Archives de l’auteur : François Audouze

déjeuner au restaurant Le Sergent Recruteur mercredi, 6 novembre 2024

L’écrivain me propose de venir à des séances de signature de ses livres mais les dates ne conviennent pas. J’invite l’auteur à déjeuner au restaurant Le Sergent Recruteur. Lorsque j’arrive, je suis accueilli par Aurélien qui fait office de sommelier mais aussi de directeur de salle.

J’ouvre les vins que j’ai apportés. Tous les deux ont des bouchons magnifiques, les niveaux sont parfaits et les parfums sont distincts. Le Corton Charlemagne a un nez puissant et conquérant tandis que le Chambertin a un nez subtil et délicat. Aurélien sent aussi les vins et nous composons le menu. Il y aura une assiette de cèpes juste poêlée et le lièvre à la royale. Aurélien pensait que le vin rouge serait trop frêle pour le lièvre et j’ai pensé au contraire que le vin charmant calmerait la puissance du lièvre.

L’écrivain arrive et nous buvons le Corton-Charlemagne Pierre Marey & Fils 1982 sur les gourmandes rillettes du restaurant. La couleur du vin est d’un or clair très séduisant. En bouche on ressent son côté guerrier, puissant, conquérant. C’est un grand Corton-Charlemagne que je n’imaginais pas aussi solaire pour l’année 1982. L’accord cèpes et vin blanc est absolument parfait.

Le lièvre à la royale, façon sénateur Couteaux, est délicieux. Sa puissance est mesurée, ce qui est agréable. Le Chambertin Clos de Bèze Faiveley négociant 1969 a une très couleur rouge sang. Le nez est discret mais subtil. En bouche je suis immédiatement conquis. Je me sens invité par Madame d’Epinay ou par la Marquise de Lambert, à l’un de ses salons où l’on parle de science et de poèmes. C’est le côté courtois de ce vin que j’adore, tellement raffiné et glissant sans fin dans le palais. Et le vin adoucit l’ardeur du lièvre avec un talent infini.

Je suis aux anges avec ce chambertin qui n’a pas d’âge tant il est pertinent. On dirait qu’il est de 1985, on ne ferait pas d’erreur, tant il est accompli. Alain Pégouret fait une cuisine d’une belle justesse.

Nous avons continué à boire les deux vins sur des fromages bien choisis par le restaurant.

Ce déjeuner avec des vins très différents et parfaits a été passionnant car nous avons échangé sur des sujets intéressants. Il est assez probable que nous nous retrouverons.

déjeuner chez des amis vendredi, 1 novembre 2024

Nous sommes dans le sud et nous allons déjeuner chez des amis qui habitent Eygalières, une petite ville entourée d’un paysage d’une grande beauté. Notre ami est un passionné de cuisine et a préparé des plats délicieux.

A l’apéritif nous buvons un Champagne Louis Roederer Brut Premier sans année. Il n’est pas désagréable, mais il manque de complexité.

Sur une entrée originale avec un boudin noir, Le Schistes d’Agrumes Condrieu M. Chapoutier 2020 est une magnifique surprise. Je m’attendais à un vin trop jeune pour mon goût, or ce vin est gourmand, plein, fruité, frais et très agréable à boire. Un réel plaisir.

J’ai apporté un Château de Beaucastel Châteauneuf du Pape 2001. Quelle merveille. Ce vin est totalement accompli, riche, construit, explosant de joie de vivre. Il est arrivé à un équilibre parfait, de belle maturité. Il va encore s’épanouir, mais il est déjà proche de la perfection absolue. L’accord avec la joue de bœuf est idéal.

Pour le dessert nous avons un Porto Ramos Pinto 2011 riche et percutant. Il est encore jeune, mais il atteint son but, riche de gourmandises pointues. Son équilibre est très agréable.

Par une belle journée ensoleillée, d’un été indien qui s’est invité dans l’automne, nous avons passé une agréable journée avec des amis charmants et deux vins de grand intérêt.

Déjeuner avec trois Romanée Conti mercredi, 23 octobre 2024

Il y a quelques mois, un de mes fournisseurs de vins m’a proposé une Romanée Conti 1945. Il y avait plusieurs photos montrant un niveau bas. Ce fournisseur a l’esprit d’un torero, toujours prêt à des batailles et la pugnacité d’un taureau de combat. Ce qui prêche en sa faveur, c’est que j’ai acheté une bouteille qu’il avait mis en vente aux enchères il y a quelques années, un jéroboam de Romanée Conti 1961, que personne n’avait acheté tant il était peu fringant. Je l’avais acheté et il s’est révélé brillant dans un dîner que j’ai organisé.

La question immédiate qui vient face à un tel mythe est évidente : faux ou pas faux ? La parcelle de la Romanée Conti avait gardé ses vignes préphylloxériques et en 1945, les vignes avaient 200 ans et étaient si fatiguées qu’il a été décidé de les arracher pour les remplacer par des jeunes vignes. La production de 1945 ne fut que de 600 bouteilles alors que d’habitude elle était de 4000 à 7000 bouteilles et comme il n’y a pas eu de vin de la Romanée Conti pour 1946 jusqu’en 1950, la Romanée Conti 1945 est devenu un symbole et un mythe.

Tous les amateurs de vin ont en tête le prix qu’a obtenu une Romanée Conti 1945 provenant de la cave de famille Drouhin qui vendait ce vin, prix qui est le plus élevé pour une bouteille de vin.

Les images que j’ai vues ne me semblaient pas correspondre à un vin falsifié et le niveau était bas. Mais quelque chose m’a poussé à aller plus loin. Le fournisseur voulait absolument boire le vin. Il sacrifierait la moitié de son revenu pour boire le vin. A mon sens, il ne ferait pas cela s’il n’avait pas confiance dans le vin.

Les discussions ont été difficiles, avec des joutes qui ressemblaient à des combats de coqs. Cinq ou six fois, j’ai dit : stop, terminé, ciao… et un jour nous sommes arrivés à une entente. Comme dans un poker, on calcule son risque. J’ai calculé et accepté le risque d’un vin qui serait mort ou faux.

