Verticale de 20 ans de Clos de Tart et dîner en l’honneur de Sylvain Pitiotsamedi, 12 septembre 2015

Sylvain Pitiot, le directeur du prestigieux Clos de Tart a pris sa retraite cette année. Avec son successeur Jacques Devauges, avec les propriétaires du Clos, de la famille Mommessin, il a invité une trentaine d’amis, de distributeurs et agents et de journalistes pour célébrer ses vingt années à la tête du domaine. Sylvain m’avait demandé d’apporter un vin pour la fin de repas, aussi dès mon arrivée j’ouvre quatre bouteilles car il y aura quatre tables au dîner.

A 18h30 nous nous présentons dans la cour du Clos et peu de temps après nous commençons la dégustation des vingt millésimes faits sous la responsabilité de Sylvain. Sur des tonneaux redressés sont posées des bouteilles de trois ou quatre millésimes. On a appelé ces stands des « stations » et je peux affirmer que cette dégustation est tout sauf un chemin de croix.

Les premières stations sont dans un chais. Les autres sont dans l’une des magnifiques caves ancestrales du Clos de Tart. Nous sommes debout, ayant en main le verre de dégustation, le carnet de notes et un stylo. Il n’y a aucun pupitre, aussi la prise de notes est épique. Elle sera donc succincte.

Le Clos de Tart 2014 a une attaque très franche. Il a déjà une belle plénitude. Il est riche et épais. C’est une belle surprise de le voir si buvable.

Le Clos de Tart 2013 a un nez plus serré que le 2014. Il est plus fluide et plus frais. Il a un très joli caractère et un finale très noble.

Le Clos de Tart 2012 a un nez très minéral, d’ardoise. Il est plus fermé que les 2013 et 2014. Il est dans un stade de fermeture qui limite son charme. A attendre avant de juger.

Le Clos de Tart 2011 a un nez très frais. Le vin est romantique. Je ressens une petite amertume. Le finale est très racé mais le vin manque un peu d’opulence à mon goût.

Le Clos de Tart 2010 est plus gourmand et plus joyeux. Il a une belle plénitude et un bel équilibre. C’est un grand vin de belle râpe dans le finale.

Le Clos de Tart 2009 a un nez fruité. Le vin est très large. Il est à la fois frais et riche. C’est un grand vin.

Le Clos de Tart 2008 a un nez plus discret mais il a une belle attaque de fruit. C’est un vin frais, riche, au finale poivré. C’est un très grand vin, très généreux.

Le Clos de Tart 2007 se boit bien. Il est frais, léger, très agréable. Il a des similitudes avec les vins anciens d’années discrètes dont il partage l’élégance et la subtilité. Il a un très beau fruit. C’est l’expression élégante du Clos de Tart dans une année moins riche.

Le Clos de Tart 2006 est très différent. Il a une belle matière, de la fraîcheur et des fruits presque confits. Il est plus assis que les autres tant il est riche. C’est un grand vin.

Le Clos de Tart 2005 a une attaque de velours et de charme. Il a beaucoup de fruits et de plaisir. C’est un vin très précis. Le finale est un peu rêche, mais c’est agréable. Ce vin est de fruit et de fraîcheur.

Le Clos de Tart 2004 a un nez très fort et intense et paradoxalement on ne le retrouve pas en bouche car le vin est fermé, âpre, limité.

Le Clos de Tart 2003 a une couleur très noire. Il y a un peu de café dans son parfum. On ressent un peu de sucrosité. Ce vin d’une incroyable richesse ne me semble pas dans la ligne traditionnelle du Clos de Tart.

Nous changeons de salle de dégustation et les odeurs très fortes qui règnent dans la cave vont influencer la perception des parfums des vins.

Le Clos de Tart 2002 a un beau fruit très équilibré. Ce n’est pas un vin tonitruant, mais il est très agréable à boire. Son finale est gourmand.

Le Clos de Tart 2001 a beaucoup de fraîcheur et un fruit agréable mais un peu court. C’est un vin qui demanderait d’être en situation de gastronomie car je le trouve un peu fermé, au sucre perceptible dans le final.

Le Clos de Tart 2000 a un nez intense. Le vin est plutôt léger. C’est un vin qui se cherche. Son finale est très agréable et me pousse à l’aimer.

Le Clos de Tart 1999 est un vin qui me donne l’impression de ne pas être encore épanoui. On sent qu’il faut l’attendre encore plusieurs années afin d’en saisir toutes les qualités.

Le Clos de Tart 1998 est le premier vin de ceux que j’ai dégustés qui donne des notes animales dans son parfum. La bouche est fraîche et le vin est agréable, ne faisant pas partie des plus belles personnalités.

Le Clos de Tart 1997 est tout en velours et en douceur. Il a une belle matière mais joue surtout sur l’élégance. J’adore ce vin qui comme le 2007 a des intonations de vin ancien.

Le Clos de Tart 1996 a une très belle couleur d’un rouge glorieux. Le vin est d’un équilibre rare. C’est le plus plaisant à boire car il est plus mûr que tous les autres. Le finale n’est pas assez structuré pour mon goût mais c’est déjà un grand vin.

