Académie des vins anciens – les vins – champagnes et groupe 1 vendredi, 30 novembre 2012

Les vins sont répartis en trois groupes sauf les champagnes d’apéritif (les vins précédés d’une astérisque proviennent de ma cave) :

deux *Champagne du Château de Germigney 1/2 bt sans année élaboré par Leclère

deux Champagne Taittinger brut – Champagne Ruinart Blanc de Blancs

Champagne Ruinart Brut – *Champagne Charles Heidsieck années 80

Les vins du Groupe 1 :

Champagne Grand Réserve Damien Coutelas SS A

*Domaine de la Trappe Vin d’Algérie rosé 1949

Vin d’Algérie rosé Frédéric Lung 1942

*Château d’Arlay Côtes du Jura 1973

Château Latour-Figeac 1970 – Château Moulin Riche 1914

*Chambolle-Musigny Domaine Faiveley magnum 1973

Corton Jules Régnier 1961

*Nuits-Saint-Georges Clos des Corvées Général Gouachon 1945

Chateauneuf-du-Pape Domaine du Banneret 1989

*Chateauneuf-du-Pape Veuve H.-M. Avril 1957 – *Rioja Ollauri Paternina 1928 (un par groupe)

Vin d’Algérie rouge Frédéric Lung 1938

*Château Chalon Fruitière Viticole de Château Chalon 1959 – Château Rabaud 1947

Château Rayne Vigneau 1945

Académie des vins anciens – les vins du 2ème groupe vendredi, 30 novembre 2012

Les vins du Groupe 2 :

Champagne Grand Réserve Damien Coutelas SS A

Château Mont-Redon Chateauneuf-du-Pape Blanc 1976

*Château d’Arlay Côtes du Jura 1969

Château Léoville Poyferré 1985 – Château La Conseillante 1969

Clos l`Eglise pomerol 1959

Clos des Jaubertes 1964

Château d’Arsac 1925

*Chambolle-Musigny Domaine Faiveley magnum 1973

*Volnay Namont de Marcy 1961*Beaune Marconnets Remoissenet 1937

Châteauneuf du Pape Camille Chandesais 1962

*Rioja Ollauri Paternina 1928Vin Jaune Désiré Petit 1964

*Château Chalon Fruitière Viticole de Château Chalon 1959

Château Doisy-Daëne 1975 – Cru Le Buhan Cérons 1962

Académie des vins anciens – les vins du 3ème groupe jeudi, 29 novembre 2012

Les vins du Groupe 3 :

Champagne Grand Réserve Damien Coutelas SS A

Château La Louvière Pessac Léognan Blanc 1979 – Mosel Wein 1964

*Château d’Arlay Côtes du Jura 1969 – Château Mouton Rothschild 1976

Château Canon Saint-Emilion 1966 – Château Gruaud Larose 1964

Château Malescot Saint-Exupéry 1961Corton Bressandes Tollot Beau 1988

*Bonnes Mares Mommessin 1972*Vosne Romanée S.A. Leroy & Cie 1959

Chassagne-Montrachet rouge Joseph Drouhin 1959

Châteauneuf du Pape Faye et Cie Négociant 1958

*Rioja Ollauri Paternina 1928

Côtes du Jura Bury 1964 – *Château Chalon Fruitière Viticole de Château Chalon 1959

Académie des Vins Anciens (AVA) – 19ème séance du 29 novembre 2012 jeudi, 29 novembre 2012

Académie des Vins Anciens (AVA) – 19ème séance du 29 novembre 2012

Règles et informations mises à jour au 18/10/2012. (à lire avec attention)

Date et heure : 29 novembre 2012 à 19h00

Lieu : Restaurant Macéo 15 r Petits Champs 75001 PARIS 01 42 97 53 85

Participation financière :

120 € par personne si l’inscrit apporte une bouteille de vin ancien (1) agréée par François Audouze

240 € par personne si l’inscrit vient sans bouteille

(1) si l’inscrit n’a pas de vin assez ancien, un "troc" est possible avec François Audouze, qui mettra au programme un vin ancien, contre une (ou plusieurs) bouteille de vin jeune qui présente un intérêt pour lui

Paiement :

Aucun chèque ne sera remis en banque avant le 27 novembre 2012. Il n’y a donc aucune raison de retarder l’envoi du chèque de paiement. On peut l’envoyer des maintenant.