J’ai réservé une table au restaurant Pages parce qu’ils sauront cuisiner pour les vins. Chacun de nous deux apporterait un autre vin.

Je suis arrivé à 9 h 30 au restaurant Pages. Nous devions nous rencontrer à 9 h45 mais Guillaume m’a envoyé un message me disant qu’il serait en retard, à 10 h 15.

J’ai décidé d’ouvrir la Romanée Conti Domaine de La Romanée Conti 1955. J’avais pris cette bouteille pour avoir une référence pour la Romanée Conti 1945 car les deux ont des niveaux bas et pour une autre raison. Curieusement, les Romanée Conti de nouvelles vignes, de 1951 à 1955, présentent une complexité inattendue. Et cette complexité n’est pas loin de celles des vins préphylloxériques. C’est très curieux, et Aubert de Villaine pense que les racines qui n’ont pas été débarrassées du sol ont eu une influence sur les nouvelles pousses.

J’ai ouvert la Romanée Conti 1955 et l’odeur était si intensément mauvaise, boue et terre, que je n’étais pas sûr qu’elle perdrait ses vilaines senteurs en un temps court.

Guillaume est arrivé et j’ai ouvert la Romanée Conti 1945. Le liège noir et gras donnait une indication : impossible que ce vin soit faux. C’est un liège typique et laid, comme on en trouve du Domaine de La Romanée Conti durant les décennies 40, 50, 60 et 70.

L’odeur n’est pas parfaite mais j’espère que toutes les mauvaises odeurs pourront disparaître. Et les défauts sont typiquement conformes aux défauts que j’avais senti en ouvrant les vieux vins du Domaine de La Romanée Conti.

La Romanée Conti Domaine de La Romanée Conti 1929 a été apporté par Guillaume et c’est une Vandermeulen. C’est un grand négociant en vin de Belgique qui avait le privilège de pouvoir embouteiller les vins reçus en barriques. Il a vendu de grands vins et beaucoup de faux vins. Je suis attentif en ouvrant et l’odeur ne correspond pas à ce que j’attendais. Les odeurs laiteuses ne sont pas normales. Le retour à la vie est prévisible et je n’ai pas d’opinion sur le fait qu’il s’agisse d’un faux ou non.

Après avoir ouvert les trois Romanée Conti, nous avons décidé de marcher dans Paris et de revenir au restaurant à 13 heures. Par chance le soleil est radieux.

Notre déjeuner commence à 13 heures après l’ouverture des vins de 9 h45 à 11 heures.

Le menu que j’ai suggéré au chef Ken, comme nous ne buvons que trois Romanée Conti et rien d’autre est : carpaccio de filet de bœuf / bœuf de Normandie / deux services successifs de Wagyu / lièvre à la royale / financiers.

Je pensais que l’odeur de la Romanée Conti Domaine de La Romanée Conti 1955 aurait du mal à se rétablir, mais elle s’est complètement reconstituée, redevenant absolument parfaite, marquée par le sel. En bouche c’est un pur rêve. La couleur est typique pour les vieilles Romanée Conti : terre brune, qui avec les vins du domaine n’est pas une caractéristique négative. Le goût est magique, archétypal de la Romanée Conti. Je suis si heureux. C’est une merveille. Probablement la meilleure Romanée Conti que j’ai bue de la période 1951 à 1975. Il faut noter que 70% des amateurs de vin auraient jeté ce vin à cause de l’odeur désagréable à l’ouverture.

Comme je le dis très souvent, ma méthode d’ouverture fait des miracles et ce n’est pas pour essayer de faire le fanfaron. Je suis tellement content de la typicité parfaite de ce vin. J’ai offert un verre pour que Ken et son équipe puissent s’en imprégner.

Pour la Romanée Conti Domaine de La Romanée Conti 1945 j’avais pensé que l’odeur imprécise avec des défauts disparaîtrait mais en fait, quelques défauts d’odeur sont restés. Je pensais : aïe aïe aïe. Mon désir allait-il être gâché ?

Mais comme les surprises arrivent toujours avec le vin, le goût n’a absolument aucun défaut. C’est curieux. La couleur du vin est lourde et le goût du vin est dense et lourd, ce qui est typique des vins préphylloxériques. Et puis la complexité, la fraîcheur et la longueur impérissable sont apparues.

Deux secondes de ma vie ont été l’éternité. J’ai mangé une bouchée de Wagyu et quand j’ai bu le 1945, toute l’histoire de l’univers était dans mon verre. Un moment de bonheur stratosphérique. Romanée Conti 1945 est faite pour Wagyu et vice versa. Ce fut le choc d’un instant. La grandeur de la viande grasse fait exploser la générosité du vin.

Puis je me suis demandé, est-ce une grande Romanée Conti ? Pour mon goût, je préfère la 1955. Mais pour la légende, ce vin est la légende. Et je me souviendrai toujours de la force du préphylloxérique, de l’incroyable longueur et de la complexité.

C’est un moment totalement précieux dans ma vie.

J’avais déjà bu la Romanée Conti Domaine de La Romanée Conti 1945 il y a 25 ans. J’avais aimé mais je n’avais pas les connaissances que j’ai aujourd’hui, qui me permettent d’avoir une meilleure perspective.

C’est maintenant le tour de la Romanée Conti 1929 Vandermeulen. Quand on l’a ouverte, l’odeur de la 1929 était désagréable. Certains aspects laiteux s’atténuent au déjeuner, mais je suis toujours agacé par ces odeurs.

La question vraie ou fausse était toujours dans mon esprit, en raison de la réputation de Vandermeulen qui avait vendu de grands vins mais aussi des contrefaçons. Mais une sensation est apparue avec le lièvre à la royale, comme l’éclair de magie pour la 1945.

La combinaison était si intense que le 1929 a révélé des marqueurs de la Romanée Conti.

Je n’ai pas été impressionné par cette 1929 parce que j’ai bu tellement de bourgognes de 1929 qui étaient meilleurs, mais j’ai eu un instant un flash non éloigné de celui que j’ai eu pour la Romanée Conti 1945.

