académie – vins de 1934 à 1953 lundi, 3 décembre 2007

Pommard Cuvée des Dames de la Charité Ets Leroy 1934

 Cos d’Estournel 1942

 Chateau Léoville Las Cazes (on disait : Grand vin de Léoville) 1945

 Puligny-Montrachet Caves Nicolas 1947 de ma cave (le plus grand vin de la soirée selon beaucoup d’académiciens)

 

Le vin fou d’Henri Maire 1950 : quelle curiosité !

 Vega Sicilia Unico 1953 : une immense bouteille

Arbois Jaune Louis Carlier 1953

académie – vins de 1923 à 1933 lundi, 3 décembre 2007

je suis extrêmement ému par de telles bouteilles

Pommard 1923 origine inconnue

Chateau La Tour Blanche 1928 absolument magnifique et bouchon d’origine.

Sublime Chablis Fortier-Picard Maison Bichot 1929. On voit qu’il a voyagé !

 Cos d’Estournel 1933 étiqueté à nouveau au chateau, mais au bouchon d’origine

Séance de l’académie des vins anciens : 03 décembre 2007 lundi, 3 décembre 2007

Informations sur la 7ème séance de l’académie des vins anciens du 03 décembre 2007 :

Lieu de la réunion : restaurant Macéo  15 r Petits Champs 75001 PARIS  01 42 97 53 85

Date de la réunion : c’est le 03 décembre à  19 heures, heure absolument impérative.

Coût de la participation : 120 € pour un académicien qui vient avec une bouteille ancienne. 240 € pour les académiciens sans bouteille. Chèque à adresser dès maintenant à l’ordre de "François Audouze AVA" à l’adresse suivante : François Audouze société ACIPAR, 18 rue de Paris, 93130 Noisy-le-Sec.

(attention : à compter du 26/11, ne plus adresser aucun paiement. Paiement sur place le 3/12)

Inscription : dès le 1er septembre 07 par mail à François Audouze

Proposition de vins anciens : dès le 1er septembre 07 (indiquer toutes informations sur l’état et le niveau). Toute bouteille proposée doit être agréée par François Audouze

Dates limites : envoi du chèque : le 1er novembre. Livraison des vins : le 1er novembre.

Livraison des bouteilles :

Si vous déposez les bouteilles, faites le au bureau de la maison de champagne Henriot 5 rue la Boétie 75008 PARIS – tél : 01.47.42.18.06. C’est au deuxième étage. Indiquez bien votre nom sur votre paquet, mais surtout, n’écrivez rien sur les bouteilles et ne collez rien sur les bouteilles.

Si vous expédiez les bouteilles, faites le à l’adresse de mon bureau : François Audouze société ACIPAR, 18 rue de Paris, 93130 Noisy-le-Sec, et je les garderai dans ma cave.

Informations complémentaires :

Vous pouvez vous informer sur les précédentes réunions en regardant sur le blog.

Les vins annoncés (mise à jour du 29/11) soit 44 vins :

champagne Delamotte 1990 – champagne Delamotte 1990 – Pouilly Fumé Baron de L Ladoucette magnum 1982 – Château Clerc Milon 1982 – Vin Jaune ROLET 1979 – Y d’Yquem 1978 – Gattinara Riserva NERVI 1977 – Pinot gris Sélection de Grains Nobles Hugel  1976 – Gewürztraminer Vendanges Tardives Domaine Weinbach Collette Faller  1976 – Château Grillet Neyret Gachet 1975 – Champagne Brut  Prince De Bourbon Parme Abel Lepitre Reims  1975 – Echézeaux Jaboulet Vercherre 1973 – Moscato Passito di Pantelleria 1971 – Cape-Port SUDAFRICAIN KWV 1969 – Muscadet 1969 – Château Bel Air Saint-Emilion 1966 – Domaine Haut De Callens (Beautiran) Graves Supérieures 1/2 Sec 1964 – Bourgogne aligoté Côtes de Nuits 1962 – Château Bellevue (Montagne Saint-Emilion) 1961 – Château Bernisse Castelnau Sauternes 1961 – Martinez Lacuesta Reserva Especial de 1960 – Moulin à vent Patriarche Père & Fils 1959 – Rioja El Siglo 1959 – Pommard Thorin 1959 – Nuits Saint Georges Bouchard Ainé et Fils 1959 – Malvoisie Bodegas El Griffo, Lanzarotte # 1957 – Hospice de Beaune Cuvee des Dames Hospitalieres Poulet 1957 – Vin Fou d’Henri Maire 1955  – Château Moulinet 1955 – Château Roumieu 1955 – Château Gilette demi-doux 1954 – Vega Sicilia Unico 1953 – Arbois jaune Louis Carlier 1953 – Champagne Moët & Chandon Dry 1952 – Hermitage La Sizeranne Chapoutier années 50 – Puligny Montrachet Caves Nicolas 1947 – Château Léoville Las Cases 1945 – Cos d’Estournel 1942 – Pommard, Hospices de Beaune, Cuvées Dames de la Charité Ets Leroy & Co 1934 – Cos d’Estournel 1933 – Chablis Maison Bichot 1929 – Château La Tour Blanche, sauternes 1928 – Pedro Ximenez 1927 – Pommard (négoce illisible) 1923

