Merveilleux repas au restaurant Michel Rostang samedi, 24 février 2018

Il y a bien longtemps que je n’avais pas partagé de belles bouteilles avec mon ami Tomo. Cela nous manquait. Alors, quand il y a un manque, il faut se rattraper avec des flacons prestigieux. Nous serons deux et voici le programme : Cheval Blanc 1947, Vosne-Romanée Cros Parantoux Henri Jayer 1994, Hermitage La Chapelle Paul Jaboulet Aîné 1938. Il n’y a que des vins rouges, mais il faut savoir explorer aussi des pistes non conventionnelles.

J’arrive à 11 heures au restaurant Michel Rostang pour ouvrir les deux vins en ma possession, le vin d’Henri Jayer de ma cave et l’Hermitage que nous avons acheté en commun, Tomo et moi. Le bouchon du Cros Parantoux ne pose aucun problème et le nez du vin est d’une rare jeunesse. La capsule de l’Hermitage est difficile à enlever entière car l’étain est très fragile et collé au bouchon. Le bouchon me semble présenter les mêmes problèmes que celui du Montrose 1964 : liège incroyablement friable et imbibé, bouchon collé aux parois, et cerise sur le gâteau, surépaisseur sur une partie du goulot, qui l’empêche de sortir sans se déchirer. Le bouchon vient donc en mille morceaux mais j’arrive à tout sortir sans qu’une miette ne tombe dans le vin.

Jasmin, une jeune sommelière adjointe de Baptiste, le sympathique sommelier qui fait la suite d’Alain Ronzatti, l’historique sommelier du restaurant, a filmé l’ouverture de ce vin.

Le parfum du vin du Rhône me semble solide et prometteur. Je rédige ces lignes en attendant Tomo qui va venir avec un Cheval Blanc 1947 de mise Calvet qui avait reçu ce vin en barriques. C’est la première fois que je vois ce vin mythique en mise Calvet.

En attendant Tomo je mets au point le menu avec Michel Rostang lui-même. Il avait fait demander par Baptiste quel plat conseillerait le domaine pour cet Hermitage 1938. Le domaine n’a pas d’archive avant 1945 et le conseil donné est du veau plutôt que de la viande rouge.

Il se trouve que Michel Rostang et son épouse déjeunent avant le service dans la salle qui jouxte la cuisine et je vois une belle pièce de bœuf qui leur est servie en tranches. Je n’hésite pas, ce sera bœuf et non pas veau.

Tomo arrive un peu après les douze coups de midi et j’ouvre la bouteille. La capsule est neutre ce qui est étonnant et le bouchon est neutre et très court. C’est un bouchon de modeste qualité. Tomo se demande si la bouteille est authentique. Je n’ai pas le moindre doute car un faussaire qui voudrait faire un Cheval Blanc 1947 s’y prendrait autrement. Pour laisser au bordeaux le temps de s’aérer, on changera l’ordre des vins et le Cros Parantoux sera servi avant le Cheval Blanc. Le nez du bordeaux me paraît logique avec l’année ou du moins la période et avec l’appellation.

Les délicieux petits amuse-bouche seraient mieux appropriés à un champagne qu’à un bourgogne aussi noble mais nous le goûtons quand même et nous sommes émerveillés. Le nez du Vosne-Romanée Cros Parantoux Henri Jayer 1994 est expressif et intense et la bouche combine avec une grande élégance une délicatesse absolue et une belle puissance. Ce vin pianote ses complexités dans toutes les directions et jamais une gorgée ne ressemble à la précédente. Le vin est chaleureux et nous sentons que nous sommes face à un grand vin d’Henri Jayer. Nous sommes heureux.

On nous sert maintenant les sandwiches à la truffe qui ont contribué à la réputation de Michel Rostang. Ils sont divins et il me semble que ce serait dommage de les manger avec le si subtil Cros Parantoux. Je demande donc qu’on nous serve le Château Cheval Blanc 1947. La couleur dans le verre est très sombre comparée à la couleur particulièrement claire du bourgogne. Le nez est authentique mais discret. La bouche manque d’ampleur. C’est un beau vin mais ce n’est pas la légende. Mais il faut savoir attendre. Le saint-émilion est très cohérent avec les sandwiches lourdement truffés et s’étoffe avec eux.

Le ris de veau qui arrive presque nu sur l’assiette, ce que j’adore, va faire briller le Vosne-Romanée Cros Parantoux Henri Jayer 1994. Le vin trouve dans l’accord une belle énergie. Il garde la délicatesse et la subtilité, gagne en puissance, et ses complexités sont d’une rare noblesse. Le goût intense n’en finit pas de marquer le palais. Nous sommes aux anges.

Pour le Château Cheval Blanc 1947, j’ai demandé à Michel Rostang de préparer des filets de rougets juste poêlés avec une petite sauce réduite. Le plat est servi avec une simplicité qui me ravit, avec un cannelloni de topinambour. Le rouget joue un rôle d’exhausteur de goût pour le vin qui prend une largeur sans commune mesure avec ce qu’il montrait jusqu’alors. Nous commençons à lever le voile d’un possible grand vin. Il ne fait aucun doute qu’il s’agit d’un vrai Cheval Blanc 1947, mais nous n’avons que 80% de ce qu’est ce vin de légende. Nous nous régalons, mais pas au septième ciel qu’il devrait nous offrir.

La viande de bœuf nous est servie en tranches avec une purée aux truffes et une sauce plombée de copeaux de truffe excite son goût. Avec une générosité particulière le maître d’hôtel va recouvrir la viande de fines lamelles de truffes comme si un Pinatubo de truffe voulait noyer la viande. L’Hermitage La Chapelle Paul Jaboulet Aîné 1938 est d’une bouteille d’une rare beauté. Le niveau est très convenable pour une bouteille de cet âge à 5 cm environ. Le vin qui est servi est assez trouble et je n’aime pas tellement sa couleur un peu terreuse. Mais le nez du vin est pur et son goût est riche et généreux. Le domaine Jaboulet avait dit à Baptiste qu’il est probable que ce 1938 ressemble à un 1962 qui est très bourguignon et c’est vrai qu’il a une belle délicatesse mais le vin est résolument rhodanien. Il y a en effet dans le finale des évocations de terroir qui sont plus du Rhône que de la Bourgogne. La viande et la truffe transportent ce vin à de belles hauteurs. Le vin riche et spontané, très droit, est de grande qualité. Il reste suffisamment de vin pour que nous demandions les fromages. Ce sera uniquement le saint-nectaire, qui est le seul fromage suffisamment doux pour ces vins subtils.

J’ai apporté avec moi la bouteille de Marc de rosé d’Ott 1929. Je suis sûr que ce Marc sera le gagnant de ce repas. Nous commandons un soufflé au Grand Marnier qui, n’étant pas flambé, conviendra à l’alcool. Il ne faut pas prier Tomo pour qu’il confirme que le marc est de loin le gagnant du repas car sur un nez très sec et fort il offre en bouche une invraisemblable suavité. C’est du bonheur en liquide.

La salle s’est lentement mais sûrement vidée aussi invitons-nous Baptiste et Jasmin à venir nous rejoindre. Tomo offre un Champagne Krug Clos du Mesnil 1992. C’est intéressant de penser que 1994 qui n’est pas une grande année nous a donné un Cros Parantoux exceptionnel et que 1992 qui n’est pas une grande année nous donne un Clos du Mesnil d’une qualité de très haut niveau. Les années qui passent changent la donne pour les grands vins. Nous avons continué à bavarder en buvant ce champagne très jeune, vif, qui combine des notes vertes d’une belle acidité avec la noblesse d’un champagne de perfection.

Si nous devons classer ce que nous avons bu qui est très disparate ; ce sera 1 : Marc de rosé d’Ott 1929, 2 - Vosne-Romanée Cros Parantoux Henri Jayer 1994, 3 ex aequo Hermitage La Chapelle Paul Jaboulet Aîné 1938 et Champagne Krug Clos du Mesnil 1992, 5 - Château Cheval Blanc 1947. Si un Cheval Blanc 1947 est cinquième dans un repas, c’est que la qualité des autres vins est exceptionnelle.

Le restaurant Michel Rostang a toutes les agréables caractéristiques d’une maison familiale. Avant le service, Michel et sa femme déjeunent alors que toute l’équipe se démène tout autour. Le menu a été mis au point avec Michel, Baptiste mais aussi avec Nicolas Beaumann le chef qui ne pouvait être présent et que j’avais prévenu du fait que nous ouvrions l’Hermitage 1938. Tout le service s’est impliqué pour que nous ayons un repas parfait. Chaque plat a mis en valeur le vin auquel il était associé. Tout le monde exauçait nos souhaits. Ce fut un des plus beaux repas que nous ayons partagés, Tomo et moi.

La Saint-Valentin au restaurant l’Ecu de France jeudi, 15 février 2018

La Saint-Valentin, c'est la Saint-Valentin, ça ne se discute pas, comme la saucisse de Morteau, le lièvre à la Royale ou la crêpe Suzette : lorsque l'on est face à face, il est interdit de se dérober. C'est ma femme qui a le choix des armes et ce sera le restaurant l'Ecu de France. On pourrait penser que nous aurions une table sans difficulté mais Madame Brousse m'annonça que le restaurant est complet et me passa au téléphone son mari qui eut la bonne réaction : « on s'arrangera ». Lorsque nous nous présentons à 20 heures, le parking du restaurant est déjà bien rempli. Monsieur Brousse nous accueille et nous dit : « je vous ai attribué la table que vous aimez ». Elle est tournée vers la Marne et malgré la nuit nous voyons que le niveau de l'eau est très élevé, ayant masqué une bonne partie du jardin. La cave a été inondée, mais comme les Brousse sont habitués aux crues hivernales, les bouteilles sont à l'abri et celle que je prendrai ce soir est impeccable.

Nous nous asseyons à notre table et le menu de la Saint-Valentin est ainsi composé : amuse-bouche, homard en habit rouge / foie gras truffé au caramel de betterave, espuma de mangue / velouté de potimaron, coquille Saint-Jacques et langoustines rôties, confiture de rose, caviar de hareng / baronnade de pigeonneau truffé, beurre Suzette au piment d'Espelette / pomme d'amour confite en coque de chocolat et praline rose, glace à la rose et au litchi.

L'idée de mettre des tons de rouge ou de rose sur tous les plats est charmante. Peter Delaboss le chef, est né en Haïti et sa cuisine généreuse s'est épanouie. Il garde ses penchants exubérants mais les plats sont très cohérents, fondés sur de bons produits. Le homard enveloppé dans de fines tranches de betteraves rouges arrive un peu froid, mais le plat est bon. Le foie gras est superbe, goûteux et gourmand, les coquilles dans le velouté sont parfaites. Le pigeon est d'une chair idéale, et le foie qui l'accompagne, très différent du premier, est d'une rare gourmandise. Quant à la pomme, elle est exquise. Tout fut grand, charmant, joyeux. C'est ce qu'il faut pour une Saint-Valentin.

Avant de commencer le repas, je prends un Champagne Bollinger sans année au verre. Comme la bouteille a été ouverte il y a un certain temps, le champagne est large et très plaisant, paraissant plus vieux que son âge ce qui lui convient. Il se boit bien.

J'ai choisi un Grands-Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2010. La bouteille arrive froide et Hervé Brousse me demande si je souhaite qu'on carafe ou qu'on réchauffe le vin. Je préfère laisser faire la nature pour que le vin s'ébroue à son rythme. Le premier contact est effectivement froid. Le nez exhale d'abord l'alcool du vin et en bouche on ne reconnaît pas le domaine. Comme une rose qui s'éveille au soleil du matin, le vin va progressivement me conquérir. Je dis « me » car je suis seul à boire. Ma femme qui a un nez pertinent pour jauger les vins sans les boire, va commenter avec moi l'éclosion du vin.

