Rayas au restaurant Patrick Pignolmardi, 4 mai 2010

Le fils d’un ami de quarante ans est devenu lui aussi un ami très proche. Nous déjeunons au restaurant Patrick Pignol. Quand j’arrive – en avance – l’aspirateur est au milieu de la pièce. Maîtres d’hôtel et sommelier sont encore en jeans. Me suis-je trompé de jour ? Patrick et son épouse ont fait refaire la décoration du lieu pendant le week-end, et le nettoyage final se fait à la dernière seconde.

Pendant qu’on se prépare, j’ai le temps d’étudier la carte des vins du restaurant. C’est une des plus belles cartes de vin de Paris. Patrick gère les achats, et comme il est gourmet, il n’achète que le meilleur. Il y a des prix très chers lorsque Patrick veut gérer la rareté avec parcimonie et il y a des prix doux qu’il faut savoir aller chercher dans le livre imposant.

Je ne jette même pas un œil aux bordeaux qui ont définitivement quitté la raison. Je jette mon dévolu sur Château Rayas Châteauneuf-du-Pape 2000 qui fait partie des fondamentaux du bien boire. Si Raymond Domenech gérait la cave comme une équipe de foot, Rayas ne serait pas sur les bancs des remplaçants. Du moins, c’est ce qu’on aimerait que Domenech fasse.

Nous prenons le menu du jour, avec des ravioles de Saint-Jacques au jus corsé et le cochon de lait saisi au four légèrement pimenté au gingembre et à la coriandre. Nicolas carafe le vin. La couleur est légèrement tuilée, évoquant un bourgogne de vingt-cinq ans. Le nez est d’une rare subtilité qui m’évoque certains bordeaux comme les Graves. En bouche, mais c’est la première gorgée qui me piège souvent, je trouve le message un peu fermé, le vin jouant avec un petit bémol. En fait, il faut attendre. Progressivement le vin découvre l’une de ses caractéristiques uniques : c’est le plus bourguignons des Châteauneuf-du-Pape. Selon le plat, on suivra une délicieuse amertume, comme sur les ravioles, ou un velouté délicat, charmeur, enjôleur et captivant comme sur le cochon de lait. L’accord avec le cochon est admirable de confort. Mais le Rayas ne m’a pas donné l’émotion dont il est capable.

Un saint-nectaire un peu trop affiné n’est pas un bon partenaire. Sur une mandarine gentiment confite, un Klein Constantia Afrique du Sud 2005 crée un accord charmant et convaincant.

L’ambiance du restaurant est toujours aussi sympathique. La cuisine est précise et goûteuse. Ici on se sent bien.