visites du blog en novembre 2007 samedi, 1 décembre 2007

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Latour 1907, cent ans mais fatigué, et Yquem 1962 éblouissant samedi, 1 décembre 2007

Je suis fatigué par les deux jours de Grand Tasting, aussi je rentre assez tôt à la maison. Ma fille et mon gendre sont là. Les vins actuels, c’est bien, mais j’ai besoin de revenir sur mes terres.

J’ouvre Château Latour 1907 et le bouchon d’origine s’éclate en mille morceaux. Le nez est superbe. Presque trop superbe, aussi je recouvre le haut de la bouteille pour qu’il n’y ait pas trop d’aération. J’ouvre une demi-bouteille de Chateau d’Yquem 1962, à la couleur superbe d’acajou. Le nez est fantastique. Tout se présente bien. Ma femme va préparer une barbue et un saint-pierre pour le Latour et un faux sabayon de pamplemousse et orange pour l’Yquem. J’attends la suite avec impatience.

L’expérience a eu du bon et du moins bon. La bouteille du Château Latour avait un niveau bas, ce qui était un risque. Ma femme s’étant trompé sur l’heure de cuisson des poissons nous avons dû passer à table une heure plus tôt, ce qui fait que le vin n’avait pas eu le temps de se recomposer. Je saisis la bouteille pour servir et je vois à mon grand étonnement (quand j’ouvre un bouchon en mille pièces, je ne regarde que ça), que la bouteille est très antérieure à 1907. C’est en 1908 ou 1909 qu’on a utilisé une bouteille de réemploi. Je verse dans les verres et la couleur est assez pâle. J’ai pris de beaux et grands Riedel, et les arômes sont beaux. En bouche, ce n’est pas blessé, c’est du vin, mais c’est du vin fané. Plus je verse de la bouteille et plus le vin est concentré et foncé. Ce n’est qu’en fin de bouteille que les dernières gorgées ont été du vrai Latour.

Ce vin fatigué n’était pas devenu aigre ni sûr. Il était buvable. Mais franchement, ce n’est pas un grand vin. Sur le poisson, l’accord est brillant, car la chair du poisson seule, dans sa pureté, est extrêmement utile pour le vin. La chair du poisson a bien aidé le vin. Le meilleur des deux est le saint-pierre. Ma femme a fait une simple purée de pomme de terre légère qui ne perturbe pas le vin. En sentant le verre où restait du dépôt, plus d’une demi-heure après, l’odeur est magnifique. L’expérience s’arrêtait là.

Le sabayon tenté mêle jaune d’œuf et jus de pamplemousse. C’est absolument inadapté au Château d’Yquem 1962. Ce vin est doré comme un coing, plus doré en verre que dans la bouteille. Son parfum est enivrant et nous sommes touchés par sa perfection. Il dégage des saveurs de coing, de thé, de pâte de fruit. Sur les pamplemousses, il met en valeur son thé. Sur un petit pot de bébé pomme et banane, dont j’ai prélevé une cuiller, l’Yquem devient banane. Sur une mandarine, il est délicieux, chantant, poussant ses notes de pâtes de fruits et de thé. Et mon gendre poêlant quelques tranches de pommes Golden qu’il commença à caraméliser à peine, la mise en valeur fut agréable. Mais en fin de compte, ce fut tout seul que cet immense Yquem fut le plus brillant. Ayant encore le frais souvenir d’une verticale de 28 millésimes d’Yquem, c’est avec un seul Yquem que je prends le plus de plaisir. Ce 1962 est un très bel Yquem, puissant, généreux, joyeux, qui nous a enchanté par sa perfection qui contrastait avec la fatigue du Latour 1907.

