon à cause de la force sucrée du goût. Il brille sur le jambon, réagit très bien aux fleurs de courgettes et aux beignets de sauge. Le homard aurait accueilli un grand blanc de Bourgogne ou un rouge du Rhône. Le Grand Siècle s’adapte bien, mais sans créer un accord aussi émotionnel que l’aurait fait un vin.

La cuisine d’Yvan Roux progresse dans l’exploration de voies nouvelles. Sa justesse des cuissons est un atout majeur. Face à la mer et son spectacle captivant, avec des goûts forts et subtils, nous avons vécu un moment de paradis.

repas chez Yvan Roux – les photos mardi, 1 juillet 2008

la vue de la terrasse chez Yvan Roux :

le calme de la mer et la presqu’île de Giens

en mai 1968 on disait : "sous les pavés, la plage". Ici c’est : "sous la plage, les graviers" !

le chapon me tentait, mais le homard impressionnant et copieux me poussa à refuser le délicieux poisson

tempura

homard goûteux

un dessert à se damner !

magnifique repas de vins rares chez un ami amateur éclairé samedi, 28 juin 2008

En banlieue ouest, dans une commune où les immeubles poussent aussi drus que les épis de blé dans des champs survitaminés, un groupe de petits pavillons forme un village rebelle qui ressemble à celui d’Astérix. L’un des plus fidèles de mes dîners, compagnon de mille folies, reçoit des amis avec son épouse. Nous dînons dans un minuscule jardinet coincé entre deux ou trois maisons et notre assemblée joyeuse est cosmopolite. Grèce et Italie, Inde, Amérique du Nord et du Sud et Allemagne ont croisé les arbres généalogiques de quelques uns des douze convives. L’amour du vin  est un dénominateur commun, car Lionel a choisi de nous faire goûter des vins rares au-delà de toute mesure.

Le champagne Extra brut Jacques Selosse, dégorgé en novembre 2005, plante le décor. Ce champagne d’une rare précision nous enchante par son intelligence et son confort : on est bien avec ce champagne. 

Le Champagne Jacquesson & Fils, Perfection 1966 est absolument spectaculaire. C’est un bouquet d’une richesse inatteignable par aucun champagne récent. La bulle discrète montre son nez, le parfum délicat est subtilement séduisant, et le goût est d’une complexité sans limite. Nous sommes tous sous le charme de ce bouquet de fleurs et de fruits.

Nous passons à table et le Bâtard-Montrachet 1937 domaine ou négoce à Pommard de nom inconnu a une couleur joliment ambrée. Il y a un peu de fatigue dans ce vin, mais le message est joli. Je suis beaucoup plus critique envers le Corton blanc P.A. André, négociant au Château de Corton-André à Aloxe-Corton 1949 présenté dans une bouteille bordelaise absolument irréelle. La couleur du vin est d’un gris sale, et je jette le contenu de mon verre un peu trop vite, car d’autres convives, puis moi qui me suis resservi, constateront que le vin revient à la vie, sans toutefois faire oublier ses fatigues lourdes.

Lionel, qui a peur que nous manquions, ouvre un Corton Charlemagne L. Chapuit 1983 au nez expressif et joyeux, d’une grande année, qui réjouit nos palais après l’épisode nécrophage précédent. Il chante en bouche sans complexe, iodlant des citronnées rafraîchissantes.

Le Château Lagrange 1944 est un plaisir pour les collectionneurs que nous sommes. Car cette petite année est oubliée de tous les écrits actuels, mais le vin se montre sous son meilleur jour, avec une belle couleur bien vive et un fruit qui a à peine pâli. Un beau vin de plaisir.

Le Château Rauzan-Segla 1928 est plus à la peine et nous serons divisés en deux camps. Il y a ceux qui, comme une amie professionnelle du vin et moi, sont capables de passer au-delà de l’acidité de façade pour comprendre la force du message de ce vin dense à forte trame, et ceux qui, à l’instar d’un ami expert en vins, qui m’a étonné en butant sur ce vin, sont arrêtés par l’acidité envahissante du vin. En ce qui me concerne, j’ai aimé ce 1928 dont la richesse de structure se lit au travers du voile de l’acidité.

