198ème dîner au restaurant du 67 Pall Mall Club mardi, 12 avril 2016

Le 198ème dîner se tient au 67 Pall Mall Club, qui est un club d’amateurs de vins de Londres. Le fondateur, Grant Ashton, et ses actionnaires, ont acquis un immeuble où ils permettent aux membres de venir boire des vins au verre (500 au programme), les commander en bouteille ou apporter leurs propres vins. Des événements sont fréquents et par exemple ce soir pendant que nous tiendrons le dîner de dix personnes dans un agréable salon, Richard Geoffroy, l’homme de Dom Pérignon, animera un dîner sur le thème des Dom Pérignon P2 (deuxième plénitude) qui regroupe une trentaine de membres du club. Je lui rendrai visite dans la très grande salle affectée à son dîner et Richard viendra nous rendre visite et apportera un vin qui se rajoutera à notre programme.

A 16 heures je viens ouvrir les vins, observé par Terry, le chef sommelier du lieu, qui va faire un travail absolument remarquable. Le nez du Cheval Blanc 1961 est étonnamment discret et le nez de l’Arche 1914 est à se damner tant il est invraisemblablement envoûtant. Je croyais que la bouteille avait été reconditionnée car le niveau est dans le goulot mais force est de constater que le bouchon est d’origine. Aucun vin ne m’inquiétant, j’attends les convives qui me sont presque tous inconnus dans la belle salle de bar et restaurant du Club, avec Tom, le journaliste par qui le contact s’est créé avec le club.

J’ai rarement eu à mes dîners une assemblée aussi cosmopolite puisque nous compterons un norvégien, un finlandais, un sud-africain, un irlandais, trois anglais, une femme aux origines chinoise et australienne, un français et moi. Tous sont membres du club sauf le français, son invité anglais et moi. Ne connaissant personne sauf mon ami français fidèle des dîners et Tom, je me suis présenté et ai exposé la philosophie de mes dîners. Après ces explications, nous passons à table.

La table rectangulaire avec quatre personnes sur chaque longueur et une personne à chaque bout rend difficiles les discussions communes et naturellement trois ou quatre petits groupes de discussion se forment.

Le menu composé par le chef Marcus Verberne est : Crumbed monkfish medallions with mayonnaise / Smoked Inverawe sea trout on blini & salmon caviar / Pan-fried hand-dived Isle of Mull scallops with pommes mousseline and garlic butter / Lobster Thermidor vol au vent / Pan-fried lamb’s sweetbreads with morels / Roasted squab pigeon with buttered spring greens / Fresh mango / Orange Madeleines.

La séance de travail que nous avions eue hier avec Marcus a eu des effets bénéfiques et la cuisine du chef s’est montrée inspirée et adaptée aux vins anciens.

Je venais d’expliquer que dans mes dîners un vin ne se conçoit qu’avec le plats qui lui est affecté et le premier champagne en donne une démonstration spectaculaire. J’avais expliqué que le vin n’est servi que lorsque le plat est servi, mais comme il faisait soif le Champagne Krug Vintage 1979 a été servi alors que nous n’avions rien mangé. Le champagne se présente plus âgé qu’il ne devrait l’être, un peu serré et strict. Les croquettes de lotte arrivent et le champagne revit, fringant, tonique, vif et racé comme le 1979 doit l’être. Cette transformation spectaculaire a frappé tous les convives.

Nous avons ensuite deux champagnes servis ensemble. Le Champagne Dom Pérignon 1959 est tout en suggestion, élégant et romantique mais capable de montrer une certaine puissance. Mais le Champagne Pol Roger 1947 est un monstre de vivacité et d’énergie. Il claque comme un champagne jeune de façon éblouissante. Je fais remarquer à mes convives qu’avoir en même temps deux champagnes aussi mythiques et qui se montrent sous leurs meilleurs jours est un privilège rare. Pour certains c’est une découverte absolue et mon voisin de table, sud-africain, qui n’avait jamais bu de champagne de plus de vingt ans est ébloui car il découvre un univers qui lui était étranger.

J’ai longuement parlé de ma méthode d’ouverture des vins qui profite aussi aux vins jeunes même si elle est conçue pour les vins anciens et le vin qui suit va en donner une démonstration éclatante. Car le Montrachet Bouchard Père & Fils 2000, s’il avait été décanté au lieu d’être ouvert avec aération lente, n’aurait jamais donné cette sérénité, cet accomplissement subtil et brillant. Ce montrachet est en effet dans un état de grâce impressionnant. C’est la force tranquille. Ce vin est d’une plénitude rassurante axant son message sur le plaisir, l’acidité citronnée étant joyeuse.

Les deux bordeaux arrivent ensemble. Le Château Pichon Longueville Comtesse de Lalande 1945 a l’équilibre et la solidité d’un vin de 1945. Il est particulièrement expressif et convaincant. Ce n’est pas le cas du Château Cheval Blanc 1961. A l’ouverture, c’est le seul vin qui me posait un problème tant son parfum était discret, voire presque éteint. En bouche, le vin manque de force. Alors, comme j’avais constaté que la capsule est une capsule d’embouteilleur et comme le bouchon est sans inscription, il est assez facile de se demander si le vin est bien le Cheval Blanc d’origine. Je n’informe personne de mon doute et je fais bien car je me fais servir la lie de la bouteille et j’ai alors avec une évidence frappante la vraie valeur d’un Cheval Blanc 1961. C’est tellement saisissant que je prête mon verre à la charmante convive chinoise et australienne qui a toujours écarté les lies quand elle boit du vin. Elle n’arrive pas à croire que le vin puisse à ce point se transcender. Si cette lie me rassure sur le vin, force est de constater que ce Cheval Blanc n’a pas correspondu à mes attentes.

