Archives de catégorie : vins et vignerons

Journée des vins clairs au champagne Bollinger à Ay vendredi, 4 avril 2008

Lors du dernier Grand Tasting à la fin de l’année 2007, j’avais assisté Michel Bettane, à mon modeste niveau, pour animer des tables rondes consacrées à plusieurs domaines prestigieux. Parmi ceux-ci, le champagne Bollinger. Lorsque j’ai dit à l’œnologue que je n’étais jamais venu visiter Bollinger, celui-ci s’empressa de m’inviter à « la journée des vins clairs », où l’on goûte une quinzaine de vins qui vont entrer dans la composition du champagne Bollinger. Le jour dit, je me présente au siège de cette célèbre maison de champagne et je retrouve les coins et recoins qui avaient été filmés par Jean-Pierre Fleury pour un reportage « In Vino … » passé de nombreuses fois sur plusieurs chaînes de télévision dont TF1, où Ghislain de Montgolfier parle de son champagne et où je parle de ma cave. Ce reportage où nous étions « associés » remonte à cinq ou six ans. Nous allons nous recueillir sur la petite parcelle qui fait le rarissime Bollinger Vieilles Vignes Françaises, et c’est assez symbolique, car ce que nous voyons en terre est loin du romantisme qui existe dans le verre. Nous visitons les installations très modernes et les caves antiques avec Mathieu, l’œnologue, puis nous retrouvons en groupe de près de 70 personnes dans une grande salle. Il y a là des vignerons qui fournissent des raisins à Bollinger depuis de longues années, des journalistes et quelques amis. Nous pouvons goûter seize vins qui entrent dans l’assemblage de la Cuvée Spéciale Bollinger. Sur les seize vins il y a quinze vins clairs des vendanges 2007 et un magnum de réserve de 2003.

Aucun conseil ne nous est donné, mais il paraît logique de commencer par les chardonnays. J’indiquerai pour chacun si la maturation est faite en cuve ou en fût, et s’il s’agit d’un premier cru ou d’un grand cru. Le cépage est chardonnay, pinot noir ou pinot meunier.

L’Oger, cuve, chardonnay, Grand Cru est le premier, aussi la bouche n’est pas encore étalonnée. Il a une belle acidité, des fruits blancs, il fait très jeune (eh oui, c’est 2007). Le Vertus cuve chardonnay, Premier Cru est plus amer, moins brillant et n’a pas de fruit. L’Avize, cuve chardonnay, Grand Cru a une forte acidité, des fleurs blanches, un final trop acide. Le Cuis cuve chardonnay Premier Cru est perlant et abrupt. Le Cuis fût, chardonnay, Premier Cru est plus rond, plus doux, avec un joli final de fruits blancs. Le Mesnil, fût, chardonnay, Premier Cru est très élégant, équilibré, avec un final moins triomphant que le Cuis précédent. Le Cramant, fût, chardonnay, Grand Cru est très champagne. Il est homogène et plaisant, avec un final de champagne un peu plus sucré que le Mesnil. A la fin de cette série de chardonnays, les deux que je préfère sont le Cramant en fût et le Mesnil en fût.

Je passe ensuite aux pinots noirs : le Mareuil, cuve pinot noir Premier Cru m’étonne après les chardonnays. Il a un goût médicinal troublant. Je lui trouve un petit problème, malgré le fruit que l’on sent. Le Ay cuve pinot noir Grand Cru est chaleureux, vivant et charpenté. J’aime. Le Ay fût, pinot noir Grand Cru est déjà du champagne. Il a un beau final mais un peur court. L’Avenay, cuve pinot noir Premier Cru a une couleur plus rose et fait plus évolué. Il est floral et fruit avec un beau final bien long. Il est un peu hors norme. Le Tauxières cuve pinot noir Premier Cru a un perlant très fort. Il est très séduisant alors que je ne suis pas à l’aise avec le perlant, et malgré cela, j’aime ses jolis fruits blancs. Le Louvois fût, pinot noir, Grand Cru a une attaque très fruitée et son joli final est aussi fruité. Le Verzenay fût pinot noir Grand Cru est équilibré, avec des fruits délicats. Le final est équilibré et long. Je classe parmi les pinots noirs, dans l’ordre le Verzenay, puis le Ay en cuve et le Louvois.