La première approche est assez dure, car le vin est froid. L'alcool est sur le devant de la scène. Ensuite viennent des fruits discrets et délicats. L'amertume est marquée, annonçant que les grappes entières sont abondantes, non éraflées. Puis progressivement, on ouvre les portes de la Romanée Conti. Le sel combiné au goût de rafle, sont les premiers marqueurs du domaine et je commence à me sentir bien. Le vin prend la bonne température et comme le chef a eu l'heureuse idée de mettre de la rose dans presque tous les plats, j'attrape au vol les beaux symboles de la Romanée Conti, la rose et le sel. Je me sens de mieux en mieux et le vin s'épanouit et devient joyeux. Attention, c'est une joie très intérieure car dans ce domaine on n'extériorise pas ses sentiments. Je bois un vin d'une rare élégance et d'une rare délicatesse. C'est si élégant et raffiné que la question de l'âge ne se pose même pas. Le vin est là, à cet instant béni par le calendrier, et mon plaisir est total.

Je verse un verre pour qu'Hervé le goûte. Hervé s'empresse d'en faire goûter à son père et je vois que le verre se retrouve sur la table d'un habitué, bien connu des Brousse.

Pour finir mon vin je demande un peu de fromage avant le dessert qui exclut tout accord et un Brie fourré à la noix est un très beau compagnon des derniers verres. C'est alors qu'arrive sur ma table un verre de Château Latour 1975 servi en demi-bouteille. C'est l'ami des restaurateurs, d'une table lointaine, qui avait goûté le bourgogne. Il me renvoie la balle avec ce bordeaux. Les deux vins ne s'excluent pas, quel que soit le sens de la dégustation. Le bordeaux est plus carré, solide, concentré. Le Grands Echézeaux a la narine plus frémissante. Le bordeaux est un seigneur en arme, le bourgogne est un poète romantique. Pour ce soir, c'est le bourgogne qui pianote de rares complexités qui emporte mon cœur, mais le Latour est un beau vin, de belle charpente et de belle vibration.

Avant de partir nous allons chaudement féliciter le chef qui a réalisé un repas très sensible, généreux, au cœur innombrable. Bravo au chef et à la famille Brousse d'avoir permis que nous passions un repas de grand bonheur.

les beaux verres gravés

dinner with friends in restaurant Pages mercredi, 31 janvier 2018

Alain, Didier, Julien and Patrice are faithful of the academy of ancient wines and among the most generous members. The excuse to meet up is that Patrice bought a nice bottle of Yquem 1947 that we agree to finance in common. Didier takes the initiative to create a dinner around large bottles brought by everyone and his friend Sintija joins us. She has no experience of ancient wines but she will learn very quickly during this meal.

I am responsible for finding a restaurant and quite naturally the choice is that of the restaurant Pages. Didier makes sure that all the bottles reach either the restaurant or my office so that I can open them at 5 pm at the restaurant. We are so crazy that there are more than three wines per person. So I will eliminate some of them based on the results of the openings. The corks are quite difficult and break into several pieces so that the opening operation lasted an hour and a half. There are very motivating fragrances.

The Champagne Comtes de Champagne Taittinger Magnum 1964 of Julien has a low level. The cape that covers the cork is eaten by mold around the top of the neck. It takes me several minutes to clean around the cork so that no dirt falls into the wine. When I can grasp the cork it comes instantly because the bottom cap disc is so narrowed that it has a size of less than half of what it should. The color is unappealing, earthy and gray. On the palate champagne without bubble is flat. Drinking gives no emotion so Julien asks for a bucket so that we can empty our glasses. I'm the only one to keep my glass because I want to see how this champagne with pale accents can evolve. During the meal I could see that the platitude of the champagne disappears, that the wine is growing, but without being able to offer a sufficient emotion. But it became drinkable.

From memory and without support of a menu that would have been printed, the menu that I developed with the chef Teshi during the opening session of the wines is: amuse-bouche in five flavors including a broth, a raw fish , a piece of onion, a piece of cauliflower and another preparation that I have not memorized / Ozaki beef in carpaccio / raw scallops with a risotto / monkfish with shells and cabbage leaves / cod with a meat sauce and small potatoes / three pieces of beef, Simmental, Charolais and Wagyu, the three having had a long-ripening / just pan-fried mangoes / dessert of the day with red fruit sorbet, pomegranate seeds and caramels.

The champagne of 1964 having had a short life on our table, I open the Champagne Brut Imperial Moët & Chandon 1959 which is one of my contributions. Under the pretty cape the cap exudes a black glue. My fingers are getting dirty quickly. When I turn the cap it breaks and the bottom gets stuck in the neck. I try to sting with my long wick but I cannot push in as the cork is dense. With a normal corkscrew I finally lift the lower part. The wine could not be in contact with the black glue. The wine served has beautiful bubbles and a magically clear color. We drink and this champagne is superb, balanced, serene, glorious like all the old Imperial Brut of Moët. He accompanies amuse-bouche who are a little too intellectual for the champagne who would like more sweet flavors. The champagne is excellent but it may be a little too classic and not enough scoundrel.

We start the series of whites. When Julien announced a Chablis Faiveley 1928, I wanted to confront him to a Chablis Faiveley 1926 that I had in cellar. The level of 1926 is low so I had taken a 1955 White Hermitage in case it would be necessary, which we will not need. Raw shells are ideal for showcasing these two whites. What strikes me right away is that these two wines have identical DNA. They have the same freshness, the same chiseled precision of the message and they differ only in volume, the 1928 being wider and the body more assertive. I had fun saying that I still prefer my wines and that the more graceful and romantic 1926 I like more but in fact both are of immense purity, the 1928 being, thanks to its year, more conquering. The performance of both wines is impressive.

Didier insisted that I open the Côtes du Rhône Brézème Domaine Pouchoulin white 1952 low and whose cork wax had been decapitated a long time ago. At the point of pointing the corkscrew the cork slipped, impossible to prevent from falling. It had to be decanted and the color was not very inviting. Served now it is drinkable but its emotion is very weak after the two chablis. Didier, defending his baby told us the esteem he has for this domaine which the 1906 he drank is a marvel. As he repeated at least ten times it was necessary to remind him that what we drink is not the 1906 but the 1952, wine rather weak.

For monkfish, it is the Bâtard-Montrachet domaine Claude Ramonet 1964 of Sintija which is served. His color is beautifully young. The wine is pure, merry with good acidity. It is delicious with the monkfish and it is especially the hulls that make it vibrate the most. It is a beautiful wine but I think it does not have the full panache of a Ramonet. He is tall but not dazzling.

We now go to the reds and I let serve three wines, two of 1928 and one of 1929. This is to be noted because these two years are legendary. The Château Carbonnieux red 1928 of Alain is an absolute marvel. Its color is blood red. The wine is rich and heavy, with an infinite velvet and a heavy grain of truffle and charcoal. This Carbonnieux is at the top of Bordeaux wine. It is absolutely huge. I am deeply moved.

When I have my lips on the Hautes Côtes de Beaune Bouchard Ainé 1929 of Didier, I get a punch to the heart. Because this wine is a seduction of an unbelievable sensuality. The Carbonnieux is King François 1st commanding the troops in combat. This Côtes de Beaune is Suzanne in the bath, it is the Odalisque of Ingres, it is the absolute seduction. I am so charmed that I lose all objectivity. We are faced with the absolute seduction of Burgundy but especially of the year 1929.

The third wine that accompanies the cod that subjugates everyone by its relevance on wines is the Corton-Grancey Grand Cru Louis Latour 1928 of Patrice. After the other two, he has a lot more trouble positioning himself. If he were alone in a meal, we would be ecstatic, but after the two sacred monsters, he lacks a little vivacity and emotion. He is still rich enough. We are thrilled to taste these three wines so perfect.

For the three pieces of beef we add two more reds. Clos Vougeot Bouchard Père & Fils 1955 of Sintija creates a fascinating break. Because all of a sudden we discover a wine 'young' (everything is relative) and incredibly Burgundy. He has this exciting rasp of wild Burgundy wine. He is lively, active and does not leave anyone indifferent. I love it.

The Châteauneuf du Pape Henri Bonneau Réserve des Célestins 1976 of Julien is struggling to pass after the other four. Julien is sad but I think he has no reason because this Châteauneuf is good. It is very good but its message seems simple after the wines of Burgundy. For him too we can say that if he was drunk alone in a meal, as for the Corton Grancey 1928, we would feast, because it has a coherence and a nice chew that are pleasant. Meats are delicious and Simmental is the most suitable for wines because it combines firmness and intensity of taste. Wagyu would be better suited to young and rich wines.

The three sauternes are served at the same time on mangoes. I start with the Château d'Yquem 1947 which we are all co-contributors since we shared the cost. This Yquem is royal, deep, complex with myriad complexities, but above all it has a boldness, a fatness, that differentiates it from the other 1947.

The Château Suduiraut 1947 of Patrice has a color as dark as the Yquem. It is powerful and very close to the quality of the Yquem. The difference is the diabolical fat of the Yquem, while the Suduiraut is an exemplary purity and a beautiful complexity too.

After these two legends, the Château La Tour Blanche 1920 that I brought is a gringalet. Its color is much clearer than that of both 1947 and it is translucent while the other two are opaque. In the mouth he is graceful, he ate some of his sugar and he is a romantic that I love. He too would be a star if he was alone on the table.

We are a little groggy not by the alcoholic load of wines but by the conjunction of so many perfect and legendary bottles. Several times we had in front of us together perfection and eternal wines, which we would find in the same state and with the same emotion if we could taste them again in fifty years from now.

Didier would be very happy if this dinner he had initiated could be counted among my wine-dinners. It would be more logical to count it as a session of the academy for ancient wines but as I opened all the wines and as I composed the menu with the chef we can make an exception for this dinner which will be the 221st. Because of this, we have to vote.

We are six to vote for our five favorite wines among the 14 of the meal. Three wines had the honors of the first place. The Yquem was nominated four times first, the Hautes Côtes de Beaune Bouchard Ainé 1929 once and the Brut Imperial Champagne Moët & Chandon 1959 once also. Ten wines out of fourteen were in the votes which is particularly brilliant.

The vote of consensus would be: 1 - Château d’Yquem 1947, 2 - Hautes Côtes de Beaune Bouchard Ainé 1929, 3 - Clos Vougeot Bouchard Père et Fils 1955, 4 - Château Carbonnieux rouge 1928, 5 - Champagne Brut Imperial Moët & Chandon 1959.

My vote is: 1 - Hautes Côtes de Beaune Bouchard Ainé 1929, 2 - Château d’Yquem 1947, 3 - Château Carbonnieux rouge 1928, 4 - Clos Vougeot Bouchard Père et Fils 1955, 5 - Château La Tour Blanche 1920.

It could stop there, but Julien takes in his bag a bottle of a Marc de rosé Domaine d'Ott 1929, in a bottle of rare beauty which is the historic bottle of wines of the estate. On the nose, the alcohol seems strong and dry. On the palate it is of a softness and a sweetness which makes that one would drink without stopping. This marc is diabolical, I love it.

Chef Teshi made dishes that stuck perfectly to the wines. Thibaut has done an intelligent service of wines and despite the smallness of the table I was able to line up the 14 glasses of wines plus alcohol in front of my place. Apart from the champagne of the beginning, all the wines presented themselves to the best of themselves. None of us imagined such a success. It was a memorable dinner that proves that the 90-year old wines still have a lot of energy.

(pictures can be seen in the next article in French)

Dîner d’amis au restaurant Pages mercredi, 31 janvier 2018

Alain, Didier, Julien et Patrice sont des fidèles de l'académie des vins anciens et parmi les plus généreux. Le prétexte pour se retrouver est que Patrice a acheté une belle bouteille d'Yquem 1947 que nous acceptons de financer en commun. Didier prend l'initiative de nous regrouper autour de grandes bouteilles apportées par chacun et son amie Sintija se joint à nous. Elle n'a aucune expérience des vins anciens mais elle va apprendre très vite au cours de ce repas.

Je suis chargé de trouver un restaurant et assez naturellement le choix est celui du restaurant Pages. Didier fait en sorte que toutes les bouteilles parviennent soit au restaurant soit à mon bureau pour que je puisse les ouvrir dès 17 heures au restaurant. Nous sommes tellement fous qu'il y a plus de trois vins par personne. Je vais donc éliminer certaines d'entre elles en fonction des résultats des ouvertures. Les bouchons viennent assez difficilement et se brisent en plusieurs morceaux ce qui fait que l'opération d'ouverture a duré une heure et demie. Il y a des parfums très motivants.

