Dégustation des 2012 de la Romanée Conti au siège de Grains Nobles mercredi, 2 décembre 2015

Pour la 23ème année consécutive, Aubert de Villaine présente les vins récents mis en bouteilles du Domaine de la Romanée Conti au siège de la société Grains Nobles. Aubert dit que c’est la seule présentation officielle qu’il accepte de faire et ceci est dû à l’amitié qu’il a pour le fondateur de Grains Nobles, école de dégustation et organisatrice d’évènements sur le vin.

Le millésime 2012 a été très chahuté. Mars fut très chaud et les trois mois suivants furent humides. Il y avait beaucoup trop d’herbe très humide dans les vignes. Le mildiou et l’oïdium sont apparus, avec des orages de grêle moins forts que ceux de la Côte de Beaune. Le montrachet fut à moitié grêlé. La floraison apparut un peu tôt et fut très longue : trois semaines contre trois jours en 2015. Il y eut de la coulure et du millerandage. On savait en juin que la récolte serait faible. Il y eut de la canicule fin juin et juillet très beau a permis de retrouver un travail normal en vignes. Août fut marqué par des orages et en septembre tout redevint normal. La récolte eut lieu fin septembre avec des raisins aux peaux très épaisses. La maturité s’accrut à toute vitesse. La vendange démarra le 21 septembre avec les cortons, puis à Vosne Romanée le 24. Le 26 une grosse pluie, et, divine surprise, cela n’eut aucune conséquence du fait de l’épaisseur des peaux ainsi que grâce au froid qui s’installa. La récolte fut belle au plan sanitaire. On a vu tout de suite que l’année ferait de grands vins, de belles couleurs. C’est un millésime plein de promesses.

Nous avinons nos verres avec un Beaujolais primeur vieilles vignes domaine de Vissoux 2015 dont l’odeur n’est pas noble, la bouche pâteuse. C’est un vin sans intérêt. Au passage je ressens la banane, assez discrète.

Il n’y a pas eu de Vosne Romanée premier cru cette année. Ce qui a été récolté est gardé pour les paulées et pour le personnel.

La dégustation commence par le Corton Grand Cru « Prince Florent de Mérode » Domaine de la Romanée Conti 2012. La couleur est assez foncée. Le nez est très délicat et racé. La bouche est gourmande, le vin est rond. Ce vin est l’assemblage de trois climats et Aubert de Villaine envisagerait bien de faire trois vins séparés quand le travail fait en vignes sera accompli dans ce domaine repris il y a peu en 2009. Il y a dans ce vin du poivre, du thé et une belle amertume. Il a tout pour bien vieillir. Je préfère l’attaque au finale, et de mémoire, je le sens plus noble que les cortons des précédentes années. On sent qu’il s’agit d’un grand vin.

L’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2012 a une couleur un peu plus rose, et un nez plus intense. L’attaque est très fraîche et épicée. Le finale claque. C’est un vin vif. Je l’adore. Le nez est fumé, profond. C’est un vin ciselé. Il y a une gourmandise particulière car elle se combine à la noblesse. C’est une belle surprise de voir ce premier vin à ce niveau. Aubert de Villaine dit que l’Echézeaux monte en puissance avec l’âge des vignes. Il en est très content.

Le Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2012 a un nez moins joyeux et soufré, trop soufré. La robe est plus sombre mais a encore du rose. Le vin ne se livre pas tout de suite. L’impression de soufre se ressent aussi dans le finale. Il est dur, amer, beaucoup moins immédiat. Il se réveille un peu et découvre du fruit rouge, mais le plaisir n’est pas là. Aubert de Villaine dit qu’en revenant sur l’Echézeaux, on voit combien le Grands Echézeaux est plus grand, mais du fait de l’amertume, je n’ai pas de plaisir.

La Romanée Saint Vivant Domaine de la Romanée Conti 2012 a une couleur très proche de celle du Grands Echézeaux, à peine plus sombre. Le nez est très élégant. Il pianote des élégances aromatiques fascinantes, presque doucereuses. En bouche il est un peu perlant et n’a pas beaucoup de charme. Il me semble fermé. Il pinote. Il a un beau fruit, mais je n’ai pas de plaisir car pour moi il est dans une phase ingrate, avec de l’amertume dans le finale. On le sent noble avec du fruit et de la rondeur qui apparaissent, mais je ne suis pas conquis. Il faudrait le revoir dans dix ans, car il est très sur la réserve. Bernard Burtschy dit qu’il est cristallin et c’est à ce moment que je me rends compte qu’Aubert de Villaine et les experts, habitués à goûter des vins de cette jeunesse, les jugent pour ce qu’ils deviendront et sont laudatifs. Alors que personnellement, je note ce que je ressens, et manifestement ces vins sont trop jeunes pour donner un plaisir gourmand. Je me suis donc tu pour ne pas donner un éclairage qui ne correspond pas à l’angle de vue de ces sommités du vin.

Le Richebourg Domaine de la Romanée Conti 2012 a une robe très belle et plus rouge. Le nez est riche et conquérant. Intense, il montre un peu d’amertume. En bouche le vin est conquérant, même s’il a encore du perlant. Le fruit est beau mais un peu amer. Le final est assez dur et rêche. Là aussi le plaisir n’est pas là. C’est à se demander si la recherche de la perfection ne conduit pas à retrouver les pratiques des anciens, dont les vins étaient ingrats pendant au moins une décennie. Ce vin sera à essayer dans une dizaine d’année. Il est beaucoup plus puissant et conquérant que la Romanée Saint Vivant. Bernard Burtschy et Aubert de Villaine disent que c’est un vrai Richebourg vineux et le trouvent délicieux. Quelqu’un parle même de suavité. Nous n’avons donc pas la même approche, car ces sommités se projettent dans le futur.

La Tâche Domaine de la Romanée Conti 2012 a une robe très proche de celle du Richebourg. Le nez est extrêmement noble. La petite pointe de soufre est infime. L’attaque est très suave, et le vin montre charme et puissance. Le finale est amer. Le vin est très intéressant avec des épices. C’est un très grand vin, on sent qu’il a tout, avec une matière très riche. Le vin envahit la bouche mais limite le plaisir. Aubert de Villaine parle de verticalité du vin en pensant aux pentes de son terroir. Il y a du velours, de l’onctuosité, la longueur est impressionnante. La complexité est extrême et la palette aromatique très ample.

Il est à noter qu’après quelques minutes tous ces vins prennent de la rondeur et du fruit, au point qu’on se demande si l’on ne devrait pas servir les verres dix minutes avant chaque dégustation. Ce serait un gros problème de logistique.

La Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 2012 a une couleur plus rose. Le nez est très délicat, un peu réservé. Il y a de la douceur dans ce parfum. L’attaque est inouïe. Là, on est en face du sublime. C’est fou comme le déroulé du goût est complexe. Avec ce vin on côtoie la grandeur extrême. Le finale est très beau, avec un peu de groseille et de végétal suggéré. C’est une « vraie » Romanée Conti, faite de grâce et de légèreté. Elle est superbe et de grande complexité. On jouit de sa délicatesse la plus pure. Ce vin est magnifique et émouvant. Pour moi, les deux vins les plus gratifiants sont aux extrêmes de la gamme, l’Echézeaux et la Romanée Conti. La Romanée Conti est un vin de recueillement. Tout est vibrant dans ce vin. Si mon analyse différait jusqu’alors de celles de Bernard Burtschy et Aubert de Villaine, je suis totalement en phase sur ce vin formidable et déjà gourmand. Je n’ai trouvé en lui ni rose fanée ni sel. Ça viendra avec l’âge. En revenant sur La Tâche, je constate l’incroyable différence entre les deux.

Aubert de Villaine dit que les Romanée Conti actuelles n’ont rien à envier aux Romanée Conti préphylloxériques. Il signale l’étrangeté qui veut que les Romanée Conti de 1952 et suivantes jusqu’en 1956 issues de vignes très jeunes, se comportent aussi bien. La légende voudrait que des vieux ceps préphylloxériques aient été oubliés sur le sol et qu’ils aient influencé la complexité des jeunes ceps.

Le Montrachet Domaine de la Romanée Conti 2012 n’a donné que 1.172 bouteilles ce qui est moins du tiers d’une année normale. La grêle de juin avec le mildiou, l’oïdium et le botrytis a entraîné la nécessité d’un tri très sélectif. Le nez n’a pas de signe réel de botrytis. Le vin est clair et frais. On sent le miel d’acacia qui est selon Bernard Burtschy le signe distinctif du Montrachet. Le vin est gourmand et noble mais il n’est pas puissant. Il est aérien et cristallin, avec un peu de miel. Il est surprenant car il est à la fois moitié sec et moitié botrytisé. Je reconnais bien le montrachet, mais moins tonitruant. Il a de belles fleurs blanches et la puissance arrive progressivement. Il sera grand. Sa persistance aromatique est extrême. Il n’a pas la puissance habituelle.

Les propos d’Aubert de Villaine respirent la recherche de l’excellence dans chaque élément qui conduira au vin. C’est un régal de l’écouter. Je crois beaucoup en ces 2012 prometteurs, que l’on doit attendre avant de les aborder. La sublime Romanée Conti sera un vin de légende.

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194ème dîner de wine-dinners au restaurant Patrick Pignol mercredi, 25 novembre 2015

Le 194ème dîner de wine-dinners se tient au restaurant Patrick Pignol. Voulant faire lors de ce dîner une expérience inédite de juxtaposer sur des plats des vins de mes dîners traditionnels avec ceux de Pingus, j’ai souhaité que le menu soit mis au point par un amoureux et connaisseur des vins, Patrick Pignol. De plus, Patrick Pignol a une particularité qui me plaît et m’impressionne : c’est lui qui va la nuit acheter à Rungis les produits qu’il va cuisiner le jour-même. Cet amour du produit est dans la logique des dîners de vins anciens puisque les vins anciens aiment trouver des goûts lisibles appuyés sur de bons produits.

