Dîner qui suit la présentation des 2010 de la Romanée Conti mercredi, 4 décembre 2013

Selon la tradition, après la présentation des vins de la Romanée Conti, Pascal Marquet, dirigeant de Grains Nobles retient à dîner Aubert de Villaine, Bernard Burtschy et Michel Bettane, plus deux ou trois amis, dans les locaux de son restaurant tenu par un couple chaleureux et authentique.

Nous commençons par un Champagne Brut Grand Cru Egly-Ouriet millésime 1999 qui a passé 109 mois en cave et a été dégorgé en août 2009, issu de vieilles vignes d’Ambonnay. Je suis stupéfait par la complexité de ce champagne riche, prenant possession du palais. On a un irrésistible besoin d’y revenir tant il est gourmand. C’est une petite merveille.

Le vin suivant est un vin de garage, ce qui est inhabituel en Californie. C’est un La Côte, santa Rita Hills Pinot Noir Domaine de La Côte Lompoc Californie 2011. Il n’a été fait que 99 caisses de ce vin confidentiel. Il est des moments où je me félicite de ne pas être dégustateur professionnel, car ça me permet d’éviter de tels vins qui, pour moi, n’ont absolument aucun intérêt. Il n’y a aucun bord d’attaque qui permettrait d’y trouver du plaisir.

(l’épisode qui suit est aussi raconté dans un autre message. Il est ici en italique)

Le vin suivant est découvert à l’aveugle. Il faut en être témoin pour le croire. Le vin est trouble, sans doute remué, d’un rouge sang coupé de rose. Il est beaucoup trop froid. Bernard et Michel annoncent tout de suite pinot noir et à la question de la région, c’est Bernard qui lance le premier la région Bourgogne. Michel est le premier à lancer Côtes de Beaune et Bernard acquiesce. Michel a en tête Volnay. Le premier à lancer une année – et il n’y en aura pas deux – c’est Bernard qui dit 1985 et c’est 1985. On lui demande pourquoi et il répond : « parce que 1985 est la seule année équilibrée des années 80″. Bien. On s’égare un peu vers Pommard, sans y croire, et le tir se rapproche de Corton et l’ami approuve. Michel dit : je verrais bien Chandon de Briailles et ça doit être un Bresssandes.

Bernard dit Clos du Roi et l’ami confirme à Bernard : « c’est effectivement Clos du Roi Chandon de Briailles « . Michel dit : « c’est curieux, parce que pour moi, c’est le style d’un Bressandes ». Et l’ami pour détromper Michel soulève le cylindre qui cachait l’étiquette, regarde et pousse un cri de stupeur : « oh, ça alors, je croyais avoir pris un Corton Clos du Roi, car je voulais faire un clin d’œil à Aubert de Villaine qui fait un Corton sur les terres de Mérode dont une partie est en Clos du Roi et je me suis trompé en la prenant ».

Si on me racontait cette histoire, j’aurais du mal à la croire. Assis entre ces deux géants de la dégustation, je hochais la tête de droite à gauche comme le spectateur d’un match de tennis et j’allais d’émerveillement en émerveillement quand ces deux sommités expliquaient les raisons de leurs choix. Le vin est un Corton Grand Cru Les Bressandes domaine Chandon de Briailles 1985 à la couleur trouble et servi trop froid, découvert à l’aveugle en additionnant ces deux talents. Très doucereux, parfois presque sucré, il était bien vivant et velouté. Un vin au fruit rose ou rouge bien dessiné, frappé d’une infime trace de TCA.

On mesure le fossé himalayesque qui sépare un amateur de vin de ces deux génies, dotés d’une culture qui m’époustoufle en chaque occasion où j’ai la chance de déguster à leurs côtés.

Nous avions commencé le repas sur une délicieuse soupe aux champignons et maintenant, c’est un morceau très tendre de bœuf avec une purée qui accueille un Château Bel Air Marquis d’Aligre magnum 1985 château dont je sais que Bernard et Michel sont deux fanas inconditionnels. Le vin est magnifique de précision, goulu et de bonne mâche.

J’ai envie de quitter la table car j’ai demain un programme très lourd, mais on me retient en disant que je ne peux pas ne pas goûter un Mâcon-Pierreclos « Le Chavigne » domaine Guffens-Heynen 2004. Force est de dire qu’on a bien fait de me retenir, car ce vin est particulièrement généreux et joyeux.

L’ambiance après la dégustation des vins de la Romanée Conti est amicale et décontractée. C’est un plaisir de dîner avec des personnes de si bonne compagnie.

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Dîner à quatre mains au restaurant Kei mardi, 3 décembre 2013

Je ne sais pas comment j’ai appris la nouvelle, mais je l’ai retenue. Le chef Kei Kobayashi a eu l’heureuse idée d’inviter son prédécesseur de la rue du Coq Héron, le grand chef Gérard Besson, pour faire pendant une courte période des dîners à quatre mains.

Il faut à Kei une belle dose d’ouverture d’esprit pour faire revenir Gérard aux fourneaux qu’il a pratiqués pendant tant d’années. Lorsque nous arrivons au restaurant Kei, les deux chefs nous saluent avec de grands sourires. On sent qu’ils sont heureux de cette expérience.

Le menu qu’ils ont concocté est : amuse-bouche / soupe de lentilles et foie gras / terrine de lièvre, légumes crus et cuits / Saint-Jacques snackées, oseille et sabayon agrumes / biche, condiment pomme et poire, sauce poivrades / interprétation de l’oreiller de la belle Aurore / consommé de gibier / tarte aux agrumes, mousseux chocolat et son sorbet.

La décoration du lieu a été rajeunie par Kei. Le service de table, épuré, est de grand raffinement. Et les deux cuisines cohabitent bien. Kei, c’est l’exploration de saveurs pointillistes, suggérées et protéiformes, proposant des rêveries et des variations infinies. Gérard, c’est le raffinement de la cuisine bourgeoise, solide et de dextérité.

