Archives de catégorie : dîners ou repas privés

Déjeuner au restaurant le Sergent Recruteur avec des vins étonnants samedi, 7 décembre 2024

Un ami m’a invité à rencontrer un philosophe d’une université de la science gastronomique de Pollenzo pour que nous parlions de l’approche du vin. J’ai proposé d’apporter du vin. Mon ami a suggéré une dégustation à l’aveugle et j’ai décidé de choisir des vins de grande diversité dont j’espère que personne ne pourra les trouver.

Je suis arrivé de bonne heure au restaurant le Sergent Recruteur, mais comme la cérémonie d’ouverture de la nouvelle Notre Dame de Paris sera demain, et comme Donald Trump va venir aujourd’hui, il y a des interdictions de circuler un peu partout. Paris fait tout pour dégouter les automobilistes.

Avec mes vins, j’ai apporté une carafe et des bouteilles vides pour transvaser quelques vins, non pas juste après l’ouverture mais lorsque l’oxygénation lente aura fait son effet. Aurélien, le très compétent directeur et sommelier, servira quelques vins avec une serviette qui cachera les étiquettes.

L’ouverture des vins ne pose pas de problème, les transvasements se font au dernier moment. Tout est prêt pour le déjeuner. L’ami qui arrive avait dit au restaurant que nous serions sept et non pas six comme je le pensais. Quand il arrive il annonce huit convives, puis le chiffre redevient sept. Il y a l’universitaire que mon ami voulait me faire rencontrer, un entrepreneur qui aide des sociétés de la branche alimentaire à trouver des financements et des débouchés, un journaliste du vin et une avocate férue de gastronomie.

J’ai apporté le Martini rosé qui avait été ouvert il y a deux jours. Il est toujours fantastique et se marie bien avec les rillettes. Ses variations d’agrumes et d’épices sont d’une grande vigueur.

Le vin qui est servi ensuite est le Champagne Heidsieck Monopole Cuvée Diamant Bleu 1971. Il a une parfaite maturité. C’est un grand champagne long et expressif. Beaucoup pensent que c’est un champagne alors qu’ils n’avaient aucune idée pour le Martini.

La Roussette de Savoie Marestel Altesse Dupasquier 2004 a une personnalité magnifique. C’est un vin si différent de tout autre vin blanc que l’on a l’habitude de boire. Je l’ai adoré pour sa complexité et son aromatique si étrange. Bien sûr personne n’a trouvé de quel vin il s’agissait. La seule piste proposée était la Loire.

Le Chinon les Varennes du Grand Clos Charles Joguet 1990 est un vin intense et expressif. C’est un grand vin d’une région que l’on n’explore pas assez. Là aussi, les saveurs sont inhabituelles par rapport à la palette Bordeaux / Bourgogne.

Vient maintenant sur la chartreuse de gibier à plume le Vin Fin de la Côte de Nuits Champy Père & Cie 1949. La chartreuse n’est pas faite d’une tourte, mais de légumes. Le plat est splendide. Alain Pégouret a du talent.

Tout le monde est impressionné par ce merveilleux vin, qui sera mon gagnant. Qui peut imaginer un vin de petite appellation, pas même de Villages, avec une telle jeunesse et une telle personnalité. Tout le monde est impressionné, car cela remet en cause les idées préconçues sur la longévité des vins.

Mon dernier apport à ce repas est un Monbazillac sans nom et sans indication, certainement des années 50. Délicat, plein de grâce, il est évidemment moins solide qu’un sauternes, mais sa douceur le rend charmant et son âge le rend rond et cohérent.

Je suis heureux d’avoir montré une belle diversité de vins, tous intéressants et tirant profit de leurs âges. Quelques autres vins ont été apportés dont un grand Musar 2005 que j’ai adoré et un vin italien de 2007 apporté par le philosophe. Je n’ai pas noté le nom mais c’était fabuleux. Un vin d’une immense qualité.

La sélection fut intéressante, avec un vainqueur, un vin simple de Bourgogne, de 1949 et la surprise d’un 2007 italien. Ce fut un très beau déjeuner intéressant.

