Archives de l’auteur : François Audouze

Présentation à la presse d’Yquem 2022 mercredi, 12 février 2025

Le Château d’Yquem organise une dégustation et un déjeuner au restaurant Le Petit Sommelier, pour le lancement du Château d’Yquem 2022. Cette réunion est destinée aux journalistes spécialistes des vins et spiritueux.

Lorenzo Pasquini, directeur d’exploitation de Château d’Yquem, fait une présentation extrêmement intéressante sur les particularités géologiques des appellations qui font des vins doux dans la région de Bordeaux. Il évoque les complexités géologiques des terres et des parcelles du Château d’Yquem. Et c’est passionnant. Il nous propose un exercice qui n’a pas déjà été fait, de goûter six échantillons de vins qui entrent dans la composition de l’Yquem 2022. Les variantes sont soit les parcelles du vignoble, soit les vins qui composent le vin, sémillon ou sauvignon blanc, et le premier échantillon est passerillé et non botrytisé.

La particularité de 2022 est que ce millésime est le plus chaud et le plus sec de tous les millésimes d’Yquem. Pour illustrer cela Lorenzo nous dit que le 18 octobre il faisait encore 34 degrés dans les vignes.

L’Y est aussi particulier car aucun millésime d’Y n’a été aussi précoce, la récolte commençant le 9 août 2022.

Je prenais mes notes sur un carnet mais comme c’était difficile, j’ai écrit sur mon téléphone qui hélas a effacé mes notes. J’avais écrit : Vin 1 : nez vert, mais en arrière-plan il y a une délicate douceur. Bouche saline et belle douceur. Vin puissant. Costaud. Pas de pourriture mais passerillage. Devient frais / Vin 2 : nez délicat plus raffiné. Sauvignon. Bouche plus fluide. Salin. Très Yquem. Un Vin puissant… les notes suivantes se sont évaporées.

Ce qui est intéressant, c’est que le septième vin est le vin final qui paraît beaucoup plus frais et élégant que les composantes. Lorenzo m’a demandé mon avis sur ce 2022. Je l’ai trouvé solide, carré, puissant mais élégant et un peu trop « scolaire » à mon goût. C’est le bon élève qui n’est pas canaille pour deux sous. Cela veut dire que cet excellent 2022 ne prendra son envol que dans quelques années.

Lorenzo nous dit que la trilogie de 2021, 2022 et 2023 devrait être aussi intéressante que la trilogie 1988, 1989, 1990.

L’apéritif se prend avec l’Y d’Yquem 2022 frais, agréable et bien construit. On est à l’aise avec ce jeune vin qui promet. Il y a du saumon gravlax, des blinis au tarama et un carpaccio de poulpe grillé. C’est l’huître et citron caviar qui propulse l’Y à de belles hauteurs.

Le menu a été conçu par Pierre Vila Palleja propriétaire des lieux et aussi sommelier et dégustateur renommé : tartare de veau à l’anguille fumée et sarrasin torréfié / pithiviers de pigeon au foie gras / tomme aux fleurs et Stilton, agrémentés d’un chutney à l’orange / tarte aux pommes caramélisées, crème montée vanillée.

Le Château d’Yquem 2022 prend une hauteur significative avec le tartare de veau. Il avait été bu à la suite de six vins parcellaires. Là, il s’exprime avec enthousiasme et montre qu’il jouera dans la cour des grands.

L’effet de l’âge se sent immédiatement avec le Château d’Yquem 2005. Il a des beaux agrumes dont un citron qui se marie bien au Pithiviers. Par rapport au 2022, la fusée gustative du 2005 est lancée. Le 2022 la rattrapera.

Le Château d’Yquem 1985 est curieux car il n’est pas large. Il est pointu et va de l’avant et fort heureusement le Stilton ouvre l’éventail de ses complexités. Je n’ai pas touché au chutney pour rester sur le stilton pur et la tomme est beaucoup moins apte à propulser le 1985.

Maintenant, c’est ‘trompettes de la renommée’. Le Château d’Yquem 1945 est un monstre sacré. Sa couleur est noire. Dans le verre, le noir côtoie des robes orangées. Et le finale de ce vin est une explosion de complexités. On citerait n’importe quel agrume, n’importe quel fruit exotique, il est là, il est dans le magique bouquet de saveurs infinies. Quel monstre de bonheur. Quelle longueur infinie.

