Repas d’anniversaire avec Haut-Brion 1992lundi, 10 octobre 2016

C’est un déjeuner de famille pour l’anniversaire de ma fille cadette. Un ami ayant son anniversaire à la même période, nous nous retrouvons à dix à la maison, dont six buveurs. Le menu a été commandé par ma fille : velouté de potimarron, ail et champignons frits / poulet et deux purées de pommes de terre dont une à la truffe / reine de Saba et ananas frais. C’est à moi de m’adapter à ce menu et non le menu à mes vins.

Le Champagne Pommery Brut Royal sans année a plus de trente ans d’âge si on se fie au bouchon. La couleur confirme aussi un âge certain car elle est assez ambrée, voire rose. La bulle est active. Ce qui impressionne en ce champagne, c’est la simplicité de sa sérénité. Il est joyeux, gourmand, et tellement facile à vivre. Sans être trop dosé, il est assez doucereux. Il a une belle longueur. Tout en lui est charme et plaisir. Décidément, l’âge va bien à ce type de champagne.

Les gougères, le jambon Belota Belota sont adaptés et accompagnent joliment le champagne. Nous passons à table.

Le Chablis Premier Cru Montée de Tonnerre Alain Robin 1983 a été choisi car la couleur vue à travers le verre de la bouteille m’a semblé correspondre à celle du potimarron. Le niveau est parfait, la couleur est légèrement ambrée et sympathique et comme pour le champagne, c’est une belle surprise car le vin est franc. Le vin accuse son âge plus que le champagne et il est difficile de reconnaître en lui un chablis. On reconnaît plus un vin blanc à maturité, et ça lui va bien. L’accord avec le plat est très exact, les champignons donnant du liant.

Lorsque j’ai choisi le Château Haut-Brion rouge magnum 1992 j’ai voulu vérifier si ce vin d’une année faible présentait de l’intérêt. Lorsque j’ai commencé à acheter du vin, avec des moyens mesurés, je m’intéressais aux petites années des grands vins, à budgets beaucoup plus acceptables et j’avais pu constater qu’avec l’âge, les petites années n’étaient pas aussi handicapées que ce qu’avaient annoncé les experts au moment de leur commercialisation. J’ai ensuite gardé cette habitude même lorsque j’ai pu avoir accès aussi aux grandes années. Vérifier ce 1992 m’intéresse. A l’ouverture, je constate que le bouchon est légèrement chevillé car il se lève facilement. Mais cela n’a eu aucune influence sur le niveau qui est dans le goulot, proche du bouchon. L’odeur à l’ouverture avait une petite pointe d’acidité dont je savais qu’elle allait disparaître. Une demi-heure avant le repas, je verse le vin dans deux carafes pour faire déguster à l’aveugle ce vin. Il est maintenant servi. Le nez est très riche et profond. Il a une richesse qui m’étonne. Je reconnais au nez un vin de bordeaux, mais je sais ce que l’on boit. Autour de moi on suggère plutôt une Côte Rôtie de Guigal, peut-être en spéculant sur mon habitude de servir ces vins à la maison. En bouche, le vin est d’une richesse rare, truffé, de grande présence et de bel équilibre. Jamais je n’imaginerais qu’il s’agit d’une année de seconde importance. Sur le poulet il est brillant. A chaque gorgée il m’étonne. Ce n’est pas la première fois, surtout avec Haut-Brion, qu’une petite année donne un vin de grand plaisir.

Trouver des vins qui accompagnent une reine de Saba et de l’ananas frais est une gageure. J’avais pensé prendre un Banyuls de 1949 mais il reste du vin rouge, aussi, même si ce n’est pas l’idéal, nous buvons le vin sur la pâtisserie discrètement chocolatée. Il est plus prudent de manger les ananas sans rien et le Champagne Initial Jacques Selosse dégorgé le 8 octobre 2008 apporté par un ami présent à table est bu avec les mignardises qui finissent le repas. Le champagne a une couleur légèrement grise et blanche, la bulle est bien active et le champagne est moins directement accessible que le Pommery. C’est un champagne intellectuel, moins joyeux et franc que les mêmes « Initial » que nous avons bus ensemble pendant l’été et qui furent délicieux. Ce champagne est bon, mais un peu énigmatique et ne se livre pas autant qu’on le souhaiterait.

Ayant fouillé dans mon armoire à alcools pour trouver un alcool qui pourrait remplacer le Banyuls, j’ai exhumé une bouteille sans aucune indication, de forme bordelaise mais à vis, qui m’a rappelé des souvenirs d’il y a plus de quarante ans. Dans mon entreprise industrielle, il y avait un chauffeur de poids lourds normand qui avait sous son siège une ou deux bouteilles de calvados de fabrication artisanale de sa famille. Un jour, il m’avait donné une bouteille. C’est celle-ci. Nous trempons nos lèvres sur ce Calvados d’environ 40 ans d’âge, fort en alcool, mais très doucereux, pur, qui a mis un point final à nos agapes.

Le repas fut particulièrement gai, les cadeaux échangés dans la bonne humeur. Le Haut-Brion 1992 a brillé dans ce joyeux repas.

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