Dégustation des 2009 DRC, deux Echézeaux plus anciens et un Bâtardjeudi, 24 juin 2010

A 10 heures précises, le groupe de visite se forme au domaine de la Romanée Conti. En plus de mes amis, il y a environ huit autres américains, de Houston, de Californie et de Chicago. Il y a de lourds collectionneurs et des professionnels du vin aux caves exponentielles. Après un petit mot de bienvenue d’Aubert de Villaine, la visite est conduite par Bernard Noblet, l’homme qui fait les vins du domaine depuis de nombreuses années, à la suite de son père. L’anglais de Bernard Noblet est assez succinct, aussi ai-je joué le rôle de traducteur. Que se serait-il passé si je n’avais pas rejoint ce groupe ? Je ne sais pas. Les métaphores de Bernard sont éminemment poétiques, ce qui rend la traduction difficile, et quand Bernard se lance dans des envolées lyriques sur les charmes féminins des vins du domaine, la pudeur me commande de ne pas traduire tout ce qui est dit.

Nous descendons en cave et commençons par le Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2009, et Bernard nous indique que l’Echézeaux est dans une autre cave. Bernard insiste sur le fait que les vins sont dans des phases très différentes de leur fermentation malo-lactique et nous précisera pour chaque vin l’état de fermentation que Bernard compare au moment de la puberté. Le Grands-Echézeaux donne une sensation de perlant. Sa « malo » comme on dit n’est pas finie. Le vin est très vert mais il a beaucoup de matière. Il est puissant et riche.

La Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanée Conti 2009 est un vin plus doucereux, au nez nettement plus agréable. Sa malo est plus avancée. Ce vin a de la finesse et un final plus poivré. Bernard signale l’acidité des tannins et compare ce vin à une femme féline. J’aime le poivre et la délicatesse.

Le Richebourg Domaine de la Romanée Conti 2009 a un nez superbe de force. En bouche, le vin est droit et musclé. C’est le vin le plus en retard dans sa fermentation malo-lactique. Bernard signale un peu de réduction dans ce vin. Je l’aime beaucoup.

La Tâche Domaine de la Romanée Conti 2009 a un nez plus fermé. Sa malo est aux trois quarts faite. Le vin est plus fluide, mais a quand même de la richesse et beaucoup de matière. Bernard dit qu’il est très exubérant et monumental. Il est plus anguleux que le Richebourg qui est plus sphérique. Ce vin me semble être un monument, très beau à boire. Le final est très signé DRC, avec des feuilles vertes que l’on mâche et du poivre.

La Romanée Conti DRC 2009 a fini sa malo. Il n’est donc plus impubère. La couleur est traditionnellement plus claire et Bernard compare avec une jolie femme qui n’a pas besoin de maquillage pour paraître belle, la couleur du vin étant le maquillage dans sa métaphore. Le vin est très féminin, au nez subtil. En bouche, le vin est frais, complexe, léger et subtil. Son toucher est soyeux et Bernard dit qu’il a la légèreté de la soie et parle de dentelle. Le final est très persistant et on retrouve la complexité du terroir. Bernard parle de spiritualité, et je m’évertue à essayer de traduire ! Je dois avouer que ce vin n’est pas si facile à lire que cela, car ses complexités vont s’ordonner sous d’autres formes.

Bernard considère que 2009 est plus grand et plus complet que 2005 et il situe ce millésime dans la continuité de 1999.

Nous changeons de cave pour la traditionnelle dégustation en cave de vins en bouteilles et non en fût comme le 2009. Cet exercice se fait à l’aveugle.

Bernard Noblet nous indique que le premier vin vient d’une année qui est très bonne et dont les quantités sont abondantes. Je lui trouve une belle matière. Il est très soyeux avec un beau final très frais. Je le trouve très puissant et quand Bernard donne la réponse : Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1999, tout le monde est étonné qu’un Echézeaux puisse avoir ce coffre et ce beau final. Certains ont même pensé qu’il s’agissait de La Tâche.

Le second vin a vraiment un nez du domaine. Là, je retrouve ce que j’aime. En bouche, le vin est beau et c’est la définition de ce qui est gravé dans ma mémoire. C’est un vin féminin – et je n’ai pas traduit tout ce que Bernard a dit – à la belle fraîcheur et aux belles épices. Là aussi c’est une belle surprise, car je n’attendais pas un Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1990 à ce niveau.

Le troisième vin est un blanc, qui est riche, beau, au final minéral. On reconnaît un peu de caramel, de beurre, mais aussi de l’iode. Comme à chaque fois, tout le monde se trompe. Quand j’ai dit : « je sais quel est ce vin », tout le monde m’a dit : « nous savons que vous savez » et j’ai répondu : « oui, mais nous ne pensons pas au même vin ». Car il s’agit du Bâtard Montrachet Domaine de la Romanée Conti 1995 qui n’est pas commercialisé et dont beaucoup ignoraient l’existence, pensant au Montrachet. Mais en fait, le Bâtard passe plus en force, quand le Montrachet joue plus sur son charme. J’ai adoré ce vin brillant, pétulant, de grande complexité.

J’ai remarqué que dans cette cave à la jolie voûte, quand on boit de si bons vins, on arrive toujours à trouver des affinités avec les gens que l’on rencontre. Nous avons échangé des cartes de visite, avec l’envie de nous revoir. Je retiens deux choses : la beauté et la richesse du millésime 2009, et la belle performance des deux Echézeaux de grandes années, que je n’attendais pas aussi glorieux.

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