Le Champagne Comtes de Champagne Taittinger Magnum 1964 de Julien a un niveau bas. La cape qui recouvre le bouchon est mangée par des moisissures tout autour du haut du goulot. Il me faut plusieurs minutes pour nettoyer le pourtour du bouchon pour qu'aucune saleté ne tombe dans le vin. Lorsque je peux saisir le bouchon il vient instantanément car le disque de bas de bouchon est tellement rétréci qu'il a une taille de moins de la moitié de ce qu'il devrait. La couleur est peu engageante, terreuse et grise. En bouche le champagne sans bulle est plat. Le boire ne procure aucune émotion aussi Julien demande un seau pour que l'on puisse vider nos verres. Je suis le seul à garder mon verre car j'ai envie de voir comment ce champagne aux accents si pâles pourra évoluer. Au cours du repas j'ai pu constater que la platitude du champagne disparaît, que le vin s'étoffe, mais sans pouvoir offrir malgré tout une émotion suffisante. Mais il est devenu buvable.

Le menu que j'ai mis au point avec le chef Teshi pendant la séance d'ouverture des vins est : amuse-bouche : bouillon de coquilles Saint-Jacques au gingembre, bonite fumée, chou-fleur rôti, Ceviche de lieu jaune, sablé parmesan et topinambour / carpaccio de bœuf wagyu Ozaki / risotto aux agrumes, radis Daïkon, carpaccio de Saint-Jacques / lotte rôtie, sauce ventrèche de porc noir de Bigorre et chou pointu / cabillaud sauce matelote et pomme de terre de Noirmoutier / dégustation de bœuf maturé ( Simmental 9 semaines, charolais 11 semaines, wagyu Ozaki 5 semaines) / mangue poêlée / pana cotta vanille, zeste de citron vert, sorbet grenade / mignardises.

Le champagne de 1964 ayant eu une courte vie sur notre table, j'ouvre le Champagne Brut Imperial Moët & Chandon 1959 qui est l'un de mes apports. Sous la jolie cape le bouchon exsude une glu noire. Mes doigts se salissent rapidement. Lorsque je tourne le bouchon il se brise et le bas reste coincé dans le goulot. J'essaie de piquer avec ma longue mèche mais je n'arrive pas en enfoncer tant le liège est dense. Avec un tirebouchon faisant levier je lève enfin la partie basse. Le vin n'a pas pu être au contact de la glu noire. Le vin servi a de belles bulles est une couleur magiquement claire. Nous trinquons et ce champagne est superbe, équilibré, serein, glorieux comme tous les Moët Brut Impérial anciens. Il accompagne les amuse-bouche qui sont un peu trop intellectuels pour le champagne qui aimerait des saveurs plus douces. Le champagne est excellent mais il est peut-être un peu trop classique et pas assez canaille.

Nous commençons la série des blancs. Lorsque Julien avait annoncé un Chablis Faiveley 1928, j'ai eu envie de le confronter à un Chablis Faiveley 1926 que j'avais en cave. Le niveau du 1926 est bas aussi j'avais pris un Hermitage blanc 1955 de secours, dont nous n'aurons pas besoin. Les coquilles crues sont idéales pour mettre en valeur ces deux blancs. Ce qui me frappe tout de suite c'est que ces deux vins ont un ADN identique. Ils ont la même fraîcheur, la même précision ciselée du message et ils ne différent qu'en ampleur, le 1928 étant plus large et au coffre plus affirmé. Je me suis amusé à dire que je préfère toujours mes vins et que le 1926 plus gracile et plus romantique me plait plus mais en fait les deux sont d'une immense pureté, le 1928 étant, grâce à son année, plus conquérant. La prestation des deux vins est impressionnante.

Didier a tenu à ce que j'ouvre le Brézème Côtes du Rhône domaine Pouchoulin blanc 1952 au niveau bas et dont la cire du bouchon avait été décapitée il y a longtemps. Au moment de pointer le tirebouchon le bouchon a glissé, impossible à remonter. Il a fallu carafer et la couleur n'était pas très engageante. Servi maintenant il est buvable mais son émotion est bien faible après les deux chablis. Didier, défendant son bébé nous a raconté l'estime qu'il a pour ce domaine dont le 1906 qu'il a bu est une merveille. Comme il l'a répété au moins dix fois il a fallu lui rappeler que ce que nous buvons n'est pas le 1906 mais le 1952, vin effacé.

Pour la lotte, c'est le Bâtard-Montrachet domaine Claude Ramonet 1964 de Sintija qui est servi. Sa couleur est magnifique de jeunesse. Le vin est pur, joyeux à la belle acidité. Il est délicieux avec la lotte et c'est surtout les coques qui le font vibrer le plus. C'est un beau vin mais je trouve qu'il n'a pas totalement le panache d'un Ramonet. Il est grand mais pas éblouissant.

Nous passons maintenant aux rouges et je fais servir trois vins, deux de 1928 et un de 1929. C'est à signaler car ces deux années sont légendaires. Le Château Carbonnieux rouge 1928 d'Alain est une merveille absolue. Sa couleur est de rouge sang. Le vin est riche et pesant, avec un velours infini et un grain lourd de truffe et de charbon. Ce Carbonnieux est au sommet du vin de Bordeaux. Il est absolument immense. Je n'en reviens pas.

Lorsque je porte mes lèvres au Hautes Côtes de Beaune Bouchard Ainé 1929 de Didier, je reçois un coup de poing au cœur. Car ce vin est d'une séduction d'une sensualité invraisemblable. Le Carbonnieux, c'était François 1er commandant les troupes au combat. Ce Côtes de Beaune, c'est Suzanne au bain, c'est l'Odalisque d'Ingres, c'est la séduction absolue. Je suis tellement sous le charme que j'en perds toute objectivité. On est face à la séduction absolue de la Bourgogne mais surtout de l'année 1929.

Le troisième vin qui accompagne le cabillaud qui subjugue tout le monde par sa pertinence sur les vins est le Corton-Grancey Grand cru Maison Louis Latour 1928 de Patrice. Après les deux autres, il a beaucoup plus de mal à se positionner. S'il était seul dans un repas, on s'extasierait, mais après les deux monstres sacrés, il manque un peu de vivacité et d'émotion. Il est quand même suffisamment riche. Nous sommes aux anges de goûter ces trois vins si parfaits.

Pour les trois morceaux de bœuf nous ajoutons deux autres rouges. Le Clos Vougeot Bouchard Père et Fils 1955 de Sintija crée une rupture fascinante. Car tout d'un coup nous découvrons un vin 'jeune' (tout est relatif) et incroyablement bourguignon. Il a cette râpe excitante du vin bourguignon sauvage. Il est vif, actif et ne laisse personne indifférent. Je l'adore.

Le Châteauneuf du Pape Henri Bonneau Réserve des Célestins 1976 de Julien a du mal à passer après les quatre autres. Julien en est triste mais je crois qu'il n'a aucune raison car ce Châteauneuf est bon. Il est même très bon mais son message parait assez simple après les vins de Bourgogne. Pour lui aussi on peut dire que s'il était bu tout seul dans un repas, comme pour le Corton Grancey 1928, on s'en régalerait, car il a une cohérence et une belle mâche qui sont plaisantes. Les viandes sont délicieuses et c'est le Simmental qui est le plus adapté aux vins car il allie fermeté et intensité du goût. Le Wagyu conviendrait mieux à des vins jeunes et riches.

Les trois sauternes sont servis en même temps sur les mangues. Je commence par le Château d'Yquem 1947 dont nous sommes tous co-apporteurs puisque nous en avons partagé le coût. Cet Yquem est royal, profond, complexe avec des myriades de complexités, mais surtout il a un gras qui le différencie de l'autre 1947.

Le Château Suduiraut 1947 de Patrice a une couleur aussi foncée que l'Yquem il est puissant et très proche qualitativement de l'Yquem. La différence se fait par le gras diabolique de l'Yquem, tandis que le Suduiraut est d'une pureté expressive exemplaire et d'une belle complexité lui aussi.

Après ces deux monstres, le Château La Tour Blanche 1920 que j'ai apporté est un gringalet. Sa couleur est beaucoup plus claire que celle des deux 1947 et il est translucide alors que les deux autres sont opaques. En bouche il est gracieux, il a mangé une partie de son sucre et il est d'un romantisme que j'adore. Lui aussi serait une vedette s'il était seul sur la table.

Nous sommes un peu groggys non pas par la charge alcoolique des vins mais par la conjonction d'autant de bouteilles parfaites et légendaires. Nous avons plusieurs fois côtoyé la perfection et des vins éternels, que nous retrouverions dans le même état et avec la même émotion si nous pouvions les goûter à nouveau dans cinquante ans.

Didier serait très heureux si ce dîner dont il est à l'origine pouvait être compté parmi mes dîners de wine-dinners. Il serait plus logique de le compter comme une séance de l'académie mais comme j'ai ouvert tous les vins et comme j'ai composé le menu avec le chef on peut faire une exception pour ce dîner qui sera le 221ème. De ce fait, il faut voter.

Nous sommes six à voter pour nos cinq vins préférés parmi les 14 du repas. Trois vins ont eu les honneurs de la place de premier. L'Yquem a été nommé quatre fois premier, le Hautes Côtes de Beaune Bouchard Ainé 1929 une fois ainsi que le Champagne Brut Imperial Moët & Chandon 1959. Dix vins sur quatorze ont figuré dans les votes ce qui est particulièrement brillant.

Le vote du consensus serait : 1 - Château d'Yquem 1947, 2 - Hautes Côtes de Beaune Bouchard Ainé 1929, 3 - Clos Vougeot Bouchard Père et Fils 1955, 4 - Château Carbonnieux rouge 1928, 5 - Champagne Brut Imperial Moët & Chandon 1959.

Mon vote est : 1 - Hautes Côtes de Beaune Bouchard Ainé 1929, 2 - Château d'Yquem 1947, 3 - Château Carbonnieux rouge 1928, 4 - Clos Vougeot Bouchard Père et Fils 1955, 5 - Château La Tour Blanche 1920.

Ça pourrait s'arrêter là, mais Julien sort de sa musette une bouteille d'un Marc de rosé Domaine d'Ott 1929, dans une bouteille d'une rare beauté qui est la bouteille historique des vins du domaine. Au nez, l'alcool paraît fort et sec. En bouche il est d'une douceur et d'une suavité qui font qu'on en boirait sans s'arrêter. Ce marc est diabolique, je l'adore.

Le chef Teshi a fait des plats qui ont collé parfaitement aux vins. Thibaut a fait un service intelligent des vins et malgré la petitesse de la table j'ai pu aligner sur trois rangées les 14 vins plus l'alcool devant ma place. A part le champagne du début, tous les vins se sont présentés au meilleur d'eux-mêmes. Aucun d'entre nous n'imaginait une telle réussite. Ce fut un dîner mémorable qui prouve que les vins antiques de 90 ans ont encore une sacrée énergie.

Champagne Comtes de Champagne Taittinger Magnum 1964

On remarque à quel point le bas du bouchon est rétréci

Champagne Brut Imperial Moët & Chandon 1959

Chablis Faiveley 1928

Chablis Faiveley 1926

les bouchons des deux Faiveley. le 1926 à gauche et le 1928 à droite

Brézème Côtes du Rhône domaine Pouchoulin blanc 1952

Bâtard-Montrachet domaine Claude Ramonet 1964

Château Carbonnieux rouge 1928

bouchon du Carbonnieux 28 (à droite) et du Hautes Côtes de Beaune 1929 (à gauche)

Hautes Côtes de Beaune Bouchard Ainé 1929

Corton-Grancey Grand cru Maison Louis Latour 1928

bouchons du Corton Grancey 1928 (à droite) et du Clos Vougeot 1955 (à gauche)

Clos Vougeot Bouchard Père et Fils 1955

magnifique bouchon de 1955

Châteauneuf du Pape Henri Bonneau Réserve des Célestins 1976

Château d’Yquem 1947

Château Suduiraut 1947

Château La Tour Blanche 1920

tous les bouchons sauf celui du 1952 tombé dans la bouteille le Marc de rosé domaine d'Ott 1929 dans sa jolie bouteille

Déjeuner au restaurant A Mère mardi, 23 janvier 2018

Nicolas est un gastronome averti, perfectionniste, qui est un volcan d'idées qui fusent comme en une éruption de haute magnitude. Il me propose que nous déjeunions à trois, avec un de ses amis. Il choisit le restaurant A Mère tenu par deux jeunes chefs, Mauricio Zillo et Francesco Ruggiero.