Nous avons bu ce soir un vin de juste cent ans. Il fut l’ombre de lui-même, malgré une fugace fulgurance. L’Yquem a sauvé la mise. Ce fut un petit bonheur seulement.

Le Grand Tasting, deuxième jour samedi, 1 décembre 2007

Le deuxième jour du Grand Tasting débute sur une « Master Class » consacrée à Moët & Chandon présenté par Benoît Gouez, le chef de cave qui fait l’assemblage du champagne le plus diffusé dans le monde. D’un discours très clair nous apprenons que « la grande maison » comme on l’appelle possède mille hectares dont 600 de grands crus, et achète les raisins de 2500 hectares supplémentaires, ce qui fait 200 crus différents dont la diversité requiert du talent à l’assemblage. La vision de Benoît est « d’être sur le fruit », comme il l’explique. Sa mission est de concilier qualité et quantité.

Le champagne Moët & Chandon Brut Imperial nous est servi en magnum, comme les quatre de cette réunion. Dans l’odeur, l’alcool domine. La bulle est bien dosée. Le non millésimé doit avoir de la constance. Il est frais, bien servi. On sent qu’il y a du vin de réserve plus mûr : du 2004 essentiellement et 30% de 2002 . C’est sans doute cela qui donne un petit goût toasté. Il y a 20 à 30% de chardonnay, 30 à 40% de pinot noir et 30 à 40% de pinot meunier. Le dosage de cette cuvée est de 11 grammes. L’assemblage est au cœur de l’action.

Le champagne Moët & Chandon rosé Brut Imperial en magnum est pour moi plus rosé que champagne. Je ne l’aime pas trop. Benoît dit qu’il a une suavité anachronique dans le monde des rosés. Il y a 50% de pinot noir et 50% de pinot meunier. C’est effectivement assez confortable, mais je préfère d’une façon générale le picotement du champagne blanc à la douceur du champagne rosé.

Le champagne Moët & Chandon Grand Vintage 2000 a un nez très minéral. Ce qui frappe c’est sa douceur. Il est charmeur comme pas deux. Benoît Gouez est présent chez Moët depuis 1998 et 2000 est son premier millésime. C’est un champagne de rêve, bien fait. Il est romantique, pamplemousse et ananas et d’une belle longueur. J’ai pensé à des plats qui doivent respecter sa douceur, son charme et son romantisme, comme le ris de veau ou la coquille Saint-Jacques.

Le champagne Moët & Chandon rosé 2000 a une magnifique couleur saumon ou pèche. Le nez est assez discret. C’est un rosé bien agréable,  mais je préfère dix fois le blanc, brillant compagnon de gastronomie.

C’est intéressant de passer ensuite à la Master Class où Vianney Fabre, responsable de l’exportation, présence trois vins de Bollinger. Il raconte l’histoire de la famille et les choix très précis. Le raisin vient à 70% de vignobles de la maison qui possède 180 hectares de vignes. La maison Bollinger entretient encore à plein temps un tonnelier pour réparer les vieux tonneaux de mûrissement, puisque l’on n’utilise jamais de fût neuf, les plus vieux ayant jusqu’à quatre-vingts ans. Bollinger entretient une « librairie », que Vianney compare à une boîte à épices, de 500.000 magnums avec sucre et levure pour donner un quart de mousse. Ces magnums servent à l’assemblage des non millésimés.

Le champagne Bollinger spécial cuvée est le non millésimé de la maison. Il est particulièrement doré. Il y a plusieurs millésimes car l’assemblage comporte plus de 50% de vins de réserve. Le nez est très pur, intense. La bulle est belle. Le vin est fumé, toasté, pain d’épices. J’aime sa forte personnalité et sa grande élégance. Le final est léger, comme un coup de fouet sur la langue. Le dosage est de 7 à 9 grammes. Sa force permet d’en faire un vin de gastronomie.

Le champagne 2003 by Bollinger a été déjà décrit lors de la Master Class d’hier. Je peux vérifier que les informations données sont les mêmes ! Le nez est un peu dur. En bouche, c’est un champagne de fleurs blanches, élégant et romantique. Il est très suggestif, doux et discret. Il est très orienté chardonnay, ce qui n’est pas le style habituel Bollinger mais on sait les problèmes climatiques que cette année a connus. Il n’y a que 3,1 g de dosage. Ce vin a été vinifié à 100% en barriques et son vieillissement en bouteilles avec bouchons naturels explique la forme du haut de la bouteille, car le dégorgement est fait à la main. C’est un vin très frais, à la bulle noble.