Le midi, pendant la présentation des vins de Pingus, Patrick Pignol m’appelle pour me dire qu’il n’a pas pu trouver à Rungis les rougets qui devaient composer un des plats. Il me propose une solution avec du homard, puis me rappelle pour proposer des encornets, ce qui paraît le plus adapté aux vins prévus.

A 17h30, je me présente au restaurant pour ouvrir les vins du dîner. Les bouchons ne posent pas trop de problème sauf celui de l’Yquem 1955, qui, dès que je pique la pointe du tirebouchon, glisse dangereusement vers le bas. Il descend si bas qu’il touche le liquide. J’arrive néanmoins à le remonter et s’exhale alors un parfum délicieux qui est tellement capiteux que je vais le faire sentir à l’équipe de cuisine qui est en train de dîner. Ils constatent que le parfum du vin va s’accorder au dessert que Patrick m’a proposé et que je trouvais osé sur le papier.

L’odeur du Haut-Bailly 1964 me déplaît fortement. Et ce qui me contrarie, c’est qu’après quelques minutes, je trouve très peu d’évolution. Nicolas, le sommelier très compétent du lieu, qui a accompagné beaucoup de dîners, est plus optimiste que moi et pense que le vin va s’améliorer.

Les vins de Pingus ont des odeurs joyeuses et superbes, la Romanée Saint-Vivant du Domaine de la Romanée Conti 1995 a un parfum d’un raffinement rare. A 18h30, tout est prêt. Il ne me reste plus qu’à attendre mes convives.

Les convives du 194ème dîner de wine-dinners arrivent au restaurant Patrick Pignol. Il y a Peter Sisseck, le propriétaire de Pingus, dont nous goûterons trois vins, un couple d’habitués dont la femme est d’origine chinoise, deux journalistes japonais spécialisés dans la gastronomie et le vin, une journaliste productrice d’émissions et de reportages pour la télévision, le directeur d’une grande maison de négoce de vins, un haut fonctionnaire amateur de vins et le gestionnaire des caves de deux prestigieux clubs huppés parisiens. C’est une assemblée particulièrement éclectique.

Le menu préparé par Patrick Pignol est : noix de Saint-Jacques poêlées avec la truffe de nos régions / encornets farcis aux oignons doux des Cévennes et senteur de Speck / ris de veau rissolé au beurre de cardamome, parfum d’oseille / canard sauvage rôti en cocotte, sauce pilée aux baies de genièvre / Etivaz, 2 ans d’affinage des Préalpes vaudoises / dattes Medjoul farcies d’une crème citronnée sur son biscuit sablé.

Le Champagne Salon magnum 1995 est une agréable façon de commencer le repas. C’est un champagne convivial, facile à vivre et à comprendre tout en ayant une structure solide et un fruit jaune plaisant. Le format du magnum lui donne une belle largeur et une sérénité motivante. De petites huîtres sont servies emmaillotées dans des feuilles vertes dont je n’ai pas retenu le nom, qui brident un peu leur iode. Mais l’accord se trouve. Nous notons que ce champagne a vingt ans, ce qui le mettrait dans les champagnes mûrs, alors qu’on ne lui trouve aucune trace d’âge. Les champagnes Salon sont faits pour vieillir.

Le Champagne Krug 1988 claque comme un fouet. Si le Salon se veut accueillant, le Krug se veut guerrier. Il dégaine son Excalibur pour fendre nos papilles. Ce Krug 1988 est au sommet de sa gloire. L’accord avec le sucré de la coquille et avec la truffe est un des piliers de la gastronomie. Nous nous régalons d’un champagne très typé, profond, vif et racé, avec une légère pointe de fumé mais aucune trace d’âge.

Nous allons maintenant entrer dans le vif du sujet de l’expérience que je veux faire : associer des vins de Pingus, modernes, lourds en alcool, avec des vins qui sont au cœur de mes dîners habituels. Sur chacun des trois plats à venir, un Pingus sera associé à un autre vin, un bordelais, un bourguignon et un vin du Rhône. Les trois Pingus sont de 2008, 1999 et 1998. J’avais créé les paires de vins à l’instinct et Peter Sisseck m’avait suggéré de permuter deux des vins. Mais la mauvaise surprise du Haut-Bailly à l’odeur incertaine m’a poussé à garder mon choix initial.

Le Pingus Ribeira del Duero 1999 est associé au Château Haut-Bailly 1964. L’odeur du Pingus est toute douce et en bouche le vin est tout velours. Le Haut-Bailly a un parfum acceptable et alors que j’avais de multiples fois annoncé un vin défait, toute la table s’insurge et apprécie ce vin. Ils corroborent ce que Nicolas le sommelier m’avait annoncé à l’ouverture, mais je persiste et signe. Même si le vin s’est effectivement reconstitué, il reste une blessure d’amertume qui limite le plaisir que le vin pourrait donner. Mais je donne acte au fait qu’il est très buvable.

Ce qui est passionnant, c’est qu’au fil de la dégustation, le Pingus devient de plus en plus bordeaux, se civilise, très velours et très frais malgré ses 14,5° d’alcool. Peter Sisseck est frappé par le résultat de l’oxygénation lente, qui gomme les aspérités, donne de la rondeur et de la civilité au vin. Le rapprochement entre les deux vins est étonnant. Le Haut-Bailly a encore un fruit rouge présent. Le Pingus 1999 est calme et accueillant. La juxtaposition devient naturelle et les encornets créent un accord d’une belle pertinence. Lorsque j’étais arrivé, j’avais fait part à Patrick Pignol de ma peur pour les oignons confits. Patrick m’avait fait goûter deux versions qui n’avaient pas totalement apaisé ma crainte. Mais le résultat final du plat est parfait car le dosage a été judicieusement réalisé et l’accord est superbe avec les deux vins. A ce stade, j’entrevois que l’association d’un Pingus calme avec un bordeaux est possible.

Le Pingus Ribeira del Duero 1998 est associé à la Romanée Saint-Vivant domaine de la Romanée Conti 1995. Le ris de veau est bon mais un peu trop cuit à mon goût, ou plutôt trop croquant, ce qui va limiter l’accord. Et contrairement aux deux vins précédents, les vins ne vont pas se parler. Chacun joue sa partition sans tendre la main à l’autre. Le Pingus est puissant et prend des accents du Rhône tout en étant espagnol dans l’âme. La Romanée Saint-Vivant est d’un invraisemblable charme, délicieusement féminine et signant son passage de roses et de sel selon la tradition des vins du domaine. Cette Romanée Saint-Vivant pianote ses subtilités avec une élégance rare. Le Pingus est puissant mais a mis des gants de velours. Chaque vin est superbe, l’espagnol direct et accueillant, le bourguignon virevoltant comme un danseur-étoile.

Le Pingus Ribeira del Duero 2008 va faire un bout de chemin avec le Châteauneuf-du-Pape Henri Bonneau Réserve des Célestins 1988. Les deux vins sont superbes. Le Pingus est puissant mais d’une précision et d’une finesse qui sont époustouflantes. C’est un grand vin généreux qui explose de fruit mais sait garder une juste mesure. Quel grand vin ! A côté de lui le Châteauneuf a la bonhommie et la simplicité du vigneron Henri Bonneau, et son bon sens paysan. C’est un vin à l’équilibre indestructible. Il est comme le trait épuré d’un dessin de Picasso ou les notes ciselées d’Erik Satie. Et ce qui s’était passé pour la première association se renouvelle, les deux vins se rapprochent comme s’ils voulaient se confondre. Le Pingus devient rhodanien. Ils sont brillants et cohabitent à merveille, et le canard crée un agréable lien entre les deux.

Les trois Pingus se sont montrés civilisés, charmants, accueillants malgré les gros muscles que représentent les 14,5° d’alcool. Et c’est intéressant de voir comme ils jouent sur leur finesse et leur précision, surtout pour le 2008. La cohabitation s’est faite avec deux des trois vins. Seule la Romanée Saint-Vivant d’une grâce extrême n’a pas tendu la main au Pingus. Le challenge que j’envisageais a donné des résultats supérieurs à mes attentes, et Pingus s’est montré si sociable que l’un des journalistes japonais m’a écrit le lendemain pour me dire que cette expérience a changé sa vision sur Pingus. Peter Sisseck lui-même a été étonné de voir à quel point l’oxygénation lente donnait à ses vins un velours et une douceur qu’il n’imaginait pas à ce point.

Le repas continue avec un Château Chalon Jean Bourdy 1955 qui est un vin extrêmement accessible. Comme les Pingus, il joue sur la douceur et l’accessibilité. Le délicieux fromage l’accompagne pour un accord classique mais toujours réussi.

Le Château d’Yquem 1955 est d’une couleur fortement ambrée. Son parfum à l’ouverture était déjà éblouissant et avait plus de fruit que le caramel qui s’impose maintenant, même s’il préexistait. Patrick Pignol a des intuitions de génie car le dessert à la datte convient parfaitement à ce bel Yquem au charme profond. C’est un vin intense, inextinguible dans son finale. On voit à quel point l’âge sourit aux liquoreux.

Il est temps de voter. Nous sommes dix à voter. Le vote porte sur quatre vins préférés parmi les dix du repas. Une constatation me réjouit, chacun des dix vins figure au moins une fois dans un des votes, ce qui veut dire que chaque vin a pu être jugé digne de figurer parmi les quatre premiers pour au moins un convive. Quatre vins ont eu les honneurs d’une place de premier, l’Yquem quatre fois, la Romanée Saint-Vivant quatre fois aussi, le Pingus 1999 et le Pingus 1998 recueillant chacun une place de premier.

Le vote du consensus serait : 1 – Château d’Yquem 1955, 2 – Romanée Saint-Vivant domaine de la Romanée Conti 1995 , 3 – Pingus Ribeira del Duero 2008, 4 – Pingus Ribeira del Duero 1999, 5 – Châteauneuf-du-Pape Henri Bonneau Réserve des Célestins 1988.