Nous avions discuté autour de la table sur l’ordre de service des vins, celui que j’adopte, bordeaux avant bourgogne n’étant pas partagé par tous, et l’Echézeaux Henri Jayer 1984 va mettre tout le monde d’accord sur la nécessité de procéder dans cet ordre parce que ce vin est éblouissant de charme et de subtilité. C’est un grand vin d’Henri Jayer, l’un des tout meilleurs de ceux que j’ai bus faits par ce magicien. Le vin est incroyablement bourguignon, avec des subtilités, des amers qui jouent avec le palais. Il est incroyablement séducteur mais dans l’énigme, car il brouille les pistes. C’est un vin que j’adore au plus haut point.

Lorsque Terry, le sommelier qui fera un travail de haut niveau tout au long du repas, me sert les premières gouttes de l’Echézeaux Joseph Drouhin 1947, je lui dis : ce vin sent le fromage. C’est tellement curieux que je sens le verre de mon voisin pour vérifier si ce n’est pas le verre qui est en cause. Mais non, c’est le vin qui a cette odeur. La matière du vin est riche mais le parfum prononcé limite le plaisir et j’y suis sensible. Un convive a dû ne pas être influencé par l’odeur puisqu’il mettra ce vin premier de son vote.

Richard Geoffroy nous ayant rejoint et une charmante sommelière versant à chacun un verre de Champagne Dom Pérignon P2 rosé 1995, nous pouvons remarquer qu’à ce stade du repas, la présence de ce champagne sensuel mais conquérant est possible. Disons que c’est une pause dans un récit. Alors que jusqu’à présent tous les plats ont convenu aux vins, le ris de veau ne brille pas à cause d’une sauce un peu trop marquée. Il est opportun de boire le sublime Echézeaux de Jayer en ayant calmé son palais.

Avec le Vega Sicilia Unico 1970 nous sommes sur un terrain que tous les convives connaissent car ce vin est incroyablement jeune. Il a 45 ans et on lui en donnerait moins de dix. Il est éblouissant avec de jolies notes de café et un finale mentholé parfait. C’est un vin de bonheur franc et délicieux.

Les deux sauternes sont servis ensemble et j’ai bien du mal à me concentrer sur le Château d’Yquem 1985 car je suis saisi par le parfum du Château d’Arche Crème de Tête 1914. A l’ouverture il était incroyable avec un bouquet de fleurs des champs comme en aurait une Chartreuse. Cette impression est encore vivace maintenant mais le parfum me tétanise. Je raconte à mes convives qu’au 4ème de mes dîners nous étions restés figés devant le parfum d’un Suduiraut 1928 qui nous interdisait de boire tant les arômes, tels des crotales, nous tétanisaient. L’émotion est la même avec ce vin aux mille parfums incroyables de séduction avec dans l’image que je forme des petits grains de sucre trempés dans des fruits rouges que l’on jetterait en l’air comme on jette les grains de riz sur des mariés. Ce vin est fascinant d’une séduction exceptionnelle et le goût est celui d’un sauternes allant vers les fruits exotiques joliment distribués.

Revenant vers l’Yquem, je suis étonné qu’il soit aussi charmant, plein, joyeux et gras en bouche. L’ancien n’a pas tué le plus jeune par sa perfection. Il le met même en valeur. Les mangues en tranches pures marchent bien avec l’Yquem et j’ai eu une idée gagnante en demandant à Marcus de faire des madeleines à l’orange confite. L’accord avec le Château d’Arche est à se damner. Quel parcours avec ce 1914 étonnamment sensuel !

Il faut maintenant que les dix participants votent. Sept vins figurent dans les classements ce qui est un bon résultat. Meilleur encore est que cinq vins ont au moins un vote de premier : le Château d’Arche quatre fois premiers, le Pol Roger et le vin d’Henri Jayer deux fois premiers et le Montrachet ainsi que l’Echézeaux Drouhin une fois premier.

Le classement du consensus serait : 1 – Château d’Arche Crème de Tête 1914, 2 – Champagne Pol Roger 1947, 3 – Echézeaux Henri Jayer 1984, 4 – Vega Sicilia Unico 1970, 5 – Château Pichon Longueville Comtesse de Lalande 1945.

Mon classement est : 1 – Château d’Arche Crème de Tête 1914, 2 – Echézeaux Henri Jayer 1984, 3 – Champagne Pol Roger 1947, 4 – Vega Sicilia Unico 1970.

Que dire de ce dîner ? J’ai découvert hier ce club que je ne connaissais pas. J’ai rencontré le chef hier pour la première fois et c’est en déjeunant que j’ai étudié sa cuisine. Je ne connaissais quasiment personne parmi les convives et le staff du lieu. Ce saut dans l’inconnu est une réussite. Grant m’a dit : « vous êtes ici chez vous », les convives ont dit : « à quand le prochain ? ».

Terry a fait un service du vin de haute volée, Marcus a su adapter sa cuisine aux exigences des vins anciens. Ce 198ème dîner fut une grande réussite.