Le champagne Bollinger Grande Année 1999 est la cuvée de prestige. Il y a 63% de pinot noir et 37% de chardonnay. Le champagne est composé de 82% de grands crus et la totalité est élevée en barrique. On sent une grande noblesse et une forte personnalité. Fort en bouche, il plombe le palais ce qui ne l’empêche pas d’évoquer des fleurs blanches. Le final est noble. Je le vois très bien être le champagne de tout un repas, car il autorise toutes les audaces culinaires. Vianney dit qu’il est féminin quand le 1997 est masculin. De bien beaux champagnes.  

Ces salons étant très fatigants par les allées et venues que l’on fait entre les stands, par les sautes de température et par de vilains rhumes qui se propagent comme les mauvaises nouvelles à la Bourse, c’est-à-dire à la vitesse de l’éclair, je suis allé déjeuner avec ma fille aînée en dégustant un Beaune Clos des Mouches rouge Maison Chanson 2005 que m’a gentiment donné l’excellent sommelier qui a réglé avec une minutie digne d’éloge le service des vins de toutes les Master Class. Le vin est joyeux et intense comme cette rencontre avec ma fille.

Je garde le souvenir d’un Grand Tasting efficace, où des vignerons de grande qualité font goûter leurs vins à un public nombreux et connaisseur. C’est pour moi l’occasion d’être proche de Michel Bettane ou Bernard Burtschy dont la connaissance du vin, de sa géographie et de son histoire ne cessent de m’émerveiller. C’est aussi l’occasion de rencontrer des vignerons que j’apprécie pour parler des plaisirs que procurent leurs chefs-d’œuvre.

Le Grand Tasting, premier jour vendredi, 30 novembre 2007

Le Grand Tasting démarre son premier jour et c’est toujours intéressant de voir les vignerons qui installent et débouchent leurs vins qui vont être livrés aux commentaires du public. L’assistance est nettement plus nombreuse que l’an dernier et paraît d’une grande qualité. Il y a de nombreux connaisseurs. La qualité du public répond à la qualité des vignerons, car il y a dans les stands de très grands noms du vin. On m’a proposé par amitié d’être à la table des conférenciers pour les « Master Class » de mon choix, pour apporter d’éventuelles anecdotes au-delà des commentaires brillants de Michel Bettane, Thierry Desseauve ou Bernard Burtschy. Je suis donc à la première session aux côtés de Marcel Guigal, Philippe d’Halluin de Mouton, Eric Rousseau, Mathieu Kaufmann de Bollinger, monsieur Humbrecht père et son chef de culture prénommé Alexandre pour déguster les vins en compagnie d’une assemblée de près de 200 personnes.

Le champagne Bollinger 2003 est le vin de toutes les anomalies. Il a donc reçu une étiquette qui diffère de celles des champagnes habituels. Il s’appelle 2003 by Bollinger et son carton d’emballage met en exergue les vignes sous la neige. En 2003, il a fait moins onze degrés le onze avril. 80% des grands crus ont eu des bourgeons brûlés par le froid. La récolte a été étonnamment précoce, sur seulement neuf jours du 21 au 30 août. L’acidité du vin est inférieure à la moitié de la norme habituelle, et, dernière anomalie, alors que Bollinger distribue en ce moment le millésime 1999, voilà que l’on sort en même temps le 2003. Mathieu Kaufmann dit que cela ressemble à ce qui s’est passé pour le millésime 1976. Il se pourrait donc que ce champagne hors norme vieillisse lui aussi. Je trouve son nez très racé, une belle fraîcheur en bouche, très peu d’acidité. On me souffle : compote, épices, fruits cuits, ce qui est vrai. La composition du vin a été faite avec seulement trois crus au lieu de quinze, mais ce sont les trois crus historiques de Bollinger. Je trouve à ce vin composé d’un tiers de chardonnay et de deux tiers de pinot noir une belle longueur vineuse.

Le Riesling Clos Windsbuhl Zind Humbrecht 2002, d’un domaine fondé en 1959, a un nez classique de pétrole auquel s’ajoutent les fleurs blanches. En bouche l’attaque est sucrée, puis le poivre s’installe avec des esquisses de violette et de rose. Le chef de culture Alexandre parle de biodynamie avec des mots enthousiastes mais mesurés ce qui rend le discours très crédible. Ce vin est très pur, mais on sentira mieux son talent dans quelques années.