En proposant d'apporter La Petite Chapelle Hermitage Paul Jaboulet Aîné 2007, il plante le décor. Pour aller dans le sens de sa proposition j'annonce un Bourgogne Pinot Noir J.F. Coche-Dury 1995, vin générique d'une redoutable personnalité et son ami ajoute un Hermitage Cave de Tain 2007.

Le restaurant est de décoration minimaliste passepartout mais agréable. J'apprends que Nicolas est venu répéter la veille, afin d'ajuster les plats et les quantités. Il demande un champagne qu'il avait déjà repéré, un Champagne Vincent Charlot « le fruit de ma passion », blanc de noirs 1997 dégorgé en 2014. Ce champagne 100% pinot noir est extrêmement confidentiel puisque seulement 300 bouteilles ont été faites. A l'attaque on sent une assez forte acidité, et le champagne combine des notes lactées avec des notes de fruits un peu aigrelets. Si l'impression est positive, je trouve qu'il y a un certain manque d'ampleur dans le finale qui fort heureusement va disparaitre totalement sur le premier plat. Au fur et à mesure le champagne va gagner en largeur.

Le menu composé par les deux chefs sur des souhaits de Nicolas est : tempura de moules, patate douce et wasabi feuille, chou rave et escarole / artichaut à la Juive, rognons de lapin, orange sanguine, rosa di Gorizia / bar sauvage, chou-fleur, Romanesco, beurre blanc, vanille-curcuma / faux-filet de bœuf, brocoli, pleurotes, champignons / sorbet kiwi du Lot, compotée de pommes Boskoop, granité oseille / Chocolat, bergamote de Calabre, glace aux amandes, crème café.

Il y a énormément d'intelligence et de talent dans cette cuisine. Les tempuras de moule sont délicates et bien croquantes, l'artichaut est profondément goûteux, les rognons sont tendres, le bar est cuit à la perfection et le faux-filet, très concentré, est une viande expressive. Nicolas avait pris la précaution de demander des demi-portions pour chaque plat ce qui est idéal.

Sur l'entrée le champagne s'imposait et le chou rave lui a donné une longueur qu'il n'avait pas. Il s'est révélé accompli et gastronomique. J'ai eu envie d'essayer les tempuras sans aucun accompagnement sur le Bourgogne Pinot Noir J.F. Coche-Dury 1995. Ce bourgogne est ciselé. C'est une mécanique de précision. Il n'est pas large, il n'est pas puissant, il est précis et charmant. C'est un très beau bourgogne qui continuera de briller sur tous les plats. Son nez à l'ouverture était très élégant. Il est expressif et noble. Jean-François Coche-Dury a signé un grand vin.

A l'ouverture le nez de La Petite Chapelle Hermitage Paul Jaboulet Aîné 2007 était riche et voluptueux. Il est encore très séduisant. Il a des côtés généreux que l'on trouve chez Vega Sicilia Unico mais il veut sans doute en faire un peu trop. Le désir de séduction est trop visible.

Au contraire, l'Hermitage Cave de Tain 2007 joue beaucoup plus naturellement, sans prétention et délivre un discours mesuré, presque bourguignon tant il est sur un registre de délicatesse.

Sur l'artichaut, c'est le bourgogne qui est le plus adapté, sur les rognons chacun des trois rouges est acceptable sans créer de réel accord. J'aime beaucoup l'Hermitage de la Cave de Tain sur le bar mais c'est surtout sur la viande de bœuf que ce beau vin du Rhône va s'accomplir.

Nous ne voulions pas passer aux desserts sans avoir mangé de fromage aussi Nicolas est-il allé en acheter dans une boutique voisine. Le vin de Jaboulet m'a beaucoup plu sur les fromages car il a trouvé une opposition de choc qui lui manquait. Essayer de marier les desserts et les vins est un exercice de style auquel j'ai préféré ne pas me livrer, même si le cacao appelait la Petite Chapelle.

Nicolas, toujours aussi entreprenant, nous a fait apporter à chacun un verre de Liqueur d'Elixir des Pères Chartreux, dont la fonction est d'apaiser nos papilles et de préparer d'éventuelles langueurs postprandiales.

La cuisine est manifestement de grande qualité mais pour des repas de vins, je ferais enlever beaucoup de saveurs parasites qui n'apportent rien aux vins.

J'étais avec deux esthètes amoureux de vins et de bonne chère. Une revanche prochaine est prévue. Ce restaurant A Mère est une adresse à conserver et à encourager.

Dinner of December 31 lundi, 1 janvier 2018

New Year's Eve is the next meal. We will be eight, including seven drinkers since my wife will only drink the Yquem. There are four faithful friends of our Eve parties and meals of August 15th. A couple of restaurateurs will be present for the first time.

Everyone is busy cooking, my wife and a friend running the operations. The setting up of wine glasses with a final rinse is like a ballet set by Maurice Béjart. From 4 pm I begin the opening of the wines. I already open the two champagnes for the beginning of the meal, then the dry whites and sweet whites that are in the same conservation zone. The nose of the 1996 Bâtard Leflaive and of the 1989 Yquem are pure and perfect.

It is then the turn of the reds. The cork of Pétrus 1983 crumbles into a thousand pieces because of a light and porous cork. And what is curious is that this fragile cork played its role perfectly because the level of the wine is in the neck, without any loss by evaporation during 34 years. Conversely, the cork stopper of the 1959 Palmer had leaked wine since the level is mid-shoulder. The nose of Pétrus is perfect. The nose of the Palmer needs to benefit from a long aeration.

I have planned for this dinner two wines from the domaine of Romanée Conti, La Tâche 1957 and La Tâche 1969. The reason is as follows: La Tâche 1957 has a low level and must be drunk. The 1969 with a very satisfactory level is in support and extra.

I pester because the quality of the corks of the two wines of Burgundy is notoriously low. When I want to poke my corkscrew into the 1957 cork, the cork slides down. I try to sting and when I turn the corkscrew, the cap turns, without I can push the corkscrew. It took several minutes before I could push in the corkscrew and lift the cork, black on more than half of its length and putting fat on the neck. The smell of wine is appalling, the dust dominating. This smell has so penetrated the wine that it seems to me impossible for the wine to come back to life.

When I sting in the cork of 1969, it is same initial scenario, the cap turns in the bottleneck, tends to lower if I push and also ask me time to prick it without it falling in the neck. The cork is less damaged than that of 1957 and the smell of wine reassures me because everything indicates that the wine will be reconstituted. But I pester because everything indicates a low quality corks and also poor storage conditions by previous holders of these bottles, which had to keep them in cellars too hot.

The cork of Châteauneuf du Pape Clos Petite Gardiole 1946 is much healthier. It is the color of the wine that appeals to me, because the wine is a little cloudy and much too pink. There is uncertainty for reds.

I'm fine, my wife is beautiful, the first friends are ringing at the door. The Christmas Eve of December 31, 2017 will begin.

The friends arrive in our southern house to share at eve on December 31, 2017. As the organization and conduct of this dinner follow the rules and precepts of my dinners, although it is a friendly dinner where all are invited, I will classify it within my wine-dinners.

The aperitif begins with Veuve Clicquot Ponsardin Vintage Magnum 1985 Champagne, which will accompany white truffle sautéed in thin slices, a chiffonnade of Cecina de León, this delicious beef smoked meat, and bread brought by a friend restaurateur. "Bread Pump" is traditionally served on December 24th. It is made of flour poured on the bottom of the grinding wheel when the pressing of the olive oil is finished, which will "pump" the flower of bottom oil and allow this special bread with orange blossom .

The champagne is glorious, a yellow discreetly green and golden. It is powerful, serene and balanced, and it is very high above the other examples of this champagne that I already have. It is broad, impregnating and conquering. With each component of the appetizer it creates an accord of a rare natural. I am conquered by this flamboyant champagne.

We sit down after everyone has solved an enigma to find his place and here is the menu that I developed with my wife who made it: caviar Osciètre alone / Caviar Osciètre on raw scallop shell / Seared Scallops / Scallop Coral / Seared Royal Bream Fillets / Sirloin Steak Medallions / Mashed Potatoes with Truffle / Camembert Jort Wooden Box / Pomelos Supremes / Mangoes / Madeleines of chestnut honey.

On caviar abundantly served, caviar osciètre prestige of Kaviari, Champagne Salon Le Mesnil sur Oger 1990 is the absolute perfection of champagne. We drank Salon 2002 in magnum two days ago. The 1990 Salon is at the top of Olympus. Everything is balanced, perfectly dosed and the champagne sings a solemn opera of greatness and divine perfection. We are in front of an exceptional champagne at a time of his life of perfect balance.

The combination caviar and raw shell with sweet notes finds an exciting resonance with Salon 1990. Each taste is pure and the combination is natural.

On seared scallops, Bâtard-Montrachet Domaine Leflaive 1996 brought by a friend also forms an agreement based on the purity of tastes. The travel of the wine in the mouth has the shape of a Chinese lantern. That is to say, the attack is fairly thin, fluid and the mid-palate is large, all in size. The heavy and rich wine is thundering in the middle of the mouth. The wine is not totally perfect but it has an immense charm, heavy and full.

The corals of the shells will accompany the two Bordeaux that will engage in a small game as sometimes one, sometimes the other will come out winner. In the beginning, the 1983 Pétrus seems more strict and uptight than the 1959 Château Palmer, velvety and feminine. And with coral, it is the 1959 that wins significantly.

A small miracle will occur on the fillets of king bream. Pétrus throws its starched neck to the nettles and becomes sharp, scathing, brilliant. And the agreement is divine, highlighting a pomerol of high purity very truffled, the Petrus being more complicit to fish. The two very disparate Bordeaux showed themselves on their best day, one on the coral and the other on the sea bream.

I go down in cellar to bring up the three wines already open since about six hours that will accompany the meat. Taking in hand La Tâche 1957, the horrible smell at the opening is always present and my verdict is that the wine will be undrinkable. I bring back the wines and I announce the death of 1957.

I pour in my glass La Tâche Domain of the Romanée Conti 1957. I'm sniffing. There is no unpleasant odor. This means that the bad smell stuck to the bottleneck of the wine and did not mark the wine. I inform friends and I taste the wine to the color tired and there, it is as if an anvil fell on my head. It is the shock of Christopher Columbus discovering America: this wine summarizes all by itself all that makes the DNA of the wines of Romanée Conti. This wine is a mountain of roses placed on a salt marsh. There is the rose, there is salt and for me, it is all the Romanée Conti that bombard me with its excellence. How can this wine that I was going to exclude summarize the estate as well, with as much charm and persuasion?

I pour the wine to everyone as well as the other two wines. The meat is perfectly cooked and the truffled puree is sufficiently typical but calm to play the accompanying role to the wines.

La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1969 is much more orthodox than the 1957. It has a nice fruit that the 1957 does not have. She has the charm of La Tâche, a delicate velvet and the rose is more discreet. This wine is all in elegance. It's a great wine. But the 1957 rascal and crazy is ten times more exciting as it is off-track, apart from all the oenological cannons.

The Châteauneuf-du-Pape Clos de la Petite Gardiole 1946 is a UVO, an unidentified vinous object. Its color is raspberry pink and the wine is slightly cloudy. And his taste is nothing of Châteauneuf-du-Pape. He is sweet, delicate, out of the ordinary. What is incredible is that this pleasant wine will stay as it is throughout the meal, without moving an inch. It is pleasant, curious, out of the ordinary and if you accept a change of scenery and astonishment, it is pleasant to drink.

We have already eaten so much that the confrontation between the Jort wood box and red box camembert will not take place. We open a Jort box wood that finds with both La Tâche relevant agreements. All landmarks are undermined: dorade with Petrus and Camembert with La Tâche, all the purists will scream, but it works!

After these three reds of which only the 1969 is orthodox and in conformity with what we hoped for, Château d'Yquem 1989 puts us on a path of pure pleasure, so much the gold of this Yquem is perfect, round and serene. The accord with the supremes of pomelos prepares the more greedy agreement with raw mango dice. It appears that sautéed mangoes would have been more in continuity with the sensual richness of the Yquem.