Déjeuner de conscrits au restaurant Pages jeudi, 5 décembre 2024

Nous sommes des conscrits de 1943 et nous avons créé un club il y a plus de 25 ans. L’un de nos membres est décédé cet été. A une date proche de son anniversaire nous nous réunissons au restaurant Pages avec l’une des filles de notre ami.

Je suis arrivé deux heures avant le repas et je fais goûter un Martini rosé de plus de trente ans au directeur Pierre-Alexandre et au chef Ken pour que l’on trouve un accompagnement à ce vin d’apéritif qui titre 16°.

Il a beaucoup d’agrumes, des saveurs douces et épicées, et le goût est absolument charmant. Je verrais bien du wagyu cru pour l’accompagner et Ken propose du foie gras, ce qui est une bonne idée. J’ouvre les autres vins sans problème. Les parfums sont prometteurs.

Le menu que composent Ken et Pierre Alexandre est : amuse-bouche à la carotte, un autre au topinambour et un autre au foie gras. Dans un deuxième service un amuse-bouche à la betterave et un autre au wagyu cru. Ensuite : carpaccio de bar / rouget sauce Pages / canard à la truffe / wagyu / comté 24 mois / dessert marron et agrumes / financiers.

Démarrer avec un Martini rosé est devenu presque obsolète, mais c’est particulièrement agréable car cet apéritif est sec et délicieux grâce aux agrumes. Sa persistance aromatique est forte.

Le Champagne Dom Pérignon 2002 est un champagne très fort, élargi en bouche par la mémoire du Martini. Ce champagne très direct ne cherche pas à séduire. Il est intense, long, persuasif, et l’accord avec le poisson cru est superbe.

Le Montrachet Grand Cru Robert Gibourg 1992 est d’une belle couleur. Le vin n’est pas large, ne cherche pas à flatter, mais il est tranchant, expressif, fonceur. C’est une belle expression stricte du montrachet d’une grande année. La sauce Pages fluide et verte, est idéale pour mettre en valeur le vin.

Le Château Haut-Brion 1981 a un parfum noble et puissant. En bouche la truffe est solide et le vin très équilibré. Un seigneur. La truffe du plat est très parfumée et délicieuse. Elle se marie avec le vin de façon idéale.

Le Clos de Vougeot Grand Cru Méo-Camuzet 1992 fait un contraste avec le bordeaux. Tout en lui est charme et douceur. Il est parfait pour le wagyu de grande qualité. Ce vin est d’une grande subtilité.

Le Comté accompagne aussi bien le Haut-Brion que le Clos de Vougeot.

Pour le dessert le Château Coutet Barsac 1943 de l’année de naissance des membres de notre groupe est un sauternes absolument accompli, d’une grâce merveilleuse. Un délice, porteur de bonheur. Et l’accord avec le dessert de Lucas le pâtissier est divin.

J’avais acheté il y a environ vingt ans une « Fine de Mouton » dans une boîte en carton qui portait la mention « cave personnelle de Philippe de Rothschild ». Je l’avais ouverte en 2011 et je l’ai apportée pour ce repas. A ma grande surprise, elle a une force et une présence incroyable, comme si la bouteille avait été ouverte aujourd’hui. Dans mes notes, j’ai lu que j’avais été très impressionné par cette fine qui ressemblait à un très grand cognac, et je retrouve aujourd’hui, treize ans plus tard, le même émerveillement. Les financiers sont parfaits pour cet alcool.

La fille de notre ami défunt ressemble comme deux gouttes d’eau aussi bien à sa mère qu’à son père. L’ambiance était chaleureuse, nos pensées allaient vers notre ami défunt. Ce fut un mémorable repas avec des accords mets et vins absolument parfaits. Un grand moment d’amitié.

Déjeuner rapide dimanche, 24 novembre 2024

Ma fille vient déjeuner chez nous, mais annonce qu’elle aura peu de temps. Je choisis donc des vins en conséquence. J’ai au frais un champagne qui m’a été offert, très jeune.