Le Chambertin Clos de Bèze domaine Armand Rousseau 2004 est présenté par Eric, petit fils du fondateur de ce domaine en 1910. La robe est rose grenat, d’un rubis clair. Le nez est très pur. En bouche, c’est d’une clarté absolue. Le vin est magnifique et c’est bien la pureté qui est remarquable.

Le Château Mouton-Rothschild 2005 a une couleur très sombre. Le nez est d’une densité immense à côté de celui du Chambertin plus léger. Le nez est lourd. En bouche, c’est d’une densité incroyable et l’on comprend que ce vin ait été encensé par la critique. Plusieurs personnes parlent de l’extrême précision des tannins. Ce vin combine élégamment force et finesse et son final est aérien. Il y a là la promesse d’un très grand vin.

La Côte Rôtie La Turque Guigal 1999 qui n’est que le quinzième millésime de La Turque a une couleur de sang de pigeon, d’un beau rubis sur les parois du verre. Le nez est un parfum doucereux. L’attaque du vin est d’une fraîcheur incroyable. La finale est mentholée, aérienne. C’est beau comme tout. Marcel Guigal explique que la côte blonde est calcaire et la côte brune est oxyde de fer. La Turque est une côte brune, la seule ayant une exposition plein sud, et Marcel parle d’un vin androgyne. La fraîcheur est éblouissante.

Les trois expressions de vins rouges sont saisissantes. J’ai suggéré aux deux cents personnes présentes de ne pas dire : « j’ai préféré tel vin » car il faut aimer les trois, qui représentent ce qui se fait de mieux dans trois régions qui font des vins très différents. Nous avons goûté trois vins qui représentent l’extrême de la qualité possible. Trahissant les conseils que je donne, je dirais que j’ai adoré La Turque. J’en ai trop dit ?

La deuxième « Master Class » à laquelle j’assiste me place à côté de Véronique Boss-Drouhin qui parle avec un charme rare des vins de sa propriété.

Le Chablis Grand Cru Les Clos Joseph Drouhin 2002 a un nez très discret. La robe est déjà d’un jaune qui commence à se frotter d’or. L’attaque est ensoleillée et le vin est joyeux en bouche. Alors que Michel Bettane vante ses qualités de chablis, je le trouve plus rond et moins orthodoxe que le Bougros de William Fèvre. Son final enlevé est très beau. Ce vin doit bien vieillir.

Le Beaune Clos des Mouches blanc Joseph Drouhin 2004 a un nez minéral très proche des nez de Meursault. Le nez est intense et le pétrole se supporte bien. Il y a des arômes de noisette grillée. Le vin est beaucoup plus ample. Le vin est très frais, très fluide et sa finale est fraîche.

Le Nuits-Saint-Georges Richemones 1er Cru Joseph Drouhin 2005 provient d’une parcelle dont le vin n’est normalement pas vinifié sous son appellation mais intervient dans des assemblages. Il a été jugé tellement bon qu’il a été décidé de le sortir sous son nom. L’attaque est forte en bouche. Il y a du poivre, un goût assez âpre, mais il a du charme et de la séduction. Il a de la force et des tannins riches qui attaquent la bouche. Il va grandir. C’est un vin original qu’il faut laisser vieillir.

Le Clos Vougeot Joseph Drouhin 2001 a une belle couleur assez pâle. L’attaque en bouche est exceptionnelle. Très fruité, doté d’une palette aromatique large, il frappe par sa belle fraîcheur en bouche. Ce bel aperçu de la maison Joseph Drouhin fut convaincant.

Je suis allé ensuite dans les allées, plus pour parler que pour déguster de façon systématique. J’ai goûté un Château Gilette 1985 encore gamin mais très prometteur, le Clos de Tart 2006, un gamin déjà très doué et le Clos de Tart 2001 d’une réussite technique exemplaire, la cuvée Femme de Duval Leroy 1998 bien faite mais manquant peut-être d’un peu de folie, un très jolie cramant de Mumm, quatre champagnes de Jacquesson que j’ai adorés dont le 732, puis les millésimes 1996 et 1990. J’ai un faible pour le 1996. J’ai bu un champagne Philipponnat Clos des Goisses 1999 dont j’aime la pureté et une magnifique cuvée du champagne Mailly.