J’avais parlé avec mes convives journalistes de vieux Yquem. On voit qu’un 1945 est stratosphérique et qu’il n’y a aucune raison que le 2022 ne le rattrape pas dans 80 ans. Ce 1945 est un Yquem parfait.

Pierre Lurton nous avait rejoint au début du repas. Il a toujours un sens de l’humour acéré et affûté. Il est amoureux d’Yquem. Nous le sommes aussi. La dégustation de six parcelles ou composantes est très didactique. Lorenzo est très ému d’avoir créé ce vin. Longue vie à Yquem 2022.

Bulletins du 1er semestre 2025, du numéro 1043 à … lundi, 10 février 2025

Bulletins du 1er semestre 2025, du numéro 1043 à …

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(bulletin WD N° 1048 250212)    Le bulletin 1048 raconte : dégustation des vins du millésime 2021 du domaine de la Romanée Conti et 291ème dîner au restaurant Astrance

(bulletin WD N° 1047 250204)    Le bulletin 1047 raconte : Une nouvelle façon d’organiser les dîners.

(bulletin WD N° 1046 250128)    Le bulletin 1046 raconte : déjeuner de conscrits au restaurant Pages, déjeuner de vins étonnants au restaurant le Sergent Recruteur, dégustation de champagnes Krug et repas à la maison familiale de la maison Krug.

(bulletin WD N° 1045 250121)    Le bulletin 1045 raconte : des Master Class du Grand Tasting de Bettane & Desseauve dont ‘assemblage et millésime : l’art du champagne selon Krug’, dont ‘la maison Laurent-Perrier à l’avant-garde de la Champagne’ et dont ‘Le Génie du Vin’.

(bulletin WD N° 1044 250114)    Le bulletin 1044 raconte : La 41ème séance de l’Académie des Vins Anciens au restaurant Macéo.

(bulletin WD N° 1043 250103)    Le bulletin 1043 raconte : dîner « Enigma » pour les gagnants d’une énigme au restaurant Pages, qui est le 290ème de mes dîners et déjeuner ‘rapide’ avec ma fille.

Un joli beaujolais dimanche, 9 février 2025

Ma fille cadette vient à la maison avec son fils. J’ai envie de goûter un vin que j’ai acheté en vue d’une conférence dégustation qui se tiendra pour des élèves de grandes écoles dans quelques semaines. C’est un Moulin à Vent Union des viticulteurs de Romanèche-Thorins et Chénas Prestige 1969 qui annonce fièrement sur son étiquette « Grand Cru de Bourgogne ». Pourquoi pas !

Le fournisseur à qui j’ai acheté quelques bouteilles m’a signalé que la couleur du vin est très claire, plus claire que ce qu’on attendrait. Il m’avait suggéré d’en goûter une et accepterait de reprendre les autres bouteilles si l’expérience n’était pas positive. Je vais suivre son conseil avec une autre raison : je n’ai pas envie de présenter aux étudiants des vins de piètre qualité.

Pour l’apéritif nous grignotons des chips à la truffe puis un fromage de montagne en buvant un Champagne Dom Pérignon 1982. J’avais été surpris que le pschitt soit aussi prononcé, ce qui est un signe de jeunesse. La couleur est ambrée. Les bulles chatouillent gentiment la langue et ce champagne est absolument délicieux, de forte personnalité. J’aime beaucoup ce millésime que j’ai bu une quinzaine de fois, car il est à un point de bascule : il est encore dans la jeunesse et va vers sa maturité. Le champagne est très long, rond et conquérant. Adorable sous tous ses aspects.

Le Moulin à Vent Union des viticulteurs de Romanèche-Thorins et Chénas Prestige 1969 m’avait offert à l’ouverture un parfum très engageant, subtil et raffiné. Servi sur un poulet il confirme la délicatesse de son nez et en bouche c’est une magnifique surprise. Je ne m’attendais pas à un vin si subtil, frêle, d’une jolie amertume à peine râpeuse et l’idée qui me vient est qu’il déroule un goût raffiné et très long comme celui d’un Echézeaux du Domaine de la Romanée Conti des années 70.