La biche est superbe, la terrine est une madeleine de Proust et l’oreiller de la belle Aurore, traité en petites portions pour deux, plus coussinet qu’oreiller, est emblématique. Je m’y sens bien, emporté par les saveurs multiples des cinq ou six composantes goûteuses du plat.

Avec Gilles Josso, pilier du restaurant, j’ai choisi un Chambertin domaine Ponsot 2000. Le nez est très subtil et bourguignon. Gilles m’avait dit que le vin serait très fruité. Or en bouche, c’est une forte râpe doublée d’une amertume qui envahit mon palais. J’attends que le vin s’élargisse, mais c’est bien lent. Il devient ce qu’il pourrait être, mais ce ne sont que des confidences, sur l’oreiller. Au total, ce vin n’est pas porteur de plaisir. Bien sûr les grappes sont entières, ce qui donne des tons rêches de rafle que j’accepte volontiers, mais le vin manque de vivacité et reste sur des notes beaucoup trop strictes.

Ce n’était pas suffisant pour brider le grand bonheur d’avoir vu ces deux chefs travailler ensemble. En sortant, nous les avons félicités pour cette idée d’une grande fécondité. Bravo aux deux chefs d’avoir aussi facilement additionné leurs talents. Ils nous ont dédicacé notre menu.

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Déjeuner au restaurant Thoumieux mardi, 3 décembre 2013

Déjeuner au restaurant Thoumieux. C’est la quinzaine des grands crus à prix coûtants organisé par le marchand Duclot qui appartient à la famille Moueix. Il y a de belles pioches dans des crus normalement inaccessibles, mais nous avons envie de pouvoir travailler l’après-midi aussi ce sera un Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill 1996 qui fera notre déjeuner. Et c’est une très grande « pioche ». Le champagne est extrêmement fruité, plein, varié dans sa palette d’arômes où les fruits sont rouges, ou jaunes ou d’agrumes. Il est riche et très équilibré. Ce qui charme, c’est qu’il est racé, claquant sur la langue.

Le menu peut être composé d’une ou de deux suggestions dans six propositions. J’ai choisi : Maltagliati à la farine de châtaigne, beurre noisette, parmesans et une râpée de Tartufi di Alba / chevreuil de chasse cuit sur des marrons grillés, réduction d’une poivrade.

A peine avons-nous fini de commander, qui vois-je arriver : Richard Geoffroy, le metteur en scène de Dom Pérignon. Nous nous étreignons de mâles embrassades, souriant que le hasard nous ait permis de nous retrouver ici.

Les hors d’œuvre sont complexes, compliqués et interminables. Des miettes de tourteau se veulent glacées, mais on ne retient que le « trop froid ». La présentation des plats est assez ampoulée, marquée d’hommages appuyés au génie du chef.

Quand c’est Jean-François Piège qui vient lui-même râper la truffe blanche, on est évidemment conquis. Les produits sont bons, le chef a un grand talent, mais tout est beaucoup trop compliqué. Avec mon café arrive une boule chocolatée. Le serveur demande « voulez-vous la casser vous-même ou voulez-vous que je le fasse ? ». Je réponds « oui ». Il prend alors la boule posée dans un coquetier dont le pied est une patte de poule en céramique. Il la lance avec force sur la table et les morceaux de chocolat s’éparpillent sur la nappe. On a vu mieux comme mise en scène.

Richard Geoffroy me fait servir un verre de Champagne Dom Pérignon rosé 2002. Le vin est bien construit mais il est assez orthodoxe. Bien charnu, de belle couleur, il occupe bien le palais, mais on se plaît à rêver qu’il ait dix ans de plus, car une maturité supplémentaire va le rendre beaucoup plus excitant. Il a tout pour devenir grand. Laissons-lui le temps.

Le chef a du talent, les produits sont bons. Il faudrait un peu moins de sophistication et de complication pour que le plaisir soit total. Le gagnant de ce repas, c’est le Pol Roger d’une rare plénitude et d’une immense complexité. Et l’autre gagnant, c’est le plaisir inattendu d’avoir rencontré un grand vigneron, que je retrouverai dans une semaine dans ce qui sera sans doute le plus grand dîner de mon année.

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Le restaurant L’Arôme et Substance de Selosse jeudi, 28 novembre 2013

Le restaurant L’Arôme est accueillant. L’espace est aéré, les tables ne se chevauchent pas, les nappes sont bien blanches et le personnel est souriant et très professionnel. Dès l’entrée on se sent bien.

Le choix du menu est facilité par le chef charmant et enthousiaste qui vient glisser quelques conseils. Thomas Boullault a travaillé longtemps avec Philippe Legendre et en a retenu la volonté de faire des plats francs et lisibles. De plus, et ça ne trompe pas, il aura la main lourde lorsqu’il viendra trancher la truffe blanche pour recouvrir les assiettes. De telles attentions sont appréciables.

Le menu : crème de butternut à la truffe blanche / langoustines avec un velouté de cresson / cabillaud sauvage et palourdes al pilpil, fregola Sarda toute rouge, tagete lucida, Pedro Ximenez / poêlée de sot-l’y-laisse de volaille de Bresse, risetto à la truffe blanche d’Alba, émulsion au vin d’Arbois / soufflé chaud à la pistache, sorbet fromage blanc et coulis de griotte.

Ce menu est intelligent, les produits sont excellents. Le velouté de cresson est une merveille, le vinaigre de Pedro Ximenez étouffe un peu le cabillaud. Le plat merveilleux, c’est la poêlée de sot-l’y-laisse, d’une rare gourmandise et qui sublime la truffe blanche.

Le Champagne Substance Jacques Selosse dégorgé en décembre 2009 se présente très ambré, d’une force extrême, très intransigeant. Il devait faire seulement l’apéritif, mais sa force risque de faire pâlir tout autre vin. Après mûre réflexion avec le sympathique et compétent sommelier il est prévu de doubler le même champagne.

