Dîner au restaurant Le Train Bleusamedi, 21 septembre 2019

Nous allons dîner avec une amie américaine au restaurant Le Train Bleu, pour lui montrer ce site extravagant mais aussi pour voir comment Michel Rostang a pris en main ce lieu chargé d’histoire. Je suis toujours fasciné par la richesse mémorielle de ce lieu avec des décorations luxuriantes, des peintures d’une rare qualité. Comment le PLM (Paris Lyon Marseille) qui sera fondu plus tard dans la SNCF a pu permettre une telle débauche de création, cela laisse pantois.

La carte des mets est simplifiée par rapport au temps jadis. Ma mère venait manger des huîtres et casser des pinces de crabes, qui ont disparu. Le lieu est devenu plus restaurant que brasserie, avec quelques plats conservés. La carte des vins est assez courte et recèle peu de pépites. Mais nous allons trouver notre bonheur. Mon menu sera choisi avec un parti pris de tradition : quenelle de brochet à la lyonnaise, sauce Newburg, riz basmati grillé / gigot d’agneau de nos régions rôti, servi à la voiture de tranche, gratin dauphinois de la Maison Rostang / cigare croustillant fait de tabac de la Havane, crème légère au cognac XO Hennessy.

La quenelle me rappelle des souvenirs vifs. Je l’ai adorée, surtout pour sa sauce. La table de découpe avait deux gigots déjà largement entamés du fait des demandes d’autres tables, aussi, répondant à mon souci, le directeur de salle a fait venir un manche de gigot tout ‘neuf’ dont mon amie et moi avons eu les meilleurs morceaux. La viande est parfaite et le gratin est d’une légèreté à signaler.

Un petit incident n’a pas réussi à casser notre bonheur. J’avais choisi sur la carte des vins un Champagne Bollinger millésimé la grande année 2008. C’est ainsi que c’est rédigé sur la carte des vins et c’est le seul champagne millésimé de la carte. Quand j’ai vu arriver un Bollinger 2007, mon sang n’a fait qu’un tour. Rien ne m’exaspère autant qu’une erreur de millésime, propice à tous les quiproquos. Le serveur est allé rechercher un 2008, et la suite de son service a été tellement attentionnée qu’il est pardonné.

Le champagne est vraiment jeune. Il faut qu’il se réchauffe pour qu’il gagne en largeur et en charme. C’est un beau champagne qu’il faut impérativement attendre contrairement à d’autres 2008 déjà épanouis.

J’ai choisi pour la viande une Côte Rôtie La Mouline Guigal 2000. Ce millésime n’est sans doute pas l’un des plus épanouis pour les Côtes Rôties de Guigal, mais sa râpe qui se combine à un beau velours en fait un vin qu’on ne peut qu’adorer. Il est incisif et entraînant, avec un finale qui claque.

Le service est très attentionné mais cela peut tenir aussi aux bouteilles que j’ai commandées. Tout paraît très professionnel et très rôdé comme du temps de ma jeunesse. J’ai beaucoup aimé cette cuisine et comme le cadre m’enchante par cette évocation d’un 19ème siècle ambitieux, je n’ai qu’une envie, c’est d’y revenir.

J’ai rapporté chez moi le reste du vin rouge. Le lendemain, ce qui caractérise définitivement le vin de Guigal, c’est le velours. Il est riche, sent bon la garrigue, mais le velours s’impose. J’ai pu faire l’expérience d’un accord qui ne marche que dans un sens : lorsqu’on boit le vin après avoir mangé une figue blanche, le vin n’en profite pas tellement. Mais lorsqu’on mange la figue après avoir bu le vin, elle devient encore plus délicieuse.

je me suis amusé à faire un selfie !!!