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le bar du club

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j’explique à Terry « the Audouze Method »

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Champagne Krug Vintage 1979

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Champagne Dom Pérignon 1959

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le bouchon a une capsule de Moët

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Champagne Pol Roger 1947

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légendaire capsule

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les deux bouchons ont été brisés lorsque Terry a voulu ouvrir les bouteilles

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Montrachet Bouchard Père & Fils 2000

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Château Pichon Longueville Comtesse de Lalande 1945

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Château Cheval Blanc 1961

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Echézeaux Henri Jayer 1984

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Echézeaux Joseph Drouhin 1947

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cadeau de Richard Geoffroy inséré dans le repas : Dom Pérignon rosé Vintage 1995

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Vega Sicilia Unico 1970

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Château d’Yquem 1985

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Château d’Arche Crème de Tête 1914

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les bouchons

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J’ai pris peu de photos des plats mais j’ai la mémoire visuelle des merveilleuses madeleines

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les votes relevés manuellement puis calcul du vote du consensus

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les verres en fin de repas

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le menu

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Quelqu’un a pris une photo de Richard Geoffroy et moi. Voici dans son montage

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Dîner au restaurant Medlar dans le quartier de Chelsea mardi, 12 avril 2016

A 18 heures, la veille du 198ème dîner, je me présente au restaurant Medlar dans le quartier de Chelsea dirigé par Christopher Delalonde, chef sommelier qui parle un français impeccable. Mon ami Tim, fidèle de l’académie des vins anciens est venu à 16 heures pour ouvrir la majorité des vins du dîner. J’ouvre mes deux apports, un Hermitage M. de la Sizeranne M. Chapoutier 1949 au niveau parfait et au parfum sensuellement prometteur et un Quinta do Noval Vintage Port 1975 que j’ai choisi parce que nous sommes en Grande-Bretagne, pays d’amateurs de portos.

Nous serons six, Tim, l’organisateur de ce dîner, un couple de britanniques qui sont déjà venus à l’académie des vins anciens, un autre anglais qui avait participé au dîner que j’avais fait à Londres il y a un an et Maureen Downey une américaine vivant à Los Angeles, spécialiste mondiale de la détection des faux dans le domaine du vin et gestionnaire de caves particulières. Comme souvent la débauche marquera la soirée.

Le menu est : cured Scottish salmon with an oyster beignet, green apple, keta and oyster leaf / roasted quail with green asparagus, jersey royals, eryngii and bois boudran / rump of lamb with Peruvian Oca, pied bleu, with garlic and roasted baby gem / selected cheeses.

J’ai été très impressionné par la qualité de cette cuisine cohérente et goûteuse qui montre qu’elle est le fait d’un amoureux des vins.

Le Champagne Drappier Pinot noir zéro dosage brut nature est très agréable, précis, direct et franc. Ce n’est pas un champagne de joie mais un champagne d’affirmation.

Le Meursault Hospices de Beaune Cuvée Jehan Humblot élevé par maison Albert Bichot 1995 a un parfum incroyablement puissant. Il est riche, plein et joyeux. Quel dommage qu’il ait été placé avant le Château Haut-Brion blanc 1989 car il fait de l’ombre au beau vin bordelais tout en subtilité. Christopher Delalonde ne démordra pas du fait qu’il est bouchonné mais aucun autour de la table ne l’a remarqué. Ce vin est grand, subtil, mais effacé par le Meursault.

Le Château La Mission Haut-Brion 1981 est d’une belle sérénité. C’est un vin confortable et profond. Ce qui m’étonne au plus haut point, c’est qu’il puisse cohabiter aussi bien avec les deux autres bordeaux magnifiques.

Le Château Palmer 1921 a un joli nez de fruits rouges. En bouche il est d’une séduction de fruits rouges poussée à l’extrême. Tout en lui est charme. Sa couleur sang de pigeon est incroyablement jeune. Ce vin magnifique va tenir toute la soirée à un niveau exceptionnel.

Le Château Branaire (Duluc-Ducru) 1945 est carré, solide, un vrai guerrier. Il a la sérénité puissante des vins de 1945. Il est manifestement grand et pourrait être le gagnant de ce dîner si le 1921 n’avait cette grâce ultime.

Le Bonnes-Mares Domaine Comte Georges de Vogüé 1997 est un vin de bonne race qui ne trouvera pas vraiment sa place dans ce repas du fait du timing, les deux vins du Rhône ne lui laissant pas réciter son texte comme il eût fallu. C’est un beau vin de belle définition mais n’attirant pas assez notre attention.

L’Hermitage La Chapelle Paul Jaboulet Aîné 1983 est une belle surprise car il a beaucoup plus l’énergie et de persuasion que ce que j’attendais. C’est vin riche convainquant.

L’Hermitage M. de la Sizeranne M. Chapoutier 1949 avait à l’ouverture un parfum riche et gourmand. Son nez maintenant est seigneurial. Ce vin combine force et douceur. Il est suave et tellement facile à vivre que l’on est au septième ciel. C’est un grand parmi les hermitages. Il n’est pas, pour moi, au niveau de l’Hermitage la Chapelle 1949 qui est un monstre sacré, mais il est passionnant et sensuel. C’est un grand vin de haute stature.

Le Quinta do Noval Vintage Port 1975 est tout en charme. Sa couleur est assez claire, avec des petites notes de rose un peu comme le Château Chalon 1934 bu ce midi. En bouche il est doucereux et plein de charme avec des accents de portos beaucoup plus vieux que 1975. C’est un grand porto, séducteur qui fait oublier qu’il a 20,5°.