Le Château Margaux 1916 (présumé ou 1914) est un vrai grand et bon vin. Lionel pensait 1910 en le goûtant alors qu’il m’évoque 1914. Toujours est-il qu’il est vivant, bien vivant, et se boit avec un grand plaisir.

Le Chateauneuf-du-Pape Les Cansonniers Domaine L.F. de Vallouit 1957 est un vin dont j’ai gardé peu de souvenirs, car la soirée avance et la charge alcoolique fatigue nos corps et nos esprits. Mais aussi parce que les vins qui arrivent captent l’attention.

Le Vosne Romanée Les Suchots Caves Nicolas 1966 est solide et serein. De fidèles lecteurs de mes bulletins siégeant à la table, ils sont intéressés de constater et vérifier qu’une fois de plus le bouchon d’un vin du domaine de la Romanée Conti sent intensément la terre des caves. La Tâche, Domaine de la Romanée Conti 1957 est un vin qui charme par cette touche bourguignonne extrême qui n’appartient qu’au domaine de la Romanée Conti. Tout le monde est ravi de ce grand vin où l’énigme est joliment posée.

La magnifique surprise vient du Corton Clos du Roi Domaine A. de Tavernost 1923 qui sera pour moi le vin de la soirée. Ce vin est grand, généreux, riche, équilibré, solide, sensuel, goûtu, de grande mâche. Un vin de plaisir.

Là encore, la peur de manquer, mais aussi l’envie de faire plaisir à ceux qui prennent du fromage, poussent Lionel à ouvrir un Meursault J. F. Coche-Dury 2003 qui nous plonge avec bonheur dans le monde des vins jeunes vinifiés par l’un des plus grands vignerons de vins blancs. Il est goûteux et franc.

Le Château d’Yquem 1966 a une magnifique couleur de mangue ou d’abricot doré. Un ami considère que c’est le plus grand 1966 qu’il ait jamais bu. J’ai un faible pour cette année qui vit dans l’ombre de 1967. Ce sauternes est grand, de grand plaisir. Il est plus mangue qu’agrumes.

On pourrait penser qu’un Sainte-Croix-du-Mont arrivant après Yquem aura une tâche difficile. Eh bien, le Château Loubens 1943 trouve sa place avec naturel et ne souffre d’aucun complexe. Il est bon, avec sa personnalité très franche, plus discrète que l’Yquem mais extrêmement plaisante. Un petit côté fumé, thé, est très agréable.

Nous votons tous sans qu’une récapitulation ne soit faite. Il y a des convergences mais aussi des préférences. J’ai mis en premier le Corton Clos du Roi Domaine A. de Tavernost 1923 car il est spectaculairement bon, puis le Champagne Jacquesson & Fils, Perfection 1966 car il est d’une richesse gustative infinie. Le Château Margaux 1916 vient ensuite pour sa fraîcheur intacte et le Château d’Yquem 1966, parce que c’est Yquem.

La cuisine de Valérie est toujours aussi précise et parfaite. Les amuse-bouches consistaient en boudin frais, sucette de feuilles de brick au fromage de chèvre et épices, brochettes de chorizo, tomates confites et melon,  brochettes de fromage de chèvre, jambon cru et nectarines et les magnifiques sablés maison au parmesan.

A table, trio de soupes froides : velouté de petit pois et gambas ; gazpacho et son gressin au jambon de parme ; velouté de carotte / tartare d’Empereur et mangue à l’huile de vanille / filet de bar de ligne citronné au pesto / filet mignon de veau en croute de cèpes – galettes de pomme de terre / fromages de chez Aléosse : Stilton ;  chèvre ; Saint Nectaire ; Cîteaux ; brebis corse / tarte Tatin de mangue.

Les accords du carpaccio d’empereur avec le Corton Charlemagne 1983, le bar délicieusement cuit avec le Margaux 1916, et le veau sur le Corton 1923, furent exacts et fort gourmands.

Aucun d’entre nous regardant sa montre n’aurait imaginé qu’il soit si tard ou si tôt dans le matin. Lionel est généreux  et Valérie grande cuisinière. Ils nous ont éblouis.

dîner chez un ami fou de vin – les photos samedi, 28 juin 2008

Les photos ont été prises dans une pénombre certaine. Grâce aux techniques de correction (sommaires), j’ai pu corriger certaines photos sombres, mais pas toutes.