Nous avons terminé ce voyage irréel avec de délicieux financiers crées par Lucas le pâtissier du restaurant Pages.

Si je veux résumer ce déjeuner, en termes de perfection, la 1955 est la parfaite Romanée Conti, mais en termes d’émotion, la 1945 est l’émotion de ma vie.

La Romanée Conti 1945 est une légende absolue. Nous avons eu son émotion. Cinq heures plus tard, je souriais encore.

Le lendemain j’ai téléphoné à Pierre-Alexandre, le directeur de Pages pour le féliciter. Il m’a dit : c’était tellement émouvant de vous voir si heureux. C’était une aventure unique.

déjeuner de famille avec deux vins de 90 ans dimanche, 20 octobre 2024

C’est un déjeuner de famille dans ma maison. Nous serons huit dont cinq qui boivent du vin. Ma dernière fille vient d’avoir cinquante ans. Un tel chiffre est important dans la vie de chacun et j’ai ressenti qu’elle y est sensible aussi j’ai eu l’idée de choisir deux Bourgognes de 1934, qui ont quarante ans de plus qu’elle, pour suggérer qu’elle a une longue vie devant elle et qu’il ne faut pas s’arrêter à un chiffre jalon.

J’ai ouvert les vins très tôt et j’ai voulu ouvrir le champagne en avance, car il s’agit d’un magnum. Lorsque j’ai tourné le bouchon du Veuve Clicquot 2008, j’ai senti une énorme pression sur mes doigts, et le pschitt explosif a fait le bruit d’un tir de canon. Buvant rarement des champagnes jeunes, j’ai été impressionné par ce bruit.

Le Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame 2008 en magnum promet d’être grand mais il est un peu trop jeune pour l’instant. Très élégant, avec une grande longueur, j’aurais aimé un peu plus de gras car il est strict. Mais il deviendra grand. C’est aujourd’hui un champagne sérieux.

Le Clos Vougeot Cave de la Reine Pédauque 1934 avait à l’ouverture il y a quatre heures une odeur qui n’était pas parfaite, un peu boueuse. Mais quand je le sers, il a effacé toute imperfection. Il est grand, un peu gras, et offre une personnalité généreuse.

Le Chambertin Charles Viénot 1934 est un vin que j’ai acheté il y a plus de 20 ans quand Pierre Cardin vendit aux enchères simultanément à New York et à Paris la cave du restaurant Maxim’s. Les prix étaient fous mais j’ai acheté une caisse de douze Chambertin 1934. Beaucoup ont souffert d’évaporation, certainement en raison des conditions de conservation dans la cave de Maxim’s.

Cette bouteille – pour une fois – a un bon niveau, et en l’ouvrant je savais que ce serait un grand vin. Ce vin a toutes les qualités d’un grand vieux Chambertin. Il est si impressionnant, dense, intense, frais. Un vin immense d’un très grand vigneron. Large et opulent c’est un vin de plaisir.

Ma fille aînée préfère le Clos Vougeot. Ma plus jeune fille comme moi préfère ce Chambertin d’une belle intensité.

Nous avons bu les vins avec du poulet et des pommes de terre, le plat le plus simple et parfait. Et avec un fromage Mont d’Or, le Chambertin est à se pâmer.

Ouvrir deux vins de 90 ans était un risque. Ce fut un succès.

286ème dîner au restaurant Pages jeudi, 17 octobre 2024

Le 286ème dîner se tient au restaurant Pages. Des amateurs américains de l’Idaho avaient participé au 240ème dîner et viennent de se marier hier en France, dans la Loire. Accompagnés d’amis de l’Idaho, ils m’avaient demandé d’organiser pour leur groupe de cinq un dîner qui se tiendrait le lendemain du mariage. Je leur ai proposé de compléter la table avec d’autres convives pour avoir un programme de vins beaucoup plus large. Nous serons donc dix ce soir avec une parité parfaite Idaho / France. Il y aura autour de la table un vigneron de la Napa Valley, des commerçants du monde du vin et des amateurs éclairés.

Un peu avant 16 heures je commence l’ouverture des vins. Je serai rejoint plus tard par un ami commerçant en vins et journaliste et par un journaliste. Nous aurons ainsi le temps d’échanger sur le vin et mes dîners.

Alors que le Domaine de Chevalier 1952 a un niveau mi-épaule et le Clos Fourtet 1960 a un niveau superbe, c’est le 1952 qui offre le plus beau parfum, le saint-émilion ayant un nez poussiéreux qui pourrait ne pas se dissiper. Le Clos de Vougeot 1961 a un beau bouchon et un parfum idéal.

Je bataille avec le bouchon du Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1956 dont le sommet est couvert d’une pâte graisseuse et se retire en morceaux gras et noirs. Mes mains sont toutes noires. Fort heureusement le parfum est salin et typique des vins du domaine.

Le Châteauneuf du Pape La Bernardine Chapoutier 1949 a un bouchon parfait et des senteurs riches de garrigue. Les trois liquoreux de 1929 ont des bouchons qui ne posent pas de problème et des parfums riches très différents. Le Champagne Mumm Cuvée René Lalou 1979 offre un gentil pschitt qui signe une belle jeunesse et le Moët & Chandon Brut Impérial 1964 a un bouchon qui se brise puisque le bas du bouchon ne veut pas suivre la torsion du haut du bouchon. Il s’annonce impérial comme son nom.

Les convives sont tous à l’heure. Le menu a été conçu lors d’une conversation téléphonique entre Pierre-Alexandre le directeur, Ken le chef et moi. Nous nous connaissons si bien que ce fut facile. Un point d’interrogation existait sur le lièvre à la royale puisque Ken n’était pas sûr de pouvoir le faire à temps. Fort heureusement ce plat mythique sera servi ce soir.

Le menu est ainsi libellé : amuse-bouche : carotte, brocolis, jambon / anguille fumée, amanite des Césars / carpaccio de poisson blanc / noix de Saint-Jacques poêlées / daurade royale poêlée, sauce vin rouge / pigeon rôti, sauce salmis, pommes des terres poêlées / lièvre à la royale / tarte Tatin / chocolat.

