Présentation des vins du groupe Vega Sicilia au Cheval Blanc Paris dimanche, 20 novembre 2022

Le lendemain matin du 269ème dîner la société Vins du Monde organise la dégustation annuelle des vins mis sur le marché par le groupe Tempos Vega Sicilia. Cette « Masterclass » se tient à l’hôtel Cheval Blanc Paris et revêt une importance particulière car c’est le quarantième anniversaire du rachat du groupe par la famille de Don Pablo Alvarez qui dirige le groupe.

C’est lui qui va faire l’introduction de cette séance en rappelant la politique de croissance par des rachats successifs de parcelles et de vignobles pour constituer des groupes cohérents.

L’assistance est composée de sommeliers et de cavistes et d’amis du groupe.

Selon la tradition on commence par les vins blancs secs de Hongrie d’Oremus.

Le Oremus Dry Mandolas 2020 est de 100% Furmint. Il titre 13,5°. La couleur est très claire, le nez très pur, salin. La bouche est douce, subtile et le finale est salin. Il est encore vert et il faudra attendre avant de le boire.

Le Oremus Petracs 2019 est lui aussi de 100% Furmint et titre 13,5°. Sa robe est claire, le nez est discret. La bouche est fluide, saline. Le finale est un peu poivré. C’est un vin assez doux qu’il faudra attendre aussi.

Maintenant les vins rouges. Le Macan Classico 2019 est fait de tempranillo et titre 14,5°. La robe est belle et fine, délicate. Le nez est engageant, de vin puissant. La bouche est douce, de tabac et de cassis. Le vin est très agréable à boire même s’il a un peu d’amertume. Je le sens gastronomique.

Le Macan 2018 est aussi de tempranillo et titre 14°. Sa robe est très élégante, un peu violette. Le nez est discret. La bouche est fraîche, charmante. Le vin est agréable et on peut concevoir de le boire dès maintenant. Il a un finale boisé.

Le Pintia 2018 est fait de Tinta de Toro et titre 15°. Il est plus dense avec un nez discret. L’attaque est très fluide, charmante. Ce vin offre beaucoup de plaisir et son finale est très agréable. C’est un beau vin de gastronomie. Il est bien fait.

L’Alion 2019 de la Ribeira del Duero est de cépage Tinto Fino. Il titre 15°. Il a une jolie robe et un nez subtil mais intense. La bouche est fluide, douce. C’est un vin aérien malgré la charge alcoolique. Le finale est moins charmant mais assez gourmand.

Le Vega Sicilia Valbuena 5° 2018 est fait de 96% de Tinto Fino et de 4% de merlot. J’ai enfin l’explication du 5° qui figure dans le nom du vin. Cela signifie tout simplement que le vin est mis sur le marché après cinq ans d’élevage, alors que l’Unico est mis sur le marché généralement après 10 ans. Il titre 14,5°. La robe est belle et le nez discret. La bouche est toute en douceur. Le vin est très agréable et racé. Il est beaucoup plus plaisant car il a un velouté très délicat. C’est un grand vin.

Le Vega Sicilia Unico 2013 est de 97% Tinto Fino et 3% de cabernet-sauvignon. Sa robe diffère très peu des robes des vins précédents. Son nez de velours est un nez que j’adore car j’aime ce vin comme j’aime les vins de la Romanée Conti et leurs nez reconnaissables. L’attaque est très douce et fluide, mais il faudra attendre ce vin même s’il est très séduisant. C’est un vin noble.

Le Valbuena est plus dur que le Unico. L’Unico a un charme extrême et le Valbuena a une grande personnalité, plus virile que l’Unico.

Le Vega Sicilia Unico Reserva Especial en vente en 2023 est fait de 2009, 2011 et 2012. Il titre 14°. Son nez est très expressif et fort car il a des vins plus anciens. Il y a une fluidité magique dans l’attaque. Le finale est un peu râpeux alors que le milieu de bouche est tout en douceur. Le vin est très doux.

Les deux Unico sont superbes, des vins de grands plaisirs.

Selon la tradition on revient en Hongrie avec des vins doux. Le Oremus Late Harvest 2021 est fait de plusieurs cépages et titre 11,5°. Le nez est de litchi et la bouche de litchi aussi. Il est agréable et son fruit est mentholé. On dirait un bonbon à la menthe. Je le vois bien avec un brochet à la crème. C’est un vin de belle fraîcheur.

Le Oremus, Tokaj Aszu 5 Puttonyos 2016 a un nez tout en velours. Il titre 11°. La bouche est fraîche, très glace vanille. Le finale est de belle acidité et salin. C’est un vin très agréable sans aucune lourdeur. Ce vin est de belle élégance.

La présentation a été faite par Gonzalo Iturriaga de Juan qui dirige les vignes et la vinification de tous ces domaines. Il est passionnant à écouter car il montre à quel point la réussite d’un vin dépend de myriades de décisions. C’est un régal de l’entendre. Il y a dans la salle des sommeliers célèbres des grands restaurants parisiens qui ont posé des questions pertinentes donnant lieu à de belles discussions dans une ambiance amicale.

Cette dégustation est enrichissante mais je prie le ciel que ces vins soient gardés longtemps en cave pour n’être bus que lorsqu’ils expriment toutes leurs qualités. J’ai discuté avec des gens charmants du domaine et de la sommellerie, ce qui a rendu cette matinée encore plus riche.

269th dinner at the Pages restaurant samedi, 19 novembre 2022

The 269th dinner is held at the Pages restaurant. I arrive around 4 p.m. and begin to open the wines. The 1959 Chablis Regnard has an awful corky taste that seems so strong to me that I highly doubt it will come back to life. Conversely, Beaune du Château Bouchard without year that I imagine from the 50s has an exciting scent. I brought a bottle of Château d’Arlay Côtes du Jura white 1973 which will complement the Chablis.

