Archives de catégorie : dîners ou repas privés

Les 1937 ne me réussissent pas beaucoup dimanche, 12 octobre 2008

En cette mi-octobre, le temps est particulièrement clément. Mon fils nous rend visite avec sa femme et leurs deux enfants. L’apéritif se prend dans le jardin. Le Champagne Mumm Cordon Rouge 1937 n’a plus l’ombre d’une bulle. La couleur est ambrée mais n’est pas dorée. En bouche, l’acidité est sympathique, mais il n’y a pas la moindre trace de douceur. On dirait un vin blanc sec qui a traversé les âges. Le vin est buvable sans doute, mais n’excite pas l’intérêt, aussi est-il remplacé assez vite par un Champagne Bollinger Grande année 1990. La puissance et l’aisance sont plus sensibles  après le Mumm. Le champagne est fort, plaisant mais manque un peu de longueur. C’est un grand champagne, auquel il manque un supplément d’âme. Sur un cuisseau de porcelet à l’ail et aux herbes, pommes de terre en robe des champs rissolées, un Château Ausone 1937 est servi. Quand je l’ai ouvert, le bouchon gras avait libéré un parfum pénétrant extrêmement velouté. C’était trop beau pour être vrai, aussi avais-je bien vite rebouché la bouteille pour éviter une évaporation. Sur table, trois heures plus tard, le vin affiche une grande acidité. Au-delà de l’acidité le message est assez beau, mais on se lasse quand même bien vite. Le vin est buvable, indique qu’il a eu un passé noble, mais le plaisir n’est plus là.

Nous ne nous attardons pas et sur une tarte aux pommes, un Château Doisy Daëne 1969 exhibe son or insolent. Rien n’est plus beau que cet or là. Le vin en bouche est joyeux et plein. On sent qu’il n’y a pas la complexité des plus grands sauternes, mais ce Barsac est pur, franc, généreux et très plaisant à boire. Je n’attendais pas cette puissance de 1969.

Les discussions se concentrent sur la crise, après la semaine boursière la plus noire que l’on ait connue, mais le sauternes joyeux remet les pieds sur terre, une terre qui produit les vins dont la joie nous est indispensable. L’année 1937 ne me réussit pas beaucoup. Sensible, subtile, elle est fragile et décevante le plus souvent, du moins pour les vins que j’ai en cave.

repas de famille – les photos dimanche, 12 octobre 2008

Champagne Mumm 1937

dans des paillons, l’étiquette a été préservée, beaucoup plus que le vin, hélas

Chateau Ausone 1937

Quel contraste entre la qualité de l’étiquette et l’état du bouchon.

le Chateau Doisy-Daëne 1969

les deux bordeaux et l’ensemble des vins bus ce jour

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le Champagne Bollinger 1990 appelé à la rescousse

la cuisine de ma femme est la plus belle du monde (qu’on se le dise) !

 

 

At Hotel Lutetia, I tried a wine from the cellar recently bought vendredi, 10 octobre 2008

Avec quelques amis fidèles, nous avons notre façon à nous de faire « casual Friday ». Cela consiste à partager quelques belles bouteilles lors d’un déjeuner, en adoucissant l’heure de retour au bureau. J’avais récemment repéré quelques pépites dans la cave de l’hôtel Lutétia. C’était l’occasion d’y faire le siège de nos agapes du vendredi.

Arrivant en avance au restaurant « Paris » de l’hôtel Lutétia, je demande à Philippe, sommelier sympathique intéressé par notre démarche d’ouvrir et décanter les vins du repas pendant que j’ouvre le vin que j’ai apporté, extrait du lot que je viens d’acheter il y a tout juste une semaine, de vins de 1880 à 1930.

Les amis arrivent et nous commençons par un champagne Dom Ruinart 1986. Sa couleur a légèrement foncé et le champagne est évolué. Il a le charme des champagnes qui commencent à prendre de l’âge. Citronné, d’une acidité plaisante, il est joyeusement fruité. On se sent bien avec ce champagne. De fines tranches d’un jambon assez plat et une petite crème aux cèpes goûteuse s’ajustent bien à la vivacité du Dom Ruinart.