Le Champagne Substance Jacques Selosse dégorgé en août 2010 est l’opposé du précédent. Il est beaucoup plus clair, sans ton ambré et infiniment plus civilisé. Il serait même presque charmeur comparativement à l’absence totale de concession du premier, très oxydatif.

Alors, existe-t-il une durée limite entre le dégorgement et la consommation des Substance ? Il est probable qu’un dégorgement de trois ans serait plus adapté à ce champagne extrêmement tendu et puissant.

Le service est extrêmement sympathique, les plats sont gourmands et donnent envie de les dévorer. La première étoile du lieu est justifiée. Voilà une table où il est naturel de se sentir bien.

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173ème dîner de wine-dinners au restaurant Taillevent jeudi, 28 novembre 2013

Le 173ème dîner de wine-dinners se tient au restaurant Taillevent, dans le somptueux salon lambrissé du premier étage. Vers 17h30 je viens ouvrir les vins. Le bouchon du Beychevelle 1928 se déchire en mille morceaux tant le liège colle fortement au verre. Je suis obligé d’aller à la pêche aux morceaux avec mon épuisette miraculeuse. Tout rentre dans l’ordre. Le parfum du 1928 est très prometteur. Les deux parfums les plus nobles sont ceux du Pétrus 1985 et de la Romanée Conti 1993, à la subtilité incroyable. Alain Solivérès, le chef brillant vient bavarder avec moi et peut sentir cette immense Romanée Conti. Le parfum du Vega Sicilia Unico 1957 est si riche de fruits lourds que ce serait dommage de cantonner ce vin au Saint-nectaire. Je demande au chef et à Jean-Marie Ancher si l’on peut prévoir un deuxième service du chevreuil. L’accord m’est donné. Le parfum du muscat 1935 évoque le café aussi fais-je la demande que l’on suggère le café dans le dessert au chocolat. Là aussi, mes demandes sont favorablement reçues.

Nous sommes dix et les convives sont d’une ponctualité exemplaire : quand sonne vingt heures, nous sommes au complet. C’est à signaler.

Le premier vin se prend d’abord debout. C’est un Champagne Charles Heidsieck 1955 qui s’entend comme larron en foire avec les fondantes gougères. Le champagne est ancien, a perdu sa bulle, mais il offre une complexité et des fruits jaunes dorés très plaisants. Sa complexité et son équilibre sont des modèles. Nous passons à table et un jambon délicieux se marie bien à ce beau champagne à la belle trace en bouche. 1955 est une grande année et ce champagne à de beaux restes.

Le menu mis au point par Alain Solivérès est : noix de coquilles Saint-Jacques marinées et caviar osciètre / saint-pierre en filet doré, écrevisses / perdreau « patte-rouge » rôti, polenta et romarin / noisettes de chevreuil sauce grand veneur, panais rôtis et betteraves confites / saint-nectaire fermier / mangue rafraîchie / chocolat Taïnori en feuillet craquant.

Après le 1955, le Champagne Krug Clos du Mesnil 1983 paraît d’une folle jeunesse alors qu’il a trente ans. Il est brillantissime, d’une tension extrême et d’une précision diabolique. On ne peut pas concevoir un champagne plus précis que celui-là. Je le consacrerai dans mon vote. Le caviar trouve en lui une résonnance idéale.

Le Montrachet Bouchard Père & Fils 2003 est d’une opulence totalement sécurisante. C’est comme si l’on chaussait ses charentaises, s’asseyait dans un fauteuil profond pour lire du Stendhal. Car ce montrachet est facile à vivre, riche et généreux. Il est plein en bouche et l’on n’a pas d’état d’âme. On est heureux.

Le Château Beychevelle Saint Julien 1928 me stupéfie par sa couleur qui est sang de pigeon, de la même tenue que son voisin qui affiche 57 ans de moins ! Il est beau, profond, et soutient la comparaison avec le Pétrus Pomerol 1985 qui est beaucoup plus complexe, très truffe noire, mais ne rabaisse pas le talent du 1928. Ma grande surprise, c’est que ces vins séparés de plus d’un demi-siècle puissent avoir les mêmes couleurs. Le 1928 est serein. Le 1985 est brillant et complexe, incisif et profond. Avec le perdreau dont la farce est très riche et intense, chacun des vins trouve sa place avec un grand confort, le 1928 étant un peu plus sensuel sur le plat.

Associer sur un même plat deux vins aussi dissemblables, c’est la philosophie de mes dîners. C’est mon plaisir, voire ma coquetterie. Le Cahors Clos de Gamot 1937, sur les premiers verres versés, révèle un léger goût de bouchon. Plusieurs minutes plus tard, tout a disparu, et ce Cahors montre des qualités que je ne soupçonnais pas, même si j’ai déjà bu des vins anciens de ce domaine, comme 1929, 1937, 1942 et 1961. Il est assez simple de construction mais s’en tire par son équilibre. Lui non plus n’a aucune trace de tuilé dans sa robe.

La Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 1993 servie en même temps n’a plus un nez aussi diabolique que celui que j’avais senti il y a cinq heures à l’ouverture. Je suis étonné que le fruit soit aussi affirmé. Un ami familier de la Romanée Conti retrouve la rose et le sel qui sont la signature de ce vin, mais je ne trouve pas ces caractéristiques avec la même acuité. Le vin est grand et va recueillir les votes les plus flatteurs, mais je ne me sens pas dans le cœur de ce vin comme je l’ai déjà été. Le vin est riche, convaincant, persuasif, mais il manque – pour moi – ce petit « je ne sais quoi » de romantisme qu’il pourrait avoir. Et à côté de lui, le Cahors trace sa route avec une solidité et une sureté qui font plaisir à boire. Le chevreuil est délicieux, et les deux vins en profitent.