La sélection des 2007 se termine sur le seul pinot meunier, le Venteuil cuve pinot meunier qui a une très forte personnalité, une bulle amère et un fruit énorme. J’aime ce vin malgré le perlant.

Lorsque l’on passe au magnum de réserve de Mesnil 2003, chardonnay Grand Cru, cela fait tout drôle, car on commence à boire du champagne. Il a une très belle personnalité, une bulle active, un goût de biscuit sec croquant, un beau final une belle acidité et sa trace est longue. Il faut maintenant passer à l’assemblage spécial cuvée 2007 qui va encore vieillir quatre ans en cave avant de se trouver dans le commerce. Ce qui frappe instantanément, c’est que ce vin assemblé, et c’est assez incroyable, a gommé tous les petits défauts que l’on pouvait trouver dans les composantes. Et c’est presque trop beau, comme si la perfection avait un peu trop discipliné ce vin. Cela va évidemment se corriger avec le temps en cave et peut-être avec l’ajout d’un peu plus de magnums de réserve, mais à ce stade, le champagne fait un peu « politiquement correct ». Il faut bien sûr saluer le travail d’œnologie qui est un art que je vénère. Je n’ai aucun doute que le vin, au moment de sa sortie, sera parfait. L’exercice de juger les vins clairs est passionnant. Il est fort probable que mes impressions n’ont aucun caractère universel, mais le plus important est de les avoir vécues.

Nous passons ensuite à table dans le cuvier où huit jolies tables ont été dressées. Je suis assis à côté de l’épouse de Ghislain de Montgolfier qui fait un discours de bienvenue joliment troussé et fort spirituel. Il va passer dans quelques semaines le flambeau à Jérôme Philipon qui lui succédera à la tête de cette prestigieuse maison de champagne.

Le menu qui est préparé par le traiteur Philippet est : salade de homard aux abricots moelleux, pignons grillés et mesclun à l’huile vierge / tournedos de filet de veau aux morilles, cannellonis de petits légumes / duo de fromages et salade / tarte à la rhubarbe, glace vanille et crème chantilly.

Le Bollinger Special Cuvée qui nous est servi est nettement plus civilisé que celui que nous avons goûté, fruit de l’assemblage des 2007. Ici, l’assemblage est fait entre 2003 et 2004 avec l’ajout de magnums de réserve de 1995. C’est vraiment le Bollinger comme on l’aime, vin agréable et surtout vin de soif, car il y a un goût de « revenez-y » particulièrement marqué. La chair du homard avec sa sauce réduite concentrée se marie merveilleusement avec ce champagne de gastronomie.

Il semble que ce soit une toute première fois que l’on goûte une création, le champagne Bollinger rosé, qui est un assemblage de 2003 et 2004. C’est un champagne très délicat, un très beau rosé et de ma part, c’est un compliment, car je ne suis normalement pas un fanatique du rosé. C’est une belle expérience et c’est bien de l’avoir tenté sur une viande malheureusement trop salée et à la sauce trop lourde. Chair et champagne eurent suffi.

Le champagne Bollinger Grande Année 1999 se présente avec un nez très minéral qui va progressivement révéler des accents de miel. En bouche il est assez curieux, car il ne donne pas l’impression d’être très homogène. Il y a du doucereux et du rêche. Il est un peu dosé pour moi. Je pense qu’il faut qu’il vieillisse plus, car on sent qu’il évolue dans le verre. Avec le brie il devient merveilleux et chaleureux. C’est un grand accord. S’il s’assemble dans le verre, on note quand même un côté assez troublant ou déroutant qui disparaîtra dans peu d’années.