Sur un petite poêlée de girolles, le Château Haut-Brion blanc 1998 montre une race extrême. Haut-Brion est définitivement le vin blanc le plus plaisant du Bordelais. Fruité, complexe, très puissant, il a une longueur quasi inextinguible. Si les girolles sont une réussite, les coquilles Saint-Jacques avec des cèpes sont nettement moins réussies. La cuisson a été trop longue. Le Haut-Brion n’en souffre pas plus que cela.

Le chef doit être amoureux et ce n’est pas un excès de sel qui en est l’indice, mais un excès de cuisson du pigeon, fort goûteux au demeurant, rôti aux aromates, blette aux carottes fanes et aux tomates cerises confites. Le Château Gazin qui nous est présenté, carafé depuis plus d’une heure, a manifestement un problème. Philippe, fort gentiment, change de bouteille, et le Château Gazin 1990 que nous buvons maintenant, sorti de cave et frais est absolument délicieux. Il représente la maturité du Pomerol dans toute sa splendeur. Riche, plein, intense, c’est un vin joyeux. C’est un grand plaisir de le boire sur un pigeon de belle personnalité.

Sur un dessert très subtil aux tons très frais, le vin que j’ai ouvert avec difficulté car le bouchon s’est brisé en plusieurs morceaux nous offre son or franc et transparent. Le nez est d’agrumes, tendant vers le citron vert. En bouche, ce qui frappe tout de suite, c’est que le vin a, comme on dit, mangé son sucre. Il est devenu sec. Plein d’agrumes, avec une acidité très jolie, il a bravé les ans. Nous essayons de deviner ce qu’il est. L’étiquette est très peu lisible, mais on reconnaît la couronne qui signale les vins de la famille de Lur Saluces. Ce n’est sûrement pas un Yquem, et compte tenu de l’aspect aérien et léger, l’idée la plus plausible est qu’il s’agisse de Château Filhot. Comme les achats que j’ai faits portent majoritairement sur des années comme 1904 et 1896, disons que c’est 1904. Baptisons le Château Filhot 1904, et si ce n’est pas cela, ce n’est pas grave. Car ce qui compte c’est que nous avons aimé ce vin délicat, de belle acidité, fort long et complexe. Les sauternes devenu plus secs sont très plaisants. Nous avons aimé celui-ci.

Le cadre du restaurant et la belle table que l’on nous a attribuée sont un atout certain. Il faudrait deux ou trois petits points d’amélioration en cuisine pour que le plaisir soit total, car la carte des vins mérite que l’on revienne souvent dans ce beau restaurant historique parisien.

Bollinger Vieilles Vignes Françaises 1992 à la Grande Cascade mardi, 30 septembre 2008

J’avais apprécié la cuisine de Frédéric Robert du temps où il officiait aux côtés d’un des grands maîtres de la cuisine française, Alain Senderens, lorsqu’il y avait trois étoiles au restaurant Lucas Carton. Son écoute, sa sensibilité, son sens des situations m’avaient impressionné. J’apprécie le restaurant de la Grande Cascade depuis plus de trente ans, la famille Menut gérant cette perle, ce bijou du Bois de Boulogne avec un sens du service consommé.

Devant organiser un dîner en ce lieu, je programme une visite pour mettre au point le menu qui accompagnera mes vins. Une table est réservée pour que je puisse déjeuner et échanger quelques mots avec le chef. On m’apprend qu’il n’est pas là aujourd’hui. La visite est sans objet, mais je décide de ne pas annuler. Déjeuner seul sans but précis, cela risque de me déplaire. Nicolas de Rabaudy est libre. Je l’invite.

Les plats à la carte sont tarifés dans des zones de prix dissuasives. Un menu fort bien structuré nous tend les bras. Nous le prenons. La carte des vins est multiforme. Elle comprend des vins attractifs, achetés dans de bonnes conditions. A côté de cela, des vins de grand prestige sont proposés à des prix que seuls quelques amateurs russes peuvent affronter sans sourciller. Quand une carte est intelligente, il faut lui faire honneur, aussi mon choix se porte-t-il sur un champagne Bollinger Vieilles Vignes Françaises 1992, vin rare s’il en est.