C’est vrai que l’émotion est grande et ma fille la ressent de la même façon. J’ai un faible pour les beaujolais ancien et ce vin en est une nouvelle preuve.

Nous n’avions pas pu partager les crêpes de la chandeleur. Nous nous sommes rattrapés avec gourmandise car les crêpes avaient l’épaisseur idéale. Ce fut un beau dîner familial.

Grandes surprises dans un déjeuner au restaurant Pages mercredi, 29 janvier 2025

Deux amis qui ont déjà participé à mes dîners dont l’un m’a déjà demandé d’organiser plusieurs dîners pour ses amis ou collègues vont déjeuner avec moi pour mettre au point un futur dîner.

Pour ce repas au restaurant Pages, j’ai arpenté ma cave pour trouver des vins. Dans une allée je vois une grosse tache de vin récente. C’est un bordeaux de 1953 qui a perdu la moitié de son vin qui a coulé au sol et cette perte est récente. La capsule s’est déchirée et une partie du bouchon dépasse du goulot.

Ce vin a toutes les chances d’être abîmé mais j’ai une règle : toujours laisser une chance à tous les vins. Ce Château La Gaffelière Naudes 1953 s’ajoutera aux autres vins que j’ai choisis.

J’arrive peu avant 11h30 au restaurant Pages qui est presque vide car toute l’équipe déjeune au 116, la brasserie qui appartient aux propriétaires de Pages. Ils me rejoignent vite.

L’un des amis est autrichien et j’ai pris un Strohwein (vin de paille) de Cabernet Sauvignon Autriche 1999. C’est le premier vin que j’ouvre pour que Lucas le pâtissier puisse créer un dessert. Il sera à base de fruit noir et de chocolat.

J’ouvre ensuite le Bordeaux 1953. Je n’ai pas besoin de tirebouchon car le bouchon est tellement recroquevillé qu’il vient à la main quand je soulève la capsule. Il y a énormément de saletés sur tout le goulot que je nettoie avec mes doigts. Quelle surprise quand je le sens. Il n’a aucune odeur négative ce qui est surprenant. Je verse l’équivalent de deux verres dans une coupelle pour que le chef Ken fasse la sauce qui accompagnera le cabillaud.

Les trois autres vins ont des parfums prometteurs, la Coulée de Serrant ayant le plus beau parfum.

Le menu sera : amuse-bouches / carpaccio de bar / cabillaud / canard de Challans / wagyu / comté / dessert fruit noir et chocolat / financiers à la rose.

Le Champagne Pommery 1980 a une couleur très claire de grande jeunesse. On ne voit pas les bulles mais en bouche, sur la langue, elles sont puissamment ressenties. Ce champagne est très expressif, enthousiasmant. Il est d’une belle maturité, cohérent et rond. L’accord avec le bar est parfait.

Le Clos de la Coulée de Serrant Mme A. Joly 1976 est magique. Quelle puissance ! Je m’aperçois que j’ai mal conçu le menu puisque le vin de 1976 accompagne le cabillaud dont la sauce est à base du bordeaux de 1953 alors que ce vin viendra après. Mais à ma grande surprise, l’accord du poisson dont la sauce est au vin rouge avec le vin blanc est parfaitement pertinent.

Sur le canard le Château La Gaffelière Naudes 1953 fait bonne figure, mais on voit quand même qu’il a un peu souffert. C’est un honnête Saint-Emilion qui montre une solidité étonnante.

Le Chambolle Musigny Joseph Drouhin 1959 est d’une couleur particulièrement claire. Son parfum est délicat et on retrouve la même délicatesse en bouche. Ce vin subtil, raffiné, précieux est extrêmement bon et va prendre son envol avec le wagyu, au point que nous en demanderons un deuxième service. Ce Chambolle est particulièrement grand, d’une grande année.

Le Strohwein Cabernet Sauvignon Weinbau Georg Lunzer Autriche 1999 est d’un rouge foncé avec des notes de rouge clair. Le nez est sec et ne laisse pas imaginer le goût qui est celui d’un liquoreux gras et épais, un peu comme un Maury. Le vin est délicieux et parfait avec le dessert. C’est un vin de plaisir qui convient aussi bien avec les délicieux financiers.