The Angélus Saint-Emilion 1950 emits an unpleasant camphor smell. What will become of the wine, it is difficult to say. The Montrose 1928, on the contrary, has a very engaging sweetness. We should be in front of a great wine. La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1943 is promising. Phew, because it is this wine that should be the crown of the evening.

Château Rayas 1976 and Hermitage Jean Louis Chave 1962 are so solid that there is no doubt. Château Chalon Clément 1906 in an old blown and opaque bottle has a discreet fragrance, which is the opposite of Yquem 1949, which is an olfactory bomb. We can expect a brilliant wine.

I decide to open the champagnes without waiting, which I don’t usually do. The Salon 2006 cork claps in my hand with a loud clang and the scent promises a champagne of great power. The cap of the Veuve Clicquot 1949 magnum comes without any pschitt and the perfume of the wine pleases me enormously. The most beautiful perfumes seem to me to be those of Yquem, Veuve Clicquot and Montrose.

The opening operation ended at 5:30 p.m. and uncertainties remain. The Chablis scares me very much and the Angélus is a question mark. I added two wines to the announced program, the Salon champagne and the Château d’Arlay. So there is no danger.

The staff of the Pages restaurant have dinner at 6 p.m. at Brasserie 116, which is just next door and is owned by the owners of Pages. According to tradition, I go there to drink a beer, which allows me to wait for the arrival of the guests.

We are eleven guests, including four from Spain, two from England, two from Switzerland, one American, one French and me. The four women are all from different countries. The menu was composed with Ken, the chef and with Pierre-Alexandre who combines the functions of room manager and sommelier. It is prepared as follows: appetizers: butternut velouté with 4 spices, mackerel and lemon crud, parmesan shortbread with celeriac / Jerusalem artichoke with scallop tartare / lobster and its yellow wine and Comté sauce / red mullet and its red wine sauce / duck and red wine and blood sauce, ravioli and roasted turnips / hare, celery puree and potato puree / wagyu beef, potato waffle, beef jus / Comté cheese 36 months / tart citrus / financial.

The weakness of the Chablis made me add the 1973 Jura wine, which I will therefore put at the top of the meal, which leads me to ask Ken to provide a plate of mollusk shell for this wine.

We drink the Champagne Salon 2006 standing up, which is glorious. Its perfume is engaging as it is generous, and in mouth, the Salon is full, broad, conquering. This young champagne is absolutely successful.

We sit down to eat and Pierre-Alexandre serves me a glass of Veuve Clicquot Magnum 1949 Champagne. Amazement! The color of champagne is that of a rain-soaked cloud. It is an intense gray and is not engaging. If such a champagne were ordered in a restaurant, the immediate reflex would be to refuse it. Everyone looks for my reaction and the surprise is immense. The nose is pleasant and soft and the champagne has a crazy charm. We even smell a little sparkle. It is particularly pleasant on appetizers which it accompanies with great subtlety. We are all under the spell of this champagne which will receive a vote of second, which is impressive. It is round and offers joyful complexities. It is a great champagne and I am happy that my guests were able to overcome the awful color of this champagne.

I had in mind cockles that would have been cooked to bring out a slightly sweet side for the Château d’Arlay Côtes du Jura white 1973, but in fact the cockles are too iodized for this slightly fragile Jura wine to respond to them. The wine is pleasant but lacks a bit of breadth.

I insisted so much on the fact that the Chablis 1er Cru Fourchaume A. Regnard & Fils 1959 would be corked that everyone reacted positively to this wine, which has lost at least 95% of the corky taste it had when it was opened. . A guest will follow it during the meal and will become passionate about it because indeed at some point, all traces of cork will have disappeared, and the wine will even collect votes at the end of the meal. I wouldn’t have imagined it.

The Beaune du Château Bouchard Père & Fils white around 1950 is a wine that I love. Most often it is not vintage and is for great years like 1929 with unforgettable memories. This white wine is joyful, broad, engaging, ready for all culinary alliances. It shines on mackerel as on scallops.

L’Angélus Saint-Emilion 1950 failed to come back to life. A nasty smell of camphor remains. We recognize in the background the taste of a noble Saint-Émilion, but the pleasure is not there. It is therefore the Château Montrose L. Charmolüe 1928 which will accompany the delicious lobster. This wine is great, magnified by a vintage of anthology. Around me the guests are astonished that a 94-year-old wine can have such youth. This is the magic of wine. It has a nice richness, a solid chew. It is a doctrinal wine that knows how to give pleasure.

When I am served La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1943 I see with horror that they are serving red mullet at the same time. In fact Pierre-Alexandre was disturbed by the addition of a dish and a wine and served the wines too quickly without respecting the planned program. I have decided to accept the situation since the rest of the meal will be out of step. You might as well live it with a positive attitude, which each guest has understood and accepted. At the end of the meal, I suggested that our cosmopolitan group get back together in a few months, for a similar dinner with « real » food and wine pairings.

That being said, we were able to enjoy all the following wines without ever suffering in their tasting.

So they serve me La Tâche and my heart sinks. The attack of the wine is so fresh that I am in heaven. It is a marvelous wine, balanced, powerful but subtle, with an incredible charm. This is the eighth Romanée Conti wine that I drink from 1943. All have been perfect and this one is magical. That is charm in my glass. You have to eat the red mullet by calming your mouth and you get there. The delicious duck is more conducive to Burgundy wine.

By putting together the two Rhône wines we will find the coherence of the agreements, with the magical hare à la Royale and the melting and delicious Wagyu. Château Rayas Châteauneuf-du-Pape 1976 surprises me because it has accents of Algerian wines, with coffee and tobacco. It amuses me to think that a Rhône wine could have been hermitaged with a wine from Algeria, but of course this is not the case, because this wine from a year of drought has suffered the consequences. It is a very good wine, adored by many around the table, but it is not one of the greatest Rayas.