Pour les coquelets j’ai choisi un Château Palmer 1981 au niveau idéal, base de goulot. J’ouvre la bouteille trois heures avant l’arrivée de ma fille. Le bouchon vient entier et je suis impressionné par la fraîcheur du parfum du vin. C’est tellement agréable.

J’ouvre ensuite le Champagne Pierre Gimmenet & Fils Brut Extra Blanc de Blancs. Il est fait de 73% de vins de 2017 et le reste de 2015 à 2010. Le bouchon est en liège comprimé et à ma grande surprise, très rapidement, il s’élargit. Le pschitt est fort et le parfum est celui d’un vin très vert et très jeune.

L’apéritif est essentiellement du grignotage de plusieurs sortes de chips et de noisettes diverses. Le Champagne Pierre Gimmenet & Fils Brut Extra Blanc de Blancs sans année est d’une telle verdeur ! C’est pour moi presque impossible à boire. Le vigneron n’est pas en cause car ce n’est pas une question de vinification, mais étant entré dans le monde des vins anciens, j’ai du mal avec des champagnes aussi verts.

Alors que j’avais ouvert le champagne deux heures avant, il a fallu plus d’une demi-heure pour que le champagne s’élargisse un peu. Mais c’est trop rude pour moi.

Nous passons à table et le coquelet aux patates douces accueille le Château Palmer 1981. Le parfum est intense et noble. Ce vin est noir et dense. Il est raffiné. Il est un peu strict, mais très expressif et long.

J’ai commis un crime de lèse-majesté car c’est un époisses qui va accompagner le vin de Margaux alors que c’est le fromage chéri des vins de Bourgogne, qui devraient en avoir le monopole. Malgré la force démoniaque de ce fromage, l’accord s’est trouvé très agréablement.

Ce Palmer d’une année qui n’est pas opulent a cependant un grand avenir devant lui du fait de sa belle structure.

Le dessert à l’ananas n’appelait aucun vin. Nous avons respecté les désirs de ma fille pour ce repas dominical.

Déjeuner avec des vins à risque lundi, 18 novembre 2024

Les fêtes de fin d’année approchent. Je cherche au hasard des vins pour les réveillons. Ma fille cadette venant déjeuner demain, deux bouteilles prestigieuses qui me semblent incertaines devraient convenir à ce repas.

Le programme est : petits biscuits au parmesan, pâté de tête / coquelets et purée de pommes de terre / époisses et mont-d’or / flan.

Dès dix heures du matin j’ouvre le Clos de la Roche Joseph Drouhin 1937 au niveau à 15 centimètres du bouchon. Je tire doucement un bouchon tout noir et la première odeur est horrible, essentiellement de terre poussiéreuse. Immédiatement je pense que 99,9 % des amateurs de vins déclareraient la mort du vin et l’écarteraient. Ma vision du vin ancien est que l’on doit toujours donner sa chance au vin car si l’on pense déclarer la mort, autant le faire quatre heures plus tard. A ce stade, je ne peux pas garantir un retour à la vie, mais j’ai déjà rencontré des résurrections de vins ayant les mêmes défauts de parfums.

A titre de sécurité, j’ouvre une demi-bouteille de Château Lafite-Rothschild 1969 que j’ai bu plusieurs fois avec bonheur.

J’ouvre ensuite le Champagne Dom Pérignon 1959 à l’étiquette abîmée et au bouchon qui a dû souffrir. 1959 est une grande année pour ce champagne et fort curieusement je ne reçois jamais d’offres de ce millésime. Il n’est pas question de le voir s’abîmer encore, il faut le boire maintenant, d’autant qu’il a perdu une dizaine de centimètres. Je veux tourner la petite rondelle de fil d’acier qui, en tournant, permettrait de dégager la coiffe du bouchon, et elle me reste dans les doigts. Les fils d’acier se déchirent. Quand je veux lever le bouchon il se brise et le bas du bouchon nécessite un tirebouchon. L’odeur est assez fatiguée, mais aucun défaut n’apparaît. Il n’y a pas de pschitt.