Pierre, sommelier que je connais et apprécie depuis de longues années nous propose de le carafer. Il me paraît opportun d’affronter la puissance de la bulle pour profiter du message de ce grand champagne. Nous goûtons le premier verre à température de cave avant que le champagne ne soit frappé. Dès la première gorgée, c’est un enchantement. Le miel paralyse nos papilles de sa trace insistante. Ce qui nous frappe le plus, c’est la longueur extrême de ce champagne qui déploie un éventail complexe de saveurs avec une insistance hors du commun.

Lorsque l’on cherche des repères dans ce foisonnement, on oscille entre le fruité et le vineux. Les fruits sont ceux d’une nature morte de Frans Snyders, distingués, rares, raffinés, jouant sur la noblesse, avec un aspect léger de tapisserie cloutée de poivre et d’anis étoilé. Le caractère vineux est noble, précis, rehaussé par l’interminable parcours en bouche. Ce blanc de noirs est une réussite.

Disons le tout net, la cuisine de ce lieu, ainsi que le service, sont d’un niveau de deux étoiles sans la moindre discussion.

La galette de champignons s’est vue complétée d’un cèpe qui donnerait des pâleurs à nombre de baobabs de Madagascar. L’association du Bollinger avec le cèpe est un nirvana, le miel envoûtant la chair souple du cèpe.

Le cabillaud est goûteux, sur un lit de haricots, avec une crème d’ail qui fait vibrer le VVF (vieilles vignes françaises). Les portions sont plus que copieuses, aussi, lorsque je prends une fine tranche de Brie du plateau de fromages tentant, c’est pour essayer l’accord. Mais le Brie est trop affiné pour que la vibration soit parfaite.

Le dessert avec des tranches de pamplemousse imitant la sanguine fait joliment réagir le champagne qui nous captive toujours.

Il restait suffisamment de liquide dans la bouteille aussi ai-je l’idée d’en faire profiter mon fils. Hélas, je ne le croisai pas dans la suite de la journée. Revenu chez moi, c’est sur un poulet froid que je finis la bouteille. La neutralité de la chair met encore plus en lumière le caractère miraculeux de ce champagne. Par une chance qui n’existe que dans les contes de fée, un camembert à peine fait se trouve sur la table. L’accord avec les dernières gorgées du Bollinger Vieilles Vignes est purement irréel. Le vin qui a perdu un peu de bulle mais dont le miel chante plus que jamais offre maintenant des fleurs et des fruits blancs. Malgré l’année qui n’est pas la plus vantée, je crois n’avoir que très rarement bu un champagne de ce niveau.

jeunes vins des Côtes de Provence pour la fin de l’été samedi, 20 septembre 2008

Nous ne nous résolvons point à quitter l’été. Ma fille aînée vient avec l’homme qui partage sa vie passer le week-end dans le sud. Alors que j’ai beaucoup de vins à boire, je m’arrête chez un caviste et j’achète des Côtes de Provence. Lors d’un déjeuner nous essayons un Clos Cibonne, Côtes de Provence 2004 du Pradet, commune qui jouxte la notre. Le vin est fort agréable,  avec la sensation de râpeux qui me plaît dans ces vins locaux. Le Rimauresq, Côtes de Provence 2005 qui le suit est plus enjoué, plus tonitruant, mais le millésime joue un rôle dans cet écart. Il se confirme que les Côtes de Provence sont délicieux dans leur région.

Nous nous rendons – une fois n’est pas coutume – à la table d’hôte d’Yvan Roux. Il exhibe un nouveau jambon Bellota Bellota à cinq glands Navalcollado, qu’il découpe avec son grand couteau. Dans l’immense cuisine nous sommes comme les mouettes qui accompagnent les bateaux de pêcheurs, prêtes à voler en piqué sur tout déchet lancé à la mer. Au risque de nous faire trancher les doigts, nous happons les copeaux de jambon aussi vite qu’Yvan les découpe. C’est certainement le plus expressif des jambons que nous avons mangés chez Yvan. Le champagne Delamotte sans année, vin du Mesnil-sur-Oger, la Mecque du champagne, est absolument à son aise avec le gras non salé de ce jambon.

Le carpaccio de liche, grand poisson pouvant atteindre une taille d’un mètre, est délicieux. Les seiches à l’encre et au Pata Negra, poivron et piment d’Espelette appellent un Rimauresq 2005 qui vibre merveilleusement sur le plat lourd et goûteux.