J’ai eu raison de demander un deuxième service du chevreuil, car les médaillons sont tendres et propulsent le Vega Sicilia Unico 1957 à des hauteurs extrêmes. Le vin a un parfum riche et lourd. Le vin n’a pas la complexité du vin de la Romanée Conti, mais il a cette aisance qui fait un peu penser aux vins de Guigal. Il est gouleyant, facilement lisible, généreux et je l’adore. Le sang de la sauce du chevreuil est son miroir. Mon ami Tomo est moins fan que moi de ce vin. Cela m’étonne car nous avons des goûts très proches. Je suis conquis par ce 1957 d’un équilibre rare, sans trace d’âge.

Le Château d’Yquem Sauternes 1976 est d’un bel acajou clair. Le nez est pénétrant. C’est un vin d’une grande année pour Yquem, absolument réussi. Il a la longueur infinie que l’on attend d’Yquem. Il est tellement équilibré que ça paraît presque facile et naturel. Un vin de jouissance.

Le Muscat rosé Gurzuf Collection Massandra 1935 avait à l’ouverture un nez de café. Ce nez s’est complexifié. Le vin est frêle comme les jeunes filles photographiées par David Hamilton. Il n’écrase pas le palais mais au contraire le rafraîchit malgré sa charge alcoolique. Tout en délicatesse, c’est une gourmandise raffinée. Enigmatique si l’on a en tête un muscat puissant qu’il n’est pas, il m’enchante.

Voter dans ces conditions, c’est un exercice extrêmement difficile. Tous les votes sont différents et c’est bien compréhensible tant les vins étaient grands. Imaginez une chose : il y a dix votants pour dix vins. Chacun ne vote que pour quatre vins et en oublie donc six. Le résultat est qu’aucun vin n’a eu moins de deux votes. C’est-à-dire qu’aucun vin n’a été considéré comme ne devant pas être dans le quarté. On imagine aisément ma fierté de voir que mes vins brillent à ce point.

Cinq vins ont eu des votes de premier, la Romanée Conti truste six places de premier et le Krug, le Beychevelle, le Pétrus et le Vega Sicilia Unico ont chacun recueilli un vote de premier.

La Romanée Conti a obtenu 9 votes (je suis le seul à ne pas l’avoir mise sur la feuille de vote) et le Vega Sicilia Unico a eu aussi 9 votes, Tomo étant le seul à ne pas l’avoir inclus.

Le vote du consensus serait : 1 – Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 1993 – 2 – Vega Sicilia Unico 1957 – 3 – Château Beychevelle Saint Julien 1928 – 4 – Pétrus Pomerol 1985 – 5 – Champagne Krug Clos du Mesnil 1983 – 6 – Château d’Yquem Sauternes 1976.

Mon vote est : 1 – Champagne Krug Clos du Mesnil 1983, 2 – Vega Sicilia Unico 1957, 3 – Muscat rosé Gurzuf Collection Massandra 1935, 4 – Château Beychevelle Saint Julien 1928.

J’avais voulu dans ce dîner mettre les vins les plus emblématiques : Romanée Conti, Pétrus, Yquem, Krug Clos du Mesnil, Vega Sicilia, un Montrachet, un vin de la collection Massandra et des vins plus originaux comme le Heidsieck 1955, le Cahors 1937 ou le Beychevelle 1928. Tous ces vins ont été présents au rendez-vous qui leur était donné.

La cuisine d’Alain Solivérès est d’une maturité qui s’affirme de plus en plus avec des plats lisibles, goûteux, parfaits pour les vins. Le plus beau plat pour moi est le médaillon de chevreuil juste cuit dans son jus, servi en deuxième service du chevreuil. Le perdreau traité en gibier est aussi un grand moment. Rajoutons à cela un service exemplaire et des convives chaleureux et souriants. Tout cela donne un 173ème dîner de réussite totale.

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La France de l’Excellence – livre de François Audouze dimanche, 24 novembre 2013

Le vin est ma passion mais je suis aussi citoyen. Excédé de voir mon pays s’enfoncer dans le déclin par l’irréalisme de toutes les politiques où la démagogie et les bons sentiments ont exonéré de la nécessité de gérer, j’ai écrit un livre, « La France de l’Excellence« , pour décrire non pas ce que l’on peut faire, mais ce que l’on doit faire.

Ce livre est brutal, car les mesures présentées paraîtront impossibles. Mais ce que l’on sait, c’est que si l’élection présidentielle de 2017 se joue, comme en 2012, sur la démagogie, le pays est définitivement perdu.

Ce livre est un avertissement sur ce qu’il faut faire avec courage en impliquant l’ensemble des citoyens.

On ne discutera pas de ce livre sur ce blog, car ce n’est pas l’objet d’y parler de politique.

Mais je ne veux pas cacher l’existence de ce cri du cœur adressé à mon pays.

Il sera disponible cette semaine dans les librairies et sur les sites marchands.

La France de l’Excellence, Editions du Rocher.

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Invraisemblable journée au siège du champagne Péters avec 20 vins différents dont des raretés absolues samedi, 23 novembre 2013

Cela faisait longtemps que nous voulions nous retrouver ! J’arrive à Mesnil-sur-Oger au siège du champagne Pierre Péters. Rodolphe Péters me propose de déguster les vins clairs de 2013. Je me suis déjà livré à cet exercice dont l’idée me plait. Nous faisons cette dégustation dans les chais.

Le vin clair Les Monts Martin au Mesnil 2013 se présente à l’œil comme un jus de citron un peu trouble, marqué de deux gouttes de lait. Il en sera de même des autres. Le vin évoque le citron, les fruits blancs, la craie. Il est surtout citron.