Le vin surprise est comme toutes les surprises : on ne le trouve pas. J’ai commencé par dire 79 mais la bulle me paraissait trop jeune pour cette année. Avec un vigneron de la table nous en sommes venus à 1983. C’était en fait un champagne Bollinger Grande Année 1992, d’une année à fort botrytis qui a donné un vin remarquable, plus mûr que son âge. Ghislain dit qu’il est ce que le 1999 deviendra dans quelques années. C’est une année où l’on n’a pas fait de « R.D. » (récemment dégorgé). Bien évolué, charmeur et beau, il est complètement dans le style Bollinger ou selon l’expression américaine dont j’ai horreur, dans le style Bolly.

Nous nous sommes quittés dans une ambiance joyeuse et j’étais content de cette expérience sur les vins clairs, qui deviennent un miracle quand ils sont assemblés et que le temps leur a donné la grâce. Je me sentais James Bond en rentrant à Paris.

visite de la maison Bollinger – photos vendredi, 4 avril 2008

Voici l’une des parcelles des vieilles vignes françaises. Si on ne le sait pas, c’est difficile d’imaginer que se fait ici l’un des plus rares champagnes au monde.

Photo de l’équipe pour la presse. au premier rang à droite le président actuel et son successeur.

 

Plusieurs kilomètres de galeries sous le village de Aÿ.

 

Mûrissement et stock de magnums de réserve.

 

De l’intérêt de l’étanchéité des bouchons !

 Passage obligatoire par la tonnellerie. Le tonneau couvert de copeaux, aux arceaux entièrement en bois, est plus que centenaire.

 

Dans un hall de vieillissement, on peut estimer l’âge canonique des fûts.

 

C’est ici que nous avons goûté les vins clairs, avec seize tonneaux portant des échantillons comme celui-ci.

 

Déjeuner dans le cellier joliment décoré.

 

Une vitrine de capsules et muselets.

 

 

Très beau repas. Ghislain de Montgolfier est heureux après son speech.

28 producers and their 2005 Burgundies : I was a kid in a candy store lundi, 31 mars 2008

This is a fantastic event.

It was held in restaurant Ledoyen.

As I will probably drink the 2005 in twenty years ad min, I had not a great motivation to compare every wine. But it was like the Ali Baba cave.

All wines were 2005.

In whites, I drank :

Bonneau du Martray Corton Charlemagne : elegant but needs more years

Comtes Lafon : Meursault, Meursault Clos de la Barre, and Meursault Charmes : what a style ! I adored the two last, having a huge personality. Great wines

Domaine Leflaive : Puligny-Montrachet, Puligny-Montrachet Clavoillon, Puligny-Montrachet Les Pucelles : pure bombs. Bombs of pleasure.

Raveneau : Chablis Clos Grand Cru : the wine of the purest distinction.

In reds, I drank :

Marquis d’Angerville : Volnay Champans and Volnay Clos des Ducs : classic wines

Bonneau du Martray : Corton red : I have a weakness for this wine, appealing

Jospeh Drouhin : Beaune Clos des Mouches : elegant and interesting

Dujac : Clos de la Roche : great wine

Michel Gaunoux : Pommard Grands Epenots : my style of wine

Méo-Camuzet : Clos de Vougeot : great wine high promise

Comtes Lafon : Volnay Santenots : highy typed, but I was under the charm of the whites

Montille : Volnay Taillepieds : a sincere wine full of charm, Corton Clos du Roi : a knight, Vosne Romanée Les Malconsorts : full of grace

Mugnier : Musigny : one of the stars of my trip

Roumier : Chambolle-Musigny les Cras and Bonnes Mares : two very great wines, the Bonnes-Mares being a prince

Rousseau : Charmes Chambertin, Ruchottes Chambertin, Chambertin : the coronation of the tasting. The Ruchottes is more performing at this moment than the Chambertin which will become a star

I did not make a precise analyse as it has a limited interest for the moment (I will buy the 2005 in 15 years), but I must say that this year is a wonder. The wines are good, and very good.

What is interesting is that the owners are there. Etienne de Montille, Erwan Faiveley, Eric Rousseau, Anne-Claude Leflaive, and so many others were there, talking nicely to me.

