Déjeuner au Bofinger et atelier de caviars Kaviarimercredi, 13 décembre 2017

On dit que les voies du Seigneur sont impénétrables et je me suis toujours demandé quelle était la pertinence de l’adjectif « impénétrable ». Incompréhensible, peut-être, mais impénétrable, ça ferme des portes. Bref. Ayant été invité par Valérie Costa à un déjeuner à la manufacture des caviars Kaviari, j’ai découvert un lieu, une ambiance et des produits qui m’ont posé cette question : pourquoi ne pas faire un de mes dîners en ce lieu ? J’ai des alcools blancs antiques qui appellent le caviar et je ressens chez Kaviari une envie de mettre en valeur leurs caviars de façon gastronomique.

Alors, pourquoi ne pas mettre en commun nos énergies ? On voit de temps à autre des dîners à quatre mains où deux chefs croisent leurs talent. Mettre en commun mes vins et les caviars de Kaviari est une idée possible. Allons-y. Rendez-vous est pris avec Karin Nebot qui, avec sa famille, est en charge de la manufacture. Nous avons prévu un travail en atelier à 14 heures et un déjeuner auparavant. Pour éviter tout aléa de circulation, nous allons déjeuner à la Brasserie Bofinger où j’ai des souvenirs antiques, avant que ce lieu ne fût Flo. Karin me rejoignant à la manufacture après mon arrivée me demande si je veux goûter quelque chose. Je réponds oui. Un caviar osciètre bien gras est le meilleur préparateur possible pour le déjeuner que nous allons faire.

Arrivés à la brasserie, le cadre est toujours aussi beau, le personnel toujours aussi brasserie. Je commande un Champagne Dom Pérignon 2006 qui me semble faire une suite logique à l’osciètre. Pour qu’il y ait continuité, nous prenons des huîtres Gillardeau n° 3 et je commande une sole pendant que Karin commande un saumon qui va apparaître beaucoup trop cuit selon une tradition culinaire française. Ma sole, à la sauce un peu lourde mais à la pomme de terre légère est beaucoup plus agréable. Le Dom Pérignon est très aidé par l’huître pour trouver une vibration et une assise que j’apprécie. Le champagne est franc, droit, facile à comprendre et de belle mâche. Comme il en reste nous prenons un morceau de munster bien affiné.

De retour à la manufacture Kaviari, Karin est très sollicitée. Elle me laisse seul avec trois personnes attablées qui finissent leur repas. Nous bavardons et bien évidemment nous trouvons des sujets d’intérêt commun. On me propose pour éliminer la mémoire du munster un Aquavit que je ne refuse pas.

J’ouvre la bouteille que j’avais prévue pour l’atelier, un Champagne Substance Jacques Selosse dégorgé le 29 juillet 2013. Mes voisins de table en profitent et sont comme moi conquis par l’invraisemblable tension de ce champagne. Il est vif, il est conquérant, mais il est capable d’être insolent au point d’offrir un fruit calme, aussi bien rouge que jaune. Un régal.

Avec Pascale, la responsable – entre autres – de l’atelier, nous passons à la partie studieuse de la dégustation. Le caviar « transmontanus », très noir, italien, évoque immédiatement pour moi la pierre alors qu’il évoque la terre pour Karin et le sel, très prononcé. Je le trouve un peu court.

Le caviar « osciètre », qui vient de Bulgarie est le caviar parfait. Il a du gras, une belle épaisseur, une grande longueur et un sel bien dosé. Le Selosse le propulse à des hauteurs rares. Karin est impressionnée par ce champagne long et percutant. Je le trouve absolument exceptionnel de puissance contenue et de persuasion.

Le caviar « cristal » est d’une couleur qui fait penser à un caviar albinos. La couleur est d’un marron gris clair. On est troublé par l’attaque déroutante mais le finale est très équilibré. Au deuxième essai, l’attaque ne rebute plus et il reste un caviar très intéressant et hors norme qui donne envie de l’essayer en gastronomie.

Le caviar « Berry » est d’un beau noir. Il est agréable, mais il fait trop bon élève. C’est un jeune élégant mais trop conventionnel.

Par rapport à l’esquisse de dîner que j’avais en tête, il y a de quoi faire de beaux accords pour mettre en valeur les alcools blancs du 19ème siècle que j’ai en cave. Le caviars sont bons, les idées sont là. A nous de les transformer en évènements rares.

un peu d’osciètre avant le déjeuner

le transmontanus

l’osciètre

le cristal

le Berry