Le Champagne Mumm Cuvée René Lalou 1979 est d’une belle couleur claire et la bulle est encore présente. Ce champagne est vif et tranchant, prenant de la largeur avec le jambon ibérique. Sa noblesse est certaine. C’est le vin phare de la maison Mumm dans un millésime qui n’a pas la renommée qu’il devrait avoir. C’est le 21ème que je bois tant j’ai de sympathie pour ce grand Mumm.

Le Champagne Moët & Chandon Brut Impérial 1964 est une belle surprise pour beaucoup tant il est joyeux et généreux. Il est même fruité et si la bulle n’est plus visible, le pétillant est entraînant. C’est un champagne gourmand. Alors que Dom Pérignon est d’une hiérarchie supérieure j’ai parfois plus de plaisir franc avec les Brut Impérial anciens qu’avec les Dom Pérignon des mêmes années.

Je suis un peu gêné par l’Y d’Yquem Graves blanc 1979 qui a un léger goût de bouchon, qui ne rebute aucun des convives. Ce vin a des traces de botrytis comme très souvent pour les Y. Il est ensoleillé. A l’inverse le Château Laville Haut Brion blanc 1978 est strict et tranchant, d’un caractère guerrier. Le Laville est le compagnon du carpaccio de poisson alors que l’Y est confortable avec les noix de Saint-Jacques. Les deux blancs de Bordeaux ont des styles différents et sont excellents.

Le Clos Fourtet Saint-Emilion 1960 n’a plus aucun défaut olfactif mais je ne le trouve pas aussi brillant qu’il pourrait l’être. On est loin du sublime 1947 qui fait partie de l’élite des bordeaux de 1947. En revanche le Domaine de Chevalier Léognan 1952 dont je n’étais pas sûr, du fait de son niveau, est riche et bien construit. Avec la daurade, il forme un très bel accord. Ce Chevalier est une agréable redécouverte.

Le Clos de Vougeot Bouchard Père & Fils 1961 est pour mon goût une gigantesque surprise. Il représente le bourgogne archétypal mais surtout il est absolument parfait, d’une construction idéale. C’est le bourgogne tel qu’on le rêverait. Alors que je chéris les vins du domaine de la Romanée Conti, c’est ce vin que je mettrai premier dans mon vote tant il est grand. L’accord avec le pigeon est classique mais si efficace.

Le Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1956 a une couleur un peu terreuse, mais il a tous les marqueurs des vins du domaines, le sel et la rose auxquels s’ajoute un style parcheminé. Le millésime 1956 était faible et s’est révélé quelques années plus tard. Il y a des complexités impressionnantes. Il convaincra mes convives.

Le Châteauneuf du Pape La Bernardine Chapoutier 1949, c’est l’ami de toujours, celui en qui on a une confiance totale. Il est tellement solide, construit et rassurant. Il est fait pour le lièvre à la royale dont il calme les ardeurs. Le vin est long, riche et d’un charme enthousiasmant.

J’ai voulu mettre dans ce repas trois liquoreux d’une année mythique, très différents. Le Château du Peyrat 1er cru Capian Langoiran 1929 est un Premières Côtes de Bordeaux qui m’avait surpris par la richesse de son parfum. Il n’a pas la puissance des sauternes mais sa vivacité est supérieure à ce que j’attendais.

Château Fihot est généralement un sauternes plus doux et discret qu’Yquem aussi suis-je surpris par l’intensité de ce Château Filhot Sauternes 1929. Quel vin riche et complexe. Un miracle de plaisir sur une tarte Tatin gourmande faite par Lucas, le pâtissier du restaurant.

Le Banyuls Grand Cru SIVIR 1929 a été embouteillé en l’an 2000. Il s’agit d’un Banyuls de coopérative qui a passé 71 ans en fût de chêne. Le parfum est d’une densité incroyable et malgré cela, le vin paraît plus léger et frais que ce que suggère sa pesanteur alcoolique.

Je suis content que l’on ait exploré ces trois liquoreux d’un même millésime. Chacun offre une grâce particulière que seuls les liquoreux anciens peuvent donner. J’aurais été tenté d’essayer le lièvre à la royale avec le Banyuls, mais mon assiette était vide. C’eût été plus original que le classique chocolat.

Mes convives ont été impressionnés par la cuisine épurée, simplifiée mais si efficace du chef Ken et de son équipe. Cette pureté et cette précision mettent en valeur les vins idéalement.

Les votes sont extrêmement intéressants. Les 12 vins présents ont tous reçu au moins un vote d’un des convives, ce qui est gratifiant pour mes vins. Encore plus plaisant est le fait que six vins ont été nommés premiers : le Richebourg trois fois, le Clos de Vougeot et le Moët deux fois et le Châteauneuf du Pape, le Domaine de Chevalier et le Laville Haut-Brion chacun une fois premier.

Le vote de l’ensemble de la table est : 1 – Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1956, 2 ex-aequo – Clos de Vougeot Bouchard Père & Fils 1961 et Châteauneuf du Pape La Bernardine Chapoutier 1949, 4 – Château Filhot Sauternes 1929, 5 – Champagne Moët & Chandon Brut Impérial 1964, 6 – Domaine de Chevalier Léognan 1952.

Mon classement est : 1 – Clos de Vougeot Bouchard Père & Fils 1961, 2 – Château Filhot Sauternes 1929, 3 – Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1956, 4 – Châteauneuf du Pape La Bernardine Chapoutier 1949, 5 – Champagne Moët & Chandon Brut Impérial 1964.

J’ai gardé la plus belle surprise pour la fin de ce récit. Les cinq américains me suivent sur Instagram. On voit peu de photos de moi mais quand je suis pris en photo c’est souvent au restaurant et on me voit avec un pullover qui a la couleur bleu foncé qui est celle des mots que l’on voit ci-dessus. Les trois hommes sont venus au dîner avec des pullovers de cette couleur bleue. Quelle gentillesse folle !