Je suis allé voir Hervé Bizeul, vigneron d’avant-garde au verbe aussi audacieux que ses vins, et sur quatre rouges que j’ai bus, dont un Clos des Fées vieilles vignes et un Clos des Fées auxquels j’ai du mal à adhérer car les pistes explorées dont je comprends le risque sont extrêmes pour moi, c’est la Petite Sibérie qui m’a enchanté, car même si l’on est à l’avant-garde de l’avant-garde, je respecte la démarche et mon palais l’accepte. J’aimerais que la pendule puisse s’accélérer pour que je boive ce vin dans vingt ans. Il devrait être spectaculaire.

Je suis de nouveau retourné en « Master Class » car Alain Senderens allait expliquer sa démarche gastronomique en faisant des travaux pratiques sur des vins que nous allions goûter. J’aurais aimé dialoguer avec lui sur ses propositions, car la confrontation de nos points de vue eût été enrichissante, mais Alain était trop dans son sujet et c’est un plaisir immense de l’entendre, quand on y arrive, car Alain changeait constamment son micro de place, le son se perdant quand il bougeait les bras ce qui fut fréquent. Alain a expliqué sa démarche dont la majeure est le vin que le plat doit suivre et non précéder. Il dit une chose qui mériterait d’être méditée : « les accords aromatiques sont les plus faciles. Les accords tactiles sont les meilleurs ».

Le Meursault Charmes Bouchard Père & Fils 2001 a un nez extrêmement parfumé. En bouche c’est aussi parfumé. Alain pense à une langoustine croustillante dont il ajouterait à la sauce épicée des zestes de citron. Je partage cette analyse si la langoustine est volumineuse. La chair d’un gros turbot irait sans doute aussi.

Le Riesling Grand Cru Kessler Heisse Wanne maison Dirler 1998 a un nez subtil. En bouche, c’est doux, fruité. Il y a une légère amertume de thé. L’idée d’Alain du foie gras poché dans un bouillon aux épices est lumineuse. Il pense aussi à homard et volaille cuite dans l’argile. J’aurais vu aussi un veau avec une sauce au thé.

Le Beaune Grèves rouge Chanson 2005 est dur. C’est beaucoup trop jeune, quelle que soit sa promesse. Alain dit qu’il faut faire disparaître la sécheresse du vin. Il pense à un perdreau au choux ou bien à « l’oreiller de la belle Aurore », pâté en croûte servi froid, plat légendaire de Brillat-Savarin que peut-être seulement quatre chefs font encore en France, et seulement sur commande. J’ai aimé le final extrêmement mentholé, mais j’ai considéré qu’il vaudrait mieux laisser vieillir ce vin que de lui trouver un compagnon culinaire.

Le Chateau Suduiraut 2002 a un nez superbe. Le final est salin ce qui est curieux. Le vin combine élégamment sucre et acidité. La suggestion tourne autour des agrumes, mais Alain passera plus de temps à éreinter l’ineptie de mettre sauternes et foie gras qu’à suggérer un plat.

C’est sur le Maury Mas Amiel, cuvée Charles Dupuy, vintage 2005 qu’Alain Senderens me parut le plus extraordinaire, car il pense à son célèbre canard Apicius. Et c’est sûr que ce vin bien jeune dégusté déjà la veille et que j’ai adoré trouverait sa voie auprès de ce canard.

Alain Senderens a parlé de sa relation au vin en disant : « le vin me parle, et c’est lui qui corrige mes plats ». Grand moment de connivence avec un chef de génie.

Je devais assister à un cocktail après cette journée, réunissant tous les vignerons qui partageraient leurs vins entre eux, sans public. La fatigue était trop forte. J’ai abandonné ce qui fut sûrement un grand moment de convivialité.