I adored the familial atmosphere of this meeting, as they have not the stress to sell, but the joy to share their wines.

Purely lovely.

Salon 1997 : chut ! jeudi, 27 mars 2008

Ce champagne fera son entrée officielle dans le monde, son bal des débutantes, en avril 2008.

Je n’ai donc pas le droit d’en parler. Cette photo est donc celle d’un OVNI (objet vineux non identifié).

Vous en saurez plus bientôt.

 

dégustation des 2006 de Bouchard Père & Fils mercredi, 26 mars 2008

Le groupe Henriot réunit chaque année des professionnels du vin pour présenter ses vins. Il s’agit aujourd’hui des 2006 des maisons William Fèvre, Bouchard Père & Fils et Henriot. Une belle salle de l’hôtel Meurice est très appropriée à la dégustation comparative de ces vins. Dans les grands crus de Chablis, je suis à ce stade de leur vie plus sensible au Chablis Bougros William Fèvre 2006 qu’au Chablis Les Clos William Fèvre 2006 dont le final indique qu’il aura un avenir plus brillant.

Les rouges de Bouchard sont en 2006 d’une précision et d’une accessibilité gustative qui méritent une mention. On sent que la nouvelle cuverie permet un travail plus maîtrisé. J’adore le Nuits Cailles Bouchard P&F 2006, le Corton Bouchard P&F 2006 et j’ai un faible pour le Chambertin Clos de Bèze Bouchard P&F 2006. Le Beaune Grèves Vigne de l’Enfant Jésus Bouchard P&F 2006 est l’enfant chéri de la victoire, mais son aîné de 1999 lui montre qu’il aura encore du travail à faire avant de l’égaler. Un jéroboam du Corton Bouchard P&F 1990 est diablement tentateur. Je n’ai pas frémi autant que je l’aurais imaginé, car je pense que ce vin a besoin d’une bonne décennie de plus pour révéler tout son talent.

Les blancs de Bouchard, c’est la planète d’excellence de ce domaine. Le Meursault Génévrières Bouchard P&F 2006 est déjà charmant, le Corton Charlemagne Bouchard P&F 2006 est noble. Le Chevalier Montrachet Bouchard P&F 2006 me fait la même impression que les Chablis : je le préfère au Montrachet Bouchard P&F 2006 car ce dernier va enclencher la vitesse supérieure dans quelques années. Avec le Chevalier Montrachet 1998 on est à la limite de la luxure. Le Corton Charlemagne 1983 servi en magnum combine jeunesse et sérénité. Il y a un accomplissement dans les blancs qui mérite les éloges.

Je n’ai pas boudé les champagnes mais l’appel des meilleurs était trop tentant. Le champagne Henriot Cuvée des Enchanteleurs 1995 est déjà un grand champagne. La vedette incontestée est le 1975 servi en magnum, d’une assurance et d’un équilibre qui me plaisent au plus haut point. Il a un potentiel d’inventivité gastronomique de première grandeur. J’ai remercié chaleureusement Stéphane Follin-Arbelet qui nous avait reçus de façon royale au château de Beaune, lors du voyage avec mon ami collectionneur américain. J’ai félicité Joseph Henriot pour le récent achat qu’il vient de faire d’un grand domaine en Beaujolais, qu’il compte gérer en tant que beaujolais sans mimétisme de la stratégie de Bouchard. Les équipes du groupe Henriot sont extrêmement motivées. Leurs vins sont bons. Le succès est la récompense du travail bien fait.

dégustation des vins du domaine de Vogüé aux Caves Legrand mardi, 18 mars 2008

Avec une grande régularité, des dégustations aux Caves Legrand suscitent mon intérêt. Cette fois-ci, ce sont les vins du Domaine de Vogüé qui sont à l’honneur. François Millet, chef de cave et œnologue nous fait une présentation sincère, vivante et explicative.