Déjeuner au restaurant Marsan Hélène Darroze mercredi, 16 octobre 2024

Il y a quatre ans, un ami m’avait demandé de faire un dîner de vingt personnes au restaurant Marsan Hélène Darroze. Leur grande table au rez-de-chaussée se prête idéalement à réaliser un tel repas. L’ambiance avait été chaleureuse et enjouée, ce qui explique sans doute que l’ami me demande de faire un nouveau dîner pour ses amis au même endroit.

Mes interlocuteurs du restaurant sont tous différents de ceux avec qui j’avais organisé le 240ème diner. Je réserve une table pour faire connaissance avec la cuisine du chef de cuisine Paul Genthon et rencontrer le directeur Dimitri Auriant. Un ami fin gourmet se joint à moi pour cette expérience.

Nous sommes accueillis par de larges sourires. Je salue le chef et le directeur et nous prenons place dans la salle à manger. Nous préférons que le chef choisisse lui-même ce qu’il veut nous faire goûter.

Le chef sommelier me montre la carte des vins et je ne dépasserai pas la première page de son beau livre car j’ai vu un Champagne Charles Heidsieck Blanc des Millénaires 2006 qui me fait envie. Ce champagne est un blanc de blancs d’une belle personnalité. Il est solide et vieillira bien.

Le champagne est bon, mais dès que le premier plat est servi, à base de poisson cru, il se propulse à un niveau de complexité et d’émotion très supérieur. Il a vraiment un très grand potentiel, pour atteindre un jour la divine perfection du millésime 1985.

Le chef sommelier s’appelle Avishek Bhugaloo. Il était heureux que je choisisse le Blanc de Blancs des millénaires et c’est lui qui a suggéré le 2006 avec des arguments convaincants.

Devant lui, j’ouvre le vin que j’ai apporté, trouvé en me promenant dans ma cave. Il s’agit d’un Château Brane-Cantenac 1978 qui a une particularité : il a une étiquette d’un importateur argentin qui a stocké ce vin à Buenos-Aires et n’ayant sans doute pas eu de succès l’a revendu aux enchères en France. J’en ai acquis une bonne vingtaine, et l’idée m’est venue de vérifier si les voyages de ce vin l’ont affecté.

Le parfum à l’ouverture est riche et engageant. Le plat qui suit le poisson cru est à base de betteraves, or la betterave n’est pas l’amie des vins. On nous sert ensuite un plat de de champignons et dès la première bouchée, on sait que l’on est en face d’un plat parfait. On a la même impression qu’avec les plats légendaires de Guy Savoy. Ce plat peut devenir lui aussi une légende. Il n’y a pas un bouton de guêtre à changer. Il est parfait avec le champagne.

D’instinct, le homard doit accompagner le vin de Bordeaux et leur accord est sublime. Le Bordeaux est transcendant et cette perfection est due à l’âge. Le vin a 46 ans. Il est à l’idéal de sa maturité et je peux constater que les pérégrinations du vin n’ont en rien entamé sa prestance.

Les plats qui suivent sont tous intéressants. J’ai versé des verres du bordeaux pour que le chef et le sommelier ainsi que le directeur puissent ressentir l’intérêt des vins anciens.

Ce repas a été manifestement copieux et très épicé. Le champignon et le homard sont des plats exceptionnels. Le menu m’a été envoyé plus tard. Il est extrêmement détaillé et en voici un résumé : daurade royale marinée aux baies roses / mikado de betteraves rouges et crapaudine poudrée de roses de Damas / cèpe de Bordeaux, carpaccio au foie gras / homard bleu aux épices tandoori / pintade jaune des Landes / chocolat et cèpes de Bordeaux / le véritable baba, à l’armagnac Darroze. C’est une belle imprégnation dans le monde d’Hélène Darooze avec Paul Genthon.

Nous sommes descendus dans la salle où se tiendra le repas pour composer le menu. Juliette Le Floc’h, la pâtissière, s’est jointe à Paul Genthon et Dimitri Auriant. Nous sommes tous motivés pour réussir le dîner du mois prochain.

285ème dîner au restaurant Astrance samedi, 28 septembre 2024

Le 285ème dîner se tient au restaurant Astrance de Pascal Barbot et Christophe Rohat. J’étais venu avec un ami mettre au point le menu avec Pascal et Christophe, mais la veille du dîner on m’informe qu’il a été impossible de trouver du turbot. La séquence turbot / lieu jaune sera remplacée par la séquence lieu jaune / rouget.

Nous serons onze dont un seul convive a déjà participé à des dîners et les neuf autres viennent pour la première fois. C’est je crois une des premières fois où il y a un tel nombre de nouveaux. Il y a deux norvégiens, deux anglais vivant à Bordeaux, deux parisiens, deux ardéchois dont l’un est un des plus célèbres vignerons de France et un jeune amateur de Porto-Rico. L’ami fidèle est parisien. Les deux jeunes femmes sont placées à ma gauche et à ma droite.

Le menu préparé par le chef Pascal Barbot est : Amuse-bouches : tuile pois chiche, gribiche aux algues, gougère, sablé Comté et pomme verte / homard vapeur, consommé et huile de crustacé, biscotte à la confiture de crevette / émincé de lieu jaune, riz koshihikari fraîchement poli au naturel, beurre blanc, sauce soja / rouget vapeur, cèpe à la braise, sauce marchand de vin / pigeon doré sur coffre, cuisse et rôti d’abat / ris de veau cuit au sautoir, jus de cuisson / céleri Monarch, quelques noix fraîches & fondue de Comté / mangue au naturel / financier à la rose.

Arrivé un peu avant 16 heures, je vois que la table est déjà dressée, très belle, avec une forêt de verres, dont 160 que j’ai fournis, pour compléter le stock de verres du restaurant. Vers dix-sept heures, trois convives arrivent pour voir comment fonctionne l’ouverte des vins. Le jeune portoricain a apporté un Champagne Laurent Perrier millésime 1985 en magnum qu’il aurait aimé ajouter au dîner, ce qui n’est pas possible. C’est Lucas, le sommelier, qui ouvre la bouteille pendant que j’ouvre celles du repas. Le champagne n’a aucune bulle et on peut imaginer que ceci est dû au bouchon très resserré dans sa partie basse. Alors, quand on le goûte après avoir trinqué, on a l’impression de boire un champagne qui serait plus vieux d’au moins vingt ans. Il est bon, mais ressemble plus à un champagne autour de 1960. Par comparaison, le Comtes de Champagne 1966 a eu à l’ouverture un pschitt significatif avec des bulles qui s’échappent du goulot.