L’avenir est incertain mais il faut espérer des retours à la vie.

Ma fille arrive avec son fils et je verse le Champagne Dom Pérignon 1959 qui n’a pas de bulle, qui a une jolie couleur dorée joyeuse et qui a une odeur très discrète, peu expressive. Dès la première gorgée, je sais que le champagne est grand. Il n’a aucun défaut. Mais la surprise vient maintenant. Sur le pâté de tête, je me rends compte que le champagne est superbe et gourmand, mais en plus, qu’il me semble être très au-dessus des champagnes de cette période. Il est immense, royal, impérial. Quelle surprise !

Le plus grand Dom Pérignon que j’ai bu est le 1929 de ma cave que j’ai partagé avec Richard Geoffroy. Je serais prêt à penser que ce 1959 vient juste après le 1929, car il explose de joie et de complexité. Je n’en reviens pas.

Les coquelets sont servis et nous commençons par le Château Lafite demi-bouteille 1969. Il est agréable, conforme à ce que doit être un Lafite, très plaisant et confirme ce que j’attendais.

Le Clos de la Roche Joseph Drouhin 1937 montre un parfum fascinant et joyeux. Toutes les mauvaises odeurs ont disparu, remplacées par des senteurs de petits fruits rouges étonnants. La couleur est d’un rouge marqué d’un peu de terre comme des vieilles Romanée Conti, mais couleur plaisante. En bouche, ce sont les petits fruits rouges qui dominent et le vin est absolument superbe. J’ai beau raconter des dizaines et des dizaines de fois des retours à la vie de vins blessés, je reste quand même fasciné qu’un vin qu’il faudrait jeter puisse se montrer aussi glorieux et sans le moindre défaut.

Sur l’époisses, le vin de Drouhin devient absolument immense. Le fromage le propulse.

Le flan permet au champagne de continuer de briller.

Il est à noter que le soir, j’ai goûté à nouveau les deux vins. Le champagne a perdu de sa splendeur, il s’est éteint, alors que le Clos de la Roche est toujours aussi brillant. C’est donc le vainqueur inattendu de cette belle journée.

Déjeuner de famille dimanche, 10 novembre 2024

Ma fille aînée vient avec sa fille aînée déjeuner à la maison. A l’apéritif nous buvons un Champagne Cristal Roederer 1999 qui m’avait gratifié à l’ouverture d’un petit pschitt discret. Le champagne a de jolies bulles fines et une couleur d’un or clair. De fines tranches de boudin blanc sont idéales pour mettre en valeur la personnalité de ce Cristal. Il est large et confortable. Il n’a pas une grande énergie, mais c’est un champagne de qualité très agréable à boire.

Pour la pintade, j’ai ouvert un Château Ausone 1967. Le niveau était dans le goulot, le bouchon idéal et le parfum prometteur à l’ouverture. Dès la première gorgée, on sent à quel point il est noble. C’est l’archétype d’un grand Saint-Emilion. Tout en lui est pur, riche, intense et équilibré. C’est le bordeaux parfait à la maturité idéale.

déjeuner au restaurant Pages samedi, 9 novembre 2024

Un ami de longue date me propose de déjeuner au restaurant Epicure de l’hôtel Bristol car cela fait des années que nous ne sommes pas vus puisqu’il vivait en Australie. Par ailleurs l’américaine qui est la plus fidèle de mes dîners vient d’arriver à Paris, et participera demain au déjeuner au restaurant Plénitude. Elle me demande quand nous pourrions nous voir. Je lui propose de se joindre à nous.

Jonathan demande à Epicure s’ils pratiquent un droit de bouchon. Le prix qu’ils indiquent est tellement ridiculement haut que je lui suggère d’annuler sa réservation. Nous irons donc déjeuner au restaurant Pages. Nous serons quatre, car j’ai demandé à ma femme de se joindre à notre petit groupe car l’américaine est une amie.