Next to him, I have the eyes of Chimène for the Hermitage Jean Louis Chave 1962. What a great, subtle and delicate wine. It has the same extreme freshness in the attack that I felt with La Tâche. This wine is happiness and with Japanese meat, it is a rare pleasure.

The Comté is actually 42 months old, and I find it delicious because its age is not too marked. Château Chalon Clément Jura 1906 has a very pretty color. He is dashing but maybe not enough for his 116 years. I was expecting a slightly more concentrated wine. He lost strength.

The new pastry chef at the Pages restaurant has created a dessert for Château d’Yquem 1949 which is a marvel of taste and relevance for wine. Cheer. Yquem is simply glorious and it shows once again that when Yquem is great, it is perfect. Its fragrance is brilliant and its inextinguishable taste is majestic.

This dinner was anything but ordinary. The atmosphere was one of absolute joy. We voted. Five wines were ranked first. La Tâche 1943 received seven first votes and four other wines had one first vote: Veuve Clicquot 1949, Montrose 1928, Hermitage 1962 and Yquem 1949. The only wines without votes are the Angélus and the two wines of the Jura. Nine wines therefore had votes, each voting for their five favourites, which shows a good sample of qualities.

The consensus vote would be: 1 – La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1943, 2 – Magnum Champagne Veuve Clicquot 1949, 3 – Château d’Yquem 1949, 4 – Hermitage Jean Louis Chave 1962, 5 – Château Montrose L. Charmolüe 1928, 6 – Château Rayas Châteauneuf-du-Pape 1976.

My vote is: 1 – La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1943, 2 – Magnum Champagne Veuve Clicquot 1949, 3 – Hermitage Jean Louis Chave 1962, 4 – Château d’Yquem 1949, 5 – Beaune from Château Bouchard Père & Fils circa 1950.

What about this meal? First of all that it is probably the most cosmopolitan of my dinners with five countries represented. This is due to the contacts that have been created with my subscribers on Instagram, which today exceed 45,000. I did not imagine exchanges of such kindness with very competent amateurs from all countries.

The second point is that the catering industry in Paris is facing a great difficulty in recruiting. Many restaurants, including Pages, are suffering from this condition. Pierre-Alexandre is obliged to be both director and sommelier. When I asked him if he had printed a menu for this meal, with the list of wines consistent with the list of dishes, he had not had time to do so and that certainly played into the inadequacy of food and wine services, but I am also responsible for having added a dish and a wine.

The third point is the extreme understanding and open-mindedness of my guests. Ranking the Veuve Clicquot second of the votes is wonderful. And accepting with a good heart the approximations of the services of the dishes, it is remarkable. And the unexpected did not take away the pleasure of this meal.

It will be a pleasure to meet again with such charming guests.

269ème dîner au restaurant Pages samedi, 19 novembre 2022

Le 269ème dîner se tient au restaurant Pages. J’arrive vers 16 heures et je commence à ouvrir les vins. Le Chablis Regnard 1959 a un affreux goût de bouchon qui me semble si puissant que je doute fortement de son retour à la vie. A l’inverse, le Beaune du Château Bouchard sans année que j’imagine des années 50 a un parfum enthousiasmant. J’ai apporté une bouteille de Château d’Arlay Côtes du Jura blanc 1973 qui viendra en renfort du chablis.

L’Angélus Saint-Emilion 1950 émet une odeur camphrée désagréable. Que deviendra le vin, il est difficile de le dire. Le Montrose 1928 au contraire est d’une douceur très engageante. On devrait se trouver en face d’un grand vin. La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1943 est prometteuse. Ouf, car c’est ce vin qui devrait être le phare de la soirée.

Le Château Rayas 1976 et l’Hermitage Jean Louis Chave 1962 sont tellement solides qu’il n’y a aucun doute. Le Château Chalon Clément 1906 dans une bouteille ancienne soufflée et opaque a un parfum discret, ce qui est l’inverse de l’Yquem 1949 qui est une bombe olfactive. On peut s’attendre à un vin brillant.

Je décide d’ouvrir sans attendre les champagnes ce que je ne fais pas habituellement. Le bouchon du Salon 2006 claque dans ma main avec un bruit fort et le parfum promet un champagne de grande puissance. Le bouchon du magnum de Veuve Clicquot 1949 vient sans aucun pschitt et le parfum du vin me plait énormément. Les plus beaux parfums me semblent être ceux de l’Yquem, du Veuve Clicquot et du Montrose.

L’opération d’ouverture est finie à 17h30 et des incertitudes subsistent. Le Chablis me fait très peur et l’Angélus est un point d’interrogation. J’ai ajouté deux vins par rapport au programme annoncé, le champagne Salon et le Château d’Arlay. Il n’y a donc aucun péril.

Le personnel du restaurant Pages dîne à 18 heures à la brasserie 116 qui est juste voisin et appartient aux propriétaires de Pages. Selon la tradition j’y vais pour boire une bière, ce qui me permet d’attendre l’arrivée des convives.

Nous sommes onze convives, dont quatre venant d’Espagne, deux d’Angleterre, deux de Suisse, une américaine, un français et moi. Les quatre femmes sont toutes de pays différents. Le menu a été composé avec Ken, le chef et avec Pierre-Alexandre qui cumule les fonctions de directeur de salle et de sommelier. Il est ainsi élaboré : amuse-bouches : velouté de butternut aux 4 épices, maquereau et crème de citron, sablé de parmesan au céleri rave / topinambour au tartare de Saint-Jacques / homard et sa sauce au vin jaune et Comté / rouget et sa sauce au vin rouge / canard et sauce au vin rouge et sang, raviole et navets rôtis / lièvre, purée de céleri et purée de pomme de terre / bœuf wagyu, gaufre de pomme de terre, jus de bœuf / Comté 36 mois / tarte aux agrumes / financier.