Mes amis n’attendaient pas cette profusion de vins si différents. Les deux vainqueurs sont la Coulée de Serrant d’une personnalité brillante et le Chambolle Musigny d’une délicatesse extrême.

Ce fut un très beau repas, mais la plus belle surprise pour moi, c’est la qualité du Saint-Emilion que beaucoup d’amateurs auraient éliminé et qui a montré à quel point les vins nous offrent des moments inattendus.

Magique Château Latour 1934 dimanche, 26 janvier 2025

Ma fille cadette vient déjeuner à la maison avec son fils. Nous avons choisi d’avoir un poulet avec une purée de pomme de terre. C’est un plat simple pour accueillir un vin. Sur l’inventaire des vins de la maison, je retiens une dizaine de vins possibles pour pouvoir en prendre un. Le premier que j’ai envie de regarder est un Château La Gaffelière Naudes 1953 qui est dans une case très basse ce qui fait que je ne vois pas les étiquettes. Je mets la main sur une bouteille que je remonte et c’est un Château Latour 1934. Le niveau est entre mi épaule et basse épaule. Il me paraît opportun que ce soit le vin du déjeuner, sachant que s’il ne convient pas, il y aura toujours des solutions de recours.

La bouteille est très ancienne, avec un cul profond et un cylindre évasé, plus large en haut de l’épaule. Le bouchon vient en se déchirant puisque le goulot est pincé. L’odeur est parfaite. Il m’apparaît que le niveau assez bas n’a eu aucune influence sur le parfum. C’est plutôt bon signe.

Pour l’apéritif nous avons le Champagne Bollinger Blanc de Noirs Vieilles Vignes Françaises 2000 qui avait été servi il y a deux jours et demi. Lorsque je le sers, de fines bulles sont nombreuses. Le nez est brillant et il m’apparaît immédiatement que le Bollinger est nettement plus épanoui et large aujourd’hui. Quel grand champagne, racé, noble, large et expressif. Un vrai bonheur et une vraie grandeur. Faudrait-il que j’ouvre les champagnes deux jours avant, la question mérite d’être posée pour des champagnes aussi structurés.

Le Château Latour 1934 est un vin que j’ai bu déjà dix fois de ce millésime, sur les 182 Latour que j’ai pu boire, de 79 millésimes différents. La couleur de ce vin est magnifique et le parfum est d’une pureté absolue. C’est intéressant de constater que ce vin n’a aucune trace d’effet liée à la baisse de niveau.

En bouche, le vin est d’une fraîcheur plaisante et d’une belle structure. C’est un vin délicat qui ne joue pas sur la puissance. Il est noble et harmonieux. On se régale avec un tel vin manifestement grandiose, d’une noblesse absolue.

Le dessert est une galette des rois, tardive puisque les rois mages ont dû rejoindre leurs royaumes depuis longtemps. Aucun vin n’aurait convenu avec ce dessert tartiné d’une confiture d’agrumes.

Il valait mieux rester sur la mémoire d’un champagne et d’un vin au sommet de leur art.

Soirée caviar avec mon fils samedi, 25 janvier 2025

Mon fils vient dîner à la maison. Le thème sera le caviar. Nous avons ouvert une grosse boîte de caviar Kaviari Baeri. J’avais ouvert il y a deux heures une demi-bouteille assez sale de Blanc de Blancs Spécial Champagne Henriot années 50. Sur l’étiquette on peut lire Vignobles Henriot Grands Crus de la Champagne. En dessous une carte montre les implantations du domaine, avec pour titre « la répartition judicieuse de ce domaine exceptionnel ».

Le bouchon était venu en deux morceaux puisque pour des bouchons de ces âges, la torsion que l’on fait pour remonter le bouchon déchire le lien avec la partie basse de liège. La couleur est belle, joliment ambrée. Le goût est délicat et subtil et constitue une belle surprise car l’âge ne se sent pas. Apparemment pour certains champagnes le volume de demi-bouteille n’a pas d’effet négatif. Le caviar rajeunit le champagne et l’effet est très positif.

J’avais ouvert aussi une bouteille assez sale et d’un niveau assez bas, un Chablis Réserve de la Rôtisserie de la Reine Pédauque 1934. La couleur est ambrée mais pas désagréable. Même si le parfum est plaisant et vivant, en bouche, le vin montre sa fatigue. Le vin est buvable mais ne donne pas assez d’émotion.

