Déjeuner au restaurant Drouantvendredi, 23 octobre 2020

Le restaurant Drouant est un lieu chargé d’histoire car il abrite les travaux du jury du prix Goncourt ainsi que du prix Renaudot. Un salon est réservé aux membres de chaque jury et chaque membre dispose d’une chaise marquée à son nom. Ils se réunissent tous les mois et déjeunent d’un menu qui répond à des règles immuables. Je suis invité par le propriétaire des lieux, Laurent Gardinier, qui possède avec sa famille ce restaurant, le Taillevent, les caves Taillevent et l’hôtel Les Crayères, entre autres possessions.

Le rez-de-chaussée où nous déjeunons n’a pas le prestige des salons du haut et se situe plutôt comme une brasserie au cadre simple joliment décoré et agréable. La carte des menus affiche des prix doux pour des plats de qualité mis au point par le chef Émile Cotte en collaboration avec Philippe Mille, le chef deux étoiles des Crayères. Mon menu sera un jambon d’Auvergne, une tarte au caviar un peu façon pizza, des choux fleurs en entrée et un vol-au-vent.

J’ai pris un verre de Champagne Lanson Le Black Reserve sur base de vins de 2014 et dégorgé en 2019. Il est dosé à 7 grammes mais fait plus strict qu’un extra-brut. Ce champagne salin est sans concession. Il se marie très bien avec le jambon.

Laurent me donne la lourde tâche de choisir les vins dans une carte impressionnante par l’étendue des vins proposés à des prix raisonnables, et notamment une grande variété de vins du Rhône. Il faut dire que le groupe Gardinier gère dans leur ensemble toutes les caves de plusieurs centaines de milliers de bouteilles.

L’Hermitage blanc Jean-Louis Chave 2008 a une jolie couleur d’un or de miel clair. Il est d’une belle plénitude, généreux, souriant, et d’une extrême lisibilité. Il est facile à vivre toute en étant vif et gourmand. C’est un vin blanc racé de grand plaisir. La tarte au caviar se marie bien à ce vin.

Le Château Rayas Châteauneuf-du-Pape rouge 2005 est un vin que j’adore, lui aussi dans une plénitude absolue. Son attaque est bourguignonne et son finale inextinguible est résolument rhodanien. C’est son côté bourguignon de belle râpe qui me plait le plus. C’est un seigneur. Autant le Chave est confortable, facile à vivre, autant le Rayas est un cheval fou qui veut briser toutes les barrières. Ces deux vins sont superbes.

Une belle assiette de fromage a permis de terminer le vin rouge passionnant. Au cours des discussions que nous avons eues, l’idée de reprendre le menu immuable de l’académie Goncourt et de le « revisiter » – comme on dit aujourd’hui – en fonction de vins que j’apporterais, est extrêmement excitante. Dans cette période où le couvre-feu est un calvaire pour les restaurants, lancer des idées dans toutes les directions est un moyen de faire vivre ce qu’il y a de plus précieux en France, la haute gastronomie.

la salle du Goncourt

des livres

une édition originale de Proust