dîner au Petit Nice chez Passédat à Marseillemercredi, 27 avril 2005

Dans le bulletin 118 je racontais une expérience au Petit Nice qui sentait la fin de saison. Nous avons bien fait d’y retourner, car la cuisine de Gérald Passédat fut éblouissante. Son menu Passédat fort éclectique et équilibré montre deux directions qu’il maîtrise remarquablement. D’un coté cette envie permanente de présenter une palette de saveurs débridées, où il faut goûter de tout. Et de l’autre une cuisine régionale sobre où le respect de la tradition est le plus pur. J’ai naturellement un penchant pour cette cuisine orthodoxe car je pense aux vins anciens que j’associerais. Mais si le chef lance des bouffées de création folle et intelligente, il faut encourager cette tendance. Nous avons eu du Watteau et du Van Gogh. Tant mieux pour nos papilles. Le pagre et la galinette furent remarquablement traités. Là où le chef ne peut s’empêcher de se laisser aller, c’est quand il associe une soupe de poissons avec un granité au fenouil. Là, Van Gogh se coupe l’oreille que le reste de son repas, faisant agiter les mouchoirs blancs, lui aurait donnée. Le homard fut beau et le pigeon goûteux. Un repas de grand plaisir. Avec une constance dans mes choix dont je ne me suis souvenu qu’en relisant le bulletin 118, nous commençâmes par un Krug 1985 toujours aussi excitant de personnalité affirmée. Voilà un champagne qui cause à mes papilles. Le Morey Saint-Denis blanc Dujac 1998 me combla d’aise. C’est un vin que l’on boit peu souvent, à l’élégance rare, qui a le mérite de dire son texte d’une voix juste. Délicatement citronné, équilibré, c’est un plaisir raffiné. J’ai vibré à sa présentation mesurée.
Le Chateauneuf du Pape Domaine de la Nerthe « Cuvée Cadettes » 1996 est un puissant bambin qui casse les barreaux de son parc. Il lui faut de l’espace en bouche. Le vin a de la mâche, du bois pénétrant et précis. Son attaque est plus éblouissante que son final. Mais c’est un beau vin jeune de plaisir. Vint ensuite une recommandation de sommelier. Le Château Revelette, « Or série » de Peter Fischer, vin de pays des Bouches du Rhône 2001 est un chardonnay surmaturé au goût d’eau sucrée, de banane, voire de thé, de litchi, et autres plaisanteries pastorales. C’est du pur exercice de style auquel je ne mords pas. Mais je ne regrette pas de l’avoir essayé. Notre palais se repositionna sur un cognac Richard de Hennessy absolument magistral. Beau dîner en cette maison au bord de l’eau où Marseille se montre sous son plus beau jour. Un service impeccable et un chef en pleine possession de son pur talent. C’est comme ça qu’il sent bon, le Sud. Vé…