Le Champagne Perrier-Jouët Belle Epoque 2004 a pour vocation de nous rafraîchir après ces « épreuves ». Fort curieusement, alors que j’ai encore en bouche la mémoire du porto, je trouve ce champagne trop dosé à mon goût alors qu’il aurait dû me donner l’impression inverse.

Nous avons tous voté pour nos trois préférés. Les ordres sont différents mais il y a des constances. Mon vote est : 1 – Château Palmer 1921, 2 – Hermitage M. de la Sizeranne M. Chapoutier 1949, 3 – Château Branaire (Duluc-Ducru) 1945. Si je devais rajouter un quatrième, ce serait 4 – Quinta do Noval Vintage Port 1975.

Dans une ambiance enjouée, avec un repas de haut niveau et un service du vin de grande compétence, nous avons passé un dîner mémorable autour de grands vins.

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Déjeuner au 67 Pall Mall Club de Londres mardi, 12 avril 2016

Il y a tout juste un an j’avais organisé le 187ème de mes dîners à Londres. Un journaliste du Financial Times présent avait fait un article élogieux dans le supplément de son journal : « How to Spend It ». Il m’a suggéré de faire un nouveau dîner dans un club d’amateurs de vins, le « 67 Pall Mall Club ». Il a créé le lien entre le club et moi et après des péripéties parfois rocambolesques le dîner s’est mis en place.

Le fondateur du club ayant annoncé ce dîner à ses membres, l’un d’entre eux, avec qui je corresponds par mails me demande si nous pourrions déjeuner ensemble pendant mon séjour. J’ai prévu de déjeuner au club la veille du 198ème dîner qui sera tenu en ces lieux, afin de vérifier si la cuisine du chef Marcus Verberne est compatible avec les besoins des vins anciens. Il est donc possible d’accéder à sa demande. Il m’annonce qu’il apportera plusieurs vins anciens et je freine son ardeur car ce soir j’ai un dîner avec de nombreux vins, la veille du dîner dans ce club.

Sortant de l’Eurostar je me rends directement au 67 Pall Mall Club où je suis accueilli avec une amabilité rare et de larges sourires de bienvenue. Les bouteilles du dîner vont être déposées en cave et j’explique déjà aux sommeliers les consignes de conservation et de service de mes vins. Je demande au chef de nous faire le menu de son choix qui donnerait une bonne idée sur sa façon de traiter les plats. Nous serons trois car Jordi, la personne qui voulait déjeuner avec moi, est accompagné d’un caviste londonien.

Mes jugements sur la cuisine ne seront pas sur la valeur du talent du chef mais sur l’adéquation aux vins anciens. Les croquettes de lotte sont parfaites pour un apéritif. Les couteaux au chorizo sont à éviter car le chorizo est dominant, propre à étouffer les vins, le homard Thermidor est parfait, le ris de veau aux morilles n’a pas besoin de petits pois. Le porc est goûteux. Lors de l’examen que nous avons fait après le repas, nous avons vu que ce repas préalable était nécessaire pour affiner les présentations, mais que les ajustements seraient faciles à faire. L’envie de coopérer du chef est évidente. Le climat est idéal.

Mon correspondant inconnu autrement que par mails a apporté un Bâtard-Montrachet Etienne Maroslavac Propriétaire 1969 embouteillé par Alexis Lichine. La couleur du vin est extrêmement jeune d’un blé très blond. Le vin a une belle acidité citronnée, signe de jeunesse. Il a un joli gras. Il y a un peu de cire d’abeille mais qui n’est pas gênante. Le vin est très plaisant.

Le Ruchottes-Chambertin Thomas Bassot 1947 est bouchonné. On sent en bouche une belle matière mais le bouchon est là et le vin s’évanouit progressivement.

Jordi, mon correspondant, se demande s’il ouvre son vin de réserve et à la réflexion c’est ce qui est décidé. Mais le Château Palmer 1937 a un nez désagréable et vinaigré. La cause est entendue, c’est un mauvais jour pour ce nouvel ami. L’odeur du vin s’améliorera une heure plus tard mais le goût restera sans espoir.

Pour compenser, Thomas l’ami de Jordi commande au verre un Sassicaia 1996 au nez très riche de fruits noirs. En bouche les fruits noirs offrent un agréable velours. C’est un très beau vin. Le petit goût à peine métallique vient-il du système Coravin, ce serait à vérifier.

J’ai apporté une bouteille d’une beauté qui m’émeut. C’est un Château Chalon de domaine inconnu 1934 en demi-bouteille. L’étiquette ne porte que « Château Chalon » sans autre texte, ce qui laisse penser qu’il s’agit d’une étiquette de caviste et un médaillon de verre gravé sur la bouteille indique aussi Château Chalon. La bouteille est belle et le vin est d’une rare jeunesse. Le nez est d’une puissance extrême, intense, riche, suggérant un fort vin jaune. La bouche est plus douce et suave que le nez. C’est une merveille, d’une persistance aromatique infinie et j’invite le fondateur du club, Grant Ashton, à venir trinquer avec nous. Il se montre fort aimable, entreprenant. Il expose dans son club cinq cent vins que l’on peut goûter au verre, en utilisant la technique du Coravin qui remplace l’air par un gaz inerte qui préserve les vins de bouteilles entamées. Ce chiffre est incroyable.