Le chèque doit être remis si possible avant le 10 novembre à François Audouze. L’ordre du chèque est : "François Audouze AVA"

Chèque à envoyer à François Audouze 18 rue de Paris 93130 NOISY LE SEC

Livraison des vins :

Les vins doivent être proposés et agréés par François Audouze. Les bouteilles sont à déposer chez Henriot 5 rue la Boétie 75008 Paris – 2ème étage – 01.47.42.18.06. Notre contact sur place est Martine Finat : mfinat@champagne-henriot.com . Aucune bouteille ne devrait être livrée après le 20 novembre. Merci d’attendre le 2 novembre pour commencer à remettre votre bouteille chez Henriot.

Une variante est de m’envoyer par la poste la bouteille à l’adresse : François Audouze société ACIPAR 18 rue de Paris 93130 NOISY LE SEC

Pour que l’organisation de cet événement soit fluide, il est recommandé de ne pas attendre avant de proposer les vins, les livrer et payer.

Au plaisir de vous accueillir pour une réunion aussi brillante que les précédentes.

Florilège de Discours savants sur le Vin dimanche, 25 novembre 2012

C’est un livre, écrit par Azélina Jaboulet-Vercherre, de morceaux choisis sur plus de 3.000 ans des philosophes et écrivains les plus célèbres, lorsqu’ils ont parlé de vin.

A lire, pour se rendre compte que les mots sur le vin ne datent pas de notre siècle.

A lire aussi pour rêver de ceux qui ont bu des vins dont il ne reste, hélas, plus aucune trace.

Il est paru aux éditions Féret.

164ème dîner de wine-dinners au restaurant Taillevent samedi, 24 novembre 2012

Le 164ème dîner de wine-dinners se tient au restaurant Taillevent. La taille du groupe a changé à plusieurs reprises, entraînant le changement du salon du premier étage. Entre le salon chinois, plus petit, et le salon lambrissé, mon cœur balance vers les boiseries élégantes à la française. Quand j’arrive à 17 heures, nous sommes chinois. A 18 heures, grâce à Jean-Marie Ancher, nous sommes lambrissés. Il est des opérations du Saint-Esprit qu’il vaut mieux ne pas discuter.

Selon la tradition, j’ouvre les vins. Le parfum du Pétrus 1979 est d’une rare séduction. Il est plus riche que je ne l’aurais imaginé. En enlevant la capsule du Gazin 1959 je vois l’inscription sur le haut du bouchon : "rebouché en 1998". Il se trouve que je n’aime pas les bouteilles reconditionnées car cette opération, même bien faite, altère le goût originel, mais surtout parce que cette opération est faite sans que l’on donne l’indication du niveau de la bouteille entrante. J’ai acheté cette bouteille parce qu’elle avait un niveau superbe. Comme de l’extérieur il n’y a aucun indication de rebouchage, je suis mécontent. Et bien sûr quand je sens le vin, j’ai un a priori défavorable. La suite montrera que j’ai tort.

Le nez du chambertin 1959 est magnifiquement bourguignon. Le bouchon de la Romanée Saint-Vivant du domaine de la Romanée Conti 1983 me résiste longtemps, tant il est comprimé dans le goulot. Son parfum est extraordinaire. Patatras, le nez du Richebourg du domaine de la Romanée Conti 1959 est plus que désagréable et l’odeur du bouchon imbibé et sorti en brisures est horrible. Même si je suis souvent le témoin de résurrections, j’ai bien peur que ce vin ne se réveillera pas. Aussi, j’ouvre une bouteille de réserve, un Châteauneuf-du-Pape Domaine du Pégau Réservée 1989. Son nez est généreux et ce qui me fait plaisir, c’est que sa puissance est contenue, ce qui lui permettra de cohabiter avec les bourgognes. Patatras à nouveau, le nez de l’Yquem 1941, d’une très belle bouteille, se présente sous des fragrances que je n’ai jamais rencontrées. Il est camphré, odieusement chimique. Le diagnostic vital est d’une triste clarté : celui-ci ne reviendra jamais à la vie. Une nouvelle fois grâce à Jean-Marie Ancher, je prélève dans la cave du restaurant un Château de Rayne-Vigneau 1914 à la jolie couleur dorée et au nez de sauternes.