The little madeleines with honey are to die for. Champagne Dom Ruinart rosé 1990 with the nice bottle is unfortunately corked. If we accept to drink champagne, forgetting the bitterness created by the cork, there is a very significant freshness that champagne offers. But it is useless to insist.

About an hour ago we had exchanged hugs and greetings and it's time to vote.

We are seven to vote for five wines to choose from the ten dinner wines. I never imagined that my preference for The 1957 La Tâche would be shared by my friends at the time of the vote. Because this wine is by far the winner. My friends have talent! Four wines had the honors of being ranked first, La Tâche 1957 four times, The Salon 1990 once, as the Petrus 1983 and the Palmer 1959.

The consensus vote would be: 1 - La Tâche Domain of the Romanée Conti 1957, 2 - La Tâche Domain of the Romanée Conti 1969, 3 - Château Palmer 1959, 4 - Pétrus 1983, 5 - Champagne Salon Le Mesnil sur Oger 1990, 6 - Yquem 1989.

My vote is: 1 - La Tâche Domain of the Romanée Conti 1957, 2 - Champagne Salon The Mesnil on Oger 1990, 3 - La Tâche Domain of the Romanée Conti 1969, 4 - Pétrus 1983, 5 - Champagne Veuve Clicquot Vintage Ponsardin magnum 1985.

The fact that a wine that any sommelier or amateur would have refused to serve is the winner with a large lead over the others is a sparkling gift that makes my heart warm. Nothing is more gratifying for me than seeing a war-wounded man win the battle.

Agreements were extremely brilliant at this dinner. The Cécina de León with the bread pump on the Veuve Clicquot 1985, the caviar on raw shell with Salon 1990, the gilthead seabream with Pétrus 1983 were summits even more gratifying than they are unexpected.

This friendship dinner gave the best start to the new year.

(pictures are on the article in French)

réveillon du 31 décembre lundi, 1 janvier 2018

Là, on ne peut plus reculer, nous sommes sur la dernière ligne droite. Le réveillon du 31 décembre est le prochain repas. Nous serons huit, dont sept buveurs puisque ma femme ne boira que l'Yquem. Il y a quatre amis fidèles de nos réveillons et des repas du 15 août. Un couple de restaurateurs sera présent pour la première fois.

Tout le monde s'affaire en cuisine, ma femme et un ami dirigeant les opérations. La mise en place des verres à vin avec un dernier rinçage est comme un ballet réglé par Maurice Béjart. Dès 16 heures je commence l'ouverture des vins. J'ouvre déjà les deux champagnes de début de repas, puis les blancs secs et les blancs liquoreux qui se situent dans la même zone de conservation.

C'est ensuite le tour des rouges. Le bouchon du Pétrus 1983 s'émiette en mille morceaux du fait d'un liège léger et poreux. Et ce qui est curieux c'est que ce liège fragile a joué son rôle parfaitement car le niveau du vin est dans le goulot, sans aucune perte par évaporation pendant 34 ans. A l'inverse le bouchon au liège parfait du Palmer 1959 avait laissé fuir du vin puisque le niveau est à mi- épaule. Le nez du Pétrus est parfait. Le nez du Palmer a besoin de profiter d'une longue aération.

J'ai prévu pour ce dîner deux vins du domaine de la Romanée Conti, La Tâche 1957 et La Tâche 1969. La raison est la suivante : La Tâche 1957 a un niveau bas et doit être bue. La Tâche 1969 au niveau très satisfaisant est en support et en appoint.

Je peste car la qualité des bouchons des deux vins de Bourgogne est notoirement faible. Lorsque je veux piquer mon tirebouchon dans le bouchon du 1957, le bouchon glisse vers le bas. J'essaie de piquer et quand je tourne le tirebouchon, le bouchon tourne, sans que je puisse enfoncer le tirebouchon. Il a fallu plusieurs minutes avant que je ne puisse enfoncer le tirebouchon et lever le bouchon, noir sur plus de la moitié de sa longueur et ayant déposé du gras sur le goulot. L'odeur du vin est épouvantable, la poussière dominant. Cette odeur a tellement pénétré le vin qu'il me paraît impossible que le vin revienne à la vie.

Lorsque je pique dans le bouchon du 1969, c'est même scénario initial, le bouchon tourne dans le goulot, tend à baisser si j'appuie et me demande aussi du temps pour le piquer sans qu'il ne baisse dans le goulot. Le bouchon est moins abîmé que celui du 1957 et l'odeur du vin me rassure car tout indique que le vin va se reconstituer. Mais je peste car cela montre une qualité faible des bouchons et par ailleurs de mauvaises conditions de stockage par les détenteurs précédents de ces bouteilles, qui ont dû les garder dans des caves trop chaudes.

Le bouchon du Châteauneuf du Pape Clos de la Petite Gardiole 1946 est beaucoup plus sain. C'est la couleur du vin qui m'interpelle, car le vin est un peu trouble et beaucoup trop rose. Il y a de l'incertitude pour les rouges.

Je me fais beau, ma femme est belle, les premiers amis sonnent à la porte. Le réveillon du 31 décembre 2017 va commencer.

Les amis arrivent dans notre maison du sud pour partager à huit le réveillon du 31 décembre 2017. Comme l'organisation et le déroulement de ce dîner suivent les règles et préceptes de mes dîners, bien qu'il s'agisse d'un dîner amical où tous sont invités, je le classerai dans les dîners de wine-dinners et ce sera le 220ème dîner de wine-dinners.

L'apéritif commence avec le Champagne Veuve Clicquot Ponsardin Vintage magnum 1985 qui accompagnera du boudin blanc truffé poêlé en fines tranches, une chiffonnade de Cecina de León, cette délicieuse viande fumée de bœuf, et le pain apporté par une amie restauratrice. Le « pain pompe » est servi traditionnellement le 24 décembre. Il est fait de farine versée sur le fond de la meule lorsque le pressage de l’huile d’olive est terminé, qui va « pomper » la fleur d’huile de fond de cuve et permettre ce pain spécial à la fleur d’oranger.

Le champagne est glorieux, d'un jaune discrètement vert et doré. Il est puissant, serein et équilibré, et il est très au-dessus des autres exemplaires de ce champagne que j'ai déjà bus. Il est large, imprégnant et conquérant. Avec chaque composant de l'apéritif il crée un accord d'un naturel rare. Je suis conquis par ce champagne flamboyant.

Nous passons à table après que chacun a résolu une énigme lui permettant de trouver sa place et voici le menu que j'ai mis au point avec mon épouse qui l'a réalisé : caviar Osciètre seul / Caviar Osciètre sur coquille Saint-Jacques crue / Coquilles Saint-Jacques poêlées / Corail des coquilles Saint-Jacques / Filets de dorades royales poêlés / Médaillons de faux-filet de bœuf / écrasé de pommes de terre à la truffe / Camembert Jort boîte bois / Suprêmes de pomelos / Mangues / Madeleines au miel de châtaignier.

Sur le caviar abondamment servi, le caviar osciètre prestige de Kaviari, le Champagne Salon Le Mesnil sur Oger 1990 est la perfection absolue du champagne. Nous avions bu Salon 2002 en magnum il y a deux jours. Le Salon 1990 se situe au sommet de l'Olympe. Tout est équilibré, parfaitement dosé et le champagne chante un Opéra solennel de grandeur et de divine perfection. Nous sommes en face d'un champagne exceptionnel à un moment de sa vie de parfait équilibre.

L'association caviar et coquille crue aux notes sucrées trouve une résonnance excitante avec Salon 1990. Chaque goût est pur et l'accord se montre naturel.

Sur les coquilles Saint-Jacques juste poêlées, le Bâtard-Montrachet Domaine Leflaive 1996 apporté par un ami forme aussi un accord fondé sur la pureté des goûts. Le parcours en bouche du vin a la forme d'un lampion chinois. C'est-à-dire que l'attaque est assez fluette, fluide et le milieu de bouche est tout en ampleur. Le vin lourd et riche est tonitruant en milieu de bouche. Le vin n'est pas totalement parfait mais il a un charme immense, lourd et plein.

Les coraux des coquilles vont accompagner les deux bordeaux qui vont se livrer à un petit match où tantôt l'un, tantôt l'autre va sortir gagnant. Au début, le Pétrus 1983 paraît plus strict et guindé que le Château Palmer 1959 velouté et féminin. Et avec le corail, c'est le 1959 qui gagne nettement.

Un petit miracle va se produire sur les filets de dorades royales. Le Pétrus jette aux orties son col empesé et devient vif, cinglant, brillant. Et l'accord est divin, mettant en valeur un pomerol de grande pureté très truffé, le Pétrus se révélant plus complice du poisson. Les deux bordeaux très disparates se sont montrés sur leur plus beau jour, l'un sur le corail et l'autre sur la dorade.

Je descends en cave pour remonter les trois vins déjà ouverts depuis six heures environ qui vont accompagner la viande. En prenant en main La Tâche 1957, l'odeur horrible à l'ouverture est toujours présente et mon verdict est que le vin sera imbuvable. Je remonte les vins et j'annonce la mort du 1957.

Je verse dans mon verre La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1957. Je hume. Il n'y a aucune odeur désagréable. Ceci veut dire que la mauvaise odeur collait au goulot du vin et ne marquait pas le vin. J'en informe les amis et je goûte le vin à la couleur fatiguée et là, c'est comme si une enclume me tombait sur le crâne. C'est le choc de Christophe Colomb découvrant l'Amérique : ce vin résume à lui tout seul tout ce qui fait l'ADN des vins du domaine de la Romanée Conti. Ce vin est une montagne de roses posée sur un marais salant. Il y a la rose, il y a le sel et pour moi, c'est toute la Romanée Conti qui me bombarde de son excellence. Comment ce vin que j'allais exclure peut-il résumer aussi bien le domaine, avec autant de charme et de persuasion ?

Je verse le vin à tout le monde ainsi que les deux autres vins. La viande est parfaitement cuite et la purée truffée est suffisamment typée mais calme pour jouer le rôle d'accompagnement des vins.

La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1969 est beaucoup plus orthodoxe que la 1957. Elle a un joli fruit que la 1957 n'a pas. Elle a le charme de La Tâche, un velours délicat et la rose est plus discrète. Ce vin est tout en élégance. C'est un grand vin. Mais le 1957 canaille et fou est dix fois plus excitant tant il est hors-piste, en dehors de tous les canons œnologiques.

Le Châteauneuf-du-Pape Clos de la Petite Gardiole 1946 est un OVNI, un objet vineux non identifié. Sa couleur est rose framboise et le vin est légèrement trouble. Et son goût n'a rien de Châteauneuf-du-Pape. Il est doucereux, délicat, hors norme. Ce qui est incroyable, c'est que ce vin somme toute plaisant va rester tel quel tout au long du repas, sans bouger d'un pouce. Il est plaisant, curieux, hors norme et si l'on accepte de dépaysement et l'étonnement, il est agréable à boire.

Nous avons déjà tellement mangé que la confrontation entre les camemberts Jort boîte bois et boîte rouge n'aura pas lieu. Nous ouvrons un Jort boîte bois qui trouve avec les deux La Tâche des accords pertinents. Tous les repères sont sapés : dorade avec Pétrus puis camembert avec la Tâche, tous les puristes vont hurler, mais ça marche !

Après ces trois rouges dont seul le 1969 est orthodoxe et conforme à ce que nous espérions, le Château d'Yquem 1989 nous met sur un chemin de pur plaisir, tant l'or de cet Yquem est parfait, rond et serein. L'accord avec les suprêmes de pomelos prépare l'accord plus gourmand avec les dés de mangues crues. Il apparaît que des mangues poêlées auraient été plus en continuité avec la richesse sensuelle de l'Yquem.

Les petites madeleines au miel sont à se damner. Le Champagne Dom Ruinart rosé 1990 à la jolie bouteille est hélas bouchonné. Si on accepte de boire le champagne, en oubliant l'amertume créée par le bouchon, il y a une fraîcheur très significative qu'offre le champagne. Mais il est inutile d'insister.

Depuis une heure environ nous avons échangé embrassades et vœux et il est temps de voter.