Le Bourgogne Blanc Domaine de Vogüé 2004 est en fait le Musigny blanc du domaine. Les vignes étant récentes, replantées de 1986 à 1997, ce nom générique a été choisi. Pour imaginer l’ampleur de ce choix, c’est un peu comme si le Domaine de la Romanée Conti avait appelé la Romanée Conti « Bourgogne rouge » pour les décennies 50 et 60. Le vin a une belle fraîcheur acide, d’agrumes et de poires. Le final minéral citronné évoque les fleurs blanches.

Le Chambolle Musigny Village Domaine de Vogüé 2004 est d’un rubis rose, le nez assez discret est de cerise rouge. En bouche le vin assez rêche, astringent est un peu fumé. Sans rondeur il est un peu strict pour mon goût, marqué par les fruits rouges amers et la cerise à l’eau de vie.

Le Chambolle Musigny Premier Cru Domaine de Vogüé 2004 est d’un rouge plus soutenu. C’est un vin issu des jeunes vignes de Musigny. Le nez est plus généreux. Plus riche en bouche, son fruit est plus assumé. C’est toujours strict, au final de feuilles d’artichaut. On sent de la matière et des notes assez jolies. Le final claque bien. François Millet évoque la framboise, la grenade, la crème de cassis et les épices douces ainsi que les fleurs roses.

Le Chambolle Musigny Les Amoureuses Domaine de Vogüé 2004 a un rubis rose soutenu. Le nez est discret, peu ouvert. Le fruit est plus joyeux, combiné à de la minéralité et de l’astringence. Le poivre se révèle dans un peu de figue fraîche. J’aime un peu moins le final, à ce stade, que celui du premier cru.

Le Bonnes-Mares Domaine de Vogüé 2004 a un rubis rose soutenu. Le nez est profond : « ça c’est du nez ». Le vin est puissant, lourd, le fruit est noir et le végétal est poivré. Le final très joli est enlevé. Mais le vin est très jeune, comme s’il n’était pas encore totalement assemblé. Au sujet de la jeunesse, François Millet regrette que les 2005, année mythique, soient déjà sur la carte des restaurants. Il estime que du fait de la curiosité pour le millésime, il est probable qu’un tiers des vins ont déjà été bus, ce qui est triste quand on sait ce qu’ils peuvent devenir.

Le Musigny Domaine de Vogüé 2004 est d’un rouge foncé presque noir. Le nez est intense. Il est onctueux, joyeux, et déjà buvable. Le final est profond, complexe et beau avec des fruits noirs et un peu de poivre.

Ayant exploré les vins de 2004 du domaine nous allons maintenant nous concentrer sur les Bonnes-Mares et les Musigny pour trois années, 1999, 1991 et 1989. Le Bonnes-Mares Domaine de Vogüé 1999 est d’un rouge très soutenu et d’un nez profond et distingué. J’écris : « wow, ça commence à être du vin ! ». Il est fluide, de fruits noirs et de fleurs mauves. Le final est triomphant. C’est un vin très racé, fluide. Il est à noter que le Musigny 2004 commence à s’ouvrir.

Le  Musigny Domaine de Vogüé 1999 est d’un beau rouge. On sent en bouche que c’est extrêmement jeune. Les fruits sont noirs et rouges, mais plus rouges que pour le Bonnes-Mares. Le vin est rigoureux. Il a moins de rondeur que le 2004 à ce stade de sa vie. Il est encore très fermé. Le Bonnes-Mares est plus mûr que le Musigny. Ce Musigny promet. Il a du corps de la fraîcheur et de la concentration. Le Bonnes-Mares est beau quand il s’ouvre dans le verre, puissant et profond.

Le Bonnes-Mares Domaine de Vogüé 1991 est foncé. Le nez est assez déplaisant, un peu suri. En bouche le vin est magnifique de fruits noirs, de myrtilles. Il est très plaisant et très bourguignon. Les fruits confits et le poivre marquent le goût.

Le Musigny Domaine de Vogüé 1991 est d’un rouge noir et d’un nez minéral. Le vin est très séduisant, flatteur au poivre bien dosé. Le vin est racé, le poivre devient plus insistant. Ce vin est encore trop jeune.