La faiblesse du chablis m’a fait ajouter le vin du Jura de 1973 que je mettrai donc en tête de repas ce qui me pousse à demander à Ken de prévoir une assiette de coques pour ce vin.

Nous buvons debout le Champagne Salon 2006 qui est glorieux. Son parfum est engageant tant il est généreux, et en bouche le Salon est plein, large, conquérant. Ce jeune champagne est absolument réussi.

Nous passons à table et Pierre-Alexandre me sert un verre de Champagne Veuve Clicquot Magnum 1949. Stupeur ! La couleur du champagne est celle d’un nuage gorgé de pluie. Elle est d’un gris intense et n’est pas engageante. Si un tel champagne était commandé dans un restaurant, le réflexe immédiat serait de le refuser. Tout le monde me regarde le goûter et la surprise est immense. Le nez est agréable et doux et le champagne a un charme fou. On sent même un peu de pétillant. Il est particulièrement agréable sur les amuse-bouches qu’il accompagne avec beaucoup de subtilité. Nous sommes tous sous le charme de ce champagne qui recevra un vote de second, ce qui est impressionnant. Il est rond et offre des complexités joyeuses. C’est un grand champagne et je suis heureux que mes convives aient su surmonter l’affreuse couleur de ce champagne.

J’avais en tête des coques qui auraient été cuites pour faire apparaître un côté légèrement sucré pour le Château d’Arlay Côtes du Jura blanc 1973,
mais en fait les coques sont trop iodées pour ce vin du Jura un peu frêle pour leur répondre. Le vin est agréable mais manque un peu de largeur.

J’ai tellement insisté sur le fait que le Chablis 1er Cru Fourchaume A. Regnard & Fils 1959 serait bouchonné que tout le monde réagit positivement à ce vin qui a perdu au moins 95% du goût de bouchon qu’il avait à l’ouverture. Un convive va le suivre pendant le repas et en deviendra passionné car effectivement à un moment, toute trace de bouchon aura disparu, et le vin recueillera même des votes en fin de repas. Je ne l’aurais pas imaginé.

Le Beaune du Château Bouchard Père & Fils blanc vers 1950 est un vin que j’adore. Le plus souvent il n’est pas millésimé et l’est pour de grandes années comme 1929 au souvenir inoubliable. Ce vin blanc est joyeux, large, engageant, prêt à tous les alliances culinaires. Il brille sur le maquereau comme sur les coquilles Saint-Jacques.

L’Angélus Saint-Emilion 1950 n’a pas réussi son retour à la vie. Une vilaine odeur de camphre subsiste. On reconnaît en filigrane le goût d’un noble saint-émilion, mais le plaisir n’est pas là. C’est donc le Château Montrose L. Charmolüe 1928 qui va accompagner le délicieux homard. Ce vin est grand, magnifié par un millésime d’anthologie. Le vois autour de moi les convives étonnés qu’un vin de 94 ans puisse avoir une telle jeunesse. C’est la magie du vin. Il a une belle richesse, une mâche solide. C’est un vin doctrinal qui sait donner du plaisir.

Lorsque l’on me sert La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1943 je vois avec effroi que l’on sert en même temps les rougets. En fait Pierre-Alexandre a été troublé par l’ajoute d’un plat et d’un vin et a servi les vins trop vite sans respecter le programme prévu. J’ai pris le parti d’accepter la situation puisque toute la suite du repas va se faire en décalage. Autant la vivre avec une attitude positive, ce que chaque convive a compris et admis. J’ai suggéré en fin de repas, que notre groupe cosmopolite se reforme dans quelques mois, pour un dîner similaire avec de « vrais » accords mets et vins.

Ceci étant dit, nous avons pu profiter de tous les vins qui suivent sans jamais souffrir dans leur dégustation.

On me sert donc La Tâche et mon cœur chavire. L’attaque du vin est d’une telle fraîcheur que je suis aux anges. C’est un vin merveilleux, équilibré, puissant mais subtil, d’un charme inouï. C’est le huitième vin de la Romanée Conti que je bois de 1943. Tous ont été parfaits et celui-ci est magique. C’est du charme dans mon verre. Il faut manger le rouget en calmant sa bouche et on y arrive. Le délicieux canard est plus propice au vin de Bourgogne.

En mettant ensemble les deux vins du Rhône on va retrouver la cohérence des accords, avec le magique lièvre à la Royale et le Wagyu fondant et délicieux. Le Château Rayas Châteauneuf-du-Pape 1976 m’étonne car il a des accents de vins algériens, avec le café et le tabac. Ça m’amuse de penser qu’un vin du Rhône ait pu être hermitagé avec un vin d’Algérie, mais bien sûr ce n’est pas le cas, car ce vin d’une année de sécheresse en a accusé les conséquences. C’est un très bon vin, adoré par plusieurs autour de la table, mais ce n’est pas l’un des plus grands Rayas.

A côté de lui, j’ai les yeux de Chimène pour l’Hermitage Jean Louis Chave 1962. Quel grand vin subtil et délicat. Il a la même fraîcheur extrême dans l’attaque que celle que j’ai ressentie avec La Tâche. Ce vin est du bonheur et avec la viande japonaise, c’est un plaisir rare.

Le Comté est en fait de 42 mois, et je le trouve délicieux car son âge n’est pas trop marqué. Le Château Chalon Clément Jura 1906 a une très jolie couleur. Il est fringant mais peut-être pas assez pour ses 116 ans. Je m’attendais à un vin un peu plus concentré. Il a perdu de la vigueur.

Le nouveau pâtissier du restaurant Pages a composé un dessert pour le Château d’Yquem 1949 qui est une merveille de goût et de pertinence pour le vin. Bravo. L’Yquem est tout simplement glorieux et il montre une fois de plus que lorsque Yquem est grand, il est parfait. Son parfum est brillantissime et son goût inextinguible est majestueux.

