les vins du 126ème dîner jeudi, 26 novembre 2009

Champagne Bollinger Spéciale Cuvée

Champagne Dom Pérignon 1966

Meursault Perrières Comtes Lafon 1992

Château Trottevieille 1943

Château Cheval Blanc 1959 (qui a été ajouté pour fêter les 50 ans d’un convive)

Château Cheval Blanc 1970

Pétrus 1976

Champagne Dom Pérignon rosé magnum 1980

Vega Sicilia Unico, réserve spéciale faite de 1960, 1962, 1972 (qui remplace le Beaune Grèves Vigne de l’Enfant Jésus 1988)

mis en bouteille en 1980, il n’a été fait qu’à 4.500 bouteilles

Grand Enclos du Château de Cérons, Cérons # 1959

Château Lafaurie Peyraguey 1925

Le livre « The Chateauneuf-du-Pape Wine Book » de Harry Karis mercredi, 25 novembre 2009

Le livre « The Chateauneuf-du-Pape Wine Book » de Harry Karis

Lorsque j’ai commencé à parler de vins sur internet, il y a près de dix ans, ce fut sur un forum américain. L’intérêt des forums, c’est lorsque les contacts virtuels sont remplacés par des contacts réels. A New York, j’ai rencontré en 2003 des amateurs de vins à l’occasion de ripailles bachiques et parmi eux, Harry Karis, un docteur en médecine néerlandais, le seul européen avec moi, ce qui, on le comprend, devait créer des liens.

Harry est venu en France avec son fils me visiter dans ma maison du sud où nous avons partagé quelques beaux flacons. Il faisait un crochet lorsqu’il visitait les vins de Chateauneuf-du-Pape. Prenant un pari assez risqué, Harry a suspendu sa carrière de médecin pendant trois ans, pour écrire un livre sur les Chateauneuf-du-Pape, livre extrêmement complet sur l’appellation, qui a eu le privilège d’obtenir une préface rédigée par Robert Parker. Ce livre connaît un succès considérable et le pari semble couronné de succès.

Harry m’annonce par mail la signature de son livre « The Chateauneuf-du-Pape Wine Book » au restaurant Macéo. Et il me fait part du plaisir qu’il aurait à ce que je dîne avec lui après la signature. L’occasion de le revoir me plaît beaucoup aussi ai-je demandé à ma femme de m’accompagner. En arrivant au restaurant, nous constatons que plus d’une vingtaine de vignerons occupent l’étage, là où se tiennent les réunions de l’académie des vins anciens. Et que proposent-ils à boire ? Des Chateauneuf-du-Pape bien sûr. Car par amitié pour Harry, la signature du livre s’est transformée en une belle présentation de remarquables vins de cette région baignée de soleil. Et le dîner où nous pensions être en tête-à-tête avec Harry et son épouse est en fait un grand banquet où les vignerons dispersent au hasard des tables leurs plus beaux vins. Pendant que ma femme fait salon avec l’épouse d’Harry, je monte goûter des 2007, des 2006 et quelques vins plus anciens de beaux domaines comme le domaine du Banneret, le domaine La Barroche, le Château La Nerthe, le domaine du Pégau, le domaine des Pères de l’Eglise, le domaine Pierre Usseglio, le domaine de la Solitude, sachant que je n’ai pas découvert le double de ceux que je cite. Par chance nous sommes placés au dîner à côté ou en face d’Harry et son épouse, ce qui nous a permis de passer une belle agréable soirée ponctuée de vins magnifiques, judicieusement choisis. Harry va faire des tournées en Europe pour promouvoir son livre qui sera même traduit en chinois.

Une nouvelle carrière est née.

Le menu au restaurant Macéo : Fin tartare de champignons sauvages, effeuillé de cabillaud / Canard croisé maison Burgaud en deux cuissons, chou vert étuvé et fruits secs épicés / Pomme et poire crumble craquant, sirop de myrtilles.

déjeuner de conscrits au Yacht Club de France mercredi, 25 novembre 2009

A un rythme que notre grand âge ne ralentit pas, nous tenons notre déjeuner de conscrits, cette fois-ci au restaurant du Yacht Club de France.

Dans une jolie petite salle discrète, nous commentons les caprices du monde et de ceux qui croient le diriger.

Une main qui n’est pas sanctionnée par l’arbitre fait sauter un à un les bouchons du champagne Joseph Perrier, honnête et assez dosé.

Sur la cuisine de ce club, d’une belle inspiration, nous goûtons un joli foie gras suivi d’un fringant turbot sur Château Beychevelle 1998 qui flatte agréablement nos papilles.

Le Chateau Suduiraut 1998 est un bien jeune sauternes pour emporter mon assentiment tant il existe une barrière gustative quasi infranchissable entre ces jeunes boutonneux et les « vrais » sauternes, ceux qui ont les signes ostensibles de la virilité.