Le Bonnes-Mares Domaine de Vogüé 1989 a une robe beaucoup plus ambrée vers le rouge orangé, montrant une évolution. Le nez combine le minéral et l’animal. En bouche, c’est beau et déjà secondaire. Il y a du poivre et moins de fruit mais beaucoup de personnalité. Il est plus bourguignon, astringent.

Le Musigny Domaine de Vogüé 1989 est d’un rouge noir. Le nez est racé, subtil, poivré. Son attaque est chaleureuse, il est rond en bouche, structuré, charmeur. Magnifiquement subtil, c’est un grand vin.

Je reviens en arrière pour constater que le Bonnes-Mares 1989 a du caractère et que le 1991, beau aussi a déjà des tons de vins anciens. Le Musigny 1991 est plus rond, plus chaleureux et le Musigny 1989, charmeur, soyeux, subtil est un grand vin. Autour de moi, certains amateurs préféraient les Bonnes-Mares. Mon penchant est pour les Musigny.

Tous ces vins sont caractérisés par la minéralité, le poivre, les fruits noirs intenses et l’astringence. De ce fait, ce sont des vins qui demandent une très longue maturation et plusieurs dégustateurs dans la salle se plaignaient du fait qu’il est très difficile d’attendre les vingt années minimum qui seraient nécessaires pour profiter de ces grands vins. Car ils ont besoin de vieillir, contre la tendance actuelle de consommation. François Millet nous a appris beaucoup d’éléments intéressants sur ce domaine attachant. Cette dégustation a permis de mieux le comprendre. Reste maintenant à trouver ces vins passionnants et à les déguster à leur apogée.

dîner au domaine Faiveley – photos jeudi, 21 février 2008

La table, préparée avec délicatesse dans la cave voûtée du siège du domaine Faiveley

 

Jeu de lumière et transparence, et délicieuse entrée

 

Corton Charlemagne Domaine Faiveley 1998

 

Le dessert a joué juste sur le vin mystère de mon ami

 

Ces deux vins de 1955, Chateau Palmer et Chateau d’Yquem, cadeau de mon ami américain pour faire honneur à l’année de naissance de Bernard Hervet, de Jacky Rigaux, mais aussi la sienne !

dîner au domaine Faiveley jeudi, 21 février 2008

Nous revenons au siège et Bernard Hervet nous entraîne de nouveau dans des caves et je me demande si ce passage en cave est vraiment nécessaire. Mais, sans qu’on s’y attende, une belle salle voûtée est aménagée dans un recoin de la cave, où une table joliment apprêtée va accueillir notre dîner. C’est Thomas Protot du restaurant La Cabotte à Nuits-Saint-Georges qui a préparé la cuisine. Voici le menu : amuse bouche qui est une crème à la châtaigne et petite gamba / Saint-Jacques poêlées, pousse de soja et boudin noir / noix de veau rôtie, pulpe de racines et truffes noires / assiette de fromages / biscuit moelleux aux noix, poire pochée et confiture de lait. Nous somme particulièrement sensibles au fait d’être traités d’aussi belle façon.

Le Meursault 1er Cru « Le Blagny » Faiveley 2000 a un nez de beurre et de fumé. En bouche, c’est bon. Le final est joli. C’est un vin assez simple mais très agréable. Le Corton Charlemagne Domaine Faiveley 1998 a une magnifique couleur dorée. Le nez de petit mousseron est charmant. Le vin est opulent et généreux.

Le Mazis-Chambertin Domaine Faiveley 1996 a un nez sauvage, fragile, timide, mais de grande profondeur. En bouche il est assez strict, astringent, poivré. Il y a peu de fruits mais un poivre important. Bernard n’a pas le même avis que moi sur l’ampleur du fruit. Bernard nous donne un tuyau. Il dit que les deux rouges réussis de 1996 sont ce vin et le Richebourg d’Anne Gros 1996. Il se trouve que j’ai bu le Richebourg d’Anne Gros 1996 avec Bernard il y a quelques années chez Guy Savoy. Je partage son avis sur le Richebourg plus que sur le Mazis. Le vin qui s’ouvre maintenant dans le verre devient subtil et délicat, mais je ne rejoins pas l’enthousiasme de Bernard.