Mon vote est : 1 – Château d’Yquem 1955, 2 – Romanée Saint-Vivant domaine de la Romanée Conti 1995 , 3 – Pingus Ribeira del Duero 2008, 4 – Champagne Krug 1988.

En ce qui concerne les paires de vins rouges, nous avons classé les trois mariages de vins, selon des critères libres, pouvant associer ou non les plats aux votes des accords de vins. Contrairement à ce que je pensais le deuxième groupe de vins a été classé comme deuxième accord, sans doute à cause de la valeur des vins, puisque j’ai dit plus haut que les deux vins se sont moins rejoints.

Le vote du consensus serait : 1 – Pingus Ribeira del Duero 2008 avec Châteauneuf-du-Pape Henri Bonneau Réserve des Célestins 1988, 2 – Pingus Ribeira del Duero 1998 avec Romanée Saint-Vivant domaine de la Romanée Conti 1995, 3 – Pingus Ribeira del Duero 1999 avec Château Haut-Bailly 1964.

Mon vote est : 1 – Pingus Ribeira del Duero 2008 avec Châteauneuf-du-Pape Henri Bonneau Réserve des Célestins 1988, 2 – Pingus Ribeira del Duero 1999 avec Château Haut-Bailly 1964, 3 -Pingus Ribeira del Duero 1998 avec Romanée Saint-Vivant domaine de la Romanée Conti 1995.

Patrick Pignol, grand amateur de vins, a eu la préscience des plats qui conviendraient aux vins. Certaines cuissons ont été un peu supérieures à ce que je souhaiterais, mais cela n’a gêné en rien la pertinence des accords, la palme revenant aux encornets avec Pingus 1999 et Haut-Bailly 1964, suivi de l’accord de la datte avec l’Yquem 1955.

C’est un plaisir pour moi d’avoir osé cette association d’un vin lourd espagnol avec des vins de trois régions, et aussi d’avoir vérifié à quel point l’oxygénation lente donne de bons résultats, y compris pour les jeunes Pingus. Retrouver Peter Sisseck était le cadeau complémentaire ainsi que la satisfaction de mes convives. Ce fut un grand repas.

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La table, avant et après

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les votes

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Présentation des vins de Pingus par Peter Sisseck à Lavinia mercredi, 25 novembre 2015

J’avais rencontré Peter Sisseck le propriétaire de Pingus, célèbre vignoble de la Ribeira del Duero en Espagne, lors d’un voyage œnologique organisé pour les propriétaires des mythiques Ferrari GTO. J’avais organisé pour eux un dîner à l’hôtel Bristol. Ils avaient aimé ce dîner et je les ai rejoints un an plus tard à l’occasion de ce voyage. Lors de la visite de Pingus, sans que je sache pourquoi, un courant amical est immédiatement passé entre Peter et moi.

Lorsque Bipin Desai a organisé une dégustation verticale des vins de Pingus à Los Angeles, j’ai rejoint cet événement qui m’a permis de mieux connaître ces vins. Nous nous sommes retrouvés à une dégustation au domaine de la Romanée Conti où nous avons dégusté une Romanée Conti 1956 qui a donné des frissons à Peter, puis à une extravagante dégustation de vins du domaine de la Romanée Conti où une bonne partie des vins présentés étaient probablement des faux.

Pingus fait partie des vins que j’achète chaque année. J’avais envie de revoir Peter et une idée m’est venue de créer un de mes dîners où des vins de Pingus côtoieraient mes vins. Juxtaposer des vins très modernes comme ceux de Pingus et des vins plus anciens sur des plats adaptés est un challenge que j’ai envie de relever.

Ayant appris qu’il y a le jour du dîner un déjeuner de presse animé par Peter Sisseck, cela me semble un joli complément d’expérience et la maison Lavinia me fait le plaisir de m’inviter. Nous sommes une petite vingtaine, au restaurant Lavinia, au premier étage de la célèbre boutique de vins. Peter Sisseck est avec Ann, son épouse. Nous commençons par une dégustation sans plat, avant le repas.

Psi Domaine Pingus 2013 a comme tous les autres vins une couleur presque noire. Le nez est d’une folle jeunesse. L’attaque est belle de cassis et de feuilles vertes. Le vin a un beau grain et une jolie mâche. C’est un vin généreux. Il a un peu d’amertume et de râpe. Il est plaisant et on l’imagine compagnon de gastronomie. C’est dans le finale qu’il manque un peu de rondeur.

Le Château Recheyron Saint-Emilion Grand Cru 2011 est d’un château que Peter a repris il y a peu d’années en association avec un investisseur qui possède un joli portefeuille de vignobles. Le nez du 2011 est extrêmement élégant et c’est un joli fruit rouge qui domine dans son parfum. Le vin a une belle attaque, ronde, plaisante et le finale très mentholé est très espagnol. On dirait que le vin a une attaque bordelaise et un finale espagnol. Le vin est quand même bordelais, très généreux.

Flor de Pingus Domaine de Pingus 2013 a un nez subtil dans la discrétion. L’attaque est curieuse comme si le vin cherche sa voie. Il y a peu de fruits et les tannins sont discrets. Le registre est tout en finesse. C’est un vin élégant avec un peu de végétal dans le finale. C’est un vin distingué, Peter l’aime et dit que c’est ce qu’il cherche à faire. Il ajoute que ce vin s’exprime mieux dans les années dites faibles comme 2013.

Pingus Domaine de Pingus 2013 a un nez profond qui manque un peu d’exubérance. Il est noble, l’attaque est soyeuse de fruits rouges clairs. Le finale n’est pas très généreux. A ce stade, car cela va changer ensuite, je ne trouve pas de saut qualitatif réel entre Flor de Pingus et Pingus qui est le grand vin recherché par les amoureux de jeunes vins de la planète. Le cœur de bouche est ample, très équilibré, racé. Le finale est poivré.

On sent que Flor de Pingus s’exprime mieux maintenant et que Pingus le dépassera dans quelques années. Avant le repas mon classement est : 1- Flor de Pingus, 2 – Château Recheyron, 3 – Pingus, 4 – Psi (lettre grecque illustrée par un vieux cep sur l’étiquette et qui s’explique par le nom de Peter).

Le menu préparé par le restaurant Lavinia est : risotto avec chipirons à l’encre de seiche / daube de chevreuil au vin de la Ribeira del Duero / Manchego et pâtes de fruits / Poire Williams pochée au vin rouge.

Le risotto crée un accord d’une extrême pertinence avec le Psi 2013 et lui donne une ampleur sensible. Ce vin devient charnu, au beau finale, grâce au plat. Le chevreuil est un peu trop sec et la sauce un peu fluette, mais cela n’empêche pas que se crée un accord qui transforme le Pingus. Il gagne en ampleur, il devient joyeux, élégant et résolument gastronomique. Il est à la fois gourmand et aérien. Ce vin s’écarte magistralement des excès parkériens, pour donner pureté finesse et élégance d’une bien belle façon. Peter nous explique qu’il cueille ses raisins quinze jours avant les autres. Ceci explique probablement – en partie, car il y a aussi le talent – cela. Une autre raison est sans doute que les vignes de Peter sont à plus de 800 mètres d’altitude. La fraîcheur et le fluidité des vins sont sans doute liées à la fraîcheur des lieux.

Le fromage et la poire n’apportent aucune valeur ajoutée aux deux vins associés, le Flor de Pingus pour le fromage et le Rocheyron pour la poire. Je suis assez sensible aux accords couleur sur couleur. Le risotto est noir, le chevreuil aussi et se sont accordés avec des vins très noirs. Le fromage et le dessert n’ont pas créé d’accord. Il ne faut évidemment pas généraliser mais j’aime signaler ces occurrences.

Peter va présenter ses vins aux étudiants du Cordon Bleu. Nous nous retrouverons ce soir pour le 194ème de mes dîners.

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Prix François Rabelais à l’Institut de France et dîner d’anciens élèves mercredi, 25 novembre 2015

L’ Institut du Quai Conti a une façade en forme d’arc dont le Pont des Arts serait la flèche, la science tendant ses bras à l’amour. C’est en traversant la petite cour pavée que l’on pénètre dans ce temple de l’excellence française. Après avoir montré patte blanche, on traverse une cour carrée, elle-même pavée, de toute beauté. Il faut gravir les marches de deux étages d’un escalier à deux montées symétriques pour accéder à la Grande Salle de Séances. Et là, on reste sans voix. De magnifiques sculptures très expressives représentent nos hommes illustres : Corneille, Racine, Molière, La Fontaine voisinent avec des dizaines de savants dont Monge, qui a créé l’Ecole Polytechnique, attire particulièrement mon regard. On sent dans cette salle que tout le pouvoir imaginatif, inventif et créatif français a bouillonné, phosphoré, inventé, pour la plus grande gloire de notre pays.

C’est saisissant. Alors que dans ma jeunesse estudiantine j’étais un fidèle de la bibliothèque Mazarine, dont l’atmosphère de recueillement permettait de mieux réviser les concours, c’est la première fois que je visite cet endroit qui jouxte la si belle bibliothèque.

La Fondation Européenne pour le Patrimoine Alimentaire est une émanation de l’Institut de France. Elle remet son cinquième prix annuel, le Prix François Rabelais, qui couronne une personnalité pour l’ensemble de son œuvre en faveur des patrimoines culturels alimentaires. Le récipiendaire est Aubert de Villaine.