Le seul vin qui m’a inquiété lors de l’ouverture, c’est le Château Chalon 1945 qui a montré une légère odeur de bouchon. Les deux parfums profonds et envoûtants sont le Climens 1949 et le vin de Chypre 1869.

Les convives arrivant à des moments différents, nous nous sommes assis à nos places, et quand le dîner devait démarrer, nous sommes restés assis alors que le programme prévoyait que nous prenions le premier champagne debout. Je voulais présenter l’esprit de mes dîners debout, mais c’était possible aussi quand tout le monde est assis.

Le Champagne Philipponnat Clos des Goisses 1988 a une belle couleur jeune et une belle bulle. Il est très intense et fonceur. Ce blanc de noirs est très convaincant, de force personnalité. La gougère met en valeur le champagne et lui donne de la largeur, alors que le sablé excite sa complexité par un accord de confrontation.

Le Champagne Comtes de Champagne Taittinger 1966 est très différent. Il est plus ambré mais pas trop et se montre plus jeune que son âge. Il a un charme fou et une palette aromatique quasi infinie. Le homard est idéal pour mettre en valeur un champagne au sommet de son art., plein et joyeux.

Le lieu jaune accueille deux vins blancs très disparates. Le Château Laville Haut Brion 1978 a une couleur claire d’une folle jeunesse et c’est une caractéristique de ce vin de ne jamais devenir ambré. Il est d’une pureté saisissante et d’une grande fraîcheur. C’est un très grand vin blanc de Bordeaux, si frais à boire et fluide.

Le Châteauneuf-du-Pape Blanc Antonin Establet 1947 à la belle couleur ambrée est puissant, lourd et conquérant. Il offre une belle personnalité, d’une vivacité très grande, malgré ses 77 ans qu’il ne fait pas. Le plat de lieu jaune avec le riz est une perfection absolue. Le poisson est parfaitement cuit, doté d’une belle sauce et le riz est éblouissant tant il est léger. L’accord avec les deux vins est pour moi le plus bel accord du repas grâce à ce plat miraculeux.

Le Château Certan de May de Certan 1955 avait à l’ouverture un parfum lourd de pomerol. Il l’a encore et ce vin riche et lourd est sans doute un peu monolithique, aussi le Bonnes-Mares Clair-Daü 1961 d’une élégance et une fraîcheur parfaites lui fait de l’ombre. J’apprécie la légèreté de ce Bonnes-Mares élégant.

Alors que le rouget est fait pour le pomerol, le Bonnes-Mares lui vole la vedette et s’impose sur ce plat excellent mais qui n’a pas la fraîcheur du plat de lieu jaune.

J’ai une sympathie particulière pour les bouteilles comme celle du Grands Echézeaux Antonin Rodet 1934, qui sont opaques tant la terre ou la poussière ont rendu le vin invisible. Généralement pour les bourgognes, c’est le signe d’une conservation parfaite et c’est le cas pour ce 1934. Quel grand vin expressif.

Et le pigeon est le compagnon idéal mais le Grands Echézeaux ne peut pas gagner face au Beaune Clos du Roi Louis Affre 1928 qui tient son accomplissement de l’excellence de l’année 1928 si belle et si noble. Ce Beaune est parfait, serein, équilibré, idéal. Et le Beaune n’a pas une grande puissance, mais une subtilité charmante.

Sur le ris de veau cohérent et idéal, La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1956 est impressionnante de conviction. Son caractère salin est là, présent, marqueur des vins du domaine. Il est aérien. C’est une bouteille qui avait un niveau parfait comme d’ailleurs tous les vins du dîner. Le vin est plébiscité par tous tant sa splendeur est convaincante. C’est un grand moment d’une Tâche qui ne joue pas sur la puissance mais sur l’élégance.

J’avais fait part de mes doutes sur le Château Chalon Bourdy 1945 mais en fait le goût de bouchon a quasiment disparu. Le vin est buvable avec un goût de paille, mais n’est pas transcendant.

Imaginez que Rita Hayworth dans le rôle de Gilda apparaisse maintenant, l’effet qu’elle ferait, c’est celui du Château Climens Haut-Barsac 1949. Le nez est un parfum envoûtant et la bouche est tout en séduction. Et l’équilibre entre la force du vin et sa longueur donne un résultat entraînant. Certains convives ont dit que Barsac est supérieur à Sauternes, mais la diversité des goûts entre tous les domaines est telle qu’il faut les aimer tous. La mangue est un compagnon idéal des liquoreux bordelais, mais celui-ci manquait un peu de fermeté.

J’ai déjà bu le Vin de Chypre 1869 sept fois et cette huitième fois a créé un de ces chocs qui me renversent, quand j’ai l’impression de toucher la perfection. Bien sûr, c’est personnel puisque je serai le seul à noter ce vin premier. A l’ouverture, le parfum du vin était incroyable car à peine avais-je levé le bouchon de deux millimètres que sa senteur envahissait la pièce. Et là, cette puissance, ce charme, cet équilibre, m’émeuvent et le financier met en valeur la subtile évocation de rose du vin.

Les accords ont été brillants. Le homard avec le Taittinger 1966 était pertinent. Le lieu jaune avec un riz aérien est le plus beau plat qui a mis en valeur les deux blancs si différents. Le rouget que j’attendais avec le pomerol a brillé avec le Bonnes-Mares. Le pigeon est définitivement un plat parfait pour des bourgognes anciens. Le ris de veau a formé un accord plus classique avec La Tâche. De beaux accords d’une grande pureté.

Le vote est très intéressant parce que six vins sur douze ont été nommés premiers, La Tâche 1956 quatre fois, le Comtes de Champagne 1966 deux fois comme le Beaune Clos du Roi 1928 et le Climens 1949, le Chypre 1869 et Le Laville Haut-Brion 1978 ont eu chacun un vote de premier. Dix vins sur douze ont eu des votes.