Aussi, je sers le Champagne Bollinger Blanc de Noirs Vieilles Vignes Françaises 2000 qui avait fait un pschitt puissant à l’ouverture. J’ai failli lâcher le bouchon qui surgissait car je n’ai plus tellement l’habitude de champagnes aussi jeunes. Quel bonheur, quelle grandeur ! Le vin est puissant, guerrier, vainqueur. Et le blanc de noirs convient parfaitement au caviar Baeri très gourmand. Le champagne est noble et précis. C’est un grand champagne de longueur extrême. Un plaisir absolu.

Nous avons conclu le repas avec une Fine Normande Maison du Bonhomme Normand 1903 toujours aussi merveilleuse expression du Calvados.

Déjeuner au restaurant Pages avec des vins bus à l’aveugle samedi, 25 janvier 2025

Récemment, un ami voulait me présenter à des amateurs de vins et j’avais apporté des vins inusuels qui devraient se boire à l’aveugle. C’était si difficile que personne n’avait trouvé. Le même ami m’invite à rencontrer deux de ses amis. L’idée me vient de faire goûter à l’aveugle trois des quatre vins que j’ai apportés.

Au restaurant Pages, j’arrive à 11h30 pour ouvrir mes vins. Le menu sera quasiment le même qu’il y a deux jours, le saint-pierre étant remplacé par une lotte.

Le premier vin n’est pas une énigme, c’est un Champagne Dom Pérignon 1976 au niveau un peu bas. L’ami qui invite annonce l’année avec certitude. Bravo. Le champagne est ambré. Il avait fait un pschitt à l’ouverture et il a gardé des bulles. Il est très bon, typé, expressif, et très long en bouche. C’est un très agréable champagne, excellent sur les amuse-bouches variés, de belle présence.

Il accompagne le bar en carpaccio en même temps que le Beringer Vineyards Chardonnay Napa Valley 1986. J’avais promis trois dîners à ceux qui trouveraient. Plusieurs annoncent que le vin n’est pas français mais aucun ne pense à un vin américain. Je suis très impressionné par la richesse et la longueur de ce vin intense et gourmand. Son chardonnay évoque des saveurs de champagnes blancs de blancs. J’adore ce vin original.

Pour les deux vins suivants, j’ai annoncé que j’offrirais un dîner gratuit au vainqueur. J’avais oublié que l’une des convives est journaliste du vin mais aussi professeur d’œnologie. Elle a gagné deux repas.

Le Fleurie Bouchard Père & Fils 1987 est sec, droit, précis et très long. Il est rigoureux mais n’est pas dénué de charme. J’aime beaucoup sa présence fine. Notre amie a trouvé beaujolais. Ça méritait le prix.

Sur le canard et le wagyu, nous avons un Pommard Clos de la Commaraine Jaboulet Vercherre 1976. Non seulement notre experte a trouvé pommard, mais elle a suggéré Jaboulet Vercherre. Là, je dis chapeau. Ce pommard n’est pas un des plus grands que j’aie bus mais il s’est comporté avec une grande franchise et a créé de beaux accords.

Nous avons eu ensuite un très bon comté, un dessert à base de noisettes très agréable et Lucas, le pâtissier, nous a fait un beau cadeau, de financiers à la rose, comme je les aime. Pierre-Alexandre qui est ami de l’américain qui avait laissé ses chartreuses à la suite d’un récent déjeuner, nous a servi quelques gouttes de chartreuse, la jaune pâle, qui a mis un point final à un déjeuner particulièrement sympathique. Bravo à la gagnante !

Déjeuner au restaurant Pages mercredi, 22 janvier 2025

Lors d’un récent déjeuner j’ai rencontré un journaliste avec lequel j’ai sympathisé. Il est venu à l’un de mes dîners et nous allons déjeuner au restaurant Pages que j’ai envie de lui faire connaître.

J’arrive peu avant midi pour ouvrir mes vins. Le bouchon du Champagne Laurent Perrier Grand Siècle est très serré aussi ai-je besoin de l’aide du jeune sommelier pour l’extirper et quelle joie d’entendre un pschitt très significatif. Le bouchon m’apprend que la bouteille a été dégorgée en 1986 et que le champagne doit être de la fin des années 70. Le Beaucastel 1981 a un bouchon qui vient entier et le vin dégage un parfum riche et plaisant.