Les discours sont prononcés par Gabriel de Broglie, chancelier de l’Institut de France, qui bien évidemment crée le lien entre le Quai Conti et la Romanée Conti, Jean Pierre Corbeau Président de l’Institut Européen d’Histoire et des Cultures de l’Alimentation IEHCA, Jean-Robert Pitte, Président de la Fondation européenne pour le patrimoine alimentaire et Philippe Gombert, président international de Relais & Châteaux qui est sponsor de la fondation. La culture des intervenants, leur humour et leur intelligence ont permis qu’à aucun moment leurs discours n’entraînent de lassitude, au contraire. Le poids des compliments assenés à Aubert de Villaine sur son œuvre à la tête de son vignoble et pour son rôle primordial pour le classement des Climats de Bourgogne au patrimoine immémorial mondial de l’Unesco aurait pu le faire vaciller, car il s’y ajoute la charge émotionnelle de cette salle prestigieuse.

Dans un discours très sobre Aubert de Villaine a répondu à ces adresses avec son humilité légendaire. Son discours fut applaudi pendant de longues minutes.

Un cocktail attendait les témoins de cette remise de prix, des vignerons qui ont travaillé à l’élaboration du dossier de l’Unesco, des restaurateurs dont Guy Savoy venu en voisin et le chef de l’Elysée, des hommes de presse et du vin et des amis d’Aubert et Pamela de Villaine. On servait au buffet les vins de Bouzeron. On m’a indiqué qu’il y avait aussi le Bâtard du Domaine de la Romanée Conti qui pouvait être bu mais je dois rejoindre l’Hôtel de Poulpry, maison des polytechniciens où se tient le dîner des anciens élèves de ma promotion. C’est toujours agréable de revoir les amis avec lesquels nous avons partagé certains des plus beaux souvenirs de notre jeunesse. Comment est-il possible que cette maison chargée d’histoire puisse proposer une nourriture et des plats d’un aussi faible niveau ? Sans savoir, j’ai choisi de ne pas boire de vin et j’ai l’intuition que j’ai bien fait. La partie culinaire fut bien triste mais fort heureusement, ce qui compte le plus, et de loin, c’est la chaleur de nos retrouvailles.

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Déjeuner au restaurant Taillevent vendredi, 20 novembre 2015

Déjeuner au restaurant Taillevent avec le monde de la Finance, qui n’exclut pas, loin s’en faut, l’amour de l’excellence et de l’art, sous toutes ses formes. D’un côté un collectionneur de voitures rares, de l’autre l’amour de la littérature, de la poésie et des vieilles pierres. Choisir un vin en cave qui convienne à ce repas, c’est comme choisir une cravate pour un événement particulier, j’aime y ajouter un lien et une note d’extravagance. Quand je vais en cave, je suis comme le sourcier qui promène sa baguette de coudrier. Je me promène, je hume l’atmosphère, une bouteille me tend les bras, je la saisis. Lecteur, vous qui me suivez depuis 660 bulletins, n’ayez pas peur, je suis lucide, mais j’aime le hasard qui guide mon geste pour choisir un vin. S’il n’y avait pas ce facteur d’incertitude, chère à Heisenberg, qui permet de construire une histoire, la vie aurait moins de sel.

Nous nous retrouvons à trois au restaurant Taillevent et j’ai eu le temps d’ouvrir ma bouteille avant l’arrivée de mes convives, tous deux habitués de mes dîners et du Taillevent. Le menu sera : huîtres tièdes riesling et cresson / noix de coquilles Saint-Jacques beurre salé, pomme reinette et cidre / fromage / équilibre noisettes et mandarines.

L’apéritif se prend avec un Champagne Amour de Deutz 2002. S’il est un vin qui porte bien son nom, c’est celui-ci. Isabelle d’Orléans et Bragance, Comtesse de Paris, avait écrit un livre, « Tout m’est bonheur ». Deutz pourrait écrire le sien, en paraphrasant, en l’intitulant « Tout m’est Amour », car ce champagne porte bien son nom. Gracile, fluide, léger, romantique il se boit avec une extrême fluidité. Sur les gougères, il est parfait, car les gougères ont le talent d’exhausser ses complexités. On ne peut pas dire que l’on est dans l’aristocratie des champagnes complexes, mais on est à l’acmé du plaisir, avec des myriades de douces saveurs tintinnabulées. Un amuse-bouche fait de hareng et de tarama, le même qu’il y a peu de jours, excite bien ce champagne tout en grâce.

A l’ouverture, le Corton Charlemagne Rapet Père & Fils 1957 avait un manque de netteté dans son parfum, et un vigneron prudent aurait dit : « faut voir ». C’est donc avec incertitude que je porte mon nez au verre qui m’est servi. Instantanément, je sens que les odeurs incertaines ont disparu. Elles font place à un bouquet miraculeux. Il y a à la fois des fleurs de printemps, des fruits frais et des fruits confits. En bouche ce vin, dont je n’attendais rien de plus que le plaisir de la découverte, délivre une onde de complexités quasiment irréelles au point que je serais bien incapable de distinguer tous les fruits roses et rouges, jaunes et bruns qui composent sa palette. La longueur n’est pas extrême, mais la complexité immédiate transcenderait beaucoup de vins plus capés. Il n’y a pas d’évolution ou de sur maturité, il n’y a que de la joie de vivre, où les fruits innombrables se mêlent dans une profusion infinie. La coquille Saint-Jacques est très bonne, mais la crème qui l’accompagne n’est pas l’amie du vin alors que la chair seule serait divine.

Le vin appelle le plateau de fromages et avec des chèvres dont un fumé, le vin s’exprime au-delà de toute attente. Voilà un vin dont je ne sais pour quelle raison il a rejoint ma cave, d’une année fluctuante, qui brille bien au-delà de vins de plus hautes lignées. Quel bonheur.

Le dessert délicieux est l’ami des vins. Il accompagne un Champagne Substance Jacques Selosse dégorgé en avril 2009 qui est lui aussi à un sommet. Racé, claquant comme un fouet, il occupe l’espace, conquérant comme Gérard Philippe dans Fanfan la Tulipe ou Alexandre Nevski face aux chevaliers teutoniques. Il est vineux, trace sa route sans oublier d’être charmeur. On dit « voir Naples et mourir ». Il n’est pas nécessaire de mourir après avoir bu ce Selosse, mais il est bon de l’avoir bu.

Les déjeuners réussis se mesurent lorsque l’envie de recommencer devient impérieuse. Ce fut le cas.

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1929 Les Gaudichots DRC shared with Aubert de Villaine and Tomo lundi, 16 novembre 2015

One of my wine suppliers offers me one day to acquire a bottle of 1929 Les Gaudichots Domaine de la Romanée Conti. This bottle is a particular rarity, since wine is actually La Tâche but do not bear the name, and I dreamed of to find one someday, especially in this special year. The price seemed unattainable and unreasonable, but I did not want to miss this unique opportunity. So I talked about this wine with my friend Tomo, with which we open big bottles, asking him to share the cost and drinking together.

 

Tomo and I agreed and we purchased this bottle which I kept in my cellar. The idea of ​​drinking this wine with Aubert de Villaine, co-owner of Romanée Conti, was very natural, and when I met him, I told him about this bottle and he did not decline the proposal I have made. In the months that followed, I sent him messages which he did not respond. The case seemed closed, we would drink this bottle, Tomo and me.

 

Moreover, a journalist who has directed many films about domains and winemakers is in the process of work on a film on Henri Jayer be released in 2016 to mark the tenth anniversary of the death of the famous winemaker. He calls me and asks me if it would be possible to film me commenting wine tasting of Henri Jayer.

 

A few years ago, when Thomas Bravo-Maza made a film « The Four Seasons of Romanée-Conti, » he made me the same request and we found ourselves, Tomo and I filmed drinking two Romanée Conti, 1996 brought by Tomo and 1986 brought by me, and after the shooting made in restaurant Grand Véfour the morning, we finished the two bottles for lunch at this restaurant for our delight, after the departure of camera crews. The temptation was great to combine with Tomo to open two wines of Henri Jayer, in the spirit of equality and reciprocity, and at this occasion we would open The Gaudichots 1929. The date is taken. For conscience, I warn Aubert de Villaine from the date of our next lunch and a miracle happens only in westerns, since the US cavalry always arrives five minutes before the end of the film to save the hero threatened by Indians, Aubert de Villaine announced that he could join us. It will be at Taillevent, Aubert, Tomo and I, with our wives.

One Monday morning, at 10:30, I stand at Taillevent restaurant to open bottles for that lunch of six, Aubert de Villaine, my friend Tomo and I and our wives. Aubert warned me that he would come by train and would be at the restaurant at one pm. Laurent, reporter joined me at the same time because he will film the lunch with two patterns, the very rare bottle Gaudichots of Domaine de la Romanée Conti 1929, and two bottles of Henri Jayer Tomo and I brought. Aubert on his side had sent me a wine of the domain. Tomo has added a champagne for aperitif and I imitated him with a champagne for dessert. Laurent filmed me while I open the bottles. The wines of Henri Jayer are easy to forge, I inspect the beautiful caps that seem authentic and fragrances comfort me. The cap on the Grand Echezeaux Domaine Romanée Conti 1979 is very tight in the neck and the bottle was refurbished in 2005. My attention is great when I open the bottle of Gaudichots 1929. The cork is perfect, but comes around sheared four pieces. The perfume is reassuring. Phew, we’re having a big bottle.

At noon, the Gardinier brothers gathered all the restaurant staff and their staff on the ground floor of the restaurant for a minute of silence related to the dramatic events that mourning Paris and Laurent and I join their group.

The train of Aubert de Villaine is a few minutes late and like many people avoid public transportation, there is a tail that deters Aubert to take a taxi. So he arrives in an underground station and SMS asking me to guide him to find the Taillevent. As a precaution I went to meet him with Tomo and we walked on the Avenue Friedland. From far I see that he is alone. His wife is not with him while my wife and Tomo’s wife, dressed in a beautiful kimono, had come to share a meal with her. I am sad because I wanted a long time that our meetings with Aubert also associate his wife. Pity.

We are on the first floor in the beautiful lounge at the Guimet Chinese décor. The set menu developed with Jean-Marie Ancher and Alain Solivérès is: Atlantic sea bass / mignon of veal, red beets, quince and potimaron / deer nuts, pepper / plum sauce, champagne and meringue.