Grant va chercher une bouteille. Je vois qu’il s’agit d’un Château Cheval-Blanc 1947 bouché d’une cape en plastique. Alors que Grant voulait nous la montrer pour que nous jugions si l’étiquette paraît authentique, je croyais qu’il nous proposait de la goûter. Je le remercie donc et il réagit en prince en versant un verre.

L’étiquette examinée par Jordi a toutes les chances d’être authentique, car le papier de l’étiquette, l’impression et le grain de l’impression sont rassurants. En bouche, le vin donne tous les signes d’être de son époque. Je ne sens pas vraiment le goût de Porto si caractéristique de ce vin, mais malgré un certain manque d’énergie, tout m’indique qu’il doit s’agir d’un vrai Cheval Blanc 1947. Les derniers que j’ai bus avaient des signes de faiblesse. Celui-ci semble être dans la continuité.

Le Club 67 Pall Mall est installé dans un bel immeuble. Le salon salle à manger est au rez-de-chaussée de l’immeuble avec des décorations de bois clair mais l’œil est attiré par les innombrables vitrines où reposent des vins prestigieux des plus belles appellations. Grant, sans doute avec quelques complices, a investi des sommes énormes pour proposer à des amateurs un lieu cosy où l’on peut apporter ses vins, les boire sans manger ou en mangeant. Il se dégage de ce lieu une atmosphère conviviale du meilleur effet.

Je quitte Jordi et Thomas et vais m’installer à l’hôtel Dukes d’un confort anglais. Je devais aller à 16 heures épauler mon ami américain Tim, fidèle de l’académie, pour ouvrir les vins du dîner, mais la fatigue du voyage et du long repas m’obligent à faire un embryon de sieste. C’est à 18 heures que je rejoins le restaurant où se tiendra ce soir un repas d’amis de folie.

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some indications about 200 dinners dimanche, 10 avril 2016

On April 12 the 198th dinner will be made. As the programs of the 200 dinners are all made it is interesting to see what these dinners represent :

2213 wines have been put in the 200 dinners which makes 11,1 wines per dinner.

136 different vintages have been represented and the average age of the wines when they have been drunk is 48,5 years. (the age is the difference between the millesime of the wine and the year when it was drunk).

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The liquorous are the most aged wines of the dinners, with an average of 67,4 years.

The domains which have been the most presented are :

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I am happy that Domaine de la Romanée Conti is the most represented in my dinners, with Yquem as nearly equivalent.

What is interesting is that for every wine, I presented old wines, taking the risk to choose old wines. Lafite and Filhot have an average age exceeding 70 years and even for wines like Moët & Chandon, the average age is of 54,9 years. This means that I wanted that the participants of my dinners enter deeply in the world of old wines.

Considering the average age of the wines of each dinner, the dinner with the highest average age will be the 200th with an age of 98,5 years with 4 wines of the 19th century.

The second one is the 160th dinner with an age of 95,1 years with 5 wines of 1900 and 3 wines of the 19th century.

Normally in every dinner, people vote for their preferred wines. I have voted in all the dinners. And people voted for 159 dinners, as sometimes it was difficult to organize votes.

The wines in my votes named 1st have an age of 68,7 years and the ones which had no vote from are 43,3 years old. It could mean two things. Either I have a special love for old wines, or I chose preferably the greatest wines among the oldest wines. It could be a combination of the two reasons.

For the 159 dinners with votes of everyone, the wine which was voted 1st by the consensus was for 76 dinners also my number one, in 31 dinners my second one, in 29 my third one, 6 times my number four and 17 times with no vote from me.

I am always surprised by the diversity of the votes, which shows that the approach towards old wines is very personal.

trois repas de famille samedi, 9 avril 2016

Mon fils vient d’arriver à Paris. Pour son premier dîner, un bocal de foie gras truffé et du fromage, pour un repas spécifiquement français. Le Champagne Comtes de Champagne Taittinger 1994 est une très heureuse surprise. La bulle est intense et le vin offre un fruit jaune opulent. Je ne l’imaginais pas aussi riche. Il est solide, aimable mais aussi convaincant. C’est un bon champagne de repas, à la belle persistance sur des notes de fruits ensoleillée. Je n’imaginais pas cela d’un 1994.

Le lendemain j’ouvre un Champagne Mumm Cuvée René Lalou 1979. Mon fils et moi connaissons ce vin par cœur, mais nous sommes impressionnés par le caractère floral prononcé et par les fruits roses de ce vin. Il est plein, riche, mais c’est surtout sa grâce fruitée puis nous convainc. On est dans un registre plus ample et plus profond que celui du Comtes de Champagne. La délicieuse soupe aux petits pois et pointes d’asperges se prend sans le champagne qui se rattrape sur le foie gras truffé et sur les fromages. Je ne prends que du camembert dont le salé fait vibrer les champagne dans un accord de bon aloi.

J’ouvre ensuite un Champagne Krug 1988. On change totalement de registre. Ce Krug est beaucoup plus vif, cinglant, vif comme un coup de fouet. Mais ce qu’il a en énergie il l’a moins en charme. C’est donc un champagne rigoureux, très grand et racé, au sel très marqué. Il en restera pour demain au déjeuner dominical et familial.