Ce qui est intéressant dans cette dégustation, au-delà de la constatation de la noblesse de ce vin béni des dieux, c’est que les petites années ou supposées petites sont les plus agréables à ce stade de leur jeunesse. Ainsi, 2007 et 1997 sont de très belles surprises. Le 2008 est un vrai bonheur et montre de grandes qualités. Les grandes années dépasseront les petites années, mais dans vingt ans sans doute.

Après cet exercice nous remontons dans la cour pour trinquer avec les autres participants. C’est un Champagne Pol Roger magnum 2002 qui nous est servi. C’est une remarquable réussite de l’année 2002, vin de charme mais de forte imprégnation. On le boit avec un infini bonheur.

Le dîner est placé. Je suis à côté de Didier Depond, président de Salon-Delamotte et à côté d’une jeune femme vivant en Suisse qui est Master of Wine. Le Grand Maître de la Confrérie des Chevaliers du Tastevin est aussi à notre table ainsi que des américains et anglais, l’épouse d’un célèbre vigneron bordelais et un célèbre vigneron bourguignon.

Sylvain Pitiot fait un court discours sur l’histoire du Clos de Tart, protégé par la Vierge de Tart depuis 1141 quand il fut fondé par les moniales de l’Abbaye de Tart, dépendant de celle de Cîteaux. Jacques Devauges fait lui aussi un court discours de remerciement à Sylvain et souhaite poursuivre son œuvre.

Le menu préparé par Thomas Le Courbe est : escalope de foie gras de canard poêlé au cassis, craquant de pain d’épices / pavé de thon sauce vin rouge, carottes glacées, jeunes pommes de terre / demi pigeonneau farci basse température, jus simple / Cîteaux, Epoisses, Comté / mignardises.

Le Clos de Tart 2007 est un vin superbe, d’une fraîcheur rare et d’un beau fruité mais surtout, il est magnifié par un accord que je n’aurais sans doute jamais osé. La sauce au fort cassis est vineuse et propulse le vin à des hauteurs rares, lui donnant équilibre et un fruité magnifique.

Le Clos de Tart magnum 2005 a un nez superbe. Le vin est noble et racé. Son acidité est belle ainsi que sa matière. Le fruit un peu râpeux est puissant. Le 2005 a plus de structure que le 2007 mais c’est aujourd’hui le 2007 qui montre plus de charme et de velours. En fait il faudrait attendre vingt ans pour que le 2005 délivre tout ce qu’il a en devenir. On en a une idée grâce au poisson car le 2005 devient grandiose, strict mais grandiose. Michel Bettane dit que c’est grâce au 2005 que le Clos de Tart est remonté tout en haut de la hiérarchie des vins de Bourgogne.

Le Clos de Tart 2002 est difficile à caractériser. Il est très vineux, très fort mais manque un peu d’ampleur. Servi d’une deuxième bouteille, je suis face à un vin beaucoup plus plaisant, vin gracieux avec des petites notes de café.

Le Clos de Tart 1996 a une couleur très foncée, plus que celle du 1996 bu en cave. Il me donne une impression de vin âgé. C’est un grand vin de structure riche, évoquant la truffe noire. Il est fort, puissant, très racé, claquant en bouche et imprégnant. Il a fraîcheur et puissance, à l’aise sur l’excellent pigeon.

Le vin mystère peut difficilement cacher qu’il est Clos de Tart. C’est donc l’année qu’il faut trouver. Autour de la table, les candidats possibles sont 1985 et 1978. Quand je hasarde 1976, le vigneron bourguignon me répond : « non, pas 1976 ». Je n’insiste pas car c’était une hypothèse parmi d’autres. Sylvain nous demande si nous avons trouvé le Clos de Tart 1976, vin frais, fluide et très beau dans son épanouissement calme et mesuré.

Le vin que j’ai apporté est un Niersteiner Konigskerze Rheinhessen Bansa & Sohn 1959. Il est doux mais non sucré, aqueux, herbacé tendance artichaut, évoquant un peu la Suze. C’est un vin curieux, déroutant mais intéressant, qui a été diversement apprécié selon les tables car ce vin fait un peu du hors-piste et les quatre bouteilles avaient à l’ouverture des parfums dissemblables. Je voulais mettre un vin qui ne soit pas archi-connu de ces grands dégustateurs. Je suis peut-être allé trop loin dans l’inconnu.

Le menu remarquablement conçu avec des accords pertinents et dont l’audace a été couronnée de succès a parfaitement convenu aux vins. L’ambiance amicale et chaleureuse a permis à chacun de se réjouir de cette communion avec Sylvain Pitiot, qui a permis au Clos de Tart de rejoindre les étoiles du firmament bourguignon.

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Jacky Rigaux et Sylvain Pitiot

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les tables du dîner dans la salle du pressoir qui date de 1514

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le menu

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trois expressions caractéristiques de Sylvain Pitiot

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un peu de retard pour photographier le foie gras poêlé !

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le vin allemand 1959 que j’ai apporté

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