Jonathan a apporté un Krug Clos du Mesnil 2008. J’ai apporté un Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1967 et un Château Chalon Bouvret 1959 que j’ouvre en arrivant. Le bouchon du 1967 est illisible et le parfum subtil est engageant. Le parfum du Château Chalon est tonitruant et conquérant. Une bombe de saveur.

Je fais le menu avec le chef Ken : carpaccio de wagyu / pagre cru / turbot / wagyu ou lièvre à la royale ou les deux / dessert.

Le Champagne Krug Clos du Mesnil 2008 a un parfum délicat qui est assez réservé. En bouche, je suis très agréablement surpris de sa largeur et de sa convivialité, alors que le champagne est jeune. Avec les deux entrées de viande et poisson crus, le champagne est brillant, vif et profond. Mais c’est en fait dans vingt ans que ce champagne donnera ses plus belles complexités, car ce champagne gagne en vieillissant, le millésime 1979, le premier de tous, étant le plus exceptionnel.

L’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1967 me fait tomber en pâmoison. Et je souris. Depuis des années je participe à la présentation des vins du domaine de la Romanée Conti et l’Echézeaux est servi en premier, considéré comme le petit débutant qui doit ouvrir le spectacle. Or cet Echézeaux est absolument étonnant, d’un niveau très supérieur à ce qu’il devrait offrir. Il est délicat, raffiné, et je le considère l’égal d’une Romanée Saint-Vivant qui serait parfaite.

Ce vin m’émeut au plus haut point car ses finesses progressent en bouche sans trouver de fin. C’est un régal sans limite. Alors bien sûr, il est tentant de le boire avec le turbot cuit nature, et c’est parfait. Nous sommes deux à manger le wagyu et deux à profiter du lièvre à la royale. Ayant eu ce lièvre hier j’ai pris le wagyu. L’accord est parfait et toute l’âme de la Romanée Conti se montre en ce vin, sel, finesse, longueur terrienne infinie.

Un Comté est prévu pour le Château Chalon Bouvret 1959. Quelle déception ! Alors que le parfum est explosif, le vin est plat, réservé, sans l’énergie que l’on aimerait. Quel dommage. Bien sûr il se boit mais il manque d’âme.

Le subtil dessert de Lucas est accompagné par le Krug toujours aussi élégant.

Le classement sera facile : 1 – Echézeaux 1967, 2 – Clos du Mesnil 2008, 3 – Château Chalon 1959. De nombreux souvenirs communs ont ensoleillé ce repas où l’équipe de cuisine a fait des prouesses.

déjeuner au restaurant Le Sergent Recruteur mercredi, 6 novembre 2024

L’écrivain me propose de venir à des séances de signature de ses livres mais les dates ne conviennent pas. J’invite l’auteur à déjeuner au restaurant Le Sergent Recruteur. Lorsque j’arrive, je suis accueilli par Aurélien qui fait office de sommelier mais aussi de directeur de salle.

J’ouvre les vins que j’ai apportés. Tous les deux ont des bouchons magnifiques, les niveaux sont parfaits et les parfums sont distincts. Le Corton Charlemagne a un nez puissant et conquérant tandis que le Chambertin a un nez subtil et délicat. Aurélien sent aussi les vins et nous composons le menu. Il y aura une assiette de cèpes juste poêlée et le lièvre à la royale. Aurélien pensait que le vin rouge serait trop frêle pour le lièvre et j’ai pensé au contraire que le vin charmant calmerait la puissance du lièvre.

L’écrivain arrive et nous buvons le Corton-Charlemagne Pierre Marey & Fils 1982 sur les gourmandes rillettes du restaurant. La couleur du vin est d’un or clair très séduisant. En bouche on ressent son côté guerrier, puissant, conquérant. C’est un grand Corton-Charlemagne que je n’imaginais pas aussi solaire pour l’année 1982. L’accord cèpes et vin blanc est absolument parfait.