At the aperitif, delicious gougères, we drink a Champagne Krug Collection 1976 to the color of a light amber. The nose is superb generosity and openness. In the mouth it is a wine of sun, the bubble is small but you do not mind. It already has a beautiful evolution towards bringing the serene maturity. It is a great champagne especially by its complexity. Acidity is beautiful. The fruits are yellow with a peaceful lemon. Tomo who brought wonder if the wine is flawless. We agree on the fact that this is not a perfect bottle for that 1976 could be even greater, but it has lots of charm and personality. It lacks just a bit of radiation. This observation is at the margin. The appetizer, a lobster to Tarama salata smoked herring roe is delicious and vibrates the champagne.

With line bar, we drink both wines of Henri Jayer that Laurent wants to include in his film and what is striking is that both wines are very different.

Vosne Romanée Cros The Parantoux Henri Jayer 1991 has an incredible personality. It is extremely bourguignon, with a nice salinity and has a remarkable tension. Its fruit is rather brown. This is one of the greatest wines of Jayer it was given me to drink.

Beside him, Vosne Romanée Cros the Parantoux Henri Jayer 1995 a redder color than that of 1991 and its fruit on the palate is also more red. But it has much less vibration and emotion as 1991. Initially the difference persuasion is great. It will diminish and end of meals, 1995 has made some of the difference. Aubert lived in the same village that Henri Jayer and had long discussions with him over the whole or not whole stalking and other subjects, although they spoke little together at the time. He anecdotes that Laurent films with great interest.

Grands Echezeaux Le Domaine de la Romanée Conti 1979 appears with cute calf. Its scent is compelling and conqueror. It is like a powerful breath. In the mouth the wine is booming. It has a rare power, but in the style of the area, ie it exposes more than is needed. I like salinity is discrete and rose petals. 1979. It is a beautiful success Pink fruit tart is just superb. What impresses is its power.

I had expected that Les Gaudichots Grand Premier Cru Domaine de la Romanée Conti 1929 that appear deer service but the temptation to taste the next wine from another area. Certainly in doing so, we no longer have two loves like Josephine Baker, but only one, the 1929. From the first contact, we know we are dealing with absolute perfection. This wine reminds me fast enough La Tâche 1962 which is the most legendary vintage of La Tache. One can also think of préphylloxériques wines that are very rich as this one. It has a density, grain and chews that are copies. We are moved because this wine is at a level of rare perfection. It does not age and is confusing because it is likely that if you opened it in a hundred years, it would have the same balance. So Aubert tells us that there are times when words can no longer express what we feel and the wine imposes itself in our hearts and our memories. The final form, the richness, range, consistency make this wine an unforgettable example of the perfection of the wines of Domaine de la Romanée Conti. Without that everyone does not want to announce it, we are close to the great wines that we never have drunk. The enthusiasm is there. The frame where we see truffles and candied grapes melts into a block, an elusive rock that gives us a sense of perfection.

Return to the other wines is possible, especially the 1991, which is distinguished in a similar direction. 1979 is beginning of his quiet enthusiasm to become more gallant and it suits her. The 1995 gains in personality and in wealth.

I brought a 1966 rosé Champagne Mumm who sadly died. Unpleasant nose and mouth. Jean-Marie Ancher always eager to please us exhume the cellar of Taillevent A. Jacquart Champagne rosé NV without disturbance to the color that has a cider acidity, also the end point will be given by the Armagnac Domain Cavaillon J. Lassis 1928 dame-jeanne who had already finished a previous meal in this place.

We had the chance to drink a 1929 wine legend who confirmed his legendary status, two wines of Henri Jayer that match the excellent reputation of this wine and champagne 1976 great level. The film was able, with Aubert de Villaine capture great moments and beautiful stories of the history of Burgundy wines, Tomo and I had the chance to share great wines with Aubert de Villaine. Only missing his wife would have met our wives. This is a good reason to start a dinner of this level by finding another excuse !

that match the excellent reputation of this wine and champagne 1976 great level. The film was able, with Aubert de Villaine capture great moments and beautiful stories of the history of Burgundy wines, Tomo and I had the chance to share great wines with Aubert de Villaine. Only missing his wife would have met our wives. This is a good reason to start a dinner of this level by finding another excuse !

(see pictures in the next article)

Déjeuner « les Gaudichots 1929 » au restaurant Taillevent lundi, 16 novembre 2015

Un de mes fournisseurs de vins me propose un jour une bouteille de Les Gaudichots Domaine de la Romanée Conti 1929. Cette bouteille est une rareté particulière, puisque le vin est en fait La Tâche mais n’en portait pas le nom, et je rêvais d’en trouver une un jour, surtout dans cette année légendaire. Le prix me semblait inatteignable et déraisonnable, mais je ne voulais pas laisser passer cette occasion unique. Alors, j’ai parlé de ce vin à mon ami Tomo, avec lequel nous ouvrons de grandes bouteilles, en lui demandant d’en partager le coût, puis de la boire ensemble.

Tomo m’a donné son accord et nous avons acheté cette bouteille que j’ai gardée dans ma cave. L’idée de boire ce vin avec Aubert de Villaine, le gérant de la Romanée Conti, était très naturelle et lorsque je l’ai rencontré, je lui ai parlé de la bouteille et il n’a pas décliné la proposition que je lui ai faite. Dans les mois qui ont suivi, je lui ai adressé des mails auxquels il n’a pas répondu. La cause me semblait entendue, nous boirions cette bouteille, Tomo et moi.

Par ailleurs, un journaliste qui a réalisé de nombreux films sur des domaines et des vignerons est en train de mettre en chantier un film sur Henri Jayer qui sortira en 2016 à l’occasion du dixième anniversaire de la mort du célèbre vigneron. Il m’appelle et me demande s’il serait possible de me filmer commentant la dégustation de vins d’Henri Jayer.

Il se trouve qu’il y a quelques années lorsque Thomas Bravo-Maza a fait un film « les Quatre Saisons de la Romanée-Conti », il m’avait fait la même demande et nous nous étions retrouvés, Tomo et moi, filmés en train de boire deux Romanée Conti, 1996 apportée par Tomo et 1986 apportée par moi, et après les prises de vues faites au Grand Véfour le matin, nous avions fini les deux bouteilles à déjeuner dans ce restaurant pour notre plus grand bonheur, après le départ des équipes de tournage.

La tentation était belle de recommencer avec Tomo à ouvrir deux vins d’Henri Jayer, dans le même esprit d’égalité et de réciprocité, et pourquoi pas en même temps que nous dégusterions Les Gaudichots 1929. La date est prise.

Par acquit de conscience, je préviens Aubert de Villaine de la date de notre prochain déjeuner et par un miracle qui n’arrive que dans les westerns, puisque la cavalerie américaine arrive toujours cinq minutes avant la fin du film pour sauver les héros menacés par de méchants indiens, Aubert de Villaine annonce qu’il pourra se libérer. Ce sera donc au Taillevent, Aubert, Tomo et moi, avec nos épouses.

Un lundi matin, à 10h30, je me présente au restaurant Taillevent pour ouvrir les bouteilles de ce déjeuner de six personnes, Aubert de Villaine, mon ami Tomo et moi, ainsi que nos épouses. Aubert m’a prévenu qu’il viendrait par le train et qu’il serait au restaurant à 13 heures.

Laurent, le journaliste me rejoint à la même heure, car il filmera le déjeuner qui a deux motifs, la bouteille mythique les Gaudichots Domaine de la Romanée Conti 1929, et les deux bouteilles d’Henri Jayer que Tomo et moi avons apportées. Aubert de son côté m’avait adressé un vin du domaine. Tomo a ajouté un champagne d’apéritif et je l’ai imité avec un champagne de dessert.

Laurent me filme pendant que j’ouvre les bouteilles. Les vins d’Henri Jayer étant faciles à falsifier, j’inspecte les beaux bouchons qui me semblent authentiques et les parfums me rassurent. Le bouchon du Grand Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1979 est très serré dans le goulot et la bouteille a été reconditionnée en 2005. Mon attention est grande quand j’ouvre la bouteille des Gaudichots 1929. Le bouchon est parfait, vient entier mais cisaillé en quatre morceaux. Le parfum est rassurant. Ouf, nous allons avoir une grande bouteille.

A midi, les frères Gardinier ont rassemblé tout le personnel du restaurant et de leur staff au rez-de-chaussée du restaurant pour une minute de silence liée aux événements dramatiques qui ont endeuillé Paris et Laurent et moi nous joignons à leur recueillement.

Le train d’Aubert de Villaine a quelques minutes de retard et comme beaucoup de personnes évitent les transports en commun, il y a une queue qui dissuade Aubert de prendre un taxi. Il arrive donc à une station de métro et par SMS me demande de le guider pour trouver le Taillevent. Par mesure de précaution je me rends à sa rencontre avec Tomo et de loin sur l’avenue Friedland, je vois qu’il est seul. Sa femme n’est pas avec lui alors que mon épouse et celle de Tomo, habillée d’un ravissant kimono, étaient venues pour partager le repas avec elle. Je suis triste car je souhaitais depuis longtemps que nos rencontres avec Aubert associent aussi son épouse. Dommage.

Nous somme au premier étage, dans le beau salon Guimet à la décoration chinoise. Le menu mis au point avec Jean-Marie Ancher et Alain Solivérès est : bar de ligne d’Atlantique / mignon de veau, betteraves rouges, coing et potimaron / noisettes de chevreuil, sauce poivrade / prune, champagne et meringue.