Le vote du consensus est : 1 – La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1956, 2 – Champagne Comtes de Champagne Taittinger 1966, 3 – Château Climens Haut-Barsac 1949, 4 – Beaune Clos du Roi Louis Affre 1928, 5 – Vin de Chypre 1869, 6 – Bonnes-mares Clair-Daü 1961.

Mon vote est : 1 – Vin de Chypre 1869, 2 – La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1956, 3 – Château Climens Haut-Barsac 1949, 4 – Beaune Clos du Roi Louis Affre 1928, 5 – Châteauneuf-du-Pape Blanc Antonin Establet 1947.

Le service des vins a été parfait. Pascal Barbot est venu souvent nous présenter les plats et nous avons pu mesurer à quel point il s’est engagé dans cette aventure pour créer les meilleurs accords possibles.

Ce 285ème repas avec tant de nouveaux convives et si cosmopolite fut un très grand repas.

Règles : académie des vins anciens du 28 novembre 2024 lundi, 23 septembre 2024

Règles pour la 41ème séance de l’académie des vins anciens du 28 novembre 2024

Du fait des coûts liés aux vins que j’ajoute dans nos réunions, j’ai été conduit à augmenter les tarifs de 10 €.

1 – participants sans vin

Les confirmations d’inscriptions sont prises dans l’ordre des demandes. Le prix est de 300 € par personne, à payer avant le 25 octobre.

2 – participants avec vins

  • proposer un vin ancien et fournir tous éléments sur le vin, dont le niveau dans la bouteille (chaque photo ne devra pas dépasser 500 Ko et devra être lisible. Elle sera en pièce jointe et non pas dans le corps du texte)
  • Obtenir mon approbation pour la ou les bouteilles proposées
  • Respecter les critères d’âge :
  • Champagnes : avant 1997
  • Vins blancs : avant 1991
  • Vins rouges et liquoreux : avant 1972

Les modes de livraisons figurent ci-après.

Livraison des vins entre le 1er octobre et le 15 novembre.

Les confirmations d’inscriptions sont prises dans l’ordre des demandes. Le prix est de 190 € par personne, à payer avant le 25 octobre.

3 – lieu de la réunion

Le restaurant Macéo au 15 rue des Petits Champs 75001 PARIS

Rendez-vous à 19h. Fin de réunion à minuit.

4 – Mode de paiement

Paiement par virement à FRANCOIS AUDOUZE AVA

RIB / FR7630003030000005024474342

5 – mode de livraison

  1. – par envoi postal à François Audouze, société ACIPAR, 44 rue Andrei Sakharov, 93140 BONDY.
  2. – par livraison au 10 Place des Vosges 75004 Paris. Téléphoner à la concierge Madame PUREZA PEREIRA 07.64.88.30.66, prendre rendez-vous avec elle et l’appeler quand vous êtes arrivé, en donnant mon nom. Elle n’est pas joignable au téléphone entre 12h et 17h.

Respectez les dates limites, c’est fondamental.

284ème dîner au restaurant Pages à trois personnes dimanche, 22 septembre 2024

Un tour-opérateur m’a contacté il y a très longtemps soit pour des dîners dans l’esprit de mes dîners, soit pour des couples qui ont un long programme de visite de la France. La demande d’aujourd’hui est particulière puisque le couple a défini lui-même les vins qu’ils aimeraient boire. En 284 dîners, c’est la première fois que la demande est fondée sur des vins précis désignés par eux et non pas sur un programme que j’aurais conçu.

Les touristes américains que je vais rencontrer doivent être des lecteurs assidus de mes écrits, puisque chaque vin a un millésime qui fait partie des trois premiers millésimes que j’ai bus de ce vin : 1966 est le troisième Dom Pérignon que j’ai bu, derrière 1998 et 1996. Je l’ai bu 29 fois.

1967 est le deuxième Pétrus que j’ai bu derrière 1974 car ce sont les années de naissance de mes deux filles. Je l’ai bu 7 fois. Et 1988 est l’année d’Yquem que j’ai bue le plus avec 27 fois. Leur choix ne peut pas être que du hasard.

Lorsque leur demande et ma proposition se rejoignent, j’ajoute au programme une demi-bouteille d’Hermitage La Chapelle 1962, sans l’annoncer. Et 1962 est le troisième millésime que j’ai bu de ce vin, sept fois.

Le dîner se tient au restaurant Pages. Ce sera le 284ème de mes dîners. Nous serons trois. J’arrive à 16 heures pour ouvrir les vins et je sais que j’aurai beaucoup de temps libre puisqu’il n’y a que quatre vins à ouvrir.

J’avais annoncé les vins et quelques plats que je souhaite au chef Ken et au directeur Pierre-Alexandre. Celui-ci me montre sur le tableau du mur de la cuisine le menu envisagé qui est : 1 – amuse-bouche, 2 – carpaccio de poisson, 3 – rouget sauce vin rouge, 4 – homard sauce vin rouge, 5 – canard aux cèpes, vin rouge, 6 – Wagyu, 7 – tarte mangue. Et il me dit que ce menu va manquer de vin rouge pour son équilibre.

J’ai déjà ajouté l’Hermitage, je n’ai rien d’autre sous la main. Et l’idée qui me vient est de changer le programme en mettant le homard non pas avec un vin rouge mais avec l’Yquem et accompagné d’une sauce au vin jaune. Je fais ajouter des cèpes crus avec le champagne

Ce qui donne ce menu : amuse-bouche, cèpes crus, carpaccio de daurade, rouget sauce viande, canard de Challans aux cèpes, Wagyu, homard sauce vin jaune, tarte à la mangue.

L’ouverture des vins est sans histoire car les bouchons viennent entiers. Le Pétrus a un parfum fort et riche, l’Hermitage est plus discret. L’Yquem est tonitruant. Le Dom Pérignon a un bouchon qui s’est resserré dans la partie basse aussi mon effort pour lever le bouchon est très faible et je vois sortir du goulot de petites bulles qui montrent que le pétillant est intact.

