Déjeuner de Pâques et déjeuner d’anniversairemardi, 22 avril 2025

Le mercredi 23 avril est mon anniversaire, mais nous le fêterons le 21 avril, lundi de Pâques, afin d’avoir avec nous le plus grand nombre de nos enfants et de nos petits-enfants.

Hier, je suis allé au marché acheter du fromage, et dans une autre boutique, j’ai vu de magnifiques asperges et je me suis dit : il me les faut absolument. Et j’ai pensé à un vin rouge.

Mon fils est arrivé ce matin de Miami et m’a proposé des truffes noires sous vide. À l’ouverture, l’odeur des truffes était si intense que je me suis dit : c’est ce qu’il faut avec les asperges pour accompagner le vin rouge de Pâques.

Pour le déjeuner de Pâques avec ma femme et mon fils, nous commençons par le Champagne Réserve Grand Trianon Rothschild 1964 à la très jolie bouteille, qui sera associé à un caviar Baeri de Kaviari. C’est un très joli champagne rond, serein, savoureux, typique des vieux champagnes. Il a une belle présence mais manque – à peine – d’un peu d’émotion.

C’est maintenant l’apparition du Château Ausone 1937 avec des asperges et des truffes noires. C’est l’occasion d’un des meilleurs accords que je n’aie jamais créés. Lorsque j’ai ouvert l’Ausone 1937 à 10 heures du matin, l’odeur était si forte que j’ai décidé de protéger ce goût impérial avec un bouchon en verre. Et au moment du service, c’est un miracle. Si frais, si long, si raffiné, il crée un accord merveilleux.

J’avais acheté cette bouteille il y a probablement 40 ans. Parfaite, sans défaut, pure et glorieuse. Je suis si heureux d’avoir eu cette idée. Nous avons ensuite goûté un Brillat-Savarin et truffe avec l’Ausone, et c’est également un miracle.

La suite se fait avec une bouteille de 50 cl de Tokaji 3 Puttonyos 1972, délicat, doux mais sans excès, parfait sur un flan. C’est un accord calme et délicat. La robe du Tokaji est intense, et le goût est très doux et de belle longueur. Comme j’adore le flan, je suis aux anges.

Pour le repas du soir, j’ouvre un Champagne Ayala 1961. Il s’est passé quelque chose d’incroyable. J’ai voulu ouvrir la bouteille, mais le bouchon a résisté. J’ai pris une serviette pour le dévisser, mais il n’a pas beaucoup bougé. J’ai donc utilisé un outil qui est comme une fourche et s’utilise pour les bouchons de champagne récalcitrants. Tout à coup, le bouchon a sauté d’un mètre en hauteur, produisant un pschitt dynamique. Qui aurait pu imaginer qu’un champagne de 63 ans puisse exploser avec une telle énergie ? Je n’aurais jamais cru que ce soit possible. Cela me rappelle le magnum de Dom Pérignon 1988 de jeudi dernier, dont le bouchon a explosé encore plus fort, touchant le plafond et le blessant. L’Ayala 1961 est extrêmement agréable, paraissant largement plus jeune que le champagne Rothschild Réserve Grand Trianon 1964. Cet Ayala est un grand champagne émotionnel.

Le succès n’est pas toujours au rendez-vous. J’avais en cave un Champagne Krug Private Cuvée des années 50, avec un faible niveau et une couleur terne. Je l’ai ouvert et le parfum était insupportable. Il était sûrement mort. Je l’ai laissé ouvert toute la nuit et le lendemain, j’ai été étonné de constater que la mauvaise odeur avait disparu, ce à quoi je ne m’attendais pas. Quand je l’ai goûté, c’était un champagne endormi, plat, mort. Je n’ai pas insisté. Mais l’attitude que j’ai adoptée devrait être la règle : toujours donner sa chance à chaque vin.

Nous sommes le lundi de Pâques pour fêter en famille mon anniversaire. De grand matin, lorsque j’ouvre le Vosne-Romanée Henri Jayer 1980, je vois que le vin avait été mis en bouteille par un négociant belge, ce qu’on lit sur l’étiquette. Je me suis demandé de quoi il s’agissait, mais à l’odorat, aucune question ne se posait, car un parfum aussi élégant, subtil et romantique ne peut pas provenir d’un vin qui n’est pas d’Henri Jayer. J’ai appris plus tard que le négociant belge avait eu le privilège de mettre en bouteille son allocation d’Henri Jayer.

J’ai aussi ouvert l’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1958, qui dégageait un parfum merveilleux. Les vins seront servis quatre heures plus tard sur du wagyu.

Le repas commence avec le Champagne Ayala 1961 qui a gardé une grande élégance et qui est plus fringant que le reste du Champagne Réserve Grand Trianon Rothschild 1964.

L’Hermitage La Tourette Delas blanc 1987 accompagne un cœur de saumon absolument délicieux. Le vin est gentiment gourmand et d’un beau fruit. C’est un Hermitage très agréable à boire avec un aimable goût de ‘revenez-y’.

L’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1958 a un nez et un goût de rose. Il est plutôt puissant. Sa personnalité est belle et sereine. C’est un grand vin.

Le Vosne-Romanée Henri Jayer 1980 est très différent, élégant, précis, raffiné. Les deux sont merveilleux à boire. Il est très difficile de dire lequel est le meilleur. Le wagyu est naturellement fait pour élargir la puissance de l’Echézeaux et l’on pouvait craindre qu’il fasse peur au sensible Vosne-Romanée, mais en fait le 1987 trouve lui aussi un tremplin avec la si gourmande viande.

Nous avons dégusté ensuite les deux vins sur du Brillat-Savarin et de l’Époisses, ce qui était un accord aussi passionnant, le Jayer éclatant sur le Brillat-Savarin et le Conti éblouissant sur l’Epoisses. Au final, j’ai eu une préférence pour l’Echézeaux, plus riche, plus complexe, plus en adéquation avec mon tempérament. Mais le Jayer était si fin et délicat que je l’ai adoré aussi. Un grand moment.

Le champagne a accompagné un fraisier de grande élégance.

Les deux repas ont formé un ensemble et mon classement est : 1 – Ausone 1937, 2 – Echézeaux 1958 3 – Vosne-Romanée 1980, 4 – Tokaji 1972, 5 – Ayala 1961, 6 – Hermitage 1987, 7 – Trianon Rothschild 1964.

Les vins du 4ème au 7ème étaient très agréables et pourraient être presque ex æquo dans le classement tant ils sont d’un intérêt similaire.

Les meilleures combinaisons vins et plats ont été : 1 – Asperges + truffe avec Ausone 1937. 2 – Epoisses et Echézeaux. 3 – Wagyu et Vosne-Romanée.

J’étais vraiment heureux de ma sélection de vins très différents.