Le lièvre à la royale, façon sénateur Couteaux, est délicieux. Sa puissance est mesurée, ce qui est agréable. Le Chambertin Clos de Bèze Faiveley négociant 1969 a une très couleur rouge sang. Le nez est discret mais subtil. En bouche je suis immédiatement conquis. Je me sens invité par Madame d’Epinay ou par la Marquise de Lambert, à l’un de ses salons où l’on parle de science et de poèmes. C’est le côté courtois de ce vin que j’adore, tellement raffiné et glissant sans fin dans le palais. Et le vin adoucit l’ardeur du lièvre avec un talent infini.

Je suis aux anges avec ce chambertin qui n’a pas d’âge tant il est pertinent. On dirait qu’il est de 1985, on ne ferait pas d’erreur, tant il est accompli. Alain Pégouret fait une cuisine d’une belle justesse.

Nous avons continué à boire les deux vins sur des fromages bien choisis par le restaurant.

Ce déjeuner avec des vins très différents et parfaits a été passionnant car nous avons échangé sur des sujets intéressants. Il est assez probable que nous nous retrouverons.

déjeuner chez des amis vendredi, 1 novembre 2024

Nous sommes dans le sud et nous allons déjeuner chez des amis qui habitent Eygalières, une petite ville entourée d’un paysage d’une grande beauté. Notre ami est un passionné de cuisine et a préparé des plats délicieux.

A l’apéritif nous buvons un Champagne Louis Roederer Brut Premier sans année. Il n’est pas désagréable, mais il manque de complexité.

Sur une entrée originale avec un boudin noir, Le Schistes d’Agrumes Condrieu M. Chapoutier 2020 est une magnifique surprise. Je m’attendais à un vin trop jeune pour mon goût, or ce vin est gourmand, plein, fruité, frais et très agréable à boire. Un réel plaisir.

J’ai apporté un Château de Beaucastel Châteauneuf du Pape 2001. Quelle merveille. Ce vin est totalement accompli, riche, construit, explosant de joie de vivre. Il est arrivé à un équilibre parfait, de belle maturité. Il va encore s’épanouir, mais il est déjà proche de la perfection absolue. L’accord avec la joue de bœuf est idéal.

Pour le dessert nous avons un Porto Ramos Pinto 2011 riche et percutant. Il est encore jeune, mais il atteint son but, riche de gourmandises pointues. Son équilibre est très agréable.

Par une belle journée ensoleillée, d’un été indien qui s’est invité dans l’automne, nous avons passé une agréable journée avec des amis charmants et deux vins de grand intérêt.

déjeuner de famille avec deux vins de 90 ans dimanche, 20 octobre 2024

C’est un déjeuner de famille dans ma maison. Nous serons huit dont cinq qui boivent du vin. Ma dernière fille vient d’avoir cinquante ans. Un tel chiffre est important dans la vie de chacun et j’ai ressenti qu’elle y est sensible aussi j’ai eu l’idée de choisir deux Bourgognes de 1934, qui ont quarante ans de plus qu’elle, pour suggérer qu’elle a une longue vie devant elle et qu’il ne faut pas s’arrêter à un chiffre jalon.

J’ai ouvert les vins très tôt et j’ai voulu ouvrir le champagne en avance, car il s’agit d’un magnum. Lorsque j’ai tourné le bouchon du Veuve Clicquot 2008, j’ai senti une énorme pression sur mes doigts, et le pschitt explosif a fait le bruit d’un tir de canon. Buvant rarement des champagnes jeunes, j’ai été impressionné par ce bruit.

Le Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame 2008 en magnum promet d’être grand mais il est un peu trop jeune pour l’instant. Très élégant, avec une grande longueur, j’aurais aimé un peu plus de gras car il est strict. Mais il deviendra grand. C’est aujourd’hui un champagne sérieux.

Le Clos Vougeot Cave de la Reine Pédauque 1934 avait à l’ouverture il y a quatre heures une odeur qui n’était pas parfaite, un peu boueuse. Mais quand je le sers, il a effacé toute imperfection. Il est grand, un peu gras, et offre une personnalité généreuse.

Le Chambertin Charles Viénot 1934 est un vin que j’ai acheté il y a plus de 20 ans quand Pierre Cardin vendit aux enchères simultanément à New York et à Paris la cave du restaurant Maxim’s. Les prix étaient fous mais j’ai acheté une caisse de douze Chambertin 1934. Beaucoup ont souffert d’évaporation, certainement en raison des conditions de conservation dans la cave de Maxim’s.