Une conjonction de bouteilles abîmées aussi importante ne s’est jamais produite jusqu’alors dans mes dîners. Nous sommes sept à la table, dont un convive qui ne boit pas. J’avais prévu sept bouteilles. J’en avais rajouté une sans le dire, la Romanée Saint-Vivant, car il y a quelques jours, c’était l’anniversaire de l’amateur chinois fidèle de mes dîners qui m’a demandé d’organiser cette soirée pour honorer des amis, et j’ai ajouté deux vins, ce qui porte à dix les vins du programme.

Sur les sept personnes autour de la table il y a la responsable du marketing hôtelier d’un grand groupe de luxe, un anthropologue qui dirige une mission Chine-Europe sur des sujets artistiques et culturels, un tailleur italien, mon ami chinois, un expert en vin londonien et un écrivain britannique. Comme nous en sommes à étrenner des "premières" lors de ce dîner, c’est la première fois qu’un convive demande un menu différent des autres, sans viande ni abats, qu’il va accompagner sous nos rires et nos yeux ébahis de Coca Light, zéro sucre. Inutile de dire que cela fait tout drôle. Son humour très britannique a permis qu’il ne soit pas le mouton noir de ce repas.

Le menu composé par Alain Solivérès est : gougères et petits toasts au foie gras / tartare de bar de ligne à l’huile d’olive / foie gras de canard poêlé, jus à la Rossini / chausson de lapin de garenne au romarin / mignon de veau du limousin doré, légumes racines au jus / perdreau patte grise rôti au genièvre/ saint-nectaire / entremets à la mangue.

Le Champagne Pommery 1947 n’a plus de bulle. Il y a un peu de poussière dans son parfum, mais en bouche, ce qui frappe immédiatement, c’est sa grâce. Il allie grâce et fraîcheur. Les gougères gomment tout signe de vieillesse de ce champagne plaisant. Quelque deux heures plus tard, lorsqu’avec Desmond nous avons senti nos verres de Pommery 1947, celui de Desmond avait une pureté exprimant la grandeur du champagne, alors que le mien, un peu plus rempli, avait encore des traces de poussières.

Le Champagne Salon 1985 fait un contraste très fort. Il apparaît plus jeune en passant après le Pommery. Le parfum est intense, le vin est très vineux et ce champagne est aujourd’hui en pleine possession de ses moyens. Il faudrait boire tous les Salon à 27 ans ! Il a de jolis fruits compotés et la légère acidité du plat de poisson lui donne un coup de fouet de plaisir et une tension extrême. C’est un grand champagne, racé, presque opulent.

Le nez du Pétrus 1979 est d’une séduction folle. Le foie gras et sa sauce sont divins et propulsent le Pétrus avec bonheur. Il y gagne en velouté. Il est bien sûr truffe, mais de façon parfaitement dosée. Ce qui est intéressant, c’est que ce Pétrus, plus puissant que je ne l’imaginais, est extrêmement lisible. Pour plusieurs convives, c’était leur premier Pétrus et c’est une chance de découvrir Pétrus avec un vin aussi facile à vivre, joyeux, velouté, subtil et charmant.

Le Château Gazin 1959 a un nez un peu retenu mais noble. Vexé d’avoir acheté un vin rebouché, je cherche à lui trouver des défauts, alors que mes convives le jugent très bon. Et c’est vrai qu’il est bon, servi à merveille par un chausson de lapin particulièrement viril. Et ce qui est le plus satisfaisant, c’est que le Gazin tient parfaitement le choc de ce plat envahissant les papilles. Il profite à plein de son année merveilleuse. Cette association est d’un grand bonheur.

Le Chambertin Jaboulet-Vercherre 1959 est une heureuse et bonne surprise. Il est très bourguignon, tant au nez qu’en bouche. Long, prenant bien toute sa place dans le palais, il est épanoui, charmant, naturel et d’une précision supérieure à ce que j’attendais. C’est un vin très agréable à boire, de belle sérénité.