Mon ami américain nous sert un vin rouge à l’aveugle. Bernard y sent l’eucalyptus et le moka qui l’orientent vers Margaux. Jacky pense que l’année doit être 1955 compte tenu de ce qu’il ressent. Le vin est un peu fatigué et il faut dire qu’il a beaucoup voyagé. On sent que c’est un grand vin d’une trame noble, même si la fatigue se sent. On nous sert en même temps le Gevrey-Chambertin 1er Cru « La Combe aux Moines » Domaine Faiveley 1935 que Bernard ne connaît pas et découvre avec nous. Bernard n’a jamais bu de vins de cette petite année alors que j’en ai bu plus d’une demi-douzaine. Nous sommes tous éblouis par l’incroyable performance de ce vin. Il est d’un velouté que jamais son année ne devrait donner. La couleur est un peu évoluée mais belle. C’est une grosse surprise de le voir aussi vivant, velouté, passionnément bourguignon. La trace de thé en bouche est magique. Bernard ne peut pas cacher sa joie indicible d’avoir découvert un 1935 d’une telle valeur, ce qui remet en cause tout ce que l’on lit dans les livres.

Mon ami ne veut toujours pas révéler le nom de son vin que nous supposons grand car il veut que nous découvrions le deuxième vin qu’il nous sert à l’aveugle, vin de dessert. Je reconnais au nez qu’il s’agit d’un Yquem, et la couleur me porte vers les années trente, mais l’abondance du sucre me trouble car ce n’est compatible avec cette décennie. Il s’agit de Château d’Yquem 1955, très puissant et d’une trace en bouche infinie. Il y a des abricots, de la mangue confite, du coing. Le fruit est légèrement caramélisé. C’est un très grand Yquem. Nous connaissons enfin le nom du rouge : c’est Château Palmer 1955, ce qui confirme les pistes proposées par Bernard et Jacky qui sont, comme mon ami nés en 1955, ce qui n’est pas un hasard dans les choix de vins qu’il a faits. Bernard est très heureux de la générosité de mon ami américain.

Bernard Hervet a une hauteur de vue dans l’analyse des vins qui m’enchante, comme m’enchante l’approche très différente mais oh combien percutante de Michel Bettane.

Ces quatre jours passés en Bourgogne, où tous les événements ont été amicaux, personnalisés, pensés avec une attention et un soin remarquables m’ont fait un infini plaisir. Je me suis rendu compte que j’avais tissé avec quelques vignerons des relations qui dépassent de loin l’accueil formel et poli. Je repars avec une cargaison de souvenirs qui marqueront ma vie. Cette amitié montrée partout est aussi riche que les vins de ces géniaux vignerons sont bons. Vive la Bourgogne !

dégustation au domaine Faiveley jeudi, 21 février 2008

Nous arrivons au domaine Faiveley, au siège de Nuits-Saint-Georges. Nous sommes accueillis par Erwan Faiveley, jeune dirigeant du domaine et par Bernard Hervet, que j’ai connu dans le monde du vin il y a bien des années et qui est devenu un ami. Délicate attention de Bernard, il a invité Jacky Rigaux, écrivain du vin, qui a écrit notamment un livre avec Henri Jayer et avec lequel j’ai partagé plusieurs dégustations de vins rares, ami sensible dont j’apprécie les connaissances de la Bourgogne, de l’histoire et du vin. Nous discutons pendant quelques minutes avec Erwan qui ne pourra pas rester avec nous. Bernard fait une comparaison pleine de sens. Il dit que le couple 2005 – 2006 évoque le couple 1961 – 1962. Pendant que l’une des années fait le devant de la scène, drapée de tous les qualificatifs les plus tonitruants, l’autre, dans son ombre, est d’une délicatesse et d’un charme qui sont reconnus des esthètes. Lorsque Bernard nous dit que le vin chez Faiveley ne fait que 2% du chiffre d’affaires du groupe, c’est alors que je réalise que Faiveley Industries, que je connaissais dans le monde industriel qui m’était familier fait partie du même ensemble. Cela explique sans doute l’agencement avant-gardiste du siège, et l’équipement moderne de la salle de dégustation où nous nous rendons, à deux cents mètres de là.