Ce dîner a été tout sauf banal. L’ambiance était d’une joie absolue. Nous avons voté. Cinq vins ont été classés premiers. La Tâche 1943 a reçu sept votes de premier et quatre autres vins ont eu un vote de premier : Veuve Clicquot 1949, Montrose 1928, l’Hermitage 1962 et l’Yquem 1949. Les seuls vins sans votes sont l’Angélus et les deux vins du Jura. Neuf vins ont donc eu des votes, chacun votant pour ses cinq favoris, ce qui montre un bel échantillon de qualités.

Le vote du consensus serait : 1 – La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1943, 2 – Magnum Champagne Veuve Clicquot 1949, 3 – Château d’Yquem 1949, 4 – Hermitage Jean Louis Chave 1962, 5 – Château Montrose L. Charmolüe 1928, 6 – Château Rayas Châteauneuf-du-Pape 1976.

Mon vote est : 1 – La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1943, 2 – Magnum Champagne Veuve Clicquot 1949, 3 – Hermitage Jean Louis Chave 1962, 4 – Château d’Yquem 1949, 5 – Beaune du Château Bouchard Père & Fils vers 1950.

Que dire de ce repas ? Tout d’abord qu’il est probablement le plus cosmopolite de mes dîners avec cinq pays représentés. Cela est dû aux contacts qui se sont créés avec mes abonnés sur Instagram, qui dépassent aujourd’hui les 45.000. Je n’imaginais pas des échanges d’une telle gentillesse avec des amateurs très pointus de tous pays.

Le second point est que la restauration à Paris fait face à une grande difficulté de recrutement. Beaucoup de restaurants, dont Pages, souffrent ce cet état. Pierre-Alexandre est obligé d’être à la fois directeur et sommelier. Quand je lui ai demandé s’il avait imprimé un menu pour ce repas, avec la liste des vins en cohérence avec la liste des plats, il n’avait pas eu le temps de le faire et cela a joué certainement dans l’inadéquation des services des mets et des vins, mais je suis aussi responsable en ayant ajouté un plat et un vin.

Le troisième point est l’extrême compréhension et ouverture d’esprit de mes convives. Classer le Veuve Clicquot à la si triste couleur deuxième des votes, c’est merveilleux. Et accepter de bon cœur les approximations des services des plats, c’est remarquable. Et l’imprévu n’a enlevé en rien le plaisir de ce repas.

Champagne Salon 2006

Magnum Champagne Veuve Clicquot 1949

Château d’Arlay Côtes du Jura white 1973

le bouchon du vin d’Arlay est en bas de la photo. 

Chablis 1er Cru Fourchaume A. Regnard & Fils 1959

Beaune du Château Bouchard blanc # 1950

Château L’Angélus Saint-Emilion 1950

Château Montrose L. Charmolüe 1928

La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1943

Château Rayas Châteauneuf-du-Pape 1976

Hermitage Jean Louis Chave 1962

Château Chalon Clément Jura 1906

Château d’Yquem 1949

les bouchons

le repas

la table en fin de repas

le classement des vins en fin de repas

Déjeuner au Yacht Club de France mercredi, 16 novembre 2022

Notre déjeuner de conscrits se tient dans la bibliothèque du siège du Yacht Club de France. Nous sommes six. Nous trinquons avec un Champagne Charles Collin blanc de blancs 2010 que je trouve un peu amer mais qui va se civiliser sur une confortable poutargue. Le directeur Thierry Le Luc veut tellement nous faire plaisir que les amuse-bouches sont gargantuesques. Il y a des coquilles Saint-Jacques présentées dans des rondelles d’andouille de Guémené, de délicieuses croquettes de crevettes que l’on trempe dans une sauce crémée, des toasts au ris de veau et d’autres succulentes préparations.

Le Champagne Charles Heidsieck Brut Réserve est fort agréable et vif. Il est bien construit et opulent. Il accompagne les amuse-bouches de belle façon.

Le menu conçu par Thierry Le Luc et par le chef de cuisine Benoît Fleury est : assiette de fruits de mer / rôti de lotte comme une viande, sauce béarnaise, pommes gaufrettes et légumes de saison / fromages d’Éric Lefebvre MOF / Paris Brest à la pistache, crème vanillée.

Nous passons à table où nous attendent les assiettes de fruits de mer impressionnantes. Les huîtres sont délicieuses et j’aurais aimé garder un peu de champagne pour les accompagner, car le Chablis Vieilles Vignes Jean Durup Père & Fils 2020 est trop jeune et trop faible. Les bulots, les grosses crevettes et les belles langoustines sont gourmandes.

Le Meursault Vigne de 1945 Buissson-Charles 2015 a une personnalité vivante, active, qui réveille nos papilles après la paresse du Chablis. Le rôti de lotte est très bien cuit.

Pour le fromage nous buvons un Château Smith Haut-Lafitte 1998 absolument convaincant, d’un équilibre parfait. Un grand vin, le vainqueur de ce repas, qui montre à quel point l’âge donne de la cohérence et assemble les complexités.

Le Champagne Charles Collin rosé brut est un aimable compagnon du dessert meringué. Un Cognac Godet VSOP titrant 40° met un point final à ce repas préparé avec soin et attention par l’équipe du Yacht Club, mais nos conversations animées continuent car nous sommes heureux d’être ensemble.

Compliments d’Aubert de Villaine lundi, 14 novembre 2022

(in English, see below)

Il convient de garder la tête froide, mais quand même…

Aubert de Villaine, gérant du domaine de la Romanée Conti m’avait adressé des lettres de compliments, lors de la parution de mon livre sur le vin, lors de mon 500ème bulletin et en d’autres occasions.