dîner des grands prix du vin Bettane & Desseauve jeudi, 29 novembre 2007

Le Grand Tasting est un événement qui compte dans le monde du vin. C’est le successeur du feu « salon des grands vins » rebaptisé, géré maintenant par Michel Bettane et Thierry Desseauve. Ces deux compères ont recouvré le droit de publier un guide des vins sous leur nom, ce qu’ils ont fait avec bonheur et succès depuis 2007. La veille du salon se tient le « dîner des grands prix du vin Bettane & Desseauve », ce qui est l’occasion de retrouver au Grand Hôtel de nombreux vignerons et gens de la presse et du vin. Donner des prix, c’est sacrifier à cette mode des médailles et autres récompenses, qui font évidemment plaisir aux lauréats et un peu moins au nominés comme on dit aujourd’hui. Il y a cinq prix aux noms sympathiques. Le prix « le bonheur tout de suite ! » est attribué au champagne Fleury pour son brut rosé. Le prix « la découverte de l’année est attribué au jurançon du domaine Bellauc pour son Jurançon supérieur 2005. Le prix « le vin étranger de l’année » couronne deux vins, un suisse du domaine Cornulus, le Clos des Corbassières Cornalin 2004 et un argentin des vignobles Michel Rolland, le Val de Flores 2004. Le prix « le meilleur vin français de l’année » est aussi partagé en deux, pour le Château Pavie-Macquin 2005 et pour le Clos de Tart 2005. Enfin le prix « l’homme de l’année » est remis à Eric Rousseau du domaine Armand Rousseau, vinificateur d’un immense talent.

Avant le dîner je bavarde avec des aristocrates du vin comme Marcel Guigal, Philippe d’Halluin de Mouton et bien d’autres grands vignerons tout en buvant un Champagne Laurent Perrier Brut Millésimé 1999 qui glisse en bouche avec bonheur et un Champagne Henriot Cuvée des Enchanteleurs 1995 de belle race et d’une grande précision. Nous passons à table dans la magnifique salle dessinée par Garnier, l’auteur de l’Opéra éponyme, mais la sonorisation assez épouvantable rendra inaudibles certains propos tenus par les vignerons primés, ce qui est dommage. Le repas ne restera pas gravé dans les mémoires sauf sur une curiosité : dans le plat « oursin farci au tartare de fruits de mer », j’ai reconnu des crevettes grises, des pétoncles et des huîtres lovés dans une demi-coquille d’oursin. Point d’oursin, sauf le test, ce qui est piquant. L’attention se portait plus volontiers sur les vins. Le Chassagne-Montrachet Abbaye de Morgeot Louis Jadot 1999 est un blanc joyeux, d’une belle définition. Je ne lui vois pas de défaut. Il est précis, clair, sans fanatisme. Et la comparaison est intéressante avec le vin suivant, un Chablis Grand Cru Bougros William Fèvre 2005 que je trouve absolument chantant, magnifique, et dégageant une émotion beaucoup plus intense. Le Château Doisy-Daëne, Barsac 2002 est très précis et bien fait mais il écrase de sa puissance un foie gras amer. C’est décidément violent avant les rouges. Le vin qui suit est un cadeau d’une rare générosité pour plus de cinq cents personnes. C’est Château Latour 1986. Le nez est incroyablement minéral, de pétrole. Cette odeur s’estompera lorsque le plat de veau paraît et réapparaîtra dès que la viande est consommée. On ressent un grand vin, surtout par comparaison aux deux autres rouges, mais on est loin de la brillance habituelle de Latour, impression qui sera confirmée par des convives d’autres tables. Le château Prieuré Lichine 2004 est un peu fermé en ce moment et le Château Fonplégade saint-émilion 2005 veut trop jouer les vins du nouveau monde pour qu’on succombe à son charme, malgré le côté flatteur évident.

La divine surprise, si l’on peut dire, car je suis familier de ces vins, c’est le Maury Mas Amiel cuvée Charles Dupuy vintage 2005. J’adore le Maury, et celui-ci nous fit un numéro amusant. Quand on le boit seul, c’est du bois et de la griotte, combinés élégamment. Et dès que le délicieux dessert au chocolat et café entre en scène, le vin s’assemble, s’arrondit, perd le bois et la griotte au profit d’un vin aérien, d’une légèreté impressionnante. Je n’ai jamais bu un Maury aussi aérien que celui-ci.

Les discussions allaient bon train entre gens du vin heureux de se rencontrer et se retrouver. Les deux vins de cette soirée sont pour moi le Maury tout en finesse légère et le Chablis Bougros au charme élégant. Une bien belle soirée.

dîner du Grand Tasting jeudi, 29 novembre 2007

La magnifique salle classée du Grand Hotel de l’Opéra.

 A ma table, deux convives parlent au téléphone, chacun de leur côté, ou se parlent-ils ?

 

Dans la coquille, ne cherchez pas d’oursin, il n’y en a PAS, malgré le titre du menu.

 

 accord divin avec le Maury