Dans la salle, les vins sont préparés, une feuille de dégustation nous est fournie et je reconnais le sens de l’organisation et de l’accueil de Bernard Hervet. Il nous propose une mini-verticale du Corton « Clos des Cortons Faiveley » Grand Cru. Cette appellation est une des deux seules avec la Romanée Conti où le nom d’une famille est repris dans l’appellation. La parcelle est de trois hectares. Il convient de noter et je le fais remarquer à mes amis américains, que la dégustation se faisant en salle et non en cave, nous avons des vins qui ont près de six degrés de plus que ce que nous avons goûté jusqu’ici.

Le Corton « Clos des Cortons Faiveley » Grand Cru Domaine Faiveley 2006 a un nez intéressant. La bouche est opulente. Le vin se boit très bien. Il y a un très beau fruit et une belle amertume. Le Corton « Clos des Cortons Faiveley » Grand Cru Domaine Faiveley 2005 a un nez puissant. La couleur est très sombre. Le nez de fruit rouge et de poivre est très Pauillac. Il est encore fermé, au bois très fort. On sent qu’il va exploser dans quinze ans. Ce vin au fruit intense et pur est magnifique.

Le Corton « Clos des Cortons Faiveley » Grand Cru Domaine Faiveley 2003 a un nez très élégant. Il est chaleureux, frais, mentholé. Le fruit est rouge et noir. Le vin a une grande densité, une astringence nette et un beau poivre. Ce sera un très grand vin. Le Corton « Clos des Cortons Faiveley » Grand Cru Domaine Faiveley 2000 a une couleur plus claire et un nez sympathique. C’est le seul qui soit vraiment buvable. Frais en bouche il n’est pas immense mais plaisant. Un peu aqueux, astringent, il a un final végétal.

Le Corton « Clos des Cortons Faiveley » Grand Cru Domaine Faiveley 1998 a une couleur qui tire sur l’orangé. Le nez est avenant. Il est plaisant, facile et accueillant. Le fruit est vivant, le poivre et les tannins sont là, mais que le vin est astringent ! Je le trouve très grand.

Nous allons maintenant goûter des blancs de 2006 en commençant par des Chablis vinifiés ici, qui sont ne sont pas du domaine, mais des achats de raisins. Le Chablis 1er Cru Fourchaume Faiveley 2006 a un nez incroyablement flatteur quand on quitte le monde des rouges. L’écart est spectaculaire. On sent le sucre. Il manque pour moi d’un peu de structure, mais je pense que cela peut changer avec le temps. Le Chablis Grand Cru « les Clos » Faiveley 2006 a un nez beaucoup plus subtil. Ça, c’est du Chablis pour moi. Il n’est pas très long en bouche mais prometteur. Bernard Hervet dit que le vin est long. C’est peut-être moi qui juge mal.

Le Meursault 1er Cru « Charmes » Faiveley 2006 a un nez très beau. Il est magique en bouche. Bernard dit que l’on ne sent à ce stade que 50% de son potentiel. Gras et fruits blancs, il est d’un final magique. C’est un vin que j’adore. Le Chassagne-Montrachet 1er Cru « Morgeot » Faiveley 2006 a un nez plaisant. En bouche il est plutôt sucré, doucereux. Ce n’est pas mal, mais ce n’est pas mon goût. Il manque un peu de coffre. De belle complexité il manque d’équilibre. Le final épicé est intéressant.

Le Corton Charlemagne Grand Cru Domaine Faiveley 2006 a un nez impressionnant. C’est le rêve absolu. Bernard a baissé le taux de fûts neufs à 50% seulement ce qui a évité le côté vanille, pour avoir le goût de bacon du terroir. C’est un vin magnifique au final de fruits blancs qui est l’archétype des vins de gastronomie.