A l’apéritif, sur de délicieuses gougères, nous buvons un Champagne Krug Collection 1976 à la couleur d’un ambre léger. Le nez est superbe de générosité et d’ouverture. En bouche c’est un vin de soleil, dont la bulle est faible mais cela ne gêne pas. Il a déjà une belle évolution qui le porte vers une sereine maturité. C’est un grand champagne surtout par sa complexité. L’acidité est belle. Les fruits sont jaunes avec un citron apaisé. Tomo qui l’a apporté me demande si le vin est sans défaut. Nous tombons d’accord sur le fait qu’il ne s’agit pas d’une bouteille parfaite car ce 1976 pourrait être plus grand encore, mais il a beaucoup de charme et de personnalité. Il lui manque juste un peu de rayonnement. Cette remarque est à la marge. L’amuse-bouche, un tarama de langoustine aux œufs de hareng fumé est délicieux et fait vibrer le champagne.

Avec le bar de ligne, nous boirons les deux vins d’Henri Jayer que Laurent veut intégrer dans son film et ce qui frappe c’est que les deux vins sont extrêmement différents.

Le Vosne Romanée Cros Parantoux Henri Jayer 1991 a une personnalité incroyable. Il est extrêmement bourguignon, avec une jolie salinité et il a une tension remarquable. Son fruit est plutôt brun. C’est un des plus grands vins de Jayer qu’il m’ait été donné de boire.

A côté de lui, le Vosne Romanée Cros Parantoux Henri Jayer 1995 a une couleur plus rouge que celle du 1991 et son fruit en bouche est aussi plus rouge. Mais il a beaucoup moins de vibration et d’émotion que le 1991. Au départ la différence de persuasion est très grande. Elle s’atténuera et en fin de repas, le 1995 aura fait une partie de son retard. Aubert a vécu dans le même village qu’Henri Jayer et a eu avec lui de longues discussions sur l’égrappage entier ou non entier et d’autres sujets, même si on se parlait peu à l’époque. Il a des anecdotes que Laurent filme avec un grand intérêt.

Le Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1979 apparaît avec le mignon de veau. Son parfum est impérieux et conquérant. Il est comme un souffle puissant. En bouche le vin est tonitruant. Il a une puissance rare, mais dans le style du domaine, c’est à dire qu’il expose plus qu’il n’impose. La salinité que j’aime est là ainsi que de discrets pétales de roses. C’est une belle réussite de 1979. Le fruit rose à peine aigrelet est superbe. Ce qui impressionne, c’est sa puissance.

J’avais prévu que Les Gaudichots Grand Premier Cru Domaine de la Romanée Conti 1929 n’apparaîtrait qu’au service du chevreuil mais la tentation est grande de le goûter à côté de l’autre vin du domaine. Il est certain qu’en procédant ainsi, nous n’avons plus deux amours comme Joséphine Baker mais un seul, le 1929. Dès le premier contact, nous savons que nous sommes face à la perfection absolue. Ce vin m’évoque assez vite La Tâche 1962 qui est le plus légendaire millésime de La Tâche. On peut penser aussi à des vins préphylloxériques qui sont très riches comme celui-ci. Il a une densité, un grain et une mâche qui sont exemplaires. Nous sommes émus car ce vin est à un niveau de perfection rare. Il n’a pas d’âge et c’est confondant, car on peut penser que si on l’ouvrait dans cent ans, il aurait le même équilibre. Alors, Aubert nous dit qu’il est des moments où les mots ne peuvent plus exprimer ce que l’on ressent et que le vin s’impose de lui-même dans nos cœurs et nos mémoires. La forme aboutie, la richesse, l’amplitude, la cohérence font de ce vin un exemple inoubliable de la perfection des vins du domaine de la Romanée Conti. Sans que chacun ne veuille l’annoncer, nous sommes proches des vins les plus grands que nous n’ayons jamais bus. L’enthousiasme est là. La trame où l’on voit de la truffe et des raisins confits se fond dans un bloc, un roc insaisissable qui nous laisse une impression de perfection.

Revenir aux autres vins est possible, surtout le 1991 qui est racé dans une direction similaire. Le 1979 calme sa fougue du début pour devenir plus galant et cela lui va bien. Le 1995 gagne en personnalité et en richesse.

J’ai apporté un Champagne Mumm rosé 1966 qui est malheureusement mort, désagréable en nez et en bouche. Jean-Marie Ancher toujours désireux de nous faire plaisir exhume de la cave du Taillevent un Champagne A. Jacquart et Fils rosé sans année à la couleur trouble qui a une acidité de cidre, aussi le point final sera donné par le Bas-Armagnac Domaine de Cavaillon J. Lassis 1928 en dame-jeanne qui avait déjà conclu le 192ème dîner de wine-dinners fait en ce lieu.

Nous avons eu la chance de boire un vin de légende de 1929 qui a confirmé son statut de légende, deux vins d’Henri Jayer qui correspondent à la réputation d’excellence de ce vigneron et un champagne 1976 de grand niveau. Le réalisateur du film a pu, grâce à Aubert de Villaine capter de grands moments et de beaux récits de l’histoire des vins bourguignons, Tomo et moi avons eu la chance de partager de grands vins avec Aubert de Villaine. Il ne manquait que son épouse qui aurait fait la connaissance de nos épouses. C’est une bonne raison pour recommencer un dîner en trouvant un autre prétexte de ce niveau.

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Détail des très jolies décorations chinoises de notre salon Guimet

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Champagne Krug Collection 1976

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Vosne Romanée Cros Parantoux Henri Jayer 1991

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Vosne Romanée Cros Parantoux Henri Jayer 1995

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Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1979

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Les Gaudichots Grand Premier Cru Domaine de la Romanée Conti 1929

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Champagne Mumm rosé 1966

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Champagne A. Jacquart rosé du restaurant

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Akiko en kimono et mon épouse

Akiko et Silke

Tomo et moi (le baiser de Judas ?)

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A table avec Aubert de Villaine

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Pamela de Villaine mise sur la liste des participants n’est pas venue

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Commentaire sur Les Gaudichots 1929 lundi, 16 novembre 2015

Aubert de Villaine m’a adressé un mail dont j’extrais son commentaire sur Les Gaudichots Domaine de la Romanée Conti 1929 :

Deux choses m’ont frappé : sa jeunesse (à l’aveugle j’aurais pensé a ’66 à cause d’une Tâche de ce millésime dégustée il y a peu : cette bouteille de ’29 a certainement atteint il y a déjà de nombreuses années un palier optimum d’évolution qu’elle n’a jamais quitté) et sa proximité avec toutes mes dégustations de La Tâche…ce qui est normal, me direz-vous, puisque Les Gaudichots c’est 80 p/00 de La Tâche actuelle ! Mais je comprends mieux la Cour qui, lors du procès de 1930 ou. 1931 (a vérifier) était venue gouter les Gaudichots à Vosne et les avait juges dignes de l’appellation La Tâche…

15ème dîner de vignerons, les amis de Bipin Desai au restaurant Laurent vendredi, 13 novembre 2015

Un dîner se tient au restaurant Laurent. En fin de dîner nous apprendrons que l’horreur s’abat sur Paris, par les messages inquiets des familles des participants. Il faut penser aux victimes et leurs familles touchées par des actes de sauvagerie sanguinaires et à la France plongée dans une guerre contre un ennemi sans visage qui vit sur son propre sol. La vie doit prendre le dessus et ce dîner sera raconté comme à l’accoutumée.

Le 15ème dîner des amis de Bipin Desai que j’organise chaque année depuis 2001rassemble des vignerons amis. Il est compté dans les dîners de wine-dinners puisque l’organisation en a la forme. C’est le 193ème dîner de wine-dinners. Du fait de la proximité de date avec la vente des vins des Hospices de Beaune, il y a beaucoup moins de vignerons bourguignons. C’est l’occasion d’accueillir des vignerons d’autres régions. Certains absents se sont faits représenter par des bouteilles qu’ils m’ont adressées et au dernier moment un participant m’a annoncé que son état de santé ne lui permettait pas de venir. Lorsque l’on ajoute la générosité des participants, nous nous trouvons face à un apport de l’équivalent de dix-sept bouteilles pour neuf présents.

Autour de la table, il y aura : Caroline Frey, Jean-Louis Chave, Jacques Devauges, Philippe Foreau, Jean-Luc Pépin, Pierre Trimbach, Bipin Desai, Agathe Audouze, François Audouze. Par ailleurs, Richard Geoffroy, Didier Depond et Egon Müller, absents, ont offert des vins. C’est l’abondance des vins qui m’a poussé à faire participer ma fille cadette en plus du plaisir de lui donner l’occasion de rencontrer des vignerons amis.

A 16 heures, j’arrive au restaurant pour ouvrir les bouteilles. Ayant en tête que ces dîners comportent des vins peu anciens je commence à ouvrir les vins en utilisant seulement le limonadier et les bouchons des deux rieslings se cassent dans le goulot. Je tire les bas de bouchons avec une longue mèche mais l’avertissement est clair, il faut que j’utilise strictement ma méthode en soulevant seulement de quelques millimètres avec le limonadier et en tirant ensuite avec la longue mèche. J’ai dû faire face à de nombreux bouchons très serrés qui ont demandé beaucoup de force pour les extirper.

Les amis arrivent tous à 19h30, voire avant l’heure, et nous buvons debout, dans le beau hall d’entrée du restaurant, le Champagne Salon magnum 1999. Les champagnes ont été ouverts vers 17h30. La première gorgée est un peu stricte. Il faut en fait que le champagne s’élargisse et les gougères y contribuent. Il devient alors extrêmement plaisant et direct, avec une jolie vivacité citronnée. On sait que ce champagne gagnera en complexité avec quelques années de plus.

Le menu mis au point par Philippe Bourguignon et Alain Pégouret est : Araignée en gelée servie en assiette / Noix de coquilles Saint-Jacques légèrement blondies, macaroni et bouillon de cèpes / Pigeon à peine fumé, pommes soufflées Laurent / Lièvre à la Royale / Soufflé chaud à la noisette.