Le menu devant convenir à ces vins est : amuse-bouche / carpaccio de bar / saint-pierre, coque et sauce umami / canard de Challans / wagyu / comté / dessert aux agrumes et noisettes.

Le Champagne Laurent Perrier Grand Siècle années 70 a peu de bulles et offre une couleur assez claire pour cet âge, à peine ambrée. Le champagne est rond, équilibré, riche et gourmand. C’est un plaisir que de le boire. Il est très gastronomique, se plaisant avec les goûts typés des amuse-bouches. Boire un tel champagne est un grand moment de plaisir dû à son équilibre.

Le Châteauneuf-du-Pape Château de Beaucastel 1981 est une pure merveille. Qui attendrait autant de qualités d’un vin d’un millésime qui n’a pas eu l’aura qu’il aurait dû avoir ? On se régale de sa richesse gourmande. J’ai envie de le goûter avec le saint-pierre malgré la présence de la coque. Et si on prépare son palais à cette expérience, on constate que l’on y trouve du plaisir. Il faut habituer le palais à être flexible et cela peut donner comme maintenant de belles surprises.

Sur le canard et sur le wagyu le Beaucastel montre sa richesse équilibrée et longue. C’est un très grand vin et une belle surprise.

Le champagne est revenu en scène pour le dessert et a montré ses qualités de de flexibilité.

Mon ami a pu mesurer à quel point la cuisine du chef Ken, du pâtissier Lucas et de toute l’équipe s’adapte si bien avec les vins. Ce fut un beau repas.

Un Rayas à l’Ecu de France dimanche, 19 janvier 2025

Le restaurant l’Ecu de France est plus que tricentenaire sur un site au bord de la Marne. Il a depuis 1920 grâce a la ténacité sérieuse de la famille Brousse une offre de vins qui mérite le respect. Hélas, du fait de l’internationalisation de la demande les allocations dont bénéficie ce restaurant se rétrécissent et c’est bien dommage.

Nous nous rendons au restaurant, ma femme et moi, accueillis chaleureusement. Tout commence par le choix du vin. Aujourd’hui ce sera Château Rayas Châteauneuf-du-Pape 2013 dont j’apprendrai plus tard que c’est la dernière bouteille.

Les plats que j’ai choisis sont : escalope de foie gras de canard poêlée, chutney de pomme, rougaille au vinaigre de riz, crème balsamique aux fruits rouges et caramel de betterave / ris et joue de bœuf confite, laqués, réduction de sauce vin rouge au poivre de Penja, pommes grenailles rôties et légumes du jardin sous toutes leurs formes / brie de Meaux aux brisures de truffe et comté / entremet chocolat, mousse de chocolat au lait, crémeux orange, marmelade de clémentine.

Le parfum du vin est superbe et intense. Dès les premières gorgées du Château Rayas Châteauneuf-du-Pape 2013 je ressens une émotion extrême. Il a un équilibre étonnant et une sensibilité émouvante. Je suis aux anges car je ne m’attendais pas à autant de romantisme et de glorieuse beauté.

A chaque gorgée je me dis : « mon Dieu qu’il est grand ». De toutes les occasions que j’ai eues de boire de jeunes Rayas, je ne crois pas avoir eu autant d’émotion. C’est une belle découverte car c’est la première que j’ai bu un Rayas 2013 et c’est le plus jeune des 90 Rayas que j’ai bus.

La cuisine de l’Ecu de France est de très belle qualité. Tant mieux.

Deux Chave Cuvée Cathelin au restaurant Pages dimanche, 19 janvier 2025

Il y a longtemps que nous n’avions pas partagé de belles bouteilles avec mon ami Tomo. Il propose comme thème les vins d’Henri Jayer. Je suis plutôt favorable à l’idée de goûter des cuvées Cathelin de Chave et c’est ce qui est retenu. Tomo me propose qu’un troisième amateur se joigne à nous. Nous échangeons longuement pour composer un programme cohérent.