Nous sommes sept à voter pour cinq vins à choisir parmi les dix vins du dîner. Jamais je n'aurais imaginé que la préférence que j'ai marquée pour La Tâche 1957 serait partagée par mes amis au moment du vote. Car ce vin est de loin le gagnant. Mes amis ont du talent ! Quatre vins ont eu les honneurs d'être classés premier, La Tâche 1957 quatre fois, Le Salon 1990 une fois, comme le Pétrus 1983 et le Palmer 1959.

Le vote du consensus serait : 1 - La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1957, 2 - La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1969, 3 - Château Palmer 1959, 4 - Pétrus 1983, 5 - Champagne Salon Le Mesnil sur Oger 1990, 6 - Château d'Yquem 1989.

Mon vote est : 1 - La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1957, 2 - Champagne Salon Le Mesnil sur Oger 1990, 3 - La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1969, 4 - Pétrus 1983, 5 - Champagne Veuve Clicquot Ponsardin Vintage magnum 1985.

Le fait qu'un vin que tout sommelier ou tout amateur aurait refusé de servir se trouve le gagnant avec une large avance sur les autres est un cadeau pétillant qui me fait chaud au cœur. Rien n'est plus gratifiant pour moi que de voir un blessé de guerre qui gagne la bataille.

Des accords ont été extrêmement brillants lors de ce dîner. Le Cécina de León avec le pain pompe sur le Veuve Clicquot 1985, le caviar sur coquille crue avec Salon 1990, la dorade royale avec Pétrus 1983 ont été des sommets d'autant plus gratifiants qu'ils sont inattendus.

Ce dîner d'amitié a donné le meilleur coup d'envoi que l'on puisse concevoir à la nouvelle année.

le bouchon du 1969 est en dessous du bouchon du 1957 le bouchon du Chateauneuf est en bas de l'assiette (en tournant dans le sens des aiguilles d'une montre en partant du Palmer 1959, Tâche 57, Tâche 69, Chateauneuf 46, Pétrus 83 déchiqueté) les trois rouges pour la viande Pour que l'on puisse imaginer la taille des boîtes de caviar, j'ai mis un petit chat sur un coussin. Le caviar forme le "8" de 2018 l'apéritif, Cecina de Leon boudin blanc à la truffe pata negra le pain pompe le repas : caviar puis caviar sur coquille crue coquilles, coraux, dorade, faux-filet (il manque le pomelos et la mangue), madeleines les vins du repas (de droite à gauche) la table en fin de repas Les votes

bulletins du 2ème semestre 2017 du numéro 741 à 759 lundi, 25 décembre 2017

(bulletin WD N° 759 171227)   Le bulletin n° 759 raconte : dégustation des vins de 2014 du domaine de la Romanée Conti, dîner d’après dégustation au siège de « Grains Nobles », déjeuner à la brasserie Bofinger et atelier de dégustation de caviars Kaviari.

(bulletin WD N° 758 171219)   Le bulletin n° 758 raconte : déjeuner au restaurant Pierre Gagnaire, salon « Vinapogée » qui succède au salon des vins matures, avec un atelier de Maury de trois âges, un atelier de Lafaurie-Peyraguey de trois âges et dîner au restaurant Macéo.

(bulletin WD N° 757 171212)   Le bulletin n° 757 raconte : dîner au restaurant Bel Canto, déjeuner de famille, 17ème dîner de vignerons et  « dîner des amis de Bipin Desai » qui est le 219ème de mes dîners. (bulletin WD N° 756 171204)   Le bulletin n° 756 raconte : déjeuner au restaurant l’Ecu de France, déjeuner au restaurant La Bourse et la Vie, déjeuner au restaurant Yoshinori, dîner au restaurant Le Clarence et passage impromptu au restaurant Pages.

(bulletin WD N° 755 171113)   Le bulletin n° 755 raconte : déjeuner au restaurant L’Ami Jean, Krug à la maison, 218ème dîner de wine-dinners au restaurant Taillevent.

(bulletin WD N° 754 171107)   Le bulletin n° 754 raconte : 217ème dîner au restaurant Michel Rostang, dégustation du Cognac Louis XIII de Rémy Martin à l’hôtel Royal Monceau.

(bulletin WD N° 753 171031)   Le bulletin n° 753 raconte : dîner caritatif de vins anciens au château de Beaune de la maison Bouchard Père & Fils, déjeuner au restaurant Les Magnolias au Perreux-sur-Marne.

(bulletin WD N° 752 171024)   Le bulletin n° 752 raconte : déjeuner d’anniversaire de ma fille, vin incertain bu avec mon fils, déjeuner au restaurant Le Petit Sommelier, dernier dîner du séjour de mon fils avec des vins étranges, déjeuner de conscrits au Yacht Club de France.

(bulletin WD N° 751 171017)   Le bulletin n° 751 raconte : dîner au restaurant l’Écu de France à Chennevières, cocktail de lancement du nouveau numéro de la revue « Papilles » au restaurant Laurent, déjeuner à L’Automobile Club de France, déjeuner à la Manufacture Kaviari sur une cuisine de Valérie Costa, chef.fe étoilé.e d’Ollioules

(bulletin WD N° 750 171003)   Le bulletin n° 750 raconte : cocktail au siège de la société Pinel et Pinel pour découvrir Salon 2006, dîner à Londres au One-O-One restaurant, mariage roumain dans le Surrey, incroyable dîner au Taillevent avec le prétexte d’un Hermitage La Chapelle 1961.

(bulletin WD N° 749 170926)   Le bulletin n° 749 raconte : Déjeuner au restaurant Passage 53, déjeuner de famille, déjeuner au restaurant Pages, déjeuner au restaurant Laurent avec l’académie des gastronomes.

(bulletin WD N° 748 170919)   Le bulletin n° 748 raconte : champagne impromptu avec ma fille, réception d’une américaine grande fidèle de mes dîners, dîner à la Vague d’Or à Saint-Tropez, dîner de grands champagnes.

(bulletin WD N° 747 170912)   Le bulletin n° 747 raconte : week-end gastronomique traditionnel du 15 août avec déjeuner chez des amis, et dîner dans ma maison du sud, dîner de famille, dîner chez des amis.

(bulletin WD N° 746 170905) Le bulletin n° 746 raconte : nombreux repas de vacances avec mes enfants, occasions d’ouvrir de grands vins,  déjeuner avec des cousins, coup d’envoi des festivités du week-end du 15 août, dîner au restaurant La Promesse à Ollioules.

(bulletin WD N° 745 170829)    Le bulletin n° 745 raconte : plusieurs repas de vacances dont deux au restaurant La Promesse à Ollioules au sein du domaine de Terrebrune, deux au restaurant BOR à Hyères, en bord de mer et plusieurs repas de famille aussi en bord de mer.

(bulletin WD N° 744 170822) Le bulletin n° 744 raconte : dîner au restaurant La Promesse à Ollioules, deux repas en famille, déjeuner au restaurant San Felice de l’hôtel du Castellet, et un autre dîner en famille dans le sud avec des grands vins.

(bulletin WD N° 743 170718)  Le bulletin n° 743 raconte : déjeuner au restaurant H. Kitchen, déjeuner au restaurant du Polo de Bagatelle, dîner au restaurant La Vague d’Or à Saint-Tropez, dîner dans ma maison du sud, déjeuner chez des cousins près d’Orange.

(bulletin WD N° 742 170711)   Le bulletin n° 742 raconte : dîner de famille avec des vins rares, dîner avec mon fils, déjeuner au restaurant Le Petit Sommelier, dîner au restaurant Taillevent avec des recettes à quatre mains.

(bulletin WD N° 741 170704)   Le bulletin n° 741 raconte : dîner à l’Assiette Champenoise après la dégustation de 38 champagnes Pol Roger, 216ème dîner de wine-dinners au restaurant Laurent.

     

28ème séance de l’académie des vins anciens au restaurant Macéo jeudi, 21 décembre 2017

La 28ème séance de l'académie des vins anciens se tient au restaurant Macéo. Elle est d'une nature particulière puisque c'est un académicien fidèle, qui est aussi fidèle de mes dîners, qui m'a demandé de faire cette séance pour lui et ses amis. Ils seront 29. Cet ami a accepté que deux autres personnes assistent aussi, qui ont acquis deux places lors d'une vente caritative qui comprenait deux lots que j'avais offerts de participation à l'académie. Je suis aussi accompagné d'une fidèle amie qui m'aide à organiser ces séances.

Le programme prévu pour trois groupes de onze personnes est :

Groupe 1 : Champagne Pommery années 60 - Champagne Pâques Gaumont à Trépail Brut années 80 - Champagne Verzenay J. Busin Grand 1er Cru Classé 1955 - Château Carbonnieux Blanc Grand Cru Classé Léognan 1966 - Crozes-Hermitage Domaine de Thalabert Paul Jaboulet Aîné 1953 - Château Saint- Martin Médoc 1964 - Clos Toinet Tauzin Saint-Emilion 1950 - Château Clos Fourtet 1er Grand Cru Classé Saint-Emilion 1950 - Château La Mission Haut Brion Grand Premier Cru de Graves 1948 - Château L'Evangile Pomerol Hanappier 1955 - Pommard Pierre Hugot négociant 1947 - Echézeaux Grand Cru Domaine de la Romanée Conti 1957 - Clos Des Lambrays 1er Cru Monopole 1943 - Chambertin Clos de Bèze Grand Cru Pierre Damoy 1961 - Royal Kébir Frédéric Lung rouge 1947 - Haut Sauternes J. B . Guillaume 1943 - Château d'Arche GCC Sauternes 1969 - Château d'Yquem Sauternes 1984.

Groupe 2 : Champagne Pommery années 60 - Champagne Pâques Gaumont à Trépail Brut années 80 - Champagne Verzenay J. Busin Grand 1er Cru Classé 1955 - Château Carbonnieux Blanc Grand Cru Classé Léognan 1966 - Agneau Blanc Sélection Rothschild Graves Supérieures 1943 - Château Saint- Martin Médoc 1964 - Château Trotte Vieille 1er Grand Cru Classé Saint-Emilion 1967 - Château L'Evangile Pomerol Hanappier 1955 - Château Clos Fourtet 1er Grand Cru Classé Saint-Emilion 1950 - Château La Mission Haut Brion Grand Premier Cru de Graves 1948 - Clos Des Lambrays 1er Cru Monopole 1943 - Grands Echézeaux Grand Cru Domaine de la Romanée Conti 1956 - Côtes du Rhône Parallèle "45" Paul Jaboulet Aîné 1959 - Royal Kébir Frédéric Lung rouge 1947 - Château de Malagar 1ères Côtes de Bordeaux 1966 - Haut Sauternes J. B . Guillaume 1943 - Château d'Yquem Sauternes 1984.

Groupe 3 : Champagne Pommery années 60 - Champagne Pâques Gaumont à Trépail Brut années 80 - Champagne René Renard à Avenay près Ay Brut années 50 - Château Carbonnieux Blanc Grand Cru Classé Léognan 1966 - Meursault Patriarche Père & Fils 1942 - Château Saint- Martin Médoc 1964 - Château Haut Cadet 1er Cru St Emilion Renversez et Bernard #1960 - Château L'Evangile Pomerol Hanappier 1955 - Château Trotte Vieille 1er Grand Cru Classé Saint-Emilion 1967 - Château La Mission Haut Brion Grand Premier Cru de Graves 1948 - Chassagne-Montrachet Boudriottes Domaine Marcel Toinet 1972 - Grands Echézeaux Grand Cru Domaine de la Romanée Conti 1956 - Clos Des Lambrays 1er Cru Monopole 1943 - Le Corton Château De Beaune Bouchard Père & Fils 1966 - Royal Kébir Frédéric Lung rouge 1947 - Haut Sauternes J. B . Guillaume 1943 - Château d'Yquem Sauternes 1984.

Il y a beaucoup trop de vins puisqu'il y a 52 bouteilles pour 33 personnes. Mais c'est dû au fait que j'ai ajouté quelques bouteilles de bas niveaux puisque le monde des vins anciens, c'est aussi cela. Chaque groupe aura un Yquem, un vin du domaine de la Romanée Conti et des vins de tous niveaux dans les classifications bordelaises. Chacun aura l'un de mes chouchous, le plus grand vin algérien dans l'année 1947. A priori, il y a de quoi faire une belle séance de l'académie.