Généreux comme d’habitude, Yvan apporte discrètement à notre table les joues d’un gros mérou qu’il servira à une autre table. Cuits à la perfection, ces deux gros morceaux de joue sont d’une chair intense.

De petites langoustes et pommes de terre à l’ail confit, graines d’anis et cébettes sont divinement goûteuses et aussi bien le champagne que le Côtes de Provence peuvent lui répondre, tirant des accents différents. Le fondant au chocolat avec une sauce au caramel et beurre salé et une glace au mascarpone correspondent comme un écho au Rivesaltes d’une coopérative de Rivesaltes 1955 que j’ai apporté, subodorant le dessert d’Yvan. C’est le beurre salé du caramel qui vibre le plus aux accents du vin lourd, riche et profond, aux saveurs multicolores.

Monsieur le bourreau, laissez-nous profiter encore de l’été qui finit officiellement ce soir et que nous ne voulons pas quitter.

dîner chez Yvan Roux – les photos samedi, 20 septembre 2008

Sous la lampe qui sert de chauffe-plat, les couleurs changent. Les carpaccios de liche sont alignés.

Yvan avec son grand couteau va découper des tranches du merveilleux jambon

Voici l’étiquette du jambon

carpaccio de liche

les seiches de l’archiduchesse sont-elles seiches, archi seiches ?

joue de mérou

la langoustine et ses pommes de terre

C’est bon !

de beaux accords sur Rimauresq, Ausone, Daumas Gassac et Filhot vendredi, 12 septembre 2008

Après une journée passée en mer avec des amis, nous nous retrouvons tous à dîner à mon domicile. L’apéritif débute sur un Champagne Charles Heidsick mis en cave en 1997 qui étanche la soif que donne le séjour en mer. De la poutargue, des sablés au parmesan, des dès de fromage de chèvre à la figue, du jambon Pata Negra s’amusent gentiment avec ce beau champagne rond, joyeux, sans souci. Il se boit si bien qu’il faut vite ouvrir un champagne Dom Pérignon 1998 qui impose sa personnalité, de plus en plus marquée par les dix ans qu’il vient de vivre. Le caractère floral, le goût de groseille blanche qui flirte avec un pamplemousse rose et la finesse de la bulle composent en bouche un tableau pastoral. On comprend le charme redoutable de ce champagne.

Nous commençons à table par une terrine de courgettes qu’accompagne fort bien un Mas de Daumas Gassac blanc 2001, au sommet de sa forme, sommet sur lequel il s’installe sans doute pour longtemps. Le fumé, les fruits délicatement confits chantent en bouche.

Mais le plaisir s’accroît quand ma femme nous présente une de ses nouveautés, un maquereau en filets au foie gras dans une robe de chou. Le Daumas Gassac est concerné par chacune des saveurs et leur ajoute une cohérence. L’accord est divinement bon. Le sucré du foie gras, l’amertume du chou et l’intensité du maquereau créent tant de résonnance avec le vin qu’il gagne en coffre, en chair, et délivre un plaisir complet. Son opulence et sa longueur sont à signaler.

Un des amis ayant apporté un fond de bouteille à me faire découvrir à l’aveugle, un chablis 1986 que je n’ai pas reconnu, je décide d’en faire autant pour les rouges. Et quand ce professionnel du vin, qui a bien reconnu la région, me dit du premier vin : « il s’agit là d’une très grande année », je suis particulièrement content. Car il s’agit de Château Ausone 1992, d’une année particulièrement ignorée des amateurs. Le fait qu’Ausone en cette petite année ait réalisé un vin puissant, ayant du corps, de la profondeur, et une longueur que jamais 1992 ne devrait avoir, confirme une fois de plus que l’on extrémise à l’excès les écarts de jugement entre les années. Ce vin est un grand vin, dont on sait qu’il n’a pas tout ce qu’Ausone peut donner, mais qui offre un plaisir sans mélange et sans restriction.