Servi en même temps, le Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1959 n’est pas foncièrement désagréable, et certains n’approuvent pas mes fortes critiques, mais le vin est cuit, brûlé, comme s’il avait eu un trop fort coup de chaud avant qu’il n’atteigne ma cave. C’est une grosse déception car un vin du domaine dans une année aussi belle aurait dû nous donner d’infinis plaisirs.

Mais son cousin plus jeune, la Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanée Conti 1983 fait tout pour rattraper la déception du Richebourg. Son nez est à se damner. C’était d’ailleurs la plus grande impression olfactive il y a quelques heures lors des ouvertures. Le vin est racé, brillant, d’une complexité extrême. C’est le contraire du Pétrus qui se faisait lisible. Il se drape dans ses voiles de séduction qui flottent sur la nuque en disant : "suivez-moi jeune homme". C’est une expression des vins du domaine très romantique et d’une année qui me plait de plus en plus. La rose et le sel sont là, déclinés de la plus heureuse façon.

Sur le perdreau, je fais servir avec un léger décalage le Châteauneuf-du-Pape Domaine du Pégau Cuvée Réservée 1989. Le vin est solide, très Châteauneuf mais avec une subtilité particulière. Il est puissant tout en étant retenu, fruité de belle façon. Il a l’art et la manière. Mais nous avons tellement envie de profiter de la Romanée Saint-Vivant que je demande qu’on nous serve un saint-nectaire, pour que l’on profite du Pégau sans subir la comparaison avec le vin bourguignon exceptionnel de subtilité. Et le 1989 bu seul sur le fromage est d’un grand plaisir avec une intense joie de vivre.

Jamais je n’ai eu à rencontrer une déviation gustative comme celle de ce Château d’Yquem 1941. On dirait qu’on a versé dans la bouteille du sauternes un liquide qui est sert à laver les vitres. Je ne fais même pas servir l’Yquem aux convives, car le goûter abîmerait nos palais. Le Château de Rayne-Vigneau 1914 est servi instantanément sur le dessert. Son or est raffiné, son nez est de jolis agrumes, et en bouche, c’est un beau et plaisant sauternes, peu explosif et relativement peu expansif, mais suffisamment plaisant pour terminer le repas de belle façon.

Le restaurant Taillevent, perfide, nous fait servir un délicieux cognac sur des mignardises, qui plombent nos volontés.

Nous sommes six à voter pour quatre vins chacun. Huit vins figurent au moins une fois dans les votes, les deux oubliés étant les vins morts. Trois vins ont reçu au moins un vote de premier, la Romanée Saint-Vivant trois fois, le chambertin deux fois et le Pommery 1947 une fois.

Le vote du consensus serait : 1 – Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanée Conti 1983, 2 – Chambertin Jaboulet-Vercherre 1959, 3 – Pétrus 1979, 4 – Champagne Salon 1985, 5 – Château Gazin 1959.

Mon vote est : 1 – Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanée Conti 1983, 2 – Pétrus 1979, 3 – Chambertin Jaboulet-Vercherre 1959, 4 – Champagne Salon 1985.

La cuisine d’Alain Solivérès a été brillante. Deux plats sont exceptionnels, le foie gras et le chausson de lapin de garenne. Le service est toujours d’une rare efficacité et d’une capacité de réaction remarquable. La salle du premier étage est toujours aussi belle. Les discussions ont été passionnantes, tenues en anglais, sur des sujets allant dans toutes les directions. Nous avons passé une excellente soirée, avec bien sûr pour moi le regret que des vins ne soient pas parfaits. Les rajoutes heureuses ont permis que ce repas nous procure une brassée de beaux souvenirs.

Une première dans mes dîners !!!!!!

déjeuner au Yacht Club de France samedi, 17 novembre 2012

Notre club 2043 se réunit une fois de plus dans une salle à manger du Yacht Club de France. Le directeur nous fait choisir des champagnes présentés dans un ample seau glacé. Nous commençons par un Champagne Pierre Mignon Cuvée de Madame 2005 bien agréable à boire. Il est lisible, sans histoire et confortable. Je lui préfère le Champagne Pierre Mignon Grand Cru Harmonie de Blancs 2004 qui a plus de tension et de vivacité.