J'arrive à 16 heures au restaurant Macéo avec les vins et une centaine de verres Riedel que j'ajoute en appoint aux verres du restaurant. Pour ouvrir toutes les bouteilles il ne faut pas chômer. J'utilise le « Durand », un tirebouchon qui combine tirebouchon et bilame. C'est un outil astucieux mais qui blesse les bouchons, pouvant rendre illisibles certaines mentions que l'on pourrait vouloir lire, comme l'année par exemple. J'avais choisi quelques bouteilles de bas niveau et je m'attendais à de mauvaises surprises ici et là. Le bilan à l'ouverture est plutôt au-dessus de ce que j'attendais, surtout pour les bordeaux, et les mauvaises surprises se situent là où je ne les attendais pas. Les trois Royal Kébir 1947 ont des senteurs de vins fatigués, ce qui signifie que j'ai acquis des bouteilles mal conservées et les trois Haut Sauternes J. B . Guillaume 1943 n'ont pas du tout les parfums que j'espérais. En sens inverse les trois Clos Des Lambrays 1943 se présentent nettement mieux que ce que j'attendais. En ce qui concerne les trois vins du domaine de la Romanée Conti, l'Echézeaux 1957 est plus sympathique que les deux Grands Echézeaux 1956. On verra plus tard que la réalité sera toute autre. Globalement le bilan des ouvertures ne me déplait pas, même si certaine contreperformances inattendues m'énervent. J'ai mis trois heures pour tout ouvrir. Je revêts les habits prévus pour recevoir les participants.

Il y a trois bouteilles du Champagne Pâques Gaumont à Trépail Brut années 80 pour l'apéritif pris debout. La première et la troisième qu'on me fait goûter sont superbes. Ce champagne est confortable, bien construit et franc et ne cherche pas à surjouer. C'est le champagne idéal pour un apéritif et une très agréable surprise. La deuxième bouteille est un peu poussiéreuse.

Le Champagne Pommery années 60 est lui aussi servi pour l'apéritif debout. La première bouteille n'est pas présentable. La seconde est une pure merveille. Plus dosé que le précédent, il joue sur la douceur et la suavité. Je l'adore. Des convives préfèrent la tension du Pâques Gaumont. Je préfère le charme du Pommery.

Nous passons à table. Il y a beaucoup de participants invités pour un dîner de Noël qui n'ont aucune connaissance des vins anciens aussi faut-il que j'insiste sur l'approche humble nécessaire pour boire des vins anciens. Je suis à la table 1 qui comporte beaucoup de vins identiques à ceux des autres tables lorsque j'ai fourni trois bouteilles. Il y a parfois des vins en un seul exemplaire.

Le menu préparé par le chef du restaurant Macéo est : velouté de lentilles du Puy, œuf poché et champignons poêlés / risoni aux saveurs de paëlla, jus safrané / joue de bœuf, légumes de blanquette et jus aux condiments / fromage / banane caramélisée, chantilly citron vert, spéculoos et tuile croustillante au sarrasin.

Le Champagne Verzenay J. Busin Grand 1er Cru Classé 1955 étonne tout le monde avec ses 62 ans. Sa couleur est claire, il n'a pas de bulle mais a gardé un pétillant très vif. Il est d'un rare équilibre et tout le monde apprécie ce champagne dont la belle acidité est synonyme de fraîcheur et d'élégance.

Le Château Carbonnieux Blanc Grand Cru Classé Léognan 1966 est étonnant car il est d'un or clair qu'aurait un vin de moins de dix ans. Franc, pur, droit, c'est un blanc expressif irréprochable, à la longueur remarquable.

Le Château Saint- Martin Médoc 1964 est en trois exemplaires et je pensais que la table 3 aurait un vin mort. Il n'en est rien, le vin a ressuscité. Celui de notre table est très élégant. Ce n'est pas un grand vin, c'est un vin timide, mais sa douceur le rend extrêmement plaisant.

Le Clos Toinet Tauzin Saint-Emilion 1950 est une belle surprise. Je ne l'attendais pas à ce niveau. Il est fluide et se boit bien. Il a beaucoup de grâce.

Les convives de ma table s'extasient en buvant le Château Clos Fourtet 1er Grand Cru Classé Saint-Emilion 1950 qu'ils jugent très nettement au-dessus du Saint-Emilion précédent, avec une typicité forte. Hélas, le vin m'a été servi dans un verre qui sent le verre et je ne peux pas en profiter autant. Quand nous avons voté pour les cinq bordeaux rouges de notre table je suis le seul à avoir mis le Toinet Tauzin devant le Clos Fourtet, mais un quart d'heure plus tard, l'odeur de verre ayant disparu j'ai pu constater la richesse de trame, le goût de truffe de ce puissant Clos Fourtet.

Le Château La Mission Haut Brion Grand Premier Cru de Graves 1948 est d'une grande instabilité. Par moment je trouve en lieu la noblesse qu'il peut avoir et à d'autres moments, je vois un vin fatigué, légèrement torréfié par un vieillissement excessif. Il sera diversement apprécié aux trois tables, l'une des tables ayant une bonne bouteille.

Dans nos votes de table sur les cinq bordeaux, le Château L'Evangile Pomerol Hanappier 1955 fera l'unanimité. Tous le noteront premier. C'est en effet un pomerol frais, facile, fluide mais expressif. C'est un vin que l'on boit avec plaisir, sans trace d'âge, fringant comme un vin de quinze ans. Il est adorable en tous points. Le classement en cours de route portant uniquement sur les bordeaux couronne L'Evangile 1955 puis le Clos Fourtet 1950 puis le Saint-Martin 1964 qui pourrait être ex aequo avec le Toinet Tauzin 1950. C'est globalement une très belle série de bordeaux.

Le Pommard Pierre Hugot négociant 1947 est un très joli vin qui profite pleinement d'une année légendaire. Il a toute la force d'expression de 1947. Il a le charme sensuel de la Bourgogne, très féminin. Ce n'est pas un vin puissant mais il est très agréable à boire.

L'Echézeaux Grand Cru Domaine de la Romanée Conti 1957 au moment où je le bois m'offre une esquisse sympathique d'un vin du domaine. Et puis, tout se referme. Le vin devient pataud, lourd. On cherche, mais vainement, à lui trouver des qualités. La plus grande surprise pour moi est qu'à l'ouverture, c'est ce vin qui surclassait les deux autres vins du domaine, et maintenant les deux Grands Echézeaux 1956 brillent aux deux tables voisines. J'ai gouté l'un des deux, qui a toutes les belles caractéristiques des vins du domaine, avec cette élégance subtile qui n'appartient qu'à lui.

Le Clos Des Lambrays 1er Cru Monopole 1943 est une grande surprise positive. Les trois bouteilles avaient des niveaux assez bas qui n'ont pas d'influence sur le goût. Aux trois tables on a apprécié ce vin solide et carré, de belle présence et force de caractère. C'est un grand vin chaleureux et puissant.

Le Chambertin Clos de Bèze Grand Cru Pierre Damoy 1961 est une valeur sûre qui ne me trahit jamais. Ce 1961 est indestructible. Il est l'expression d'une force tranquille avec un charme parfaitement dosé. Il est d'une belle longueur.

Le Crozes-Hermitage Domaine de Thalabert Paul Jaboulet Aîné 1953 a une affreuse couleur rose de vin trouble. Je sens à peine, je ne cherche même pas à le goûter. Il est mort et je n'insiste pas.

Le Royal Kébir Frédéric Lung rouge 1947 qui pour ses trois bouteilles m'avait offert des parfums imprécis et peu plaisants est moins triste que ce que je redoutais, mais on est loin du vin glorieux et conquérant dont je suis si fier. Il y a bien les marqueurs que sont le cacao et le café, mais le vin manque de rythme.

Je suis aussi déçu par les trois bouteilles du Haut Sauternes J. B . Guillaume 1943. Le vin n'est pas mauvais, mais il est légèrement poussiéreux et manque de vivacité.

Trompettes de la Renommée, apparaissez maintenant, car le Château d'Arche GCC Sauternes 1969 est absolument divin. Le vin est quasiment noir, ce qui est un peu en avance pour un vin de cet âge mais il a tout d'un vin éblouissant, gras, intense, à la longueur infinie, avec des myriades de fruits confits délicieux. Il est dans la même veine que le Suduiraut 1926 sublime que j'ai fait goûter récemment à Vinapogée. On est dans l'aristocratie du sauternes. C'est pour moi le plus grand vin de la soirée.

Le Château d'Yquem Sauternes 1984 est très agréable à boire, même après le puissant Château d'Arche, car il est gracieux et porte dignement tous les marqueurs de ce vin emblématique, noblesse, longueur et raffinement. Les trois bouteilles ont été honorées, d'autant que pour beaucoup c'était leur premier Yquem.

Mon classement des vins de ce dîner serait : 1 - Château d'Arche Sauternes 1969, 2 - Château L'Evangile Pomerol 1955, 3 - Champagne Verzenay J. Busin 1955, 4 - Clos Des Lambrays 1943, 5 - Pommard Pierre Hugot 1947, 6 - Champagne Pommery années 60, 7 - Champagne Pâques Gaumont à Trépail Brut années 80, 8 - Château Carbonnieux Blanc 1966, 9 - Château d'Yquem Sauternes 1984, 10 - Chambertin Clos de Bèze Grand Cru Pierre Damoy 1961, 11 - Clos Toinet Tauzin Saint-Emilion 1950, 12 - Château Saint- Martin Médoc 1964.

La qualité de ces douze vins permet de dire que ce dîner est une réussite, mais je ne peux pas m'empêcher de penser aux vins qui n'étaient pas au rendez-vous, ce qui me fait toujours souffrir, car j'aimerais que mes vins soient parfaits. Il est probable que j'ai voulu trop en faire. J'ai mis 17 ou 18 vins par table en acceptant qu'il y ait des vins qui soient de qualité moindre, pour faire découvrir le monde des vins anciens tel qu'il est. En fait j'aurais dû m'en tenir à treize vins par table en étant plus sélectif sur la qualité. Mais est-ce si sûr car les surprises ont joué dans les deux sens, certains vins que je croyais faibles ont brillé et certains vins en lesquels je plaçais ma confiance n'ont pas été au rendez-vous.

Le menu a été exécuté de belle façon, les plats goûteux trouvant leur place dans le déroulement au rythme soutenu du service des vins

De ce que j'ai ressenti, cette expérience absolument nouvelle pour beaucoup, d'immersion dans le monde des vins anciens, a été bien vécue. Les sourires et les compliments reçus ont de quoi me réconforter. Mais je suis perfectionniste, je ne serai jamais totalement satisfait, ce qui ne m'empêche pas de désirer au plus vite une nouvelle expérience.