Champagne Extra brut Jacques Selosse, dégorgé en novembre 2005

Champagne Jacquesson & Fils, Perfection 1966

Bâtard-Montrachet 1937 domaine ou négoce à Pommard de nom inconnu (quand on collectionne, il faut parfois croire les mentions manuscrites, et on fait bien !)

Corton blanc P.A. André, négociant au Château de Corton-André à Aloxe-Corton 1949 (la bouteille est de forme bordelaise, et la petite étiquette a une devise charmante)

Corton Charlemagne L. Chapuis 1983

Château Lagrange 1944 (pas de photo)

Château Rauzan-Segla 1928 (pas de photo)

Château Margaux 1916 (présumé ou 1914)

Chateauneuf-du-Pape Les Cansonniers Domaine L.F. de Vallouit 1957

Vosne Romanée Les Suchots Caves Nicolas 1966

La Tâche, Domaine de la Romanée Conti 1957 (pas de photo)

Corton Clos du Roi Domaine A. de Tavernost 1923

Meursault J. F. Coche-Dury 2003

Château d’Yquem 1966

Château Loubens 1943

 

les jeudis des Caves Legrand, artistes et vins – le 50ème jeudi, 26 juin 2008

Les caves Legrand Filles et Fils organisent des soirées où Aladin Reibel, comédien, mêle avec talent des spectacles artistiques avec la présentation de vins. L’atmosphère y est extrêmement sensible, conviviale et passionnée. La délicatesse est de grande inspiration. Ce soir, Aladin fête son cinquantième jeudi et a fait venir de nombreux artistes qui se sont produits ici-même, ainsi que plusieurs vignerons, heureux de se retrouver entre eux mais aussi de fêter Aladin. Des habitués, jeunes et vieux vibrent aux chants, aux voix, aux textes, et le ballet des verres qui viennent se remplir au bar est d’une chorégraphie gourmande. Gérard Sibourg-Baudry, l’heureux animateur propriétaire des caves est tout sourire, laissant libre cours aux improvisations des artistes et des vignerons. La maison de champagne Tarlant fait goûter son non millésimé qui est le champagne des caves Legrand, son Prestige millésime 1998 et son rosé 1998. Mélanie Tarlant vient m’expliquer avec enthousiasme la foi qui anime son frère et elle-même. Le champagne Prestige 1998 Tarlant est plein d’âme. Je goûte un Cornas 1998 fait par une association de vignerons dont Marcel Richaud. C’est la première année d’un vin qui se cherche un peu mais promet, car il y a tout ce qu’il faut pour que ce soit grand. Il y a tant d’artistes heureux de se produire et tant d’applaudissements de joie que c’est fort tard que nous nous rendons à la Brasserie Le Colbert où un dîner attend les tardives Cendrillon que nous sommes. Les vignerons présents sont généreux. Je goûte un Pibarnon rouge 2006 ensoleillé et chantant, un La Rectorie 2006 puissant comme un Sumo, un délicieux Charmes-Chambertin de Geantet-Pansiot 2003, sereinement et magnifiquement bourguignon. J’ai de belles discussions avec André Ostertag et son épouse sur les vins et la gastronomie. Quand je quitte fort tard cette riante assemblée, je sens que le cinquantième jeudi de Legrand se finira à l’heure du laitier. Art et vin font bon ménage. Bravo Aladin.