Le menu mis au point par Thierry Le Luc, le gérant des lieux : lasagnes imprimées d’herbes, médaillons de langouste, queues de langoustines aux jeunes légumes arrosés d’un jus de crustacés / filet de bœuf français, foie gras poêlé, courgette jaune / fromages affinés / charlotte au chocolat et fraises et framboises.

L’ami qui invite a choisi un bon Pouilly-Fuissé dont je n’ai pas retenu le nom. Le Château Talbot 1998 m’impressionne par sa densité. Il a une trame riche, et emplit la bouche goulument. Il va bien avec la viande. Le Château Lynch Bages 1997 est plus en douceur, subtil, et se marie bien aux fromages. Un Champagne Billecart-Salmon Brut réserve accompagne le dessert. A ce moment du repas, il est un peu linéaire et sans grande vibration. Il faut le goûter dans d’autres conditions.

Le jeu des sept familles samedi, 17 novembre 2012

"castigat ridendo mores" est la devise de la comédie classique, qui corrige les mœurs par l’humour.

Je n’ai pas l’habitude de parler de politique sur ce blog, mais je ne m’interdis pas l’humour. Lisant le Figaro magazine, je vois dans le courrier des lecteurs un billet où l’on suggère l’obligation de changer les intitulés du jeu des sept familles en remplaçant père et mère par parent 1 et parent 2.

Après avoir beaucoup ri de cette saillie, j’ai voulu aller plus loin. Si l’on nie la sexualité des parents qui ne sont plus père et mère mais parent 1 et parent 2, je ne vois pas pourquoi on ne nierait pas la sexualité des enfants. Et un parent, parlant de sa progéniture dirait qu’il a l’enfant 1, l’enfant 2 et l’enfant 3 par exemple.

Et pour aller plus loin dans le déni d’appartenance à un sexe, le gouvernement pourrait imposer que les seuls prénoms à utiliser seraient : Claude, Camille, Dominique, prénoms qui ont l’avantage de ne donner aucune indication sur le sexe de l’enfant.

Si cette grande conquête sociale est poussée à son terme, il reste encore à résoudre le problème de "M. et Mme Dupont recevront leurs amis le 13 avril à 19 heures". Une telle formulation n’est pas acceptable, puisque l’on peut voir que le couple est sexué, ce qu’il faut éviter. La formulation suggérée est : humain 1 et humain 2, le mot humain étant utilisé à la place de "membre d’un couple 1" et "membre d’un couple 2".

A titre d’exemple, voici ce que pourrait donner le carton d’invitation pour le mariage de deux jeunes futurs époux :

Humain 1 Claude Dupont et Humain 2 Camille Dupont, ainsi que Humain 1 Dominique Duval et Humain 2 Claude Duval sont heureux de vous convier à la cérémonie de mariage de leurs enfants :

Enfant 3 Dominique Dupont et Enfant 2 Camille Duval.

Par cette mesure de grande justice, on est en pleine citoyenneté républicaine, puisqu’il est impossible de connaître le sexe d’aucun des parents et d’aucun des enfants. On ne peut alors plus parler de minorité, mais au contraire de normalité (ou normalitude, au choix), puisque la notion de sexe est totalement supprimée.

Il s’agit très probablement de la plus grande conquête de l’humanité depuis l’invention de la peinture dans les grottes de Lascaux et Chauvet.

Un saut dans l’inconnu qui se révèle un sacré coup de chance vendredi, 16 novembre 2012

Souvent, je reçois des messages d’amateurs qui me parlent de leurs collections. Un collectionneur de verreries de bouteilles anciennes me contacte. Il est allé dans un château en Bretagne pour prendre livraison d’une grande quantité de bouteilles vides très anciennes, certaines étant du 17ème siècle. A sa grande surprise il a vu des bouteilles pleines, majoritairement du 19ème siècle, avec une ou deux, ici ou là du 18ème siècle. Au sein de ces lots, plusieurs alcools très anciens et surtout, des muscats de Joseph Nadal à Port-Vendres. Il les date du milieu de la deuxième moitié du 19ème siècle. Il me dit qu’il a l’intention d’en ouvrir un lors d’un dîner, en compagnie des descendants de Joseph Nadal. Par ailleurs, il regroupera des amis et un vigneron et compte bien que je vienne.

