Deux vins de 1915 exceptionnelsdimanche, 27 janvier 2019

Les jours se suivent et ne se ressemblent pas. Le réveil fut difficile et je décide que le nombre de vins pour notre déjeuner serait réduit. Le Veuve Clicquot 1899 en demi-bouteille de Florent et le Heidsieck Monopole sec 1904 en demi-bouteille de ma cave ne seront pas bus ainsi que le Meursault Goutte d’Or Morin Père et Fils 1949 de Florent et le vin allemand du début du 20ème siècle au nom illisible. Il n’y aura que les bouteilles ouvertes hier qui figureront au déjeuner.

La table est mise dans ma cave et sur le reste du Champagne Krug Private Cuvée années 40, nous goûtons un camembert excellent. Le champagne a profité de la nuit et s’est ouvert, avec une joie de vivre plus grande, même si les bulles sont plus rares. Ce champagne est devenu très agréable, même s’il n’a pas vraiment un goût de revenez-y.

J’avais ouvert hier un supposé Château Margaux vers 1910 au parfum incertain. Aujourd’hui, les miracles ne sont pas à l’affiche, car le vin dévié ne paraît pas buvable et ne reviendra jamais à la vie puisqu’il ne s’est pas ouvert en une vingtaine d’heures. Le Meursault inconnu d’une cave de restaurant années 40 a passé une mauvaise nuit car il a perdu son équilibre et n’incite pas à le boire à nouveau. Il a eu son heure de gloire hier.

La bouteille que j’avais rangée loin des autres hier à cause de son odeur désagréable se refuse elle aussi. L’odeur s’est vinaigrée et l’acidité épouvantable empêche de la boire. C’est une journée sans miracle.

Sur le champagne nous mangeons des tranches de saucisson et un joli jambon de Parme. Le rôti de porc froid et les fromages vont accompagner les deux 1915.

Le Corton Geisweiler 1915 de Florent a une très belle couleur fraîche et claire. Le nez est raffiné, peu expansif. En bouche, il est très sauvage, atypique, avec une fraîcheur inattendue. Il a du volume et une belle expression.

Le Nuits-Saint-Georges Les Cailles Morin Père & Fils 1915 de ma cave qui avait un superbe bouchon à l’ouverture a une couleur plus foncée que celle du corton. Le nez est profond, intense, ce que l’on retrouve dans le goût puissant. Les deux vins nous offrent ce qui se fait de mieux dans les Côtes de Beaune et dans les Côtes de Nuits pour cette période. Ils sont très dissemblables et ce qui est amusant c’est qu’au début de la dégustation, Florent préfère mon vin et je préfère le sien alors que généralement, il est naturel, surtout pour moi, de préférer son propre apport.

Nous différons aussi sur l’appréciation du fruit dans les deux vins. Florent trouve le Nuits plus fruité et je trouve le corton plus fruité. Nous nous retrouvons tous les deux sur le fait que les deux vins sont exceptionnels et que leurs 103 ans ne correspondent à aucun affaiblissement de leurs qualités. Ils ont puissance et énergie sans aucun bémol. Le Nuits se montre plus grand que le Corton et Florent qui aime les notations donne un écart de 4 points sur 100 en faveur du Nuits. Il est à noter aussi que c’est la douzième fois que je bois le Nuits 1915 (j’en ai bu un ou deux avant de créer les bulletins) et aucun n’a été autre chose que parfait. Ce lot de vins extrêmement sain est incroyable. Mis sept fois dans des dîners où l’on a voté il a été nommé cinq fois premier ou second par le consensus.

Le corton est plus frais, plus aérien au final de jolis fruits rouges. Le Nuits est plus riche et plus profond, incisif et bourguignon sans concession. Je pense volontiers que le grand vin est éternel et que sa mort n’est causée que par la mort du bouchon. Nous avons la preuve qu’avec deux bourgognes de 103 ans dont le bouchon est venu entièrement sain, il n’y a aucune trace de vieillissement mais des évolutions vers des saveurs plus abouties et intégrées.

Florent va reprendre son train. Lafite 1900, Nuits Cailles 1915 et Corton 1915 ont fait de ces deux jours d’amitié un moment exceptionnel.


à gauche le Corton Geisweiler 1915 et à droite le Nuits Cailles 1915

le Corton

le Nuits Cailles

le millefeuille pour le Pedro Ximenez

1/2 Krug Grande Cuvée, Domaine de Chevalier 1962, Meursault années 40, Pichon 1904, Pétrus 1900, Pedro Ximenez, Marc de rosé d’Ott 1929. Belle brochette !