Le lendemain, dimanche, le soleil donne enfin l’impression que le printemps s’installe. Avant que ma fille cadette n’arrive, j’ouvre un Vosne-Romanée Marey & Liger-Belair 1947. La bouteille est belle, le niveau très acceptable pour un vin de 69 ans. Le bouchon qui avait légèrement baissé dans le goulot est remonté avec mille précautions pour qu’il ne glisse pas vers le bas et ne se brise en de nombreux morceaux car une surépaisseur en haut de l’intérieur du goulot l’empêche de sortir entier.

A l’apéritif nous buvons la bouteille de Krug 1988 ouverte hier. Dès la première gorgée nous voyons à quel point ce vin est glorieux et guerrier. C’est un samouraï. C’est l’opposé du Mumm qui jouait sur son charme fruité. Le Krug, c’est un étendard de grandeur. Les chiffonnades de Pata Negra se dégustent avec bonheur sur ce champagne.

Ma femme a préparé un poulet tout simple et particulièrement goûteux. Le nez du Vosne-Romanée Marey & Liger-Belair 1947 est un parfum onctueux, velouté et séducteur. En bouche c’est un vin de velours. Ma fille est totalement sous le charme de ce vin et ne cesse de s’extasier. Elle voit même des évocations de rose. Ce qui me plait beaucoup, c’est que mes enfants sont enthousiastes. Je vois bien une petite imprécision qui ne gêne pas le plaisir et je n’en fais pas état tant je suis heureux que mes enfants vibrent aussi fort sur ce beau vin ancien. Ce qui est marquant, c’est son velours et sa douceur. En lui, tout est suggéré et même les roses, si je les trouve fugaces, complètent le tableau en pastel.

Sur la mousse au chocolat agrémentée d’arlettes, un fond de Madère Manuel Misa très ancien probablement des années 30 se marie bien ainsi qu’un Marc de Bourgogne Charvet 1913 que j’avais ouverte pour mon anniversaire en 2013 pour goûter un alcool de cent ans. Depuis trois ans il n’a pas pris un seul signe d’âge ou d’évaporation, marc superbe et expressif.

En ce premier dimanche à la nature fait exploser les promesses de bourgeons, de feuilles et de fleurs, ce fut un beau repas familial, marqué par un délicieux Vosne-Romanée.

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déjeuner au restaurant Le Petit Verdot vendredi, 8 avril 2016

Je vais déjeuner au restaurant Le Petit Verdot. Hidé, toujours aussi accueillant, que j’avais rencontré à la présentation des vins de Bourgogne, m’avait incité à venir avec un vin. J’ai envie de vérifier dans quel sens évolue le Château Mouton-Rothschild 1990. Ce vin a été très critiqué car il ne représenterait pas ce que Mouton devrait donner pour cette année. Qu’en est-il aujourd’hui qu’il a vingt-cinq ans ? La bouteille a un niveau dans le goulot, le bouchon est de superbe qualité. Le nez est puissant, vineux, parfum d’un vin très jeune. Quel menu composer à partir de ce qui est proposé sur l’ardoise du restaurant ? Après discussion avec Hidé, nous décidons que l’entrée sera des asperges vertes et blanches accompagnées de magrets de canard froids en tranche, puis un bar juste cuit sur sa peau sans accompagnement, puis une pièce de bœuf dont la sauce au vin serait servie à part.

Mon invitée qui est journaliste au Japon connaît la controverse sur ce millésime de Mouton. En bouche le vin est étonnamment jeune, ses tannins très marqués étant ceux d’un vin de cinq ans. Le vin est équilibré et son finale est joliment marqué. Ce qui est intéressant, c’est que l’on peut soit critiquer ce vin, soit vanter ses qualités. C’est à l’humeur de chacun.

Si l’on pense en effet aux Mouton des années 1982 ou 1986, on est loin d’un Mouton glorieux. Mais si l’on goûte le vin en oubliant que c’est Mouton on a un vin de belle grâce de beau velours mais aussi de forte affirmation. Il se boit bien, généreux et goûteux, avec un finale inspiré. Ce qui lui manque c’est un peu d’ampleur, de complexité et de joie. A l’aveugle, je crois que tout le monde l’aimerait. Il ne renverse pas encore la réputation défavorable qu’il avait mais je sens que dans quinze à vingt ans, il fera partie des Mouton que l’on aime.

Hidé est un hôte toujours aussi agréable. Chers lecteurs, allez manger dans ce restaurant qui mérite d’être encouragé et pratique des prix très inférieurs à sa qualité, y compris sur les vins.

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Simplicité comme je l’aime

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information about the activity of paying dinners samedi, 2 avril 2016

Questions have been raised on a forum about the activity of paying dinners. Here is what I answer.

I would like to make a comment about the activity of paying dinners.

I am absolutely not forced to give specific information about the financial activity of  my dinners.

But I prefer to give information which will explain that when I say that this activity is not profit oriented, it is reality.

I have founded the company « Vimpériale » (combining the word vin and the word Impériale) in 2000.

capital Vimpériale

I brought a capital of 300.000 € to finance the stock of wine, the main financing coming by money that I bring in an account at my name. I finance the stock by inputs of cash but the stock belongs to the company.

On the document dated 2016 (up right on the document) which gives capital + reserves, the column « Exercice N-1 » is 2014 and « Exercice N » is 2015.

 

Before the beginning of 2014, the accumulated losses was 72.355 € minus reserves of 20314 and 2243.