 

L’ayant entendu me citer des vins d’Alicante, de Ténériffe, des Marsala, des Samos, des liqueurs de cidre et autres raretés, alors que je ne connais personne de la future tablée, que je ne connais pas celui qui me convie, je décide d’aller à Tours pour un saut dans l’inconnu.

 

Emmanuel habite une jolie maison du 18ème siècle dans le centre de Tours. Dans toutes les pièces que je peux visiter, il y a des bouteilles magnifiques, aux verres de couleurs profondes, aux formes d’une grande beauté. Emmanuel s’y connait en verreries anciennes. Nous allons naturellement dans sa cave à vins où l’on retrouve aussi de belles bouteilles vides, mais mon œil est attiré par de magnifiques bouteilles pleines anciennes. 1882, 1846, 1837 et bien d’autres années. Le marquage a été fait à la main sur d’anciennes petites étiquettes d’écolier. Nous discutons quantité et prix, nous mirons les vins à la lumière et nous tombons d’accord. Je choisis dix bouteilles toutes différentes au sein de ses lots.

 

Les autres participants arrivent, Paul Nadal et son fils Lionel qui viennent pour goûter le muscat de leur ancêtre, Michel, un collectionneur de vins assez exceptionnel, qui a commencé à acheter aux domaines dès 1953 et possède aujourd’hui des allocations qui feraient pâlir d’envie tous les amateurs de vins, dont moi.

 

Nous partons au restaurant Olivier Arlot La Chancelière à Montbazon. Olivier n’est pas là, mais son prédécesseur toujours présent, chef de l’ancienne gestion avant qu’il ne reprenne, va nous exécuter un menu dont certains plats valent sans hésiter deux étoiles au guide rouge. Nous sommes neuf, Emmanuel et un de ses amis, Michel le collectionneur; Philippe Foreau, vigneron du Clos Naudin et son fils ainsi qu’un ami, les deux Nadal et moi. Chacun des apporteurs de vins, l’un après l’autre, montre en catimini ses vins à David le sommelier pour qu’il sache le moment de l’apparition de chacun des vins et les exigences d’ouverture. Car ce soir, on boira à l’aveugle, puisqu’Emmanuel et ses amis aiment déguster ainsi. J’ouvre mes vins au vu et au su de tout le monde, car je veux montrer ma méthode, dont je suis fier, d’ouverture des vins anciens. Emmanuel me dit : « puisque tu es si malin, si tu arrives à sortir entier le bouchon du muscat Nadal, je t’en offre une bouteille, parce que pour celles que j’ai ouvertes, le bouchon est chaque fois sorti en charpie ». Nous topons, et excité par le challenge, je m’applique plus que de coutume et sors le bouchon entier. Le lendemain matin, Emmanuel a honoré son pari.

 

Le menu concocté par Olivier Arlot, Philippe Foreau et Emmanuel est : amuse-bouche, foie gras sel et poivre / huître de Cancale de quatre façons : en raviole et bouillon champagne, frite sur chair de tourteau et yuzu, en coquille, crème échalote et raifort, enfin son eau en granité et citron caviar / soupe Miso à notre façon, foie gras et pigeon / noix de Saint-Jacques, topinambour, truffe blanche d’Alba / sandre confit au beurre, sauce diable / râble de lièvre, salsifis rôtis, béarnaise du Piémont, jus d’un civet / faisselle de chèvre frais, poires, vinaigre d’hydromel / macaron, crème de marron et clémentine / mi-cuit chocolat, fève tonka, sorbet cacao, bergamote.