dîner au restaurant de Matthias Dandine au Lavandou jeudi, 19 juin 2008

Descendu dans le sud, j’invite avec ma femme des amis d’Hyères et de Giens à dîner à l’Hôtel des Roches à Aiguebelle, au restaurant de Mathias Dandine. Pour ne pas devoir s’y rendre à trois voitures, j’ai le réflexe écologique du covoiturage, ce qui me pousse à proposer que l’on prenne l’apéritif chez moi. Il faut toujours utiliser les arguments les plus « citoyens » pour faire ce dont on a envie. J’ouvre un Champagne Henriot Cuvée des Enchanteleurs 1995 en magnum qui par cette belle journée d’un été qui commence se boit avec un infini plaisir. Je suggère à mes amis de comparer les formes que prend le champagne tantôt sur la poutargue, tantôt sur des toasts au foie gras, ou bien encore sur du jambon de Parme ou de la rosette de Lyon. Ce qui révèle le mieux l’excellence du champagne, c’est la rosette, qui l’épanouit et l’élargit. La poutargue lui donne une expression plus virile, le rendant plus strict, mais très intéressant. Le foie gras est politiquement correct, sans véritable ajout à la pureté du breuvage. Ce beau champagne est goulu, typé, fort et long. Nous nous rendons à l’hôtel des Roches. La mer est calme et Mathias Dandine a le sourire d’un homme heureux. Nous prenons un nouvel apéritif sur la terrasse. Je choisis un Champagne Philipponnat Clos des Goisses 1999. C’est normalement un des grands champagnes que j’aime, mais ici, il se présente un peu guindé, timide, et le souvenir du Henriot ne l’avantage pas. C’est évidemment un grand champagne de belle personnalité, mais ici peu à son avantage malgré les délicats canapés gourmands préparés par le chef.

Nous passons à table et la grande question qui se pose est la suivante : vais-je choisir les vins en fonction de suggestions de plats du chef, ou fera-t-on l’inverse, le chef s’adaptant à mon choix de vins ? Après un assaut de politesses, il est décidé que je choisisse les vins dans la carte qui m’est tendue par le nouveau sommelier Arnaud, et Matthias créera sur ce choix.

Les vins que je repère dans la carte sont un Domaine d’Ott Clos Mireille 2003 en magnum  et un Château de Pibarnon Bandol 1990 en magnum.

Voici le menu créé pour nous par Matthias Dandine : amuse-bouche gourmand / fin velouté d’asperges vertes et croq’truffe / cocotte de langouste aux haricots rouges, Thermidor et salade d’herbes fraîches / le cabillaud cuit au lait, purée de pommes de terre à l’huile d’olive, truffes d’été du Haut-Var / cochon noir de Bigorre »cul noir », « façon contemporaine » / tarte fine d’abricots et sabayon granité au romarin et émulsion d’abricot. Il y a dans ce menu de petites merveilles.

Arnaud est nouveau et m’a étonné quand il a ouvert les vins seul dans son coin, sans être venu présenter les flacons. Ceci nous aurait évité une situation que je déteste, c’est que le Clos Mireille qui nous fut servi est un  2004, « détail » dont je ne me suis aperçu que lorsque j’ai demandé à photographier les bouteilles. Ce « détail » est à corriger au plus vite. Malgré ce changement non annoncé, le vin est bon. D’une couleur d’un jaune citronné presque vert, d’un nez qui annonce les grillons qui sortent de leurs chrysalides, ce Domaine d’Ott Clos Mireille 2004 en magnum  est chaud en bouche, plein d’aplomb, et malgré sa rusticité par rapport aux blancs que je bois en hiver, je lui trouve beaucoup de talent. Sur le velouté d’asperges, j’ai gardé quelques gouttes de champagne, et sur le « croque-truffe », le blanc est fou de joie comme le chien à qui l’on jette une balle pour jouer. Sur la langouste charnue, dense, le vin s’adapte à merveille. Les haricots rouges qui ont cuit dans la cocotte sont délicieux, et le vin les aime.

Le cabillaud est un plat d’une réelle perfection. On est dans un monde raffiné et Matthias me dira plus tard : « j’aurais pu dire sans vous entendre que c’est ce plat que vous préféreriez ». Ce plat convient au blanc de belle matière, avec un citronné délicat mais aussi des évocations de fruits jaunes charnus. Mais il était imaginable que le Bandol rouge accompagne ce plat.

Le Château de Pibarnon Bandol en magnum 1990 est un vin joyeux, riche, de forte densité qui offre un velouté confortable. Il appellerait une tapenade tant il chante le sud. Sur le cochon, il est à son aise, car le gras de la viande lui convient. Goûteux, mâchu, il réjouit mon âme.

Ce n’est pas un vin de dessert aussi nous restons à l’eau pour des pâtisseries et des gourmandises qui montrent un réel talent du pâtissier, ce qui est à signaler.