Le vin clair La Fosse à Avize 2013 est plus austère. Sa structure est différente. Il est plus gras, plus riche mais moins tendu. Il est plus pamplemousse que citron. S’il est plus gras et ample, cela vient du profil du vignoble me dit Rodolphe Péters qui évoquera au fil de la dégustation les caractéristiques des parcelles, telles que l’orientation, l’ensoleillement et la composition du sol.

Le vin clair Les Bellevues à Oger, côté Mesnil 2013 a une attaque superbe, plus généreuse de pomelos. Il y a aussi un côté floral, fleur d’oranger. Il est très élégant avec un beau final. Très généreux.

Le vin clair Les Chemins de Chalons à Cramant 2013 a une attaque très fraîche suggérant la menthe. Il y a des fruits blancs. C’est celui qui a la plus belle palette de fruits et fleurs blanches avec un bel agrume, le pamplemousse. Il a plus d’acidité car ce vin n’a pas fait sa fermentation malolactique. Il a des épices douces.

Le vin clair Les Chétillons de Mesnil-sur-Oger 2013 est pétillant. Il a des fruits blancs. L’agrume est peu marqué. Le fruit est plus confit. Je dis : « c’est le plus difficile à comprendre » et cette formule plait à Rodolphe Péters car il est à juste titre fier de ce vin.

Rodolphe Péters m’apporte deux vins sans me dire de quoi il s’agit.

Le premier vin a un nez très précis, une attaque très douce, calme. Seul le final est citronné.

Le second vin a un nez plus large que précis. L’attaque est plus rêche mais il a plus de matière. Le final est moins long et sans agrume.

Rodolphe Péters m’explique que le premier vin a été élevé avec une levure saccharomyces et que le second a été élevé avec une levure torulaspora puis saccharomyces. Le premier n’a eu qu’une levure alors que le second en a eu deux.

Le premier est plus droit et le second plus large. J’avoue bien volontiers que cette expérience me passe un peu au dessus de la tête.

Le vin que je goûte maintenant est le Brut Sans Année de réserve. Il est fait avec 50% de brut sans année de l’année précédente plus 50% de vin de l’année. Le Brut Sans Année de réserve a commencé en 1988. Ce vin est beaucoup plus rond, car il est plus ancien. Il a un bel équilibre mais il manque un peu de final.

Nous allons maintenant à la salle de dégustation pour continuer notre voyage. Rodolphe Péters me fait goûter le Champagne du centenaire de la maison Pierre Péters. Il y a des vins de l’arrière-grand-père, le 1921 et le 1937. Des vins du grand-père 1947, 1959, 1966. Des vins du père de Rodolphe, 1969, 1973, 1976, 1979, 1982, 1985, 1988, 1990, 1995, 1996. Cet assemblage représente un tiers du vin. Le deuxième tiers comprend les 2000, 2002, 2004 et 2008. Le troisième tiers est fait de 2010. Ce qui me surprend, c’est que Rodolphe Péters ne l’a pas encore bu. Il le découvre donc avec moi. Quel honneur !

Le nez est très intéressant car multiple. Il y a une évocation de fenouil. En bouche c’est très jeune, marqué par du caramel au beurre salé. C’est la patine des vieux vins. Rodolphe Péters dit que l’impact de la levure est trop présent. C’est un vin très curieux, très intéressant mais pas concluant. Il y a probablement trop de 2010 qui brouille le message des plus vieux témoignages des vins de cette maison.
Nous passons ensuite à des vins plus conventionnels. Le Champagne Les Chétillons Pierre Péters 2006 a un nez un peu lacté. L’attaque est brillante et riche, avec du lait et du beurre. Le vin est très long, avec deux caractéristiques : caramel et mandarine.

Le Champagne Les Chétillons Pierre Péters 2005 a un nez plus racé, plus champagne. Il y a plus de tension mais moins d’opulence. Il est plus champagne que le 2006 mais le 2006 va évoluer. Le 2005 a de l’amande et de la mandarine, ce qui est caractéristique des Chétillons.

Le Champagne Les Chétillons Pierre Péters 2004 est dans une phase qui ne plait pas à Rodolphe Péters. Le nez est très minéral, la bouche est lactée, beurre et noisette. Rodolphe pense qu’il y a trop de coing et pas assez d’agrumes et que le fruit est un peu éteint. Je trouve que c’est un grand vin mais pas très pétulant.

Le Champagne Les Chétillons Pierre Péters 2002 a beaucoup plus de tension. Le nez est vineux. Le vin est carré, solennel, très grand. L’équilibre est minéral avec du pamplemousse. Le vin est de grande longueur. Il est grand.

Entretemps, le vin du centenaire s’est assemblé. Il est beaucoup plus serein, large avec un final de lait et de caramel. Et le 2002 s’ouvre aussi, offrant la mandarine caractéristique du Chétillons.

Rodolphe présente maintenant un vin qui s’appelle Champagne Pierre Péters « Réserves Oubliées » un vin créé pour Michael Edwards, poète et membre de l’académie française, qui voulait un « goût anglais ». Seules 60 bouteilles ont été faites. La base est la réserve perpétuelle vieillie un an en cuve. La base est de 2007 et les vins plus anciens, mis en cuve en 2009 et gardés quatre ans en cave. Le vin est très bon, plein et effectivement, on a une impression de boisé. Il est beau, chaleureux, minéral, très pur, joyeux et gourmand. Du grand champagne.

Le Champagne Les Chétillons Pierre Péters 1997 a un parfum fort prégnant. Il a un côté très agréable et complexe, dans beaucoup de directions. Lacté, foin, grillé.

Le centenaire continue de s’épanouir, et du floral apparaît.

Après cette dégustation d’un rare éclectisme et avec des vins originaux, nous nous rendons au restaurant Les Avisés où nous sommes accueillis par Anselme Selosse qui ne restera pas avec nous. Je vais saluer Nathalie qui va servir notre repas et Stéphane Rossillon, le chef avec qui j’avais partagé des moments mémorables il y a quelques mois. Le menu affiché sur l’ardoise est : l’œuf mollet et son velouté de champignons, châtaignes au curcuma / suprême de volaille fermière au citron, endive rôtie au piment d’Espelette, cocos de chevriers aux aromates / mousse au chocolat tiède à l’orange.