Le Champagne Dom Pérignon P2 magnum 1995 est un immense choc. Le nez de ce champagne est incroyablement pénétrant. C’est un parfum profond qui restera aussi intense, lorsque je sentirai mon verre en fin de repas. En bouche, c’est un festival de complexités. Par quel miracle un tel champagne peut-il être guerrier, envahisseur comme Attila, mais aussi charmeur comme Gene Kelly dans « Chantons sous la Pluie ». Nous nous regardons tous car c’est assez incroyable d’obtenir un champagne de cette force et de cette conviction. On évoque les chemins de la vie du vin et ses éventuels pics d’excellence qui sont à la base du concept des P2 et P3 (deuxième et troisième pics d’excellence appelés Plénitude 2 et Plénitude 3). Ce champagne à la palette aromatique infinie est très aidé par l’araignée qui n’est pas présentée dans le verre à pied évasé traditionnel mais en assiette, ce qui lui va bien.

Nous allons avoir maintenant quatre blancs sur le plat suivant, ce qui rend la dégustation très difficile car il y a un vin légèrement doux et un vin superbe qui a du mal à se placer au milieu des trois autres.

Le Riesling Clos Sainte Hune Trimbach 1975 est une belle expression du Sainte Hune, celle préférée par le père de Pierre Trimbach. Il a raison car le riesling est pur, vif, sans signe d’âge avec un grand équilibre et la précision d’un riesling pur.

Le même Pierre déclare que le Scharzhofberger Kabinett Egon Müller 1976 est bouchonné mais il ne l’est pas ce dont Pierre convient. Il est glycériné ce qui gêne plusieurs convives. Même s’il est peu accueillant, ce vin offre de jolis fruits, ce qui m’a moins gêné que d’autres et on verra au moment des vins de dessert que l’aspect glycériné est lié au style Egon Müller.

Le Vouvray Demi-sec Clos Naudin 2008 a 25 grammes de sucre. Il est apaisé et le sucre ne se sent presque pas, mais il s’extériorise quand même un peu, ce qui va gêner le vin suivant. Le vouvray est très frais, fluide, agréable malgré sa jeunesse.

Le Musigny Domaine Comte Georges de Vogüé blanc 1988 a du mal à cohabiter avec les trois autres et il aurait fallu un plat de plus, pour lui seul. J’ai eu la chance de commencer à le goûter avant les trois autres vins blancs. Il est noble, racé et c’est pour moi le plus complexe des quatre. Mon voisin le juge évolué ce qui ne me dérange pas du tout. Le Musigny est plus à l’aise avec les pétales de champignon cru, alors que la coquille avantage le vouvray.

Le Clos de Tart magnum 1988 est une merveille de fraîcheur et de fluidité. Ce vin racé se boit avec une telle facilité qu’on s’en enivrerait volontiers. Il forme un fort contraste avec le Musigny Domaine Comte Georges de Vogüé rouge 1993 que je trouve un peu torréfié, évoquant la truffe et les fruits noirs. Contrairement à Jean-Luc Pépin je ne crois pas que ce 1993 gagnera au vieillissement, mais c’est peut-être dû à cette bouteille. Le pigeon est délicieux et la chair rose convient surtout au Clos de Tart plus rose, alors que le fumé du pigeon convient au Musigny.

L’Hermitage La Chapelle Jaboulet Aîné 1978 est absolument superbe et c’est certainement le meilleur des 1978 de La Chapelle que j’ai bus. Il est d’une franchise et d’une lisibilité incroyable. Son message est direct, clair et épanoui, sans défaut. La bouche est pleine d’un jus quasi idéal. Un Hermitage de ce style, c’est un bloc de marbre de proportions parfaites.

L’Ermitage Cuvée Cathelin Jean-Louis Chave 1991 est très différent car il a des vibrations plus larges encore et un final qui rebondit, quasi inextinguible. Ce vin est beaucoup plus complexe et subtil. Il est vineux avec de fines notes de thé. On est dans l’excellence absolue. Le lièvre à la royale est remarquable et d’une légèreté que l’on n’attendrait pas d’un tel plat. C’est un régal qui convient aux deux vins.

Il aurait fallu filmer le comportement des convives face à un vin lorsque le vigneron est présent. Cela commence par une œillade que j’échange avec Caroline Frey, puis avec ma fille, puis un grand silence, jusqu’à ce que quelqu’un ose dire que le Vouvray Moelleux Perruches Clos Naudin 1947 est bouchonné, ce dont Philippe Foreau convient. Le nez de bouchon est très faible, sinon quelqu’un l’aurait immédiatement annoncé et la trace en bouche est faible aussi. Le vin a 180 grammes de sucre. On l’oublie un peu même si l’on peut percevoir et imaginer sa grandeur.

Le Scharzhofberger Beerenauslese Egon Müller 1971 est d’une grande puissance malgré un degré d’alcool qui n’est que de 7. Il a effectivement une approche glycérinée mais qui n’est pas gênante. Il est d’une complexité invraisemblable, pianotant des arômes dans toutes les directions de fruits frais, de litchi et autres fruits froids.

Le Vouvray Moelleux Goutte d’Or Clos Naudin 1990 a 320 grammes de sucre et franchement, c’est trop pour mon palais. Ce vin a été encensé par tous les critiques du monde et c’est une rareté dont Philippe Foreau nous a fait le cadeau. Il a des tonnes de fruits dorés luxuriants, mais le sucre n’est pas mon ami. Pour mon goût, aucun des trois vins de dessert n’a réellement créé une émotion de plaisir.

Le Champagne Billecart-Salmon Cuvée Elisabeth Salmon brut rosé 1990 est une respiration finale pendant que l’on grignote les délicieux palmiers. Ce champagne est de très haute qualité et se boit avec un infini plaisir. Sa richesse aromatique est à signaler. Il est de romantisme et d’amour courtois. Sa place en fin de repas est idéale.

C’est à peu près à ce moment que les SMS arrivent sur les téléphones des participants dont les familles s’inquiètent des événements terroristes qui endeuillent la capitale. Rentrer chez soi ou à son hôtel devient une aventure. Nous nous sommes endormis très tard ce soir de terreur.

Ce dîner est un des points culminants de mon année de passion car des vignerons amis viennent partager leurs beaux vins dans une ambiance où personne n’a rien à prouver aux autres. Si tel ou tel vin brille plus que d’autres, peu importe. Les deux vins qui m’ont marqué ce soir sont le Dom Pérignon P2 1995 et la Cuvée Cathelin Chave 1991. Mais les autres brillent par leur amitié.

Les discussions ont été passionnantes, parfois un peu techniques. J’ai retenu une phrase de Jean-Louis Chave à propos des ouvriers agricoles qui travaillent la terre, vantant les qualités de certains d’entre eux : « il a tout de suite pris le bon geste en sarclant la terre, et j’ai eu l’impression qu’il avait immédiatement adopté le geste ancestral parfait, ce qui m’a ému ». C’est la retranscription de mémoire de ce que j’ai entendu, qui m’a plu car j’avais l’impression que Jean-Louis Chave avait été illuminé par l’apparition d’un geste nimbé d’histoire familiale.

Alors que la quantité de vins était surnuméraire, nous avons honoré chaque vin sans difficulté. Ce dîner d’amitié a ravi chacun des participants.

Champagne Delamotte Blanc de Blancs Brut magnum (n’a pas été ouvert)

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Champagne Salon magnum 1999

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Champagne Dom Pérignon P2 magnum 1995

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Riesling Clos Sainte Hune Trimbach 1975

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Scharzhofberger Kabinett Egon Müller 1976

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Vouvray Demi-sec Clos Naudin 2008

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Musigny Domaine Comte Georges de Vogüé blanc 1988

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Clos de Tart magnum 1988

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Musigny Domaine Comte Georges de Vogüé rouge 1993

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Hermitage La Chapelle Jaboulet Aîné 1978

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Ermitage Cuvée Cathelin Jean-Louis Chave 1991

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Vouvray Moelleux PERRUCHES Clos Naudin 1947

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Scharzhofberger Beerenauslese Egon Müller 1971

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Vouvray Moelleux Goutte d’Or Clos Naudin 1990

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Champagne Billecart-Salmon Cuvée Elisabeth Salmon brut rosé 1990

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Photo d’ensemble, sans les vins de Clos Naudin non disponibles au moment de la photo

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avec les vins de Clos Naudin livrés au restaurant Laurent

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la couleur des quatre blancs secs servis ensemble

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l’invraisemblable similitude de couleurs entre le Vouvray 2008 et le Beerenauslese 1971

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de gauche à droite : Agathe Audouze que je regarde et qui me regarde, Jean-Luc Pépin, Caroline Frey, Jean-Louis Chave, Philippe Foreau, Pierre Trimbach, Bipin Desai, Jacques Devauges, François Audouze

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192ème dîner de wine-dinners au restaurant Taillevent mercredi, 11 novembre 2015

Le 192ème dîner de wine-dinners se tient au restaurant Taillevent dans le magnifique salon lambrissé du premier étage. La mise au point du menu est toujours aussi agréable avec l’équipe attentionnée sous la direction de Jean-Marie Ancher. J’arrive très tôt, vers 16 heures, pour ouvrir les vins. Un phénomène curieux m’interpelle. Le bouchon du Laville Haut-Brion 1987 tourne en même temps que je tourne le tirebouchon pour enfoncer la mèche. L’adhérence au goulot est donc faible. Instantanément je regarde le niveau du vin dans la bouteille. Il est dans le goulot. Une adhérence apparemment plus faible n’a eu aucune influence sur l’évaporation du vin. Le phénomène se répète avec l’Yquem 1958. Lorsque je pique le tirebouchon, le bouchon dérape vers le bas. Il s’extirpe facilement. Comme précédemment je regarde le niveau qui est lui aussi dans le goulot. Comment des faibles adhérences n’entraînent-elles aucune évaporation, c’est un sujet de réflexion et je n’ai pas la réponse. Le bouchon de la Romanée Saint-Vivant du Domaine de la Romanée Conti 1983 m’a demandé une force herculéenne pour le lever. Alors qu’il est absolument sain, il s’est brisé en quatre ou cinq morceaux. L’explication est simple. Au lieu d’être cylindrique, le goulot est resserré au niveau du milieu du bouchon, ce qui fait que le bas du bouchon est obligé de se comprimer s’il veut sortir, ce qui provoque ces cassures. Le seul bouchon qui s’est brisé du fait de l’âge est celui du Carbonnieux 1952. Les parfums de tous les vins à l’ouverture inspirent confiance. Tout va bien.