Déjeuner au restaurant de l’hôtel Bristol avec Desmond, mon ami chinois mardi, 24 novembre 2009

Déjeuner au restaurant de l’hôtel Bristol avec Desmond, l’homme grâce auquel j’ai réalisé deux dîners en Chine, et son correspondant en France, fils d’un vieil ami. Le menu se compose sans faire appel à la carte : macaronis à la truffe noire, plat emblématique du lieu, suivi d’une poêlée de cèpes sur un lit de persil et ail confit et enfin le lièvre à la royale, qu’il fallait faire découvrir à Desmond.

La carte des vins est riche, mais pour les vins les plus prisés, les prix sont riches aussi. Nous allons donc commencer par un champagne Pierre Gimonnet et Fils Gastronome 2005. C’est un blanc de blancs qui a besoin de s’ouvrir pour perdre l’amertume due au froid. C’est un champagne très agréable premier cru, auquel il manque un peu d’étoffe pour rivaliser avec les plus grands.

J’avais envie d’essayer deux Rayas 2003, en blanc et en rouge. Quand Manuel me présente le Chateauneuf-du-Pape Rayas blanc 2003, le nez me paraît civil, aussi fais-je servir le vin. Et c’est le fils de mon ami et ami lui-même qui m’alerte. Effectivement le vin est perlant, amer, déséquilibré, ce qui ne se sent pas au nez. Manuel constate qu’il a redémarré une fermentation. Il faut vite changer pour un Chateauneuf-du-Pape Vieilles Vignes blanc Château de Beaucastel 2004. Ce vin est fumé, dense, et a des allures de vins vieux du fait de sa concentration. Plaisant, joyeux mais hors norme, ce vin joue avec les cèpes un numéro de pur bonheur.

Le lièvre à la royale, avec foie gras et truffe, comme il se doit, est très intelligent et sensible. Sa sauce est diabolique de séduction. Le Chateauneuf-du-Pape Rayas rouge 2003 est une petite merveille qui rafraîchit le palais quand on le boit après la lourde sauce. Et Manuel a été très astucieux de laisser la bouteille dans de l’eau fraîche, pour que le sentiment de fraîcheur du vin, nécessaire face à la lourdeur de plomb (de chasse) du plat, puisse agir pleinement. Comme nous évoquions l’idée d’un dîner de folie sur la base de très vieux Lafite, le vin qui hypnotise les chinois, Desmond et Charles-Edouard me réclamaient gentiment un Lafite sur le plat, mais c’eût été une erreur. La sauce aurait raidi le Lafite alors que le Rayas joue parfaitement son rôle de compensation et de mise en valeur de l’aspect gibier de la viande et conquérant de la sauce.

Mes deux jeunes hôtes ont eu le courage de prendre un somptueux dessert au chocolat à la géométrie dalinienne, tandis que sous couvert de sagesse, je succombais aux mignardises, tentatrices cruautés pour la ligne. De nouveaux plans s’échafaudent. Le délicieux restaurant du Bristol en fut la cigogne et le chou.

déjeuner au Bristol – photos mardi, 24 novembre 2009

Le déjeuner n’est ouvert qu’à 12h30. Avant cette heure, briefing du personnel. Quelle attention ! On dirait une messe.

champagne Pierre Gimonnet et Fils Gastronome 2005

Chateauneuf-du-Pape Rayas blanc 2003

Chateauneuf-du-Pape Vieilles Vignes blanc Château de Beaucastel 2004

Chateauneuf-du-Pape Rayas rouge 2003

amuse-bouche

nouvel amuse-bouche

macaroni aux truffes

assiette de cèpes

lièvre à la royale

un pré-dessert

dessert au chocolat sculptural (sans moi)

la goûteuse cuiller à l’infusion de thé (ou quelque chose de ce genre)

Déjeuner de famille au restaurant Taillevent lundi, 23 novembre 2009

Déjeuner de famille au restaurant Taillevent. Comme souvent, on me demande de choisir le vin. Sur de délicates gougères, nous buvons un Champagne V.O. version originale Jacques Selosse. Etant habitué à boire le « Substance » de la même maison, je voulais rafraîchir mon souvenir de ce champagne. Très typé, ce champagne non dosé est viril et sans concession. Très pur, il a le charme des champagnes insolites que l’on est heureux d’essayer.

Jean-Marie Ancher nous suggère deux demi-entrées, une langoustine et de l’épeautre aux cèpes. Le Riesling Clos Sainte-Hune Trimbach 2001 a besoin de deux à trois minutes pour exprimer sa personnalité. On ne peut qu’être admiratif de la précision de ce beau riesling. C’est l’épeautre qui réagit divinement bien avec le vin lui donnant une ampleur remarquable. Je suis amoureux de ce riesling ciselé.

Ma sœur a pris un gibier à plumes, avec mon frère nous avons choisi le lièvre à la royale, exécuté de façon très classique et très goûteuse, le foie gras équilibrant harmonieusement la saveur appuyée du gibier. Sur ce plat, l’ Hermitage Jean-Louis Chave 1998 est une merveille. Totalement sur le fruit, il est joyeux et animé par les saveurs extrêmes du lièvre. L’accord est d’un naturel confondant. Le nez riche et joyeux et les saveurs de fruits rouges et noirs sont un régal. Ce vin n’aurait pas besoin de vieillir, tant il est beau comme cela.