Cette bouteille – pour une fois – a un bon niveau, et en l’ouvrant je savais que ce serait un grand vin. Ce vin a toutes les qualités d’un grand vieux Chambertin. Il est si impressionnant, dense, intense, frais. Un vin immense d’un très grand vigneron. Large et opulent c’est un vin de plaisir.

Ma fille aînée préfère le Clos Vougeot. Ma plus jeune fille comme moi préfère ce Chambertin d’une belle intensité.

Nous avons bu les vins avec du poulet et des pommes de terre, le plat le plus simple et parfait. Et avec un fromage Mont d’Or, le Chambertin est à se pâmer.

Ouvrir deux vins de 90 ans était un risque. Ce fut un succès.

Dîner avec mon fils et des vins étranges jeudi, 17 octobre 2024

Ce soir nous allons recevoir mon fils à la maison. C’est avec lui que je peux choisir des vins que je ne pourrais pas ouvrir dans d’autres occasions.

Je déteste gaspiller. Dans ma cave, des problèmes existent car les vins sont des êtres vivants qui peuvent se blesser ou mourir. J’accepte cette situation. Et tous mes vins ont le droit de figurer dans un repas.

J’avais acheté 10 bouteilles de Krug Private Cuvée des années autour de 1960 et, en regardant le lot, je vois une bouteille ayant perdu 40% de son liquide et une autre ayant perdu 60%.

Pour un de mes prochains dîners, j’avais prévu de mettre une bouteille que je chéris, un Domaine de Bouchon Sainte-Croix du Mont Café Voisin 1900. Une magnifique bouteille. Mais quand j’ai voulu faire une vidéo, 75 % du vin s’étaient évaporé.

Face à ces trois vins, la seule possibilité est de les boire avec mon fils.

Par ailleurs, j’ai choisi un Richebourg du domaine de la Romanée Conti dont je n’arrivais pas à lire l’année. La capsule avait été coupée pour essayer de lire l’année et malgré toutes les illuminations possibles, je n’arrivais pas à lire l’année. Il a un superbe niveau d’environ 6 cm sous bouchon.

Seul mon fils accepterait cette expérience. Voilà un beau challenge.

J’ouvre les vins trois heures avant le dîner.

Qui pourrait croire que lorsque j’ai ouvert le Krug avec le niveau le plus bas, il y a eu un pschitt. C’est incroyable puisque l’air remplit déjà 60% de la bouteille. Mais le pschitt était là. Etonnant. La bouteille la plus remplie n’a pas montré le moindre souffle. Au parfum c’est la plus évaporée qui me séduit.

J’ai ouvert le Richebourg et le bouchon est venu entier. Je pouvais lire le 6 sur 196.. et je pensais que c’était 1969, ma femme lisait 1960 et quand mon fils est arrivé il a lu 1966. C’est seulement plus tard que j’ai retrouvé dans mon inventaire que c’était 1966. A l’ouverture le parfum est très engageant.

La capsule du Domaine de Bouchon 1900 est entouré d’une ficelle avec des nœuds que j’enlève religieusement, ne sachant pas à quoi elle peut servir. Le nez du vin dont il ne reste que 20% est neutre.

L’apéritif consiste en une rillette de porc et une rillette de canard. Le Champagne Krug Private Cuvée années 60 au plus bas niveau a une couleur magnifique et le champagne est merveilleux, parfait. C’est assez incroyable. Il est meilleur que le Champagne Krug Private Cuvée années 60 d’un meilleur niveau. Le plus bas a une énergie supérieure à l’autre. La rillette de porc est nettement supérieure à celle de canard pour mettre en valeur les champagnes.

Les deux sont délicieux et vont accompagner un caviar osciètre prestige aux accents marqués, presque viandeux qui va exciter les champagnes. Le plus évaporé est fantastique, du niveau d’un Krug parfait. On est face à l’aristocratie du champagne.