Ces lettres privées restent privées.

Mais là, cette vidéo très courte (1’22 ») peut être vue.

Je ne suis pas dupe, car ce compliment n’est pas justifié, même si Aubert de Villaine est tout sauf flatteur.

Mais ça fait plaisir quand même.

Il faut mettre le son très fort pour bien entendre.

https://youtu.be/TWDuxFvDH3g

Bon, il faut garder la tête froide, mais c’est quand même un cadeau inouï qui m’est fait.

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Les propos en français (AdV = Aubert de Villaine, FA = François Audouze :

AdV : Les Godichots 29, oui, c’était mon grand-père, oui…. les vins comme ça, il n’y a pas besoin de….il y a des gens qui essaient de mettre des mots et de faire de la poésie dessus, mais la poésie sur le vin, c’est toujours très mauvais. Le vin, c’est la poésie par soi-même.

FA : vous avez remarqué que dans mes écrits, je deviens de plus en plus synthétique.

AdV : Vos écrits sont… personne n’écrit sur le vin mieux que vous.

FA : ah, c’est gentil

AdV : c’est vrai, c’est vrai, je veux dire, au niveau du style, du choix des mots, etc, personne ne le fait mieux que vous. Non, c’est vrai, tout le monde a à prendre des leçons là-dessus. Je me régale à lire vos commentaires.

FA : c’est gentil. De plus en plus je deviens synthétique. C’est l’émotion pure qui doit ressortir. Qu’est-ce qu’on s’en fiche qu’il y ait de la banane, de la cerise ou du kumquat. Aucun intérêt.

AdV et FA : ce qui compte, c’est l’émotion…

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The dialogue translated in English (AdV = Aubert de Villaine, FA = François Audouze)

AdV: Les Godichots 29, yes, it was my grandfather, yes… wines like that, there is no need for… there are people who try to put words and to write poetry about it, but poetry about wine is always very bad. Wine is poetry by itself.

FA: You have noticed that in my writings, I am becoming more and more synthetic.

AdV: Your writings are… no one writes about wine better than you.

FA: ah, that’s kind

AdV: It’s true, it’s true, I mean, in terms of style, choice of words, etc., nobody does it better than you. No, it’s true, everyone has to take lessons on this. I enjoy reading your comments.

FA: That’s kind. More and more I become synthetic. It’s the pure emotion that must come out. Who cares if there is banana, cherry or kumquat. No interest.

AdV and FA: what matters is the emotion…

Conférence dégustation avec « le cercle du goût » dimanche, 6 novembre 2022

Depuis quelques années, je réserve des places aux séances de l’académie des vins anciens à des élèves de grandes écoles comme HEC ou d’autres écoles de commerce. C’est pour beaucoup une occasion d’entrer dans le monde des vins anciens pour un budget sans équivalent. Des élèves ayant participé à des séances m’ont proposé de faire une conférence devant le groupe qu’ils ont constitué entre élèves de plusieurs écoles : « le cercle du goût ».

Je leur propose une dégustation de vins permettant de prendre conscience de l’évolution du goût avec l’âge. Ils financent les huit bouteilles que je leur propose. Dans un immeuble qui abrite de nombreuses organisations, trente élèves de plusieurs horizons mais tous intéressés par le monde du vin écoutent ma vision du monde du vin et surtout de celui des vins anciens. Nous dégustons ensuite quatre vins différents.

Le premier groupe compte un Château de Chantegrive Cérons 1995 et un Cérons doux Cru Saint Marc A. Claverie 1943. Les couleurs sont très différentes, le jeune est d’un or clair et le plus ancien est d’un ambre prononcé que le verre de la bouteille rend presque gris. Les deux vins ont des parfums quasiment identiques.

Le Cérons 1995 a un goût très doucereux, solide et bien construit. Le Cérons 1943 est presque sec tant il a mangé une partie de son sucre. Au premier abord, on trouverait le plus jeune plus plaisant. Mais j’avais demandé à Stanislas, l’un des organisateurs, d’acheter du Stilton. Et sur le fromage, c’est le plus ancien qui est le plus enthousiasmant, cohérent, superbe. Les élèves se rendent compte que la complexité du 1943 est plus expressive.

La deuxième série comporte un Château Lafaurie-Peyraguey 1996 et un Château Lafaurie-Peyraguey 1964. Les couleurs ont des différences très prononcées, le plus jeune d’un or clair comme le Cérons et le plus ancien d’un or plus ensoleillé que le Cérons 1943. Fort curieusement, les parfums des deux sauternes sont moins épanouis que ceux des deux Premières Côtes de Bordeaux.

C’est en bouche que tout se joue, car Lafaurie-Peyraguey fait partie des sauternes les plus puissants. Les deux sont conquérants, et il est clair que l’on peut aimer les deux, l’un d’une magnifique jeunesse et l’autre d’une belle sérénité. Et l’on voit que le plus vieux est plus cohérent et plus intégré.

Des gâteaux secs et des financiers accompagnent la dégustation. Chacun s’imprègne des différences que donne l’âge et comprend que la complexité et l’accomplissement est du côté des anciens, mais je constate avec plaisir qu’on peut aimer les deux, tant les jeunes vins doux ont de charme.

On me pose mille questions auxquelles je réponds. Pour beaucoup le monde des vins anciens était inconnu. Je crois leur avoir donné envie de l’explorer. Dans une ambiance extrêmement sympathique, nous avons passé une soirée très sympathique, avec, je l’espère, de nouveaux horizons.

