dîner au restaurant Yannick Alléno au Pavillon Ledoyenjeudi, 6 octobre 2022

Nous invitons des amis à dîner au restaurant Yannick Alléno au Pavillon Ledoyen. À la confirmation de la réservation on m’a demandé l’empreinte de ma carte bleue et quelques jours avant le repas, un maître d’hôtel s’est proposé pour m’aider à préparer cette expérience gastronomique. Cela part d’un bon sentiment mais il m’a semblé plus pertinent que nous fassions les choix avec nos amis.

Le jour venu, quand je donne mon nom, une aimable hôtesse m’indique que nous sommes attendus en cuisine. Nous descendons des escaliers étroits et nous arrivons dans une salle immense où une brigade importante travaille. Tout ce monde s’affaire, ce qui n’empêche pas les sourires et la gentillesse de l’accueil. Yannick Alléno arrive et nous propose un apéritif impromptu en cuisine. Quelle aimable attention ! Il nous fait croquer des châtaignes originales, un petit plat au lait et un tempura de cèpe. Nous sommes tellement heureux de nous revoir. Un membre de l’équipe nous sert une coupe de Champagne Diebolt Vallois fort plaisant. Ce moment imprévu est un beau geste d’amitié.

Nous montons à l’étage du restaurant gastronomique et la décoration est originale. Les murs et le plafond de cette salle sont classés et immuables et des paravents légers séparent les tables sans que cela donne l’impression d’être isolés.

Chacun de nous quatre reçoit un menu personnalisé par son prénom, ce qui est, une fois de plus, une délicate attention. Nous choisissons le menu collection découverte dont seul le plat central est optionnel. Voici mon menu : primeur, cueillette improvisée, extraction en gelée délicate / royale d’oursin en texture, beignets de crevettes bouquet / tourteau dit dormeur, cuit à la cheminée sur une tranche de chou-fleur au curry, sauce liée aux parties crémeuses / pigeon mariné puis soufflé et poché au « lait de Sakura », cerises au jus de presse anis, caillé et roquette sauvage / figue de chez monsieur Baud au curry, confiture / anneaux croustillants de feuilletage glacés au café, gelée d’extraction de topinambour et raisins gorgés au Paradis.

Le choix des vins dans le livre de cave est un chemin périlleux, car dès que mes yeux se posent sur un vin qui me fait envie, la colonne des prix me fait faire la grimace. Je vais donc jouer « petit bras » pour deux vins et me « lâcher » pour le troisième.

Le Champagne Chartogne-Taillet Cuvée Sainte Anne Brut est un champagne que quinze ans auparavant j’aurais ignoré, car ces champagnes très nature, relativement simples n’étaient pas dans ma démarche. Mais celui-ci, pur, franc, direct et de belle acidité est un appel à la gastronomie. Il a besoin de se confronter à des saveurs franches et il se révèle d’une souplesse qu’il n’a pas sans un plat. Avec l’entrée l’accord se trouve et j’apprécie ce champagne.

J’ai choisi dans la carte des vins un Bourgogne Blanc Coche-Dury 2017 car j’ai le souvenir d’avoir eu une immense surprise en buvant le Bourgogne Rouge Coche Dury au restaurant La Cagouille, démontrant que sur un vin sans appellation ce magicien de Jean-François Coche-Dury est capable de faire des miracles. Là, au premier abord, je n’éprouve pas le sentiment de prodige car le vin est assez calme. Mais le miracle que j’attendais va se produire avec le plat d’oursin qui est une merveille. Le vin s’élargit, s’anime, et devient grand. C’est cela que je désirais.

L’Hermitage Jean- Louis Chave 2006 est un grand Hermitage. Il paraît tellement facile et accessible. En lui tout est judicieusement équilibré. Ce n’est peut-être pas la plus grande des années de cet Hermitage, mais à ce niveau de qualité, peu importe. Alors on est à l’aise et heureux. Avec le pigeon l’accord est parfait et même avec les petites cerises si expressives, le vin jubile.

Au cours du repas, deux des chefs que nous avions vus en cuisine sont venus expliquer leurs plats et ils savent en parler comme personne ne le ferait. On sent leur implication et leur enthousiasme. Les deux plats que j’ai considérés comme les plus brillants sont les deux premiers servis, la cueillette improvisée et la royale d’oursin.

Dans ce temple de la gastronomie, nous avons passé avec nos amis une excellente soirée.