Ma femme a prévu un foie gras poché, car elle sait que j’adore ce plat sur les vins de la Romanée Conti. Le Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1966 est fantastique, avec ce sel intense qui est une signature de la Romanée Conti. La première moitié du flacon évoque une Romanée Saint-Vivant du domaine, tant le vin est gracieux et fin. La seconde mi-temps est un vrai Richebourg glorieux et immense. Nous avons été émus par ce vin parfait et intense. Quelle chance !

Le Domaine de Bouchon Sainte-Croix du Mont Café Voisin 1900 est beaucoup trop fatigué et a perdu en intensité. Il est éventé. Il n’est pas possible de le boire. J’ai donc servi un alcool fruité 1905, riche et joyeux.

Deux vins parfaits, la Private Cuvée la plus basse et le Richebourg, une très belle Private Cuvée de bas niveau et un vin doux mort avec la compensation d’un alcool de 1905.

Un merveilleux moment avec mon fils et ma femme.

Deux jours plus tard nous devions aller au restaurant avec notre fils mais lorsque j’ai voulu réserver, j’ai appris que le restaurant avait fermé ce jour du fait de pluies diluviennes qui ont désespéré les propriétaires. N’ayant pas de solution de rechange, le dîner se fera à nouveau chez nous.

Je choisis des vins dans la cave de la maison. Un Haut-Brion 1934 est de fière allure et son niveau à mi-épaule ne m’effraie pas. Lorsque je veux ouvrir la bouteille, le haut du bouchon est dur comme du roc et je n’arrive pas à piquer la pointe du tirebouchon. Je retire l’équivalent de trois millimètres d’épaisseur et le bouchon résiste fortement à mon effort pour le lever. Je décide d’utiliser le tirebouchon Durand, qui combine un tirebouchon et un bilame. Le bouchon sort enfin entier, boursoufflé, ce qui explique sa résistance. Le parfum est intense et glorieux. Cela ne promet que du bonheur.

Deux heures avant le repas j’ouvre un champagne que j’adore, un Laurent-Perrier Cuvée Grand Siècle probablement des années 70. Le bouchon fait du bruit quand je tourne la bouteille, résistant à mes efforts. Comme il arrive souvent, la lunule du bas de bouchon ne tourne pas et reste figée. Je la retire avec un tirebouchon. Je ressens la pression de l’air comprimé dans la bouteille. Le parfum est plaisant.

L’apéritif se compose des rillettes qui restaient du dîner précédent. Je préfère celle de porc et mon fils celle de canard. Le Champagne Laurent-Perrier Cuvée Grand Siècle # 1970 a une couleur d’un or clair. La bulle est très présente. Le nez est noble. En bouche, c’est un délice. Quel contraste avec les Krug Private Cuvée d’il y a deux jours. Les Krug sont des guerriers conquérants et persuasifs. Le Grand Siècle est tout en charme, très romantique et séducteur. Ce champagne est un régal et je l’adore.

Un poulet de qualité est l’accompagnateur parfait des vins, qu’ils soient blancs ou rouges. Lorsque je verse le Château Haut-Brion 1934 dans les verres, il offre une couleur très foncée, mais le bord du verre est rouge sang. Le vin paraît riche comme une truffe noire. En bouche, le vin est subjuguant. Mon fils boit le vin à l’aveugle, coutume amusante et sans prétention. Si l’on se trompe, peu importe. Il voit dans ce vin une telle richesse qu’il imagine une Côte Rôtie autour de 1978. C’est vrai que le Haut-Brion est particulièrement riche.

Ce vin est exceptionnel et il n’a pas le moindre signe d’âge alors qu’il a 90 ans. Nous nous régalons et après le poulet nous l’essayons sur un saint-nectaire de belle qualité. L’accord est intéressant, mais le poulet faisait briller le bordeaux beaucoup mieux.

Le dessert étant de mangues, on aurait pu penser que l’accord ne se trouverait pas avec le champagne mais ils se sont plu. Encore un beau repas avec mon fils.