le 100ème dîner de wine-dinners – les préparatifsmercredi, 19 mars 2008

Le centième dîner de wine-dinners se prépare. Les vins, le lieu, la date, les convives, tout est déjà déterminé. S’agissant d’un lieu où je n’ai jamais organisé un dîner, la coordination avec le chef est essentielle. N’écoutant que mon sens du devoir, je me rends au château de Saran, demeure résidentielle de réception du groupe Moët & Chandon, puisque c’est là que se tiendra ce dîner, grâce à la gentillesse et l’amitié des dirigeants dont en particulier Jean Berchon, l’un des plus fidèles membres de l’académie des vins anciens. Etant en avance, je me rends au siège du champagne Salon pour saluer Didier Depond, son président. L’ordonnancement de la communication étant un sujet sensible dans le monde du champagne, je bois un champagne dont on me demande de ne pas parler. Je n’en dirai rien.

Je suis accueilli au château de Saran par deux rayons de soleil, d’abord celui de notre astre qui était bien discret depuis quelques semaines, ensuite celui d’Hélène Feltin, nouvelle directrice du patrimoine du groupe Moët et maîtresse de ce château. Jean nous rejoint et nous allons saluer en cuisine Bernard Dance, le chef de cuisine qui a composé un menu de travail pour que je commente chaque plat en fonction des personnalités des vins prévus pour le centième. Jean m’annonce les vins de Moët & Chandon qui seront ajoutés, car il est évident que les champagnes ne viendront d’aucune autre origine. Jean m’avait promis que je serais content. Il a raison.

Bernard Dance, formé dans plusieurs restaurants trois étoiles de France a déjà une grande habitude des accords mets et vins, car aussi bien Jean Berchon que Richard Geoffroy cisèlent les saveurs qui doivent accompagner les champagnes ‘maison’. Je découvre des plats épurés, lisibles, ce qui me facilite grandement la tâche de mise au point. Nous avons mille fois changé d’orientation, modifié les sauces ou l’esprit des plats, retiré certains et ajouté d’autres et une solution est apparue, où nous mêlerons le rassurant et l’osé, le confortable et la confrontation. Il me semble que la synthèse est cohérente. Je ne résiste pas au plaisir d’en livrer le secret.

L’apéritif au salon se fera autour d’un champagne Dom Pérignon Oenothèque 1973 en magnum. De petites tuiles, du jambon en fines tranches et des toasts à l’anguille fumée l’accompagneront.

Nous passerons à table et un champagne Moët & Chandon 1975 en magnum sera agrémenté d’un velouté de sole puis d’une langoustine baignant dans une sauce orientale très typée. Un Rilly rouge Moët & Chandon 1928 accueillera une sole au caviar.

Le Château Margaux 1959 voisinera avec un turbot léchant un jus de veau et Pétrus 1953 nagera avec un rouget baigné d’une sauce légère au vin rouge.

Une pause avant les bourgognes sera faite avec un champagne Moët & Chandon 1921 dégorgé à la volée devant nous pour lequel sera servi un ris de veau nu.

La Romanée Conti domaine de la Romanée Conti 1972 et le Vosne Romanée Cros Parantoux Henri Jayer 1987 voisineront avec un agneau en croûte légère et navet confit au jus. La Côte Rôtie La Mouline Guigal 1978 courra avec un râble de lièvre rôti.

Le Montrachet domaine de la Romanée Conti 1972 sera confronté à un plat très osé, un pigeon molé dont j’ai demandé que l’on adoucisse la présence envahissante. Un Crémant Moët & Chandon 1928 et un Vin Blanc d’Arlay Jean Bourdy 1888 se mesureront sur un Comté.

Le Château d’Yquem 1904 aura pour compagnon un des classiques de mes dîners, fait de mangues et pamplemousses roses juste poêlés et caressés d’une infusion de thé. Le vin de Chypre 1845 se consolera de madeleines au miel.

Nous passerons au salon pour goûter un champagne Moët & Chandon 1959 en magnum et un champagne Mesnil Moët & Chandon 1900 sur des tuiles et des financiers.

Tout au long de notre déjeuner avec Jean et Hélène, l’excitation montait, car la composition de ce programme est particulièrement motivante. Bernard Dance était heureux de voir nos réactions sur sa cuisine intelligente et d’une grande lisibilité. Ces travaux pratiques m’ont offert un grand moment de plaisir sur un Champagne Dom Pérignon 1999 qui s’améliore à chaque fois que je le bois, aux chauds accents de crème caramel et aux évocations florales gracieuses.

Je crois que nous préparons un grand dîner.

P.S. le menu qui me fut servi au château de Saran :

Velouté de sole

Filet de sole au caviar d’Aquitaine et cerfeuil

Homard à la vanille

Turbot rôti jus salé à l’anchois

Langoustines Thaï

Filet d’agneau en croute de truffe noire

Canard à l’orange

Foie-gras poêlée aux épices douces

Ris de veau aux morilles fraîches

Pigeon molé

Fromages

Délice chocolat blanc citron vert

Glace au poivre de Sechuan

Ananas confit aux épices, glace coco

Zéphyr chocolat noire et griottines