  la préparation des vins dans ma cave vins du groupe 1 (le vin du domaine de la Romanée Conti n'est pas sur la photo en cave mais sur la photo de groupe au restaurant) Champagne Pommery années 60 Champagne Pâques Gaumont à Trépail Brut années 80 Champagne Verzenay J. Busin Grand 1er Cru Classé 1955 Château Carbonnieux Blanc Grand Cru Classé Léognan 1966 Crozes-Hermitage Domaine de Thalabert Paul Jaboulet Aîné 1953 Château Saint- Martin  Médoc 1964 Clos Toinet Tauzin Saint-Emilion 1950 Château Clos Fourtet 1er Grand Cru Classé Saint-Emilion 1950 Château La Mission Haut Brion Grand Premier Cru de Graves 1948 Château L'Evangile Pomerol Hanappier 1955 Pommard Pierre Hugot négociant 1947 Echézeaux Grand Cru Domaine de la Romanée Conti 1957 Clos Des Lambrays 1er Cru Monopole 1943 Chambertin Clos de Bèze Grand Cru Pierre Damoy 1961 Royal Kébir Frédéric Lung rouge 1947 Haut Sauternes J. B . Guillaume 1943 Château d'Arche GCC Sauternes 1969 Château d'Yquem  Sauternes 1984   vins du groupe 2 (le vin du domaine de la Romanée Conti n'est pas sur la photo en cave mais sur la photo de groupe au restaurant) Champagne Pommery années 60 Champagne Pâques Gaumont à Trépail Brut années 80 Champagne Verzenay J. Busin Grand 1er Cru Classé 1955 Château Carbonnieux Blanc Grand Cru Classé Léognan 1966 Agneau Blanc Sélection Rothschild Graves Supérieures 1943 Château Saint- Martin  Médoc 1964 Château Trotte Vieille  1er Grand Cru Classé Saint-Emilion 1967 Château L'Evangile Pomerol Hanappier 1955 Château Clos Fourtet 1er Grand Cru Classé Saint-Emilion 1950 Château La Mission Haut Brion Grand Premier Cru de Graves 1948 Clos Des Lambrays 1er Cru Monopole 1943 Grands Echézeaux Grand Cru Domaine de la Romanée Conti 1956 Côtes du Rhône Parallèle "45" Paul Jaboulet Aîné 1959 Royal Kébir Frédéric Lung rouge 1947 Château de Malagar 1ères Côtes de Bordeaux 1966 Haut Sauternes J. B . Guillaume 1943 Château d'Yquem  Sauternes 1984   vins du groupe 3 (le vin du domaine de la Romanée Conti n'est pas sur la photo en cave mais sur la photo de groupe au restaurant) Champagne Pommery années 60 Champagne Pâques Gaumont à Trépail Brut années 80 Champagne René Renard à Avenay près Ay Brut années 50 Château Carbonnieux Blanc Grand Cru Classé Léognan 1966 Meursault Patriarche Père & Fils 1942 Château Saint- Martin  Médoc 1964 Château Haut Cadet 1er Cru St Emilion Renversez et Bernard #1960 Château L'Evangile Pomerol Hanappier 1955 Château Trotte Vieille  1er Grand Cru Classé Saint-Emilion 1967 Château La Mission Haut Brion Grand Premier Cru de Graves 1948 Chassagne-Montrachet Boudriottes Domaine Marcel Toinet 1972 Grands Echézeaux Grand Cru Domaine de la Romanée Conti 1956 Clos Des Lambrays 1er Cru Monopole 1943 Le Corton Château De Beaune Bouchard Père & Fils 1966 Royal Kébir Frédéric Lung rouge 1947 Haut Sauternes J. B . Guillaume 1943 Château d'Yquem  Sauternes 1984 les photos des groupes prises au restaurant groupe 1 groupe 2 groupe 3 les trois groupes en vue plongeante les bouchons le repas le menu  

Les 2014 du domaine de la Romanée Conti présentés par Aubert de Villaine jeudi, 7 décembre 2017

Chaque année, au siège de la société Grains Nobles, Aubert de Villaine, gérant de la Romanée-Conti, présente les vins du domaine qui sont mis sur le marché. Cette année, ce sera le millésime 2014. La petite salle en sous-sol, voûtée et antique, est pleine. Beaucoup sont des habitués qui ne rateraient en aucun cas ce rendez-vous. A côté d'Aubert de Villaine il y a Bernard Burtschy et il devait y avoir comme chaque année Michel Bettane, mais il ne sera pas là. Pascal Marquet, le dirigeant de Grains Nobles annonce le début de la séance.

Aubert de Villaine raconte les conditions climatiques du millésime. L'année 2014 est un beau millésime abondant marqué par trois actes successifs. L'hiver fut doux et sans pluie. Le printemps fut beau et sec. Ce fut un des plus beaux printemps que l'on ait connu en Bourgogne. La croissance de la plante fut idéale, mais avec une floraison lente. Puis, les 27 et 28 juin, il y a eu de très gros orages. Heureusement les parcelles du domaine ne furent pas touchées par la grêle. Dès juillet, le temps fut pluvieux et froid. Il y eut des attaques de mildiou et même de botrytis dès le début août ce qui est très tôt et rare. Après des années de petites récoltes, la vigne voulait produire. La canicule qui a suivi a entraîné que des baies se mirent à brûler. Les peaux épaisses ont permis de lutter contre le botrytis. L'herbe présente a permis de conserver l'humidité.

Après cette présentation Aubert de Villaine répondant à des questions indique que le domaine ne travaille quasiment exclusivement que des grands crus, ce qui fait que la façon de travailler est la même aussi bien pour les Echézeaux que pour la Romanée Conti.

Pour aviner nos verres et notre palais on nous sert un Givry Louis Jadot 2014 dont la couleur est d'un joli rouge clair et le nez d'un vin de chaleur. La bouche est ronde, épanouie. C'est un vin solaire, un peu amer et très court. Il n'est pas désagréable, un peu acide mais un peu trop court.

La maison Riedel ayant fourni des verres c'est la première fois que tous les vins auront leur verre ce qui permet de garder chaque vin pour qu'il s'épanouisse

Corton Grand Cru Prince Florent de Mérode Domaine de la Romanée Conti 2014. La robe est assez foncée. Le nez est invraisemblable de personnalité. C'est assez fou. Je sens de la framboise écrasée comme on en trouve dans des vins anciens. La bouche est d'un charme fou. Ce vin est suave. Il est étonnamment charmeur. C'est de la soie. C'est fou. Le fruit est incroyable. Il est très probable que cela ne restera pas ainsi et d'ailleurs le vin s'est calmé après quelques dizaines de minutes dans le verre. Ce vin est fait avec 50% de fûts neufs. Aubert de Villaine parle du côté sombre du Corton que je ne trouve pas. Je trouve ce vin aérien, vin de légèreté et de charme. Je suis étonné par sa douceur qui ne cadre pas pour moi ni avec un corton ni avec le travail habituel de la Romanée Conti. Mais cela va vite changer.

Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2014. Aubert de Villaine rappelle que le mot « Echézeaux » veut dire un lieu où il y a des habitations. Le vin est d'une rouge violine. Le nez est ingrat, strict. La bouche est fraîche à l'attaque. Le vin est extrêmement racé. C'est un vin superbe, sans concession, vibrant et racé. J'adore, alors que le nez ne correspond pas à la bouche. Il y a une petite amertume qui fait sa personnalité. Bernard Burtschy dit que le vin a une masse tannique importante. On sent que le vin sera de longue garde. Il y a 60 à 70% de vendange entière. L'âge moyen des vignes est de 50 ans pour l'Echézeaux et de 40 ans pour le Grands Echézeaux. Tous les vins de la Romanée Conti, sauf le Corton, ont 100% de fûts neufs.

Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2014. Le rouge est généreux. Le nez est fermé. La bouche est riche. Le vin est plus profond que le précédent mais moins enthousiasmant pour moi alors qu'Aubert de Villaine vante l'écart qualitatif en faveur de ce dernier. Le finale du vin est plus riche mais il est plus fermé que l'Echézeaux. Il sera très grand avec une générosité plus grande. Il est dans une phase ingrate. C'est sur le finale que la différence se fait.

Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanée Conti 2014. Les vignes ont une moyenne d'âge entre 45 et 50 ans. Le rouge est plus sombre. Le nez est un peu plus charmeur. La bouche est gracieuse, pleine de charme. Il y a beaucoup plus de velours que pour les deux précédents. Mais il y a aussi plus de puissance. C'est un vin qu'il faudra attendre car il a l'amertume de la jeunesse. Sa base florale est très raffinée. Il a le velours et l'élégance et Bernard Burtschy dit qu'il a une base tannique plus forte que la Romanée Conti.

Richebourg Domaine de la Romanée Conti 2014. La couleur est plutôt claire par rapport à ce que j'attendais. Le nez est fermé. La bouche est riche et guerrière. On sent la gourmandise de ce vin. Mais il est encore fermé. La matière est riche et superbe. Il est prometteur et laisse une trace profonde en bouche. Il est lourd de promesses et j'aime beaucoup sa grande richesse. Il va être grand avec de la noblesse. A l'aération il gagne de la longueur et ceci vaut aussi pour tous les vins précédents. Le nez devient splendide et le vin devient généreux, plus charmeur que guerrier.

La Tâche Monopole Domaine de la Romanée Conti 2014. La couleur est plutôt claire. Le nez est très raffiné. La bouche est très séductrice, toute en charme. C'est la danse des sept voiles. Quel équilibre ! C'est un vin riche, complet mais qui a un charme unique. J'adore. Sa puissance est peu commune. Il est plus fin que le Richebourg tout en ayant une grande énergie. Pour mon goût, la belle surprise, c'est le Richebourg, même si La Tâche est plus grande.

Romanée Conti Monopole Domaine de la Romanée Conti 2014. La couleur est claire. Le nez est très beau. Si tel ou tel vin précédent pouvait avoir le moindre défaut (en ont-ils ?), ici, dès la première seconde on sait que l'on est au paradis. Le nez est suave et la bouche est suave, fluide. C'est un vin de haute précision. Il a une petite râpe que j'aime. Il a tout pour lui et bien évidemment je me demande si je ne fais pas d'auto persuasion, car je sais que c'est la Romanée Conti. Mais son équilibre, sa complexité et sa richesse n'ont pas d'équivalent. La longueur est extrême. Si le vin est complexe, ce qui me frappe c'est l'équilibre serein. C'est un vin grandiose. La Tâche est très expressive et plus affirmée que la Romanée Conti, le Richebourg est généreux mais moins noble et moins complexe. Le velours de cette Romanée Conti est extrême.

S'il faut classer les six rouges, ce sera exactement le même classement que l'ordre de service, sans discussion. Aubert de Villaine fait compliment à Bernard Burtschy de la façon dont il décrit la Romanée Conti qui est exactement comme sa propre perception. Entendre Bernard Burtschy est un ravissement tant il sait de quoi il parle, incollable sur tous les sujets.

Montrachet Domaine de la Romanée Conti 2014. Le vin est d'un or clair. Il n'est pas translucide. Le nez est très expressif et opulent. La bouche est superbe, déjà d'un équilibre total. Tout est équilibré. Le vin est frais, acide, fluide, au finale opulent, avec un léger miel. Le vin est vif et frais et montre de la salinité. C'est un grand vin que l'on sent gastronomique. Il n'a pas de gras comme certains montrachets. Il a très peu de botrytis, de l'ordre de 5%. Il est très noble et élégant. Il deviendra raffiné avec l'âge.

Tout le monde a remarqué que les vins s'épanouissent dans les verres et la tentation serait grande que les vins soient servis dix minutes avant que nous ne commencions la dégustation. Aubert de Villaine nous indique que c'est ce qui se pratique aux USA.

Après la dégustation un dîner rassemble, autour de Pascal Marquet, Aubert de Villaine, Bernard Burtschy et quelques amis. Cette fois-ci ce sera dans la salle de dégustation ce qui fait que les assiettes descendent par le passe-plat. Hélas, les coquilles Saint-Jacques à l'agréable parfum de fruit de la passion arrivent trop froides.

Je n'ai pris de notes et ce compte-rendu n'étant pas fait à chaud, mes impressions seront fugaces. Le Corton-Charlemagne Domaine Georges Roumier 1996 est un vin de belle droiture, peut-être un peu timide. Le Bâtard-Montrachet Domaine Marc Colin et ses fils 1999 a plus de puissance. Il est vif et n'a pas la rondeur de ses petits camarades du Domaine Leflaive.

J'ai apporté un Hermitage Chave blanc 1986 de beau niveau mais qui ne brille pas. Le bouchon est en effet brulé sur la moitié du bouchon. Je pense que l'oxygénation lente lui aurait redonné une certaine ampleur mais tel qu'il est servi, il est plutôt coincé même si on devine ce qu'il pourrait offrir.

Le Clos Saint-Patrice Monopole Châteauneuf-du-Pape 2015 est un agréable Châteauneuf, pas vraiment adapté au délicieux pot-au-feu, mais qui se boit bien dans sa jeunesse. Dès qu'arrive la Côte-Rôtie La Landonne Guigal 1988, on change de dimension ; ce vin est très gourmand et de belle amplitude.

Pascal Marquet en veine de générosité nous a offert un Château d'Yquem 1986 que je m'en veux de ne pas avoir reconnu. Il est bien épanoui mais je n'avais plus le palais réceptif.

Ce repas d'après dégustation est un enchantement pour moi, aussi bien lorsqu'il y a Michel Bettane et Bernard Burtschy que lorsque Bernard est seul, car ces deux experts ont un savoir invraisemblable qu'ils exposent avec simplicité. Les écouter est un bonheur rare. Et les écouter dialoguer avec Aubert de Villaine est un privilège. La découverte de 2014 superbes et prometteurs et ce petit souper sont un cadeau de Noël.