Comme je l’ai déjà écrit, Matthias Dandine a atteint un niveau d’une belle sérénité. Sa cuisine est joyeuse, avec une exécution raffinée. Du fait de sa jeunesse, il n’a pas de nécessité immédiate d’ajouter une étoile à celle qu’il a. Les honneurs et les lauriers tomberont tous seuls dans son tablier. Le service est toujours aussi souriant. L’ambiance à notre table était joyeuse. Une lune rousse s’est levée vers 22 heures derrière l’île du Levant, et s’est placée devant notre table, teintant d’argent scintillant l’onde frémissante de l’une des trois nuits les plus courtes de l’année. Nous avons passé une excellente soirée, guidés par le sourire d’un grand chef, talentueux, ouvert et amical.

dîner au restaurant de Mathias Dandine – les photos jeudi, 19 juin 2008

Champagne Philipponnat Clos des Goisses 1999 bu à l’apéritif bu sur la terrasse haute

Nous sommes accueillis dans la salle à manger par un goëland dont les plumes ont pris la couleur de la toile des transats sur la plage de l’hôtel des Roches

les vins du repas, Domaine d’Ott, Clos Mireille blanc 2004 et Château de Pibarnon 1990 bandol rouge

amuse-bouche au toast délicat

la pleine lune se lève. Elle a le bon goût de venir se poser en auréole à la verticale de ma sainteté (ici entourée de deux prêtresses)

petit morceau de homard goûteux

les délices des cocottes lutées

truffe d’été !

 n’est-ce pas de la belle cuisine bourgeoise ?

desserts

dilemme majeur chez Alain Senderens jeudi, 12 juin 2008

Le titre de ce sujet pourrait être : « dilemme majeur chez Alain Senderens ». Je sors d’une réunion, d’humeur guillerette. Je suis seul. Où vais-je déjeuner ? Je pense au restaurant d’Alain Senderens. Je suis accueilli avec un large sourire par le personnel qui me connaît et dans cet espace où toutes les tables sont prises on me donne une table pour six. Le costume est large pour moi, mais j’assumerai. On m’offre une coupe de champagne Pommery 1999 et j’apprécie. Car ce champagne qui ne revendique aucune situation d’exception joue bien sa partition. Il est confortable, sans recherche de chichi. Je commande des asperges et une brandade de morue, et quand je lis la carte des vins, je commande un Chateauneuf-du-Pape Château de Beaucastel Hommage à  Jacques Perrin 1990. Philippe me dit que ça n’ira jamais avec la brandade, et je lui réponds que c’est comme l’existence de Dieu, ça ne se prouve pas. Lorsque le vin arrive, je sens, et c’est l’odeur divine qui me monte aux narines. Je porte le vin à mes lèvres et instantanément des clignotants s’allument. Le vin est amer. Et là, je me mets à penser, alors que toute mon éducation m’a appris que la dernière des choses à faire, c’est de penser.

Il est exclu que je renvoie la bouteille, car je suis venu pour siroter le temps présent. La situation confuse du monsieur qui a refusé une bouteille de grand prix, je n’ai pas envie de la vivre. Alors, je dis que c’est bon.

On m’apporte une langoustine panée à tremper dans une sauce que je trouve délicieuse. Je sens mon vin qui s’évanouit à grande vitesse, car le nez s’affadit et le goût se vinaigre à la rapidité d’un maquillage sous les sunlights.

Les asperges sont délicieuses, croquantes à souhait, et auraient fait vibrer le vin s’il était encore vivant. Je fais goûter le vin à Philippe, ce qui ne peut que l’embarrasser, car un Hommage à Jacques Perrin, même claudiquant, c’est quand même nettement mieux que beaucoup de vins.

La brandade de morue qui est un plat dont je suis un adepte est ici une variation sur la brandade. Elle est plantée de salade fort vinaigrée que je m’empresse d’écarter, car la brandade, ça doit être de la brandade, et l’ail n’a pas la sensualité à laquelle j’aspire. La sauvagerie interlope de ce plat est absente. Et pendant ce temps là, mon vin continue de s’évanouir. Philippe a raison, la brandade n’aime pas le vin. Je voulais laisser vagabonder mon humeur sautillante de plaisir en plaisir, et voilà que je suis dans un abîme de contrariété.

Mon humeur s’en ressent, et j’ai moins de plaisir que d’habitude sur le millefeuille qui est pourtant une institution. Il faudra vite que je revienne en ce lieu que j’adore et que je me repaisse d’un vin qui n’a pas souffert.