Le vin suivant, bu aussi à l’aveugle, subjugue cet ami professionnel et l’ami propriétaire du bateau sur lequel nous avons fendu l’onde. L’idée qui leur vient est celle du Rhône septentrional. Le vin est un Rimauresq, Côtes de Provence 1983 rouge, d’une plénitude étonnante. Absolument accompli, d’une maturité qui durera encore pendant des décennies, ce vin a toutes les caractéristiques d’un Côtes de Provence, mais sublimée. Je pense qu’à l’aveugle, je n’aurais pas reconnu non plus tant ce vin brillant dépasse les critères normaux des Côtes de Provence. Un grenadin de veau cuit à basse température avec des courges de Nice cuites sur une sauce à l’amande et la noix s’accorde avec les deux rouges brillamment car chaque composante du plat est destinée à mettre en valeur les deux rouges.

Nous essayons un camembert Jort et un camembert d’Isigny. Alors que le Jort, combinant le crémeux et l’amertume ammoniaquée est d’une sensualité rare, l’un d’entre nous, le marin, déclare sa préférence pour celui d’Isigny. Tous les goûts sont dans la nature !

La tarte aux quetsches s’associe au Château Filhot 1990 beaucoup mieux que je ne le pensais. Le sauternes d’un beau jaune commençant à accrocher de filets d’or à sa robe est très élégant et déjà arrondi dans sa jeunesse. On sait que soixante ans de plus le rendront magique, mais tel qu’il est là, à l’état d’adolescent, avec des notes d’un abricot discret, il est chaleureux, plein de joie et ravit le palais. Son adaptabilité à l’acidité de la quetsche est à signaler.

Nous n’avons pas voté mais après coup je voterais pour le Rimauresq 1983, suivi ex aequo par l’Ausone 1992 et le Dom Pérignon 1998. Chaque vin s’est bien comporté malgré l’atmosphère étouffante et orageuse peu propice aux vins. Dans ce dîner dont la cuisine de ma femme fut d’une grande justesse, les accords mets et vins fonctionnèrent tous. Il faut vite recommencer.

déjeuner chez Yvan Roux, les photos samedi, 30 août 2008

La vue féerique qu’offre notre table

cigalons et crevettes roses

homards pour ogres !

on n’a pas envie de lui serrer la pince !

festival de couleurs

Chateauneuf-du-Pape de Vallouit 1982

j’avais déjà mangé un bon tiers du homard quand j’ai pris cette photo

un fondant à mourir !

 

énormes homards, Chateauneuf et Meursault samedi, 30 août 2008

Un des plus fidèles parmi les fidèles de mes dîners nous rend visite dans le sud avec sa femme, sa mère et ses enfants. Nous nous rendons chez Yvan Roux, table qu’il adore.

Une assiette de cigalons et crevettes roses se croque avec un Meursault Genèvrières Bouchard Père & Fils 2004 en magnum. La chair du cigalon est d’une rare subtilité, combinant le marin et le doucereux. Le meursault lui répond comme en un écho, car sa palette aromatique est quasi infinie. Ce vin remplit la bouche avec une persuasion certaine.

Les beignets de calamars et carpaccio de poisson rouge forment un plat à aborder en deux parties distinctes. Les beignets pourraient accueillir du vin rouge ou du champagne, mais le meursault leur répond bien. Le poisson est fondant comme un délicat bonbon.

Mon ami a apporté un Chateauneuf-du-Pape Domaine de Vallouit 1982. Le plat est un homard et son corail avec une sauce au meursault, à la crème et aux oignons. Sur le corail, le vin est à son aise, chaleureux et chaud comme un vin du sud, presque doucereux, avec une signature poivrée très agréable. Je le trouve d’un niveau supérieur à l’image que j’aurais pu m’en faire. Yvan Roux possède un art des cuissons qui est exceptionnel. La mère de mon ami, qui pratique les meilleurs restaurants, déclare que c’est le meilleur homard qu’elle ait mangé. Yvan me demande mon jugement sur la sauce. Je le félicite, car la continuité gustative est assurée.

Le fondant au chocolat avec des figues nous fait doublement fondre. D’une part car nous sommes conquis par la réussite du plat follement séduisant, mais aussi car la générosité d’Yvan, géant d’un double mètre, dépasse les capacités d’absorption de simples humains.

Par un temps de canicule en cette fin d’août, ce fut un beau déjeuner d’amitié.