La salle était pleine, ce qui fait plaisir. Comme d’habitude, dans un élégant décor lambrissé, nous avons passé un agréable déjeuner sur une cuisine appréciée.

au Castel de Très Girard un Bourbon inoubliable jeudi, 19 novembre 2009

Après la fabuleuse dégustation verticale de 56 millésimes de Clos de Tart de 2005 à 1887, nous nous rendons au Castel de Très Girard pour dîner. Patrice Noyelle administrateur de Clos de Tart mais aussi président du champagne Pol Roger nous a apporté un jéroboam de champagne Pol Roger 1979. Je suis content quand Patrice Noyelle lui-même reconnaît que le champagne est un peu dosé, car ce goût doucereux n’est plus le goût actuel. Ce qui me frappe c’est que ce champagne de trente ans déjà est d’une incroyable jeunesse, comme s’il avait dix ans. Sur des huîtres, du saumon, du foie gras, des gougères et mille autres copieux canapés, le champagne répond merveilleusement.

Nous sommes placés à deux tables de huit. Le menu composé par le chef Frank Schmitt est : filet de bar poêlé, croquant de choux-fleurs violet et crème de chèvre / pintade « les bons amis » rôtie aux herbes, le suprême et gratin de poireaux, sauce blanquette, la cuisse, girolles et jus de viande à la noisette / fromages de Gaugry à Brochon : Cîteaux, comté et roquefort / tarte fine aux pommes, éclats de noix et glace caramel au beurre salé.

Le premier vin est du groupe Mommessin, un Pouilly-Fuissé domaine Bellemand, Laurent & Fils dont je n’ai pas noté l’année. Il est convenable, mais j’évite d’en boire après la dégustation marathon. On me demande d’ouvrir trois Clos de Tart que le groupe américain avait apportés en supplément.

Le Clos de Tart 1982 est mort et ne sera pas bu. C’est le cas aussi du Clos de Tart 1937, mort également. En revanche le Clos de Tart 1921 de mise Van der Meullen est très agréable à boire, mais je doute fort, du fait de sa couleur trop riche qu’il soit totalement de Clos de Tart. A cette heure tardive, seul le plaisir compte et le vin est fort bon. Comme le 1921 est vite asséché, nous continuons avec Clos de Tart 2003 qui est absolument succulent, plus riche et complexe encore qu’au cours de la dégustation. Il se boit avec bonheur.

Ayant été invité à un événement où les vins sont apportés par des collectionneurs, j’ai tenu à contribuer aussi aux plaisirs du jour. J’ouvre un Château d’Yquem 1927 que j’ai apporté. Le nez de ce vin est prodigieusement délicat. Il évoque les agrumes discrets avec un peu de thé. Sur cette période, de nombreuses années au botrytis assez faible ont produit des Yquem au sucre très discret. Il me faut donc l’expliquer aux deux tables pour éviter une erreur de compréhension d’un Yquem très subtil mais peu riche et flamboyant. Lorsque l’on a admis qu’il ait mangé son sucre, phénomène fréquent, on profite d’un Yquem ravissant. C’est un Yquem que je n’avais jamais bu, car il est d’une année très rare. Je suis content d’avoir goûté ce vin dans la lignée des 1932, 1933 et 1936, signe sans doute de vendanges de grains peu attaqués par la pourriture noble.

Ayant cherché un autre cadeau pour ces amateurs américains, j’ai choisi dans ma cave un Bourbon qui fait partie des alcools que j’ai achetés de la cave parisienne du duc de Windsor. La seule indication sur la bouteille est : « imported from the United States of America ». C’est ce qui me paraissait le plus approprié pour remercier les américains de leur générosité. J’ai dû batailler avec le bouchon tout petit, tout court, friable, qui voulait tomber dans le liquide chaque fois que j’y touchais. Au bout de plusieurs minutes, il est enlevé et je sers une belle rasade à chacun puis je porte un toast à leur générosité.

Ce Bourbon du 19ème siècle est une pure splendeur. Il est incommensurable et me rappelle le Bourbon 1900 qu’un américain m’avait fait goûter ainsi qu’à mes amis, lors du 78ème dîner à l’Astrance. Celui-ci est encore plus riche, plus goûteux, plus sensuel. Je suis au bord de l’extase gustative. Le Bourbon n’est pas vraiment goûté car chacun ne songe qu’à rejoindre son hôtel et son lit, et je vois tout le monde partir. Sylvain Pitiot est le seul à me tenir compagnie, car j’ai envie de profiter de l’une des plus sensationnelles formes d’alcool que je n’aie jamais rencontrée. Sylvain retourne chez lui et pendant quelques minutes, seul et rêveur, je cherche à capter la douceur de cet élixir qui me dévoile un coin de paradis. La mémoire de ce goût m’accompagnera toute ma vie.