Le Champagne Les Chétillons Pierre Péters 1996 a un nez très minéral et très champagne. Le vin, de grande tension et harmonieux a un goût de truffe.

Le Château Chalon Fruitière Viticole de Voiteur 1966 que j’ai apporté a un merveilleux goût de noix. C’est un Château Chalon au sommet de sa plénitude. Il est « énorme ».

Rodolphe Péters, qui n’en est pas à une surprise près à m’offrir a apporté le vin qui est maintenant le plus vieux de sa maison puisque les plus vieux champagnes ont tous été assemblés dans le vin du centenaire. C’est un Vin rouge de Vertus Pierre Péters 1937. Son nez est salin et on ne peut pas ne pas penser aux vins de la Romanée Conti. L’attaque en bouche est très fruitée, de fruits rouges. Le vin est presque sucré, mais son final est salin. La jeunesse du fruit est remarquable. Il a une énergie immense. S’il a des fruits rouges, il a aussi de l’écorce d’orange. Le côté sucré évoque le ratafia.

Le Champagne Les Chétillons Pierre Péters 1986 a un côté évolué extrêmement plaisant. Le 1966 est charnu, il a du gras et la noix est bien dosée. Il réagit très bien sur l’endive.

Le 1986 paraît jeune à côté du 1937 et du 1966. Il est très agrume frais, peut-être pas très long mais très large.

Le Champagne Les Chétillons Pierre Péters 1976 est marqué par la noix. Il a une belle évolution, une belle énergie. Il est mordant en bouche, vineux et coquille d’huître. Le pont que je voulais créer entre vin jaune et champagne se trouve idéalement avec ce 1976 mais aussi avec le 1986.

La générosité de Rodolphe Péters est incommensurable. Ce qui est amusant c’est qu’il avait prévu que nous buvions 1996, 1986 et 1976 et que je suis venu avec un 1966. Hasard ?

Je repars sur un petit nuage à Paris. Le dîner de L’Ordre des Dames du Vin et de la Table m’attend au restaurant Laurent. Comment vais-je survivre, je ne sais pas.

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la couleur des vins clairs et la salle de dégustation

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le vin rouge de Vertus de 1937

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le Chateau Chalon 1966

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les Chétillons 1996 et 1986

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nous avons demandé une poêlée de champignons pour accompagner le rouge de 1937

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Déjeuner au restaurant Le Millésime avec des vins du domaine de Vogüé samedi, 23 novembre 2013

Nous nous rendons à pied au restaurant Le Millésime avec nos musettes respectives. Nous avons un salon pour nous tout seuls aussi puis-je immédiatement procéder à l’ouverture de mon vin, qui est venu en voiture avec moi et a donc été agité. Imaginant que je bénéficierais d’une verticale extensive du Musigny, j’avais pris avec moi un vin pour qu’il permette une comparaison avec les plus vieux, mais dès mon arrivée au domaine, Jean-Luc m’avait dit que les réserves du domaine sont maigrelettes et que l’âge des vins du repas ne serait pas canonique. Tant pis, il faut prendre les choses telles qu’elles viennent, sachant que la générosité est là, puisque Jean-Luc Pépin est l’un des plus généreux lors des dîners de vignerons que j’organise chaque année. Mon vin a un bouchon qui vient bien, d’une grandes souplesse qui laisse penser qu’il est plutôt de 1948 / 1950 que de l’année du vin, résultant probablement d’un rebouchage. Le parfum est splendide. De peur qu’il ne s’évanouisse du fait du chahut du voyage, il sera goûté en premier.

Le menu que je choisis est : queue de cochon en robe des champs, pulpe de haricots tarbais / fusette de filet d’oie, jus aux épices du Maghreb et pulpe de pois chiches.

La bouteille que j’ai prise en cave car je l’avais repérée et j’en attendais une belle surprise est une bouteille dont on ne voit que l’année, 1918. Comme on vient de passer une semaine à ne parler que de la future commémoration de la grande guerre, j’ai eu envie de l’apporter au domaine de Vogüé, domaine pour lequel j’ai les yeux de Chimène, ces yeux pleurant parfois sur l’inaccessibilité financière des vieux millésimes. L’étiquette de mon vin est en lambeaux mais en faisant un travail de Champollion, je risquerais ce nom : Chambertin Thomas Bassot 1918 car il y a des lettres qui rendent cette hypothèse probable.

Le nez est très joli, très doux. En bouche, le vin est très doux, il a un peu de pruneau, il est velouté. J’ai peur qu’il ne décline, mais en fait c’est le contraire qui se produit. Il se renforce, prend de la consistance tout en gardant un charme velouté et doucereux.

Le Bourgogne Blanc domaine Georges de Vogüé 1995 a un caractère lacté. Il est capiteux, opulent et généreux et s’associe très bien à la queue de cochon.

Le Chambolle Musigny Les Amoureuses domaine Georges de Vogüé 2007 est frais, d’un beau fruit généreux mais gracile. C’est un vin très plaisant. Il n’a pas beaucoup de puissance mais il a la spontanéité du fruit rouge. Il ressemble au 2012 que nous avons goûté en cave.

Le blanc fait lourd et pesant après le rouge. Il a un beau fruit jaune clair mais on sent les vignes jeunes. Il y a un peu de litchi. Le vin est capiteux.

Le 2007 auquel on revient est un vin de très grand plaisir. Il a un final en coup de fouet minéral.

Le Musigny Vieilles Vignes domaine Georges de Vogüé 1996 a un nez superbe et profond. C’est un vin intense, riche mais de très grande subtilité. Sur l’oie, il ne cherche pas à s’imposer. François évoque, et c’est vrai, la peau blanche de pamplemousse. Le vin est riche, très gastronomique, rafraîchissant.