 

Nous allons commencer par le Muscat Vieux Joseph Nadal à Port-Vendres vers 1870 sur le foie gras. J’ai envie d’associer l’un de mes deux vins, d’une bouteille qu’Emmanuel date vers 1880, de la forme d’une vieille bouteille de bière. David le sommelier me fait goûter et il m’apparaît instantanément que mon vin serait écrasé par la perfection du muscat. Je retarde donc le service de mon vin et le muscat sera seul. La bouteille est lourdement chemisée d’un dépôt noir épais. Dans le verre, la couleur du muscat est d’un abricot gorgé de soleil. Cette couleur est magnifique. Le nez l’est tout autant. En bouche on ressent l’orange, le menthol, l’alcool. Le vin muté est fort, épais, très pâte de fruit. Le final est très frais. C’est un très grand vin et les deux Nadal sont émus. Le vin est fait de muscat d’Alexandrie, d’une période entre 1850 et 1880 selon eux. L’accord avec le foie gras est superbe.

 

Les vins vont être bus à l’aveugle. Le premier blanc sec est très beau, minéral, de grande longueur et de bel équilibre. C’est un Chablis 1er Cru Séchet Dauvissat 2001 au nez superbe et très pur, déjà très mûr. Le second a un nez moins agréable, mais en bouche, il a beaucoup de gras et d’ampleur. On sent le miel. C’est Chablis Grand Cru les Preuses Dauvissat 1995 de moindre longueur que le Séchet. Le « Preuses » s’accorde très bien à l’huître au raifort, ce qui ne paraissait pas évident.

 

La soupe Miso est une merveille absolue et le troisième vin a un parfum qui est la copie conforme du parfum de la soupe. Le vin est gourmand. Il a du fumé, il est chaleureux. C’est un Vouvray demi-sec Foreau Clos Naudin 1995. Je l’aurais estimé beaucoup plus ancien. C’est un très beau vin.

 

Le quatrième blanc sent la truffe, parce que le plat a de la truffe blanche. Le cinquième est beaucoup plus strict mais forme un accord divin avec le plat de coquilles. Le 4ème est gourmand, le 5ème est plus strict, plus tendu. Le 4ème est Pouilly Fuissé Tête de Cru Mme Ferret 1996. Il est de belle complexité aromatique, avec un goût de pierre à feu influencé par la truffe blanche. Le cinquième est un Vouvray sec Foreau Clos Naudin 1996. Il a beaucoup de profondeur. Il est très pur et très précis. Le vouvray est plus « marin », avec un final superbe.

 

Le nez du 6ème est camphré cependant que pour Emmanuel, le nez du 7ème est celui des cierges d’église et de la cire des bancs d’église. L’ami de Philippe Foreau est celui qui trouve le mieux les vins. Il reconnaît dans le 6ème le Riesling Clos Saint Hune Trimbach 2002. Mais j’avoue que les dégustations à l’aveugle me rendront toujours perplexe, quand l’un des convives affirme urbi et orbi que le 7ème est un riesling alors qu’il s’agit d’un merveilleux Château Grillet 2003, superbe, brillant fumé et très long, un vin qui m’avait fait dire : « ah, ça, c’est grand », car je n’allais pas hasarder un cépage que je ne reconnaissais pas. Le Sainte Hune est puissant et n’a pas beaucoup de longueur. Le Grillet est un pur régal sur le sandre divinement cuit, dont la sauce diable n’est pas l’amie des vins.

 

Pour le râble de lièvre tendre mais pas assez gibier à mon goût, il y a quatre vins alignés, et dès les premiers parfums, on sent que ça tape fort. Le premier a un nez à se damner et je suis le premier à dire domaine de la Romanée Conti. Je ne suis pas peu fier, car jusqu’à présent, j’ai observé un certain mutisme vis-à-vis des blancs. Ce vin a un nez à mourir tant il est profond. La bouche est moins conquérante, plus mesurée mais aux saveurs bien précises, où l’on a du fumé, feu de cheminée, de la truffe, mais aussi la signature de rose et de salin. Très représentatif du domaine avec un esprit très strict, très serré, il a une longueur infinie. C’est une très grande bouteille. C’est La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1971.