The loss of 2014 is 27.366 €

The loss of 2015 is 41.976 €.

So, at the end of 2015, what remains of the 300,000 € of capital is 180,860 € which makes a loss of 40% of my input in capital.

Any finance man would say that this is not particularly a profitable business.

I have no salary in the company, no fees, no dividend, nothing.

So, if I say that I do not do this activity for making profit but in order that my wines are shared, this is reality.

 

I have been the chairman and CEO of a company making sales of 1 billion € in the steel industry.

My company was quoted in the French Stock Market and I have been used to produce sincere accounts.

To give an idea, the sales of Vimpériale represent 15 minutes of the annual sales of my previous company, if you count 250 working days and 8 hours a day.

One could say : you make a profit on the reevaluation of the stock because of the price increase. This is true but then we would have to count the mortality inside my cellar and the huge costs or maintaining a building of 750 square meters at a constant temperature, costs that I pay personally.

So, all in all, my passion for old wine is a costly hobby.

One last remark : with 200 dinners I have opened 2,213 bottles. Not 100% of the wines came from me because I count the annual dinners that I organize with winemakers, who bring their wines. Let us say that I have brought 2,000 wines in 15,5 years. In 15,5 years there are 806 weeks.

I imagine that it is extremely necessary to make remarks about a huge company like Vimperiale which sells through dinners 2.5 bottles per week. Such a huge conglomerate represents a big player in the wine industry which needs a constant surveillance.

 

Déjeuner chez un ami canadien à Paris mercredi, 30 mars 2016

Un ami canadien m’avait demandé d’organiser l’un de mes dîners pour ses cinquante ans, il y a neuf ans. Le dîner avait été réfléchi longtemps à l’avance. Pour ses soixante ans qui seront en 2017, il prend aussi les devants. Il m’invite à déjeuner chez lui à Paris pour préparer cet événement. Son épouse américaine est aux fourneaux et a concocté un repas délicieux. Tout d’abord deux places assises ont été préparées dans la cuisine, pour Joe et moi, avec pour chacun une belle tranche de foie gras. La maîtresse de maison, aux fourneaux, n’a pas de place assise car elle cuisine. Joe me fait goûter un Champagne Paul Bara à Bouzy Brut 2005 en demi-bouteille. C’est son champagne habituel, celui qu’il ouvre sans hésiter. Le champagne est clair, facile, mais a un final un peu abrupt que le foie gras délicieux et doux va corriger.

J’adore le moment que je passe en cave pour chercher ce que j’apporte quand je suis invité. Joe est un amateur de vin et connaisseur, aussi me faut-il le surprendre. Quand je sors les deux demi-bouteilles, je le vois surpris et hésitant puisqu’il a fait son programme en fonction du repas de son épouse. Mais mon cadeau n’a de sens que si nous le goûtons ensemble aussi, ayant apporté mes outils, j’ouvre les deux vins.

Après le Paul Bara qui servait de mise en bouche, Joe verse dans nos verres un Champagne Philipponnat Clos des Goisses 1992. La couleur est encore claire et offre très peu d’ambre. Le champagne a une bulle active. Il est très nettement meilleur que le même 1992 que j’ai bu il y a peu de mois. Il a un charme redoutable car il combine à la fois la jeunesse, avec sa vivacité et la maturité, car on sent déjà les complexités que donne l’âge. Très vineux et fier, c’est un grand champagne.

Nous passons à table où Elizabeth a sa place, le quatrième convive étant un perroquet qui mange le même menu que nous et aura la courtoisie d’apprécier mes vins. La soupe avec des morilles, un œuf mollet, un fond de poulet et des petits champignons est délicieuse. Si elle convient au champagne, elle s’accorde merveilleusement à l’Hermitage Chevalier de Sterimberg Paul Jaboulet Aîné en demi-bouteille dont la collerette supérieure a disparu et dont le bouchon n’a aucune marque d’année. Si je me fie à mes souvenirs, ce doit être un 1985 ou 1990 du fait de mes achats. Il est probable que ce soit 1985. Le vin est superbe. De farouche au moment de l’ouverture il est devenu opulent et profite à fond de la soupe à la châtaigne et de la juxtaposition au champagne car très souvent un vin blanc et un champagne se fécondent mutuellement. J’ai un faible pour les Sterimberg de Jaboulet, riches, kaléidoscopiques avec une minéralité qui virevolte. De délicieuses gambas conviennent au vin et à au champagne.

Vignerons qui me lisez, mettez les années sur les étiquettes principales en plus de celles que vous apposez sur les collerettes de millésimes, et imprimez l’année au moins en deux positions sur les bouchons.

Sur du fromage nous goûtons la demi-bouteille du Gevrey-Chambertin domaine Robert Groffier & Fils 1992. Qui dira que le format demi-bouteille fait moins bien vieillir les vins ? Ce Gevrey est glorieux, joyeux et terriblement bourguignon. La Bourgogne, telle un envahisseur armé, prend possession de mon palais, et c’est bonheur. Le message est subtil, tout en finesse, avec un fruit rose délicat. Jamais je n’aurais pensé trouver autant de délicatesse et de longueur en bouche dans ce vin.

Comme si Joe avait lu dans mes pensées, et comme si j’avais lu dans les siennes, mes deux apports sont intervenus exactement au moment où il le fallait dans le déroulement de ce repas. Nous avons fini avec des fruits frais et une crème fleurette à se damner. Un Vin Santo del Chianti Classico Rocca di Montegrossi 1997, vin doux muté et fort aux accents de pruneaux a accompagné une brioche aérienne.