Le 1918 progresse et progresse, prenant de l’ampleur. Le 2007 confirme sa fraîcheur extrême.

Le Bonnes-Mares domaine Georges de Vogüé 1980 a une couleur plus tuilée. C’est Alain Roumier qui a fait ce vin de 1956 à 1985. François Millet a pris sa suite en 1986. Ce vin a des caractéristiques de vin ancien, sans doute un peu plus que ne devrait son millésime. Il a des aspects de griotte et de kirsch mais aussi de bois marin car le sel affleure.

Sur l’oie, la fraîcheur du 1918 est incroyable. En résumé, le 2007 est très frais et aérien, le 1996 a une belle puissance et un grand équilibre, le 1980 s’améliore et perd un peu de son caractère évolué et le 1918 est magnifique avec une tenue exemplaire. Sa tension est inimaginable et son fruit très vivant.

Je quitte mes hôtes à toute vitesse, car je dois participer à une émission sur France Culture qui parle de bonne chère et de bons vins, ce qui ne m’empêche pas de les remercier pour le temps qu’il m’ont consacré et pour leur générosité. Le restaurant est agréable et le service attentif. Croisant au retour Frédéric Mugnier je lui dis que c’est assez curieux qu’au cœur de l’aristocratie viticole de la Bourgogne le restaurant ne fasse pas une cuisine plus simple qui se met au service des vins si prodigieux qui l’entourent. La cuisine est bonne. Mais elle doit comprendre qu’elle est au service des vins miraculeux de sa région et de sa commune !

Cette immersion dans le monde de Vogüé, par ses vins jeunes et par ses vins plus mûrs à table fut une grande réussite.

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Le 1918 à déchiffrer. Merci pour vos éventuelles suggestions.

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Dégustation des 2012, 2011 et 2010 au domaine Georges de Vogüé samedi, 23 novembre 2013

A l’invitation de Jean-Luc Pépin je me rends au domaine Comte Georges de Vogüé dans la charmante ville de Chambolle-Musigny. Avec François Millet maître de chai et Eric Bourgogne responsable des vignes, nous allons goûter les vins en fût de 2012 en cave.

Il doit être dit que je ne suis pas un expert en vins jeunes aussi mes notes ne sont que des impressions de voyage, de vagabondage, qui ne prétendent pas exprimer une vérité intangible. De plus les vins que l’on boit sont parfois à des stades différents de leurs évolutions. On ne retiendra donc de ces notes que les impressions d’un amateur au palais formé ou déformé par les vins anciens.

Le Musigny blanc domaine Georges de Vogüé 2012 évoque la noix. Il est très minéral avec des agrumes, de l’acacia et du tilleul. Il a été soutiré il y a dix jours et se montre très ouvert. Il est à noter que le Musigny blanc s’appelle encore Bourgogne Blanc, car le domaine ne veut donner le nom de Musigny qu’à un vin de vieilles vignes. Du fait d’arrachages, le dernier Musigny blanc date de 1993. Les années suivantes sont des « Bourgogne Blanc » et reprendront leur nom de Musigny dans trois ou quatre ans.

Le Chambolle Musigny domaine Georges de Vogüé 2012 est d’une année difficile. Le nez est fermé car en cave la température est très basse. Il fait froid dehors. L’attaque est très belle et le final est assez coincé. Il y a du bonbon sucré que l’on croque et un peu d’astringence. Le vin fermé est peu charmeur.

Le Chambolle Musigny 1er Cru domaine Georges de Vogüé 2012 est en fait le Musigny de jeunes vignes, de moins de 25 ans, qui n’aura pas l’appellation Musigny. L’âge moyen des vignes est de 16 ans. Le gap est énorme avec le précédent. Le vin est riche, il a du fruit, opulent même s’il y a une astringence finale. Les fruits rouges et noirs sont très spontanés.

Le Chambolle Musigny Les Amoureuses domaine Georges de Vogüé 2012 a un nez raffiné. Les vignes ont été plantées en 1964 et 1974. Le vin est raffiné, élégant et cohérent. Il y a de la confiserie de framboise et du poivre blanc.

Le Bonnes-Mares domaine Georges de Vogüé 2012 est très différent. Il est plus subtil et plus intellectuel. Le fruit est moins apparent. Il a une astringence finale. On sent la myrtille, la prunelle, la feuille verte. Il a beaucoup de fraîcheur. La couleur du vin tend vers le bleu et le violet.

Le Musigny Vieilles Vignes domaine Georges de Vogüé 2012 est d’un parfum riche et très cohérent. Très fermé, on sent sa grande énergie. Comme c’est le plus grand, c’est celui qui aura besoin de plus de temps pour s’exprimer. Il a une consistance de fruits rouges et noirs, de cassis. Son poivre est fort et le final est le plus riche, avec beaucoup plus de réserve. C’est le vin au final le plus long, malgré une mise plus tardive de trois mois.

Les 2011 sont bus de bouteilles et non plus de fûts.

Le Chambolle Musigny domaine Georges de Vogüé 2011 montre une très grosse différence, car le vin est déjà buvable. C’est un très beau vin accueillant, d’un millésime précoce, évoquant la gelée de fruit.

Le Chambolle Musigny 1er Cru domaine Georges de Vogüé 2011 (jeunes vignes du Musigny) a plus de végétal. Il est moins souriant que le Villages. Il va s’épanouir. On a une sensation de calcaire en final. Au réchauffement dans les mains, le vin devient plus sympathique.

Le Bonnes-Mares domaine Georges de Vogüé 2011 a beaucoup de richesse, beaucoup de cohérence. C’est un grand vin. Le fruit est très bien mesuré. Le vin est superbe. François dit qu’il évoque le goûter de quatre heures.