Règles pour la 37ème séance de l’académie des vins anciens le 1er décembre 2022 dimanche, 6 novembre 2022

Règles pour la 37ème séance de l’académie des vins anciens le 1er décembre 2022

Pour participer à une séance il faut suivre le cheminement habituel :

  • Si l’on vient sans bouteille de vin, respecter les dates de paiement.
  • Si l’on veut venir avec un vin, proposer un vin ancien et fournir tous éléments sur le vin, dont le niveau dans la bouteille (chaque photo ne devra pas dépasser 500 Ko et devra être lisible)
  • Obtenir mon agrément pour la ou les bouteilles proposées
  • Respecter les critères d’âge :
  • Champagnes d’apéritif : pas de règles. Seront des cadeaux des académiciens qui veulent en apporter, au-delà de leur apport
  • Champagnes : avant 1997
  • Vins blancs : avant 1991
  • Vins rouges et liquoreux : avant 1972

Dates à respecter

  • Livrer les vins à partir du 17 octobre et avant le 11 novembre
    selon le processus décrit ici :
  • soit livrer sa bouteille au 10 place des Vosges (sonner et demander au gardien de prendre possession des vins, qu’il gardera pour moi. Son numéro : 06.05.76.24.83)
  • soit expédier sa bouteille à l’adresse : François Audouze Société ACIPAR, 44 rue André Sakharov 93140 BONDY.
  • Payer sa participation dans les délais prévus (avant le 1er novembre)
  • Chèque à l’ordre de « François Audouze AVA » à adresser à François Audouze société ACIPAR 44 rue Andrei Sakharov 93140 BONDY, qui est de : 170 € si on apporte un vin agréé ou 270 € si on vient sans vin.
  • Ou bien avant le 1er novembre pour le paiement à RIB FRANCOIS AUDOUZE AVA : FR7630003030000005024474342

– Le lieu de la réunion est : RESTAURANT MACEO 15 r Petits Champs 75001 PARIS

– Heure de la réunion : 1er décembre à 19h et fin impérative 0h00.

Recommandations supplémentaires :

– ne pas mettre de chèque dans le colis qui comporte votre vin. Les chèques doivent être envoyés à part.

– ne pas coller quoi que ce soit sur la bouteille. Tout ce qui est collé est difficile à enlever.

  • Nous étions 40 à la dernière réunion ce qui est trop pour le local. Le restaurant me demande de limiter à 36 personnes. D’où l’intérêt de s’inscrire vite.

Remarque générale importante :

L’expérience des 36 séances précédentes (sauf la 33ème, parfaite) est que je suis obligé de gérer beaucoup trop de cas particuliers au dernier moment. On va essayer de ne pas subir les impondérables.

Mettre ma secrétaire en copie de tous vos mails, à winedinners.paris@gmail.com

Dîner au restaurant du Plaza Athénée vendredi, 4 novembre 2022

Nous sommes invités ma femme et moi par des amis. Ils célèbrent l’anniversaire de Valérie avec nous au restaurant du Plaza Athénée. Depuis la fin de la gestion par Alain Ducasse, la grande salle a été rénovée. C’est parfaitement réussi. Il y a un petit côté Sissi Impératrice avec des ors partout, mais le résultat est très beau.

Le nouveau chef Jean Imbert avait été accueilli en ce lieu avec quelques tempêtes journalistiques et des avis diamétralement opposés. C’était l’occasion pour nous de voir ce que nous en penserions.

Le directeur des lieux ainsi que le sommelier sont ceux qui officient en ce lieu depuis des lustres. Ce sont de grands professionnels qui dirigent les serveurs, tous compétents et attentifs.

Valérie veut choisir un champagne dans une carte de champagnes particulièrement courte puisque les champagnes connus et célébrés sont inabordables. Par exemple un Dom Pérignon de la décennie 90 est proposé plus de vingt fois plus cher que celui que j’ai acheté.

Nous choisissons un champagne qui fait partie des champagnes proposés au verre : Champagne Pierre Péters Réserve Oubliée sans année. Il est particulièrement agréable, vif blanc de blancs fait à partir de vins de réserve, ce qui fait qu’il y a une proportion de vins de plus de vingt ans qui lui donnent une subtilité appréciable.

Les plats sont décrits avec pertinence par ceux qui nous les expliquent. Les choix sont cornéliens. On est dans la cuisine historique et gourmande. Le menu que j’ai choisi : amuse-bouche / huître au gingembre / la brioche Marie-Antoinette au caviar / surprise du chef / le Pithiviers de lièvre à la Royale / le grand dessert (qui inclut tous les desserts dont omelette norvégienne, la glace nougat et d’autres gourmandises).

Choisir des vins dans la carte des vins est un slalom pour éviter les récifs de prix impensables. Jean-Marc et Valérie choisiront un vin blanc abordable suivi d’un rouge plus ambitieux, exactement comme j’avais fait au Pavillon Ledoyen récemment.

Le Vino di Gio Clos Saint-Vincent vin de Bellet 2013 est fait de 100% rolle (vermentino). Le nez est vif, l’acidité est bien dosée et le vin d’un fruit discret se comporte très bien avec la merveilleuse entrée. La cuisson de la brioche est divine. Je suis aux anges, car ce plat est réussi. Allons-nous nous ranger dans le camp des pro-Imbert ? Ça en prend le chemin.

Le Pithiviers de lièvre à la Royale est très bien exécuté, avec une belle virilité des saveurs, mais après la première brioche, la deuxième brioche est trop copieuse pour moi. Je me serais contenté du très beau lièvre seul.

J’aurais volontiers envisagé une Turque de Guigal sur le lièvre mais pour des raisons tarifaires, la Turque bénéficiant d’une aura très supérieure, mes amis ont choisi une Côte Rôtie La Landonne Guigal 1994. Et ce choix se révèle judicieux car la douceur de cette Landonne est exactement ce qu’il faut pour calmer les ardeurs du lièvre et cela fonctionne délicieusement, cette Landonne se montrant d’un calme qui lui va bien.

Jean-Marc ayant choisi une blanquette de veau a choisi pour lui Les Granits Saint-Joseph M. Chapoutier 2017. Il l’a fini sur le fromage.