J’ai donc le temps de me rendre à l’Académie du Vin de France qui tient son assemblée et son dîner de Gala annuel au restaurant Laurent. Par une erreur d’agenda je n’avais pas noté cette date et si j’avais su, j’aurais modifié la date du 192ème dîner pour assister au dîner si chaleureux de l’académie. J’ai donc fait une apparition très courte qui m’a permis de saluer des vignerons que j’apprécie et de goûter quelques vins des académiciens au premier étage du restaurant Laurent. La Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanée Conti 2013, de trente ans plus jeune que celle que nous boirons ce soir, est d’une subtilité rare. Michel Bettane lui trouve des accents de syrah. L’Hermitage Chave rouge 2012 est absolument superbe, plein et d’un charme extrême, le Clos Saint-Denis Dujac 2013 a une belle puissance. Le Château de Beaucastel Chateauneuf-du-Pape 2013 est absolument superbe, d’un fruit rare. J’ai bu quelques bordeaux 2013, 2012 ou 2011 et dans la petit salle des vins doux, deux vins seulement, dont le Jurançon Quatuor Cauhapé 2014 que me commente avec fierté Henri Ramonteu, et il a raison, car il s’agit de la sélection du meilleur de quatre périodes de vendanges, vin très frais et léger qui ne fait pas ses 14°, et le Château de Fargues 2012, radicalement différent, qui exprime un joli botrytis. Je m’éclipse vite pour retrouver les convives du dîner au Taillevent.

Nous sommes dix, dont un norvégien et un suédois vivant en Norvège, tous deux amoureux du vin, un couple de jeunes chinois, deux français vivant à Singapour, deux provinciaux dont un vigneron bordelais et deux parisiens. Un ami parisien et la jeune chinoise ont participé à mes dîners. Les huit autres sont des bizuts. Le dîner se tient en anglais.

L’apéritif debout est l’occasion de donner les consignes d’usage pour profiter au mieux de ce dîner. Le Champagne Bollinger Année 1975 a une couleur déjà sensiblement ambrée. Le premier contact ne me plait pas trop, car il y a une amertume qui n’est pas métallique mais dans le même registre ingrat. Il faut en fait attendre un peu l’apparition des gougères pour que le champagne prenne de l’ampleur, s’aère et offre de beaux fruits jaunes et bruns. Il est tout simplement un peu plus vieux qu’il ne devrait car la noblesse Bollinger est là.

Le menu mis au point par Jean-Marie Ancher avec le chef Alain Solivérès est ainsi intitulé : Huîtres de l’Impératrice en gelée d’eau de mer / Noix de coquilles Saint-Jacques, beurre salé, pomme reinette et cidre / Filet de rouget barbet, sauce au vin rouge / Epeautre du pays de Sault en risotto, potiron et lard di Colonnata / Tourte de canard colvert « Tradition Taillevent » / Stilton / Variations sur mangue et pamplemousse.

Le Champagne Krug 1988 est absolument éblouissant. Contrairement au 1975 il est d’une folle jeunesse. Il a une puissance indestructible et une longueur qui nous emporte. Il est riche, extrêmement complexe et sa virilité est exacerbée. C’est un très grand Krug. Les huîtres sont magiques, goûteuses et fraîches, avec juste ce qu’il faut de salinité pour titiller avec bonheur le Krug. C’est un grand accord et un grand moment.

Je n’aurais pas dû mettre ensemble les deux blancs sur la belle coquille Saint-Jacques mais qui aurait dû être doublée pour les deux vins, car le bordelais en a souffert, alors qu’il est grand.

Le Château Laville Haut-Brion 1987 est une vin d’une grande pureté, au nez droit et minéral et à la belle complexité janséniste. A côté de lui, le Chevalier Montrachet Bouchard Père & Fils 1985 a un parfum envoûtant et sensuel et le goût est à l’avenant, riche, large, emplissant la bouche. C’est un grand vin épanoui et joyeux. La coquille est belle, de grande qualité, mais ne crée pas une vraie valeur ajoutée pour les vins.

Le Pétrus 1988 est une merveille de Pétrus dans une acception tempérée. Le nez est dense et profond. En bouche, on a des grains de truffes, de charbon, de belle matière et c’est le toucher de bouche qui est enthousiasmant. On le sent noble, structuré, de haute densité. Dès qu’on me sert le plat, je sens que le vin ne conviendra qu’à la chair du rouget et non pas à la lourde sauce au vin. Mettre Pétrus avec du rouget, c’est une de mes coquetteries. J’ai raison d’être coquet, car l’association rouget et Pétrus est immensément gastronomique. Mes convives sont aux anges.

L’accord qui va suivre est encore plus gastronomique. Le Château Carbonnieux rouge 1952 est le seul vin dont le niveau est à mi- épaule, ce qui n’a aucune influence sur son goût. Le vigneron bordelais qui dirige de nombreux domaines n’en revient pas de la performance de ce Graves. J’ai beau essayer de lui expliquer que cela vient de la « méthode Audouze » d’ouverture des vins, avec ce qu’il faut d’humour, il reste subjugué par la plénitude de ce beau bordeaux riche, opulent, marqué lui aussi d’un peu de truffe, et qui trouve en l’épeautre en risotto au lard un accélérateur de saveurs spectaculaire. C’est le plus bel accord du repas, même si les huîtres jouent au coude à coude pour la première place.

La tourte de canard est d’une richesse qui rivaliserait avec bien des lièvres à la Royale. La juxtaposition de deux vins fonctionne parfaitement dans ce cas. Le Chambertin Bouchard Aîné & Fils 1967 est étonnamment brillant, tant il exsude la sensualité. Je dis étonnamment, car on n’attendrait pas un 1967 avec cette largeur et cette générosité. C’est un grand chambertin, propulsé par la tourte.

La Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanée Conti 1983 avait cette particularité singulière que le haut du bouchon, juste décapsulé, sente la terre que dans mon imaginaire j’attribue à celle de la cave la plus vieille de la Romanée Conti. Autre particularité que j’adore c’est que le nez du vin est salin. C’est une caractéristique des vins du domaine. Le vin est élégant, délicat, suggérant plus qu’il n’impose ses complexités. Il sera couronné par les votes des participants. Le contraste entre le chambertin sensuel et la Romanée romantique est superbe à vivre sur fonds de tourte puissante et maternelle.

Le Château Sigalas-Rabaud Sauternes 1970 est un joli sauternes simple du fait de sa jeunesse mais de belle vibration sur un stilton plutôt gras, ce qui va bien aussi.

Le Château d’Yquem 1958 est d’un or glorieux. Le nez est riche et ce vin évoque plutôt la puissance d’un 1959 que celle d’une année plus réservée. C’est donc une belle et grande surprise sur un dessert absolument réussi par le pâtissier qui a présenté des goûts francs de mangue et de pamplemousse en un dessert d’une grande beauté.

Jean-Marie Ancher nous a posé une énigme mathématique, nous demandant de trouver l’année d’un alcool en relation avec le numéro du dîner. J’ai proposé 1948 car 192 est le quadruple de 48 mais la réponse est 1928, qui a les trois premiers chiffres du dîner et le « 8 » qui est la verticale du symbole de l’infini. Le Bas-Armagnac Domaine de Cavaillon J. Lassis 1928 en dame-jeanne est excellent, riche, combinant maturité et vivacité. C’est un beau point final à ce dîner.

Voter pour les vins du dîner est très difficile et je m’en veux d’avoir oublié Carbonnieux 1952 dans mon vote. Cinq vins ont eu l’honneur d’être nommés premier, la Romanée Saint-Vivant quatre fois, Pétrus et le Chambertin chacun deux fois et le Chevalier Montrachet et le Carbonnieux chacun une fois. Neuf vins sur dix ont figuré dans les votes de cinq vins sur les dix du dîner, ce qui est un beau score. Je suis le seul à ne pas avoir mis le vin du domaine de la Romanée Conti dans mon vote, sans doute parce que je le connais et le pratique souvent.

Le classement compilé du consensus est : 1 – Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanée Conti 1983, 2 – Chambertin Bouchard Aîné & Fils 1967, 3 – Pétrus 1988, 4 – Château d’Yquem 1958, 5 – Champagne Krug 1988.

Mon classement est : 1 – Chevalier Montrachet Bouchard Père & Fils 1985, 2 – Château d’Yquem 1958, 3 – Chambertin Bouchard Aîné & Fils 1967, 4 – Pétrus 1988, 5 – Champagne Krug 1988.

Le Taillevent a fait une prestation remarquable à tous les stades, élaboration, service du vin, service des plats et cuisine. Parmi les plats je retiens les huîtres et le dessert et parmi les accords l’épeautre liée au Carbonnieux, Pétrus et rouget et les huîtres liées au Krug.

Dans une ambiance cosmopolite, marquée notamment par l’enthousiasme des norvégiens, et celui du vigneron présent, nous avons passé un excellent dîner.

Champagne Bollinger Grande Année 1975

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Champagne Krug 1988

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Château Laville Haut-Brion 1987

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Chevalier Montrachet Bouchard Père & Fils 1985

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Château Carbonnieux rouge 1952

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Pétrus 1988

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Chambertin Bouchard Aîné & Fils 1967

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Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanée Conti 1983

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Château Sigalas Rabaud Sauternes 1970

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Château d’Yquem 1958

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