Le Musigny Vieilles Vignes domaine Georges de Vogüé 2011 a une magnifique matière. Il y a des fruits noirs. Il y a presque du gras tant le vin est soyeux et charmant. Minéralité, densité et réserve sont ses caractéristiques de grand vin. Je sens la peau de raison. Le vin titre 12,3°.

Le Chambolle Musigny domaine Georges de Vogüé 2010 a une belle attaque mais un final rêche. Son parcours en bouche est assez court. Je préfère le 2011 à leurs stades respectifs de développement aujourd’hui. Au deuxième essai le vin est meilleur, avec un final plus sympathique.

Le Chambolle Musigny 1er Cru domaine Georges de Vogüé 2010 a plus de consistance. Le final est plus riche. Il est assez strict, très droit, plus épuré. Il est minéral et de grande clarté.

Le Bonnes-Mares domaine Georges de Vogüé 2010 est riche et plus joyeux. Il a un beau fruit épanoui, entre rouge et noir. Le final est un peu léger mais c’est un grand vin très fluide et très beau.

Le Musigny Vieilles Vignes domaine Georges de Vogüé 2010 a une grande élégance et une belle richesse. Il est assez contenu. François dit : « c’est un lac d’eau très pure », car il est fluide et de grande minéralité. Je sens des fruits très purs à petits grains. Il a beaucoup de précision. Le vin est ensoleillé.

Cette dégustation est très intéressante car j’apprends beaucoup de choses. Jean-Luc, François et Eric ont en tête les données climatiques qui leur permettent de mettre ces vins en perspective. Je n’ai que mon palais pour juger de leurs qualités immédiates, celles du jour de la dégustation de vins dont les âges sont de 1, 2 et 3 ans, ce qui crée des différences considérables.

Vite, allons déjeuner, pour boire « en vrai » ce que deviennent les si belles promesses de ce domaine prestigieux.

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le domaine qui n’avait pratiquement plus aucun vin ancien constitue une « bibliothèque » pour le futur.

Les 30 ans de l’Ordre des Dames du Vin et de la Table vendredi, 22 novembre 2013

L’Ordre des Dames du Vin et de la Table fête ses trente ans au restaurant Laurent. La Présidente est Françoise Cornu-Rigord de la Commanderie de Peyrassol. Avant le dîner il était possible de goûter des vins des Dames mais je ne suis arrivé que pour le dîner .

L’apéritif est servi à table. C’est un Champagne AR Lenoble grand cru blanc de blancs non millésimé. Ayant passé ma journée à goûter des champagnes de Pierre Péters, il m’est difficile de recalibrer mon palais sur ce champagne plus opulent et d’un autre terroir.

Je suis à la table d’une ancienne présidente, Gisèle Gonet, de la célèbre maison de champagne de Mesnil-sur-Oger où j’étais ce matin même, d’une ancienne propriétaire de Cheval Blanc que je connais depuis quelques années, qui possède maintenant le château qui a appartenu à Joséphine Baker. Il y a aussi un couple de vignerons suisses dont la femme est présidente de l’association des vins de Suisse (Artisanes du Vin), une vigneronne de Pommard et d’autres personnes de l’autre côté de la table avec qui il fut impossible de parler dans l’ambiance bruyante et joyeuse de ce dîner.

Le menu mis au point par l’Ordre et Alain Pégouret est : araignée de mer dans ses sucs en gelée, crème de fenouil / homard en civet / volaille de Bresse farcie au foie gras, champignons des bois / pamplemousse rose en marmelade dans un pain d’épice maison, sorbet / café, mignardises et chocolats.

Le Sancerre Cuvée des 500 ans, Joseph Mellot 2012 est brutal. C’est une bombe olfactive et j’ai bien du mal avec ce vin auquel je prédis un bel avenir. Le Montagny 1er cru « Les Coères » Feuillat Juillot 2011 est d’une densité extrême. Lui aussi est très fort mais plus civilisé du fait de son âge. C’est lui qui accompagne le mieux l’araignée d’une qualité particulièrement appréciable.

Le Chinon « Clos du Chêne vert » Charles Joguet 2009 est probablement le vin de la soirée pour moi. Il est riche mais absolument charmant, glissant en bouche avec une joie certaine. Madame de Labarre, ex-Cheval Blanc, l’adore pour la pureté de son cabernet franc.

Le Château d’Afrique Côtes de Provence Elie Sumeire 2009 est moins précis que le chinon qui est servi en même temps que lui. Le Chinon est plus adapté à la chair du homard, et le Côtes de Provence plus adapté à la sauce très (trop ?) poivrée.

Le Pommard 1er Cru Les Epenots domaine Parent 2007 de ma voisine de table est plus puissant et tannique que ce que j’aurais imaginé. Il est plus puissant qu’il n’est Pommard, mais il est très bon.

Le Château La Tour de l’Evêque Côtes de Provence Régine Sumeire 2009 est très agréable, plus fondu que celui d’Elie. Les deux vins se régalent avec la volaille de Bresse exceptionnellement aérienne et goûteuse.

Le Château Rayne Vigneau 2007 est un bonheur. C’est le mieux dessiné de tous les vins du repas. Il est précis, sa puissance est contenue. Il dégage un bonheur serein. Avec les agrumes du dessert, il vibre bien, mais les biscuits et le sorbet ne lui conviennent pas. Le dessert est trop disparate pour le vin.

Les Dames du Vin et de la Table ne sont pas toutes des oratrices et il est difficile d’entendre leurs discours dans le brouhaha de groupes qui bavardent lors des discours. L’ambiance est chaleureuse et souriante. Tous et toutes sont heureux d’être ensemble. Le service du Laurent pour 150 couverts et neuf vins à servir a été parfait comme d’habitude. L’araignée et la volaille sont deux temps forts, ainsi que le Chinon et le Rayne-Vigneau.

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