Nous avons pris, sauf ma femme, le dessert qui combine les cinq desserts. Copieux est un mot trop faible pour décrire cette débauche de saveurs inouïes qui rappellent tant de souvenirs heureux comme l’omelette norvégienne que je n’ai pas mangée depuis de nombreuses décennies.

Le chef sommelier nous a offert, à l’aveugle, le Cyprès de Climens Barsac 2016 qui est un sauternes assez sec, ce qui lui va bien, à la belle personnalité et aux tonalités de noix, de noisettes et amandes. Une très pertinente suggestion de ce grand professionnel de la sommellerie.

Disons-le clairement : nous nous sommes régalés.

Dîner au restaurant L’Écu de France samedi, 29 octobre 2022

Il est très rare que je dîne seul avec mon fils au restaurant. Ma femme est dans le sud. Nous nous rendons au restaurant L’Écu de France, lieu qui a accueilli beaucoup de réunions familiales dont mon fils a le souvenir. Monsieur Brousse propriétaire des lieux qu’il gère avec sa femme et son fils Hervé, me dit qu’il a trouvé par hasard en cave un Chambolle-Musigny Roumier 2011 qu’il n’avait jamais commandé et a sans doute pris la place d’un 2012. Pourquoi ne pas prendre ce vin ? Pour le blanc, ce sera un Hermitage Chave blanc 2012.

Nous bâtissons le menu pour ces deux vins, en choisissant : ravioles d’escargots et champignons, échalions au vin rouge, persillade / volaille fermière de Culoiseau, céleri confit, courge et oignon de Roscoff, jus de volaille.

Le vin blanc est beaucoup trop froid, aussi je commande deux coupes de Champagne Veuve Clicquot rosé sans année qui va accompagner l’amuse-bouche, un lit de betteraves, miso et œuf de truite. Le problème de la betterave rouge, c’est qu’elle écrase tout sur son passage, comme Attila roi des Huns. Le champagne est sans histoire.

L’Hermitage Chave blanc 2012 est solide, fort avec une ampleur unique. Et sa solidité, s’exprime en des milliers de subtilités discrètes. Et le goût restant en bouche est impressionnant. C’est un guerrier mais un gentleman.

Comme nous buvons lentement ce vin superbe, je commande du foie gras et arrive un pressé de foie gras, chutney de poire au Xérès, fine gelée à l’hibiscus. Bien évidemment je n’ai mangé que le foie gras, sans les ajoutes et j’ai signalé à Hervé Brousse que la cuisine qui a fait des progrès, devrait s’orienter vers des goûts cohérents lorsqu’elle accompagne des vins de si grande qualité.

La volaille est très bien traitée et les accompagnements sont très adaptés au plat et au vin. Le Chambolle-Musigny Roumier 2011 est tout en subtilités. Il a ce que la Bourgogne peut donner de mieux. Certes il n’a pas la magnificence d’un Musigny, mais il est si délicat qu’il procure un plaisir extrême. Quelle région pourrait donner un charme aussi délicat ? Il y en a, bien sûr, tant il y a de régions qui recèlent des trésors. Ce vin a la politesse d’un grand vigneron.

Nous avons fini les deux vins sur deux fromages. D’instinct j’ai eu le bon choix qui n’est pas évident : le Chambolle-Musigny se marie au brie de Meaux aux brisures de truffes et l’Hermitage blanc se marie à la tomme de Savoie. Sur le papier ce n’était pas évident, mais au palais, oui.

Nous avons eu un dîner avec mon fils au cours duquel la proximité de nos visions, de nos idées pour l’avenir me rend heureux car je sais qu’il y aura une continuité dans ce que j’ai commencé qu’il développera, y compris la collection et la dégustation du vin.

Il n’y a pas eu de gagnant entre le blanc et le rouge, juste un intense moment de partage et d’émotion.

Déjeuner au restaurant l’Assiette vendredi, 28 octobre 2022

Trois fois par an, nous nous réunissons mon frère, ma sœur, son mari et moi pour un déjeuner, chacun invitant à son tour. Ma sœur invite au restaurant l’Assiette dans le 14ème arrondissement de Paris. Le lieu devait être il y a longtemps une boucherie et le plafond très coloré doit dater d’il y a un siècle. Les tables sont très petites et nous avons peur de manquer d’espace, mais la qualité des mets va nous faire oublier ce détail.

Nous ne prenons pas tous le même menu. Le mien sera : pâté en croûte tradition, mais sans les pickles / escargots en pot et croûton doré / cassoulet maison.

Pour l’apéritif nous prenons un Champagne Drappier Grande Sendrée 2010 qui est d’une très belle construction et d’une ampleur appréciable, mais je suis un peu gêné par une acidité prononcée. On le boit quand même avec plaisir car j’apprécie son pinot noir majoritaire expressif.

Le Châteauneuf-du-Pape Domaine La Barroche 2015 est un grand vin. Il envahit le palais de sa générosité. Je n’attendais pas autant de complexité et de joie de vivre d’un 2015. Il est évident que les délicieux escargots le mettent en valeur.

Il y a si longtemps que je n’ai pas mangé de cassoulet que je ne boude pas mon plaisir. Ce plat si simple est un régal et le vin de Châteauneuf brille, mis en valeur par le plat. Nous avons doublé la bouteille. On ne change pas une équipe qui gagne.

Le sommelier, très attentif à nos souhaits me dit qu’il m’a reconnu pour avoir servi certains de mes dîners dans deux ou trois grands restaurants. Quand il me dit son prénom, des souvenirs me reviennent. Son plaisir de me revoir est émouvant.

La cuisine est parfaite dans sa simplicité. Le service est attentif et compétent. Je recommande vivement ce restaurant simple et authentique qui fait un sans-faute.