L’association « Les Grandes Tables du Monde » à Moët & Chandonmardi, 25 octobre 2011

L’association « Les Grandes Tables du Monde » tient son congrès annuel à Epernay. Les grands chefs se retrouvent pendant trois jours et visitent de grandes maisons de champagne. Le dîner de gala a lieu dans les caves de Moët & Chandon. Avant de s’y rendre, l’apéritif debout permet de parler avec beaucoup de personnes et je salue Michel Troisgros et son épouse, Eric Briffard, Philippe Etchebest, Philippe Bourguignon, et beaucoup d’autres, puis plus tard Eric Fréchon et Dominique Loiseau. Sur les amuse-bouche préparés par Bernard Dance avec qui j’avais déjeuné il y a quelques jours au château de Saran, nous buvons un Champagne Moët & Chandon impérial magnum sans année qui se boit avec une facilité déconcertante. C’est un champagne de soif, facile à vivre, qui a en permanence un goût de revenez-y.

Dans la belle salle voûtée aux multiples arches, nous sommes environ deux cent cinquante répartis en tables de dix aux noms évocateurs de qualités d’un champagne. Ma table s’appelle « élégant ». Mes convives sont Marie-Pierre et Michel Troisgros, Marie-Christine Clément du Lion d’Or à Romorantin, Jean Cousseau, le restaurateur aux foies gras réputés à Magescq et son épouse, Marie-Laure et Arnaud de l’équipe marketing de Moët & Chandon, Thierry Gardinier qui préside avec son frère aux destinées des Crayères, de Taillevent et de Phélan-Ségur entre autres et le chef du restaurant French Laundry de la Napa Valley, avec lequel je n’ai pas pu échanger un mot du fait de l’éloignement de nos sièges et du brouhaha ambiant.

Avant le dîner, Stanislas Rocoffort m’a proposé d’aller visiter la cuisine. Nul n’imaginerait qu’elle puisse être aussi immense au niveau des caves. Une brigade est alignée en rang comme pour rendre les honneurs et je salue Arnaud Lallement tout sourire qui partage avec trois autres chefs la lourde responsabilité de ce dîner pour un parterre qui compte tant de grands chefs.

Voici le menu : Homard bleu – bœuf de Coutancie (Arnaud Lallement de l’Assiette Champenoise) / dos de cabillaud de M. Doucet en habit noir, endives farcies de cèpes et jambon des Ardennes, jus à la moutarde de Reims ( Philippe Mille des Crayères) / foie gras de canard poché dans un bortsch, betteraves en croûte de sel, daïkon et enoki crus, chou Pack Choï étuvés au champagne, croûtons en beurre noisette ( Philippe Mille des Crayères) / pigeonneau, épinard, tomate, en tourte (Arnaud Lallement de l’Assiette Champenoise) / glace tutti frutti accompagnée de Panettone (Pascal Tingaud et la brigade Moët & Chandon).

Nous buvons le Champagne Moët & Chandon Grand Vintage 2002 qui commence à prendre une belle ampleur. Il se boit bien et connaîtra encore sur plusieurs années une belle évolution.

Je suis un peu heurté par le Champagne Moët & Chandon Grand Vintage Collection 1992, dégorgé en 2004, car son nez doucereux est fortement marqué par la liqueur d’expédition et en bouche, le vin manque de cohésion. La forte trace de la liqueur d’expédition et l’amertume du champagne ne se sont pas intégrées. Je soupçonne un problème de bouteille.

Le Champagne Moët & Chandon Grand Vintage rosé 2002 est d’une couleur d’un rose intense. Le nez est assez discret et ce rosé d’une belle justesse crée avec la sauce du foie gras le plus bel accord de la soirée. La sauce est rouge et l’accord couleur sur couleur fonctionne magnifiquement.

Quand je sens le Champagne Moët & Chandon Grand Vintage Collection magnum 1975, dégorgé en 2002, je me dis : « ça y est, on tient du grand ». Car le parfum de ce vin combine richesse, profondeur et élégance. La bouche confirme la promesse du nez et le vin est grand, très grand. Et il démontre que le 1992 avait un problème, tant l’écart gustatif est sensible.

Le Champagne Moët & Chandon Grand Vintage Collection Dry 1952 dégorgé en 2011 fait entrer dans le monde des « vieux » Moët que j’adore. Il a toutes les qualités du 1975 légèrement plus burinées. Il est très agréable avec une belle longueur, mais mon cœur ira vers le 1975, à la fraîcheur exceptionnelle.

Le repas mérite tous les éloges. Le homard a une chair de grande qualité. La cuisson originale du cabillaud est signalée avec enthousiasme par Michel Troisgros. Le foie gras poché se déguste comme un bonbon et la sauce épouse le champagne rosé. La tourte de pigeon est exquise et chose curieuse, le 1975 est dix fois plus à l’aise sur la tourte seule, vibrante pertinence, que lorsque la sauce est ajoutée. Une mention spéciale ira au panettone, qui est une brioche fourrée de raisins secs, de fruits confits et de zestes d’agrumes, de dimension gargantuesque, et dont la mâche est d’un plaisir rare. Il rappelle des souvenirs d’enfance. Les quatre chefs associés à cette belle fête ont créé un repas remarquable, approuvé par les professionnels de notre table, avec des recherches d’accords très subtiles.

Le Cognac Hennessy Paradis Impérial toujours aussi bon a marqué le point final d’un dîner très sympathique, avec des chefs heureux de se retrouver. Les discussions furent ouvertes, sympathiques car l’ambiance était à la joie de profiter d’une gastronomie raffinée.

notre table enjouée

le panettone, de taille impressionnante