Dégustation de Mumm et Perrier-Jouët à la Maison Belle Epoquejeudi, 15 novembre 2018

L’histoire qui va suivre commence au 228ème dîner au restaurant Akrame. Nous avions une table dans la cour intérieure et la pluie a arrosé des convives mal protégés par les tentures et parasols. Cela m’avait contrarié car certains ne pouvaient pas profiter au mieux du programme du dîner. J’ai annoncé à tous les convives qu’ils seraient invités pour un dîner de compensation. Cette déclaration a été chaudement accueillie et des convives attachés au groupe Pernod Ricard ont proposé que le deuxième dîner nous réunissant se tienne au siège de la maison de champagne Perrier-Jouët. Là aussi l’accueil à cette idée fut massif.

Pour préparer ce futur dîner mais aussi pour me faire connaître la maison de champagne, je suis invité à venir déguster les vins des maisons Mumm et Perrier-Jouët et à dîner à la Maison Belle Epoque de Perrier-Jouët.

Je me présente à 16h30 au siège de Perrier-Jouët et je suis accueilli par Hervé Deschamps, chef de caves et par Séverine Gomez-Frerson qui va prochainement succéder à Hervé. Alexander Staartjes qui dirige des opérations commerciales du groupe Mumm, Perrier-Jouët et Martell arrive en même temps que moi pour suivre la visite.

Nous visitons la Maison Belle Epoque qui a été la demeure du fondateur de la maison Perrier-Jouët en 1811. La décoration est totalement Belle Epoque avec des meubles rares. On croise ici un tableau de Toulouse-Lautrec et là une sculpture de Rodin offerte par le personnel « au patron » comme il est écrit sur l’étiquette en cuivre. On me dit que le lit de la chambre qui m’est affectée vaut une petite fortune. Avant de visiter les caves, on nous offre un verre de Champagne Perrier-Jouët Belle Epoque 2008 qui est particulièrement brillant, doté d’une belle maturité malgré son jeune âge, serein et conquérant, d’une longueur remarquable.

Hervé nous raconte des histoires passionnantes pendant que nous arpentons les kilomètres de cave (en partie seulement). Dans la cave des trésors il y a des bouteilles de la première moitié du 19ème siècle qui me font rêver. Ici ou là il y a des œuvres d’art très modernes dans des impasses voûtées. Nous remontons directement dans la Maison Belle Epoque pour commencer la dégustation. Magalie Maréchal, adjointe du chef de caves de la maison Mumm, nous rejoint.

J’ai apporté avec moi deux bouteilles, une pour la dégustation et une pour le repas, car je voudrais voir avec ces grands œnologues s’il existe une fécondation réciproque entre les champagnes et mes vins. La dégustation commence.

Le Champagne Mumm Cordon Rouge magnum 1989 a une belle couleur et une belle acidité. Il est très jeune, très toasté et ce qui me gêne un peu c’est la longueur assez courte, ce qui ne semble pas troubler les autres participants, les trois œnologues et Alexander. Le Vin de l’Etoile Paul Comte 1979 est d’une belle couleur légèrement ambrée. Le nez est très typique du Jura avec des notes légèrement torréfiées. Il est sec, très sec même et fluide. Le vin féconde le champagne car il lui donne de la largeur et des notes salines. Le 1989 évoque de beaux fruits et du sel. Il est très distingué, fluide et gastronomique. Il est fait de 70% de pinot noir et 30% de chardonnay. Des notes iodées apparaissent lorsqu’on le boit à la suite du vin de l’Etoile.

Le Champagne Mumm Cordon Rouge magnum 1976 a un nez très expressif et une belle matière. Il est gourmand. Le champagne n’avantage pas le vin du Jura alors qu’à l’inverse, le 1979 rend le 1976 de Mumm absolument fabuleux. Il lui donne de la longueur ce qui justifie ma remarque précédente sur la longueur du 1989. Il y a dans ce 1976 des notes de safran, une extrême délicatesse avec une attaque toute en douceur. Il a les mêmes proportions de cépages que le 1989.

Le Champagne Mumm de Cramant Blanc de Blancs magnum 1955 est légèrement ambré. Son nez est subtil. En bouche il est d’un raffinement extrême. Ses amers sont superbes. Il est fluide, racé et noble et cohabite bien avec le 1979 du Jura qui en profite et dans le sens inverse, le 1955 ne profite quasiment pas du vin du Jura. Le 1955 est plus à son avantage s’il est seul. Il a été dégorgé il y a un an ce qui lui donne une jeunesse extrême. Il est très difficile de hiérarchiser le 1976 et le 1955. Les deux ont beaucoup de charme. Le 1955 en se réchauffant devient exceptionnel.

Le vin de l’Etoile est magique, de belle acidité. Ce vin sans concession, strict, est de grand plaisir. Cette dégustation de vins de Mumm est extrêmement convaincante. Les 1955 et 1976 sont de très grands champagnes. J’ai écouté avec plaisir les trois œnologues disséquer les saveurs. Ils sont passionnants. La variété des influences entre les champagnes et le vin du Jura dans un sens et dans l’autre a intéressé grandement mes hôtes.