Ayant fini très tôt je regarde ce qui se passe en cuisine et la préparation des plats. Je pars vers l’hôtel de Crillon où je dois rencontrer mes convives pour les mener jusqu’au restaurant Pages. J’arrive en avance et je demande au concierge d’appeler la chambre. Rien. A l’heure précise de notre contact, nouvel appel. Pas de réponse. Je fais envoyer quelqu’un sonner à la chambre. Personne. Le numéro de téléphone du mari ne répond pas et n’accepte pas de message. Celui de son épouse accepte un message. Puis rien. Je commence à m’inquiéter. Tout-à-coup je lis un message : « nous sommes sur le trottoir ». Ouf !

Nous nous rendons avec un chauffeur de limousine au restaurant Pages. Nous avons une belle table d’où nous pouvons voir ce qui se passe en cuisine. Je m’aperçois qu’ils avaient une idée assez imprécise de ce dîner. Mes explications leur plaisent. Le dîner démarre.

Le Champagne Dom Pérignon 1966 a une jolie couleur légèrement ambrée. Le champagne est majestueux et on sent immédiatement qu’il est grand. Il a des évocations discrètes de fruits et de miel. Le champagne est délicat, large et imposant tant il est riche de complexités. J’avais demandé des lamelles de cèpes crus qui font un joli accord en suggestions. Avec la daurade de carpaccio, l’accord est viril et noble, donnant une belle rigueur au champagne.

J’avais prévenu mes convives texans que la première fois que l’on boit Pétrus, on peut être déçu parce qu’on en attend trop. Il n’y aura pas de déception car ce Pétrus 1967 est particulièrement brillant. Solide, charpenté, avec des suggestions de truffe, il s’impose avec son équilibre parfait. Je n’aurais pas imaginé qu’un 1967 pourrait être aussi dense et puissant. C’est ma coquetterie d’associer Pétrus et rouget. L’accord est brillant mais les rougets sont de gros rougets. Je préfèrerais des plus petits, qui seraient plus vifs et plus marins.

L’accord avec le canard de Challans est beaucoup plus percutant. La chair expressive du canard fait briller le Pétrus.

J’explique que j’ai ajouté l’Hermitage La Chapelle Paul Jaboulet Aîné 1962 en demi-bouteille pour que mes convives puissent goûter au Wagyu exceptionnel du restaurant. Et l’accord est magique. L’Hermitage bu après le Pétrus montre que l’on change de monde. Le Pétrus est un seigneur puissant, riche et imposant alors que le vin du Rhône est tout en charme et en séduction, vin confortable et gourmand.

Faire un dîner où le homard est servi après le Wagyu est assez peu commun mais j’adore ces choix. L’accord du homard avec le Château d’Yquem 1988 est divin. La pureté de la chair avec une sauce au vin jaune épouse la richesse de cet Yquem parfait.

L’Yquem est délicieux avec la tarte à la mangue, mais l’accord avec le homard est plus excitant. Cet Yquem 1988 riche et équilibré est l’archétype de l’Yquem totalement accompli.

Nous sommes d’accord pour classer les accords ainsi : 1 – Wagyu et Hermitage, 2 – canard et Pétrus, 3 – homard et Yquem.

Le classement des vins serait difficile car chacun a été parfait. Je mettrais 1 – Yquem, 2 – Pétrus, 3 – Hermitage et 4 – Dom Pérignon.

J’avais apporté une bouteille de Sherry du Cap 1862 que j’avais ouverte il y a quelque mois. Il n’a pas sa fraîcheur originale mais c’est une belle évocation de vins du 19ème siècle.

Mes convives vont faire un voyage en France pendant une douzaine de jours. Ils ont été ravis de ce repas qui leur a donné de nouvelles perspectives d’approche gastronomique. Ils comptent en parler à leurs amis amateurs de vins.

Déjeuner au restaurant Astrance dimanche, 22 septembre 2024

De retour à Paris, je vais déjeuner avec un ami au restaurant Astrance, pour préparer avec Pascal Barbot le chef et Christophe Rohat le directeur, le menu d’un dîner de wine-dinners qui se tiendra en ce lieu la semaine suivante.

Nous sommes accueillis avec de grands sourires par toute l’équipe très motivée. Je regarde dans la carte des vins qui pour les champagnes est très riche de vins d’une multitude de vignerons intéressants. Et quand je vois qu’il y a un 1996 d’un vigneron de Mesnil-sur-Oger, il n’y a pas l’ombre d’une hésitation et Lucas le sympathique sommelier valide mon choix.

Le Champagne Pascal Doquet Blanc de Blancs Grand Cru 1996 a une typicité de Mesnil-sur-Oger poussée à l’extrême. Champagne viril, salin, minéral, large et conquérant, il a un équilibre apporté par l’âge dans un millésime exceptionnel. Ce champagne expressif est convaincant et gastronomique.

J’ai apporté une Côte Rôtie La Turque Guigal 1987. Le niveau des vins de Guigal est toujours très proche du bouchon. Lucas ouvre la bouteille avec un limonadier classique et le bouchon se brise en deux car il est imbibé. Des miettes de bouchons flottent sur le vin. Je les enlève avec mes outils que j’avais dans ma sacoche.

Le parfum du vin est fascinant. J’ai l’impression d’être devant une cuve où les grappes récemment cueillies sont pressées. Il y a une vivacité et une jeunesse qui taquinent mes narines. La Turque est la plus puissante et riche des trois Côtes Rôties, mais celle-ci, si elle a une force naturelle, offre aussi un velours charmant. Le vin combine une belle maturité et une jeunesse encore sensible.

Ce vin qui n’a pas la puissance d’autres millésimes est charmant et lui aussi gastronomique.

Lorsque le repas est terminé, Pascal et Christophe arrivent à notre table pour préparer le menu du prochain dîner. C’est un véritable bonheur de travailler avec Pascal Barbot. Il est extrêmement motivé à créer des accords parfaits. Les discussions ont été animées et nous avons réussi à établir un menu pour les vins qui tiendra compte du talent du chef et des « exigences » des vins.

On peut penser qu’un grand repas nous attend.