J’arrive à 11h30 au restaurant Pages pour ouvrir mon vin et un autre que j’offre en surprise. Les vins de Tomo avaient déjà été ouverts par Pierre Alexandre le dynamique directeur.

L’ouverture des vins donne du temps pour composer le menu, avec les suggestions de Tomo, du chef Ken et les miennes. Ce sera : amuse-bouches / carpaccio de wagyu / poisson cru / homard / veau / truffe en croûte / wagyu / fromage / financiers. L’idée majeure est de se faire plaisir.

Le Champagne Krug Clos du Mesnil 2000 est clair et offre de fines bulles. Le parcours en bouche du champagne très sec est comme le sillage d’une pirogue avec de gracieuses ondulations, et le finale est brillant comme un saut de carpe. C’est dans le finale que le goût explose. Ce 2000 est un grand vin cistercien de la stricte observance qui pousse à la méditation. Il est très grand.

Le Meursault Domaine d’Auvenay 2011 est un vin de niveau Villages mais c’est une bombe, comme tous les vins blancs d’Auvenay que j’ai eu l’honneur de goûter. On dirait que l’on a jeté du marc de Bourgogne dans les cuves pour donner cette puissance guerrière. Le vin est gourmand, puissant, dominant le palais et d’une expression remarquable. Avec le homard, c’est un régal de grand vin.

J’ai envie de goûter l’Hermitage Chave Cuvée Cathelin 2000, qui est mon apport, avec le homard. Mes amis me regardent comme si j’étais un envoyé du diable, mais en fait l’accord se trouve aussi avec le vin rouge. Il me semble que le Cathelin met plus en valeur le homard, alors que dans l’accord avec le meursault, c’est le homard qui met en valeur le vin.

Sur le veau délicieux et riche nous buvons l’Hermitage Chave Cuvée Cathelin 2009 de Tomo en même temps que le mien. Sur le veau, j’ai tendance à préférer le 2009, plus rond, plus confortable et plaisant. Sur la truffe le 2000 prend son envol. Il est droit, rectiligne, long, strict et sans concession et j’adore ce vin car il ne veut pas séduire. Il veut qu’on l’aime pour lui-même. Et c’est le cas.

Le wagyu accueille volontiers les deux Hermitage, et c’est vraiment la truffe qui a illuminé le brillant 2000. Ces deux vins de 2009 et 2000 sont des vins d’une richesse noble qui justifie l’aura dont ils sont entourés.

J’ai acheté il y a maintenant environ un quart de siècle une collection de vins de Chypre et de nombreux autres vins liquoreux parmi lesquels quelques Malvoisie des Canaries 1828. Lorsque je verse le vin, la couleur brille comme celle d’un bijou. Il y a du jaune, du brun et de l’or chatoyant. Le parfum est magique, riche, voluptueux, à se damner. En bouche c’est un élixir irréel tant il est accompli, parfait et éternel. Son acidité est divinement dosée. La pensée qui me vient est que ce vin, s’il était ouvert dans 200 ans, serait dans le même état qu’aujourd’hui. C’est un immense moment.

Nous allons goûter deux chartreuses anciennes et les indications d’années m’ont été fournies sur Instagram lorsque j’ai mis les photos des deux flacons. La Chartreuse dite Tarragone mais en fait Voiron de la période 1936 – 1941 est très claire comme une chartreuse blanche mais c’est une jaune, délicate, subtile et à la longueur infinie.

La Chartreuse Tarragone 1951 est d’un jaune plus foncé. Elle est puissante mais moins charmeuse que la plus vieille. Terminer un repas sur des chartreuses, c’est finir sur un petit nuage à la droite du Père.

Pour nous tous, le gagnant est de loin la Malvoisie 1828. C’est un vin immortel d’une longueur infinie. Le deuxième pour moi est la Tarragone jaune clair et le troisième le Cathelin 2000.

Tomo a le même gagnant et son deuxième est le Cathelin 2000, suivi en troisième par le Meursault d’Auvenay.

En fait, tous les vins étaient parfaits et c’est incroyable de rencontrer une telle perfection mais aussi une telle diversité de grandes personnalités qui vont de celle du Clos du Mesnil à celle de la Malvoisie.

L’équipe de cuisine a suivi nos émerveillements. Le repas fut sublime. Ce fut un grand moment de gastronomie.