Cela me fera plaisir de faire un dîner pour les soixante ans de Joe car mes hôtes esthètes m’ont reçu de la plus belle des façons.

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Dimanche de Pâques dimanche, 27 mars 2016

Dimanche de Pâques. Pour une fois, aucun des six petits-enfants n’est là, seule notre fille cadette nous rend visite. Pas de chocolats à chercher dans le jardin. C’est je crois la première fois. J’ouvre un Champagne Cristal Roederer 2002 qui est enveloppé dans une feuille transparente orange qui protège le vin de la lumière. La bouteille dorée est belle, et l’on comprend la fascination des rappeurs américains pour ce joli flacon. Le bruit à l’ouverture est particulièrement fort. Le champagne se boit sur une chiffonnade de jambon Pata Negra plutôt sec que gras et cela convient au champagne qui n’a pas un fruit très expansif mais compense par une belle énergie. Le champagne s’étend dans le verre et apporte vinosité, tension ainsi que charme.

Le poulet au citron bergamote cuit à basse température est délicieux et les citrons cuits au four, très adoucis, font vibrer le champagne en mettant en valeur la bergamote. Sur un camembert très doux et crémeux j’aime le champagne et ma fille moins.

Ma femme a préparé au four trois tartelettes aux pommes de trois façons. Les Pierre Hermé et autres pâtissiers talentueux pâliraient devant la perfection de ces tartes exceptionnellement gourmandes qui nous permettent de finir le Cristal Roederer 2002, champagne racé et joyeux. Nous avons trinqué par la pensée avec tous les autres membres de la famille qui nous ont manqué.

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les trois tartes, avant et après le four

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petit rappel de Pâques

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Déjeuner au restaurant Pages samedi, 26 mars 2016

Un membre de l’académie des vins anciens qui a lu mes commentaires élogieux concernant le restaurant Pages a envie de le découvrir et me propose de le faire ensemble. Cet académicien est l’apporteur, à une dernière séance, de vins algériens de Frédéric Lung. Son invitation ne peut être déclinée, d’autant qu’il m’invite et apporte ses vins.

Le menu ne nous est pas communiqué, nous allons nous faire guider : pain soufflé et crème au chou Kale / poulpe de Galice / chips de pommes de mer / caviar de Sologne / bœuf Ozaki / asperges vertes de Roques Hautes, veau de lait du Limousin / oursin, asperges blanches d’Anjou, sabayon brûlé / merlan, endives, noir de Bigorre et cresson / pigeon, sauce salmis, dattes et gingembre / bœuf de Galice 60 jours, Normand 70 jours, bœuf Ozaki sur la fonte et sur Bincho / orange sanguine et cacao / déclinaison de sauge / choux au caramel, guimauve à la vanille.

Une fois de plus le chef Teshi et son équipe font des merveilles. Avant de boire les vins de mon ami, nous prenons sur la carte des vins un Champagne Krug Grande Cuvée. Le code 214024 nous apprend, sur le site de Krug, que ce champagne est fait de 147 vins de onze années de 1990 à 2006 et a quitté la cave de Krug au printemps 2014. Il a beaucoup de présence et de force de persuasion. Il s’accorde parfaitement aux premiers plats mais à un moment je ressens un peu de monotonie créée sans doute par ma fatigue après le dîner de la veille au Macéo.

Le Champagne Dom Pérignon 1964 a perdu environ un tiers de son volume. Mon ami l’ouvre maintenant et l’odeur, très caramélisée, indique que le champagne doit être madérisé. Nous décidons qu’il sera bu au dessert plutôt que maintenant et Vincent, le sommelier, nous sert le Beaune Grèves Vigne de l’Enfant Jésus Bouchard Père & Fils 1997. Mon ami sait que ce Beaune est un de mes chouchous. J’adore le message subtil de ce vin, tout en grâce. Il n’est pas particulièrement complexe, mais il dégage un charme particulier et surtout dans des années calmes comme celle-ci. Insensiblement, il fait penser à l’expression populaire du petit Jésus qui descend dans le gosier en culotte de velours. Cet « enfant Jésus » est tout velours. Avec le pigeon et encore plus avec les quatre délicieux morceaux de bœuf, le vin est raffiné, mettant en valeur les plats.

Vincent nous avait suggéré de verser des verres du champagne avant le service du bourgogne, pour qu’il s’épanouisse. Au premier verre, l’usure du Dom Pérignon et son côté madérisé apparaissent. Le vin est agréable mais ne représente pas ce que 1964 doit donner. Et le miracle arrive, comme souvent. Lentement mais sûrement sa couleur devient plus claire et le champagne devient plus vif. Il éclaircit son message et se montre de plus en plus précis. Bien sûr, ce ne sera jamais le 1964 quand il est splendide, mais c’est un beau champagne d’expression qui trouve sa place sur les desserts raffinés.

J’ai beaucoup aimé la nouveauté du poulpe, le traitement des asperges vertes et blanches, et les « institutions » du restaurant, le caviar de Sologne et les quatre morceaux de bœuf délicieux. L’atmosphère du restaurant Pages est particulièrement agréable. Toute l’équipe est motivée, le chef est créatif avec un talent assuré. Avec mon généreux ami, nous avons passé un excellent déjeuner.

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