Nous passons maintenant au bar pour l’apéritif avec un Champagne Perrier-Jouët Belle Epoque Blanc de Blancs 1993 de la première année où l’on a fait pour Perrier Jouët un blanc de blancs Belle Epoque. Alexander est très laudatif pour ce champagne et je ne partage pas tout-à-fait son enthousiasme car je ne trouve pas en ce champagne une complète cohérence. Hervé dit qu’il est assez discret. Les petits canapés sont délicieux, sans chichi, aux saveurs cohérentes. Celui à l’anguille convient au 1993.

Nous passons à table dans la jolie salle à manger. Tout en cette maison est raffiné. Le menu créé par Joséphine Jonot, chef de la Maison Belle Epoque est : langoustines, bouillon thaï / ris de veau, compotée d’oignons rouges / dessert au marron.

Le Champagne Perrier-Jouët Belle Epoque magnum 1982 est magique. Ce champagne est superbe, accompli. Il est grand. Et c’est avec le bouillon que l’accord propulse le champagne à des hauteurs rares.

Le Champagne Perrier-Jouët Belle Epoque magnum 1996 a une énergie incroyable. Il est tranchant et lui aussi très grand. Pendant l’apéritif, j’avais ouvert le deuxième de mes apports, un Château Chalon Jean Bourdy 1929. Le bouchon s’était émietté et n’est venu qu’après de longs efforts. C’est un superbe vin jaune à la personnalité très affirmée. Il est tellement puissant et conquérant que champagne et vin se comprennent, mais ne se fécondent pas. Ils vivent très bien ensemble sur un ris de veau parfaitement cuit.

Sur le dessert nous buvons un Champagne Perrier-Jouët Belle Epoque rosé magnum 1985. Il convient bien au dessert, il est très agréable, mais il n’a pas la force de conviction des deux blancs.

La cuisine de Joséphine Jonot est très lisible, directe, sur de bons produits. C’est un atout certain pour le dîner que nous voulons faire au mois de mai en ce lieu. L’accueil qui m’a été réservé est un honneur auquel je suis sensible. Les champagnes dégustés se sont montrés brillants, avec du côté Mumm le 1955 et le 1976 en vedette et pour Perrier-Jouët le 1982 et le 1996. Mes vins du Jura avaient leur place pour exciter ces beaux champagnes. Et j’ai un petit béguin pour le 2008 Belle Epoque.

Après une nuit de repos le petit-déjeuner ponctue ce court séjour par un niveau de qualité qui place la Maison Belle Epoque au niveau des hôtels les plus luxueux. J’ai eu une bonne idée de proposer un nouveau dîner avec les charmants convives du 228ème dîner.

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A tout cela il y a une suite ! Pensant à mon « musée » des bouteilles vides j’ai demandé si je pouvais garder les flacons que nous avions bus et cette suggestion a été approuvée. Mais tant de bouteilles avaient été ouvertes pour cinq personnes qu’il restait abondamment de chaque vin. C’était le dernier soir de mon fils à Paris aussi l’occasion était-elle belle de boire les « fonds » de bouteilles.

Ma femme a prévu des coquilles Saint-Jacques sur une purée de pommes de terre à la truffe puis des fromages et un Kouign-amann. Nous commençons par les Perrier-Jouët Belle Epoque 1982 et 1996. Le 1982 est devenu tout doux, charmeur et agréable. Le 1996 est d’une vigueur incroyable, d’une énergie explosive. On est forcé d’aimer ce 1996 si passionnant.

Nous buvons ensuite les deux Mumm, le 1976 en Cordon Rouge et le 1955 en Cramant. Les deux sont aussi adorables l’un que l’autre. Le 1955 est plus calme mais a un final de fruits rouges comme s’il avait fauté avec un vieux bourgogne. Le 1976 est très complexe, plus ouvert et plus franc, peut-être un peu moins canaille que le 1955.

La bonne surprise est celle du rosé 1985 Belle Epoque, qui est beaucoup plus typé que la veille. Il a un côté réduit qui le rend plus épais. Il est très agréable.

Il reste un peu de Château Chalon 1929 qui a ce superbe goût de noix et une profondeur inextinguible.

Lorsqu’il faut faire le lendemain, le bilan de tout ce qui a été bu, mon fils me suggère et je suis d’accord, que le gagnant est le Château Chalon 1929 car son empreinte est impressionnante. Ensuite ce sont le 1955 et le 1996 qui sortent du lot. Tant de grands champagnes, c’est rare.

 

le jardin de la Maison Belle Epoque

un monte charge antique

La cave au trésors

des œuvres d’art en cave

un joli mode de stockage des bouteilles pour la dégustation

des œuvres d’art dans la maison

l’apéritif au bar

mes apports

la couleur des vins

le repas

de ma chambre, le jardin mais aussi celui de Moët & Chandon, juste voisin

Toulouse Lautrec et Rodin !

éléments de décoration

ce que je vais rapporter pour boire avec mon fils

le soir avec mon fils

c’est amusant que le deuxième « 5 » de 1955 est une gommette collée sur l’étiquette