 

Le second vin est puissant riche, d’une trame serrée. Je hasarde Palmer 1964, car Palmer est un fonceur sur cette année mais Michel, le donateur de La Tâche et de cette bouteille m’arrête et dit : c’est Pétrus 1971. Emmanuel saute en l’air comme s’il avait gagné le gros lot. C’est son premier Pétrus et il l’adore. Et alors, voici un moment comme je les adore. La bouteille de Pétrus a une étiquette rongée par l’humidité et le millésime est invisible. Le sommelier arrive avec le bouchon et dit : « je suis désolé, ce n’est pas 1971, mais 1969 ». A ce moment, je sursaute, car une telle puissance est incompatible avec l’année 1969. Emmanuel prend le bouchon en mains, me le montre et il est évident que c’est 1959. Nous buvons Pétrus 1959. Le vin est grand et si je me suis trompé de rive, c’est que ce vin n’est pas un exemple significatif de la rive droite. Sa puissance, sa truffe, le mettent hors compétition. Celui que je bois n’est pas le plus puissant des Pétrus 1959 que j’ai récemment bus en bouteille et en magnum. Le parfum du vin est intense et c’est avec le jus de civet que l’accord se trouve le mieux.

 

Notre attention est tellement prise que l’on en oublierait presque un vin très subtil, le Pommard Rugiens Domaine de Montille 1985, d’autant qu’il a un léger problème – mais vraiment à la marge – qui pourrait venir du bouchon. Le quatrième est bizarre, perlant, presque trop vert. C’est un Vosne Romanée aux Brûlées domaine Méo Camuzet 2004, beaucoup trop jeune dans cette série.

 

Le Château d’Arche Pugneau Sauternes 1921 que j’ai apporté, d’une bouteille au niveau impeccable, a une couleur d’un ambre doré très jolie, plus foncée que celle du muscat mais tout aussi dorée. J’aime beaucoup son parfum et ses agrumes, même si le vin est un peu court. Son botrytis est bien présent même si le vin est un peu sec. Bien sûr, comme nous sommes sur les terres de Vouvray, les autochtones sont volontiers critiques avec lui. A côté un sauternes plus jeune qui sent la térébenthine n’a pas la complexité du 1921 mais a de la fraîcheur, c’est Château Suduiraut 1988 qui mériterait de vieillir encore longtemps.

 

Je suis le plus mauvais ambassadeur de ma bouteille ancienne, d’un verre presque noir empêchant de voir la couleur du liquide. Cette bouteille est du même lot de bouteilles disparates de la seconde moitié du 19ème siècle que j’avais achetées, et dont j’avais ouvert un exemplaire lorsque j’étais allé goûter la bouteille de 1690 chez un rennais. C’était un délicieux madère. Là, le vin est effacé, fade, n’a pas de joie de vivre. Je le dis à mes amis d’un soir et c’est celui qui trouve tout qui me contredit. Ce vin est un xérès. Attendant un madère, j’étais loin du compte. Et en le buvant en pensant xérès, le jugement change complètement sur ce – disons – Xérès 1870 #. L’ami si expert dit : « ce vin est excellent détrompez-vous ». Mais, marqué par mon analyse première en forme de contresens, je n’ai pas eu le plaisir que j’aurais pu avoir.

 

Si je devais classer les vins de ce soir, ce serait : 1 – La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1971, 2 – Château Grillet 2003, 3 – Pétrus 1959, 4 – Vouvray demi-sec Foreau Clos Naudin 1995. Le muscat est hors catégorie car non comparable aux autres vins.

 

La cuisine a été sur deux plats à la hauteur de deux étoiles, la soupe Miso et les noix de Saint-Jacques. Le service attentionné et intelligent font ce cette table un site qui « mérite le détour ». La générosité de Michel le collectionneur et de Philippe le vigneron, l’ambiance chaleureuse créée par et autour d’Emmanuel ont fait de cette soirée une soirée mémorable. Je venais dans l’inconnu et j’ai eu en retour beaucoup plus que je ne l’espérais.

 

Le lendemain, venant chez Emmanuel pour prendre les bouteilles que j’avais achetées, il a ajouté le prix de son pari plus deux bouteilles pleines ou presque pleines de vins du 18ème siècle. Décidément la chance sourit à ceux qui la provoquent.

 

 

J’aime cette photo d’une toute petite partie de la collection d’Emmanuel

 

 

la bouteille qui est le point de départ de ce dîner

 

 

les vins du dîner

 

 

 

 

 

 

 

le bouchon du Pétrus