Ça chauffe pour l’agneau pascal !dimanche, 4 avril 2010

C’est Pâques, il fait froid. La pluie empêche de cacher des œufs sous les arbustes que les petits-enfants cherchent en riant ou en pleurant, selon leurs réussites. Ce n’est pas la même chose de chercher sous un rideau, un canapé ou un coussin que sous un laurier ou un abricotier.

Après une semaine de repos et de jeûne, une assiette de Pata Negra a autant de pouvoir que le bouton réservé au Président de la République pour actionner la Force de Frappe. Fort heureusement, la stratégie à long terme de la défense de notre territoire familial a prévu qu’il y ait au frais un Champagne Krug 1989. Quel beau champagne ! On imagine très volontiers que George Clooney aurait autant de pertinence à défendre ce champagne qu’il le fait pour une marque de café. Car en ce champagne, tout est facile et tout coule de source. C’est grand, circulez, il n’y a rien à discuter. Et l’astuce, c’est de le boire par millilitre. Plus on le rationne, et plus son caractère s’impose, avec une personnalité diablement affirmée.

Quand le four fait des siennes, même le jour de Pâques, les scènes de ménage poignent à l’horizon. A peine ai-je le malheur de dire que les épaules d’agneau ne sont pas cuites, qu’un retour cinglant me cueille et m’asphyxie : « toi, de toute façon, tu ne sais pas ce que c’est que la cuisine ». Ma fille risque un : « intéressants tes sushi d’agneau ». Mon gendre, plus diplomate : « on pourrait les poêler juste deux minutes ». Ce fut le point de départ d’une innovation culinaire : un agneau à basse température pendant quatre heures sur un four défaillant, saisi ensuite juste ce qu’il faut, cela donne une chair parfaite.

L’appel d’un vin rouge est évident. La Côte Rôtie La Turque Guigal 1997 est exceptionnelle. La première expression, sur le vin juste ouvert est celle du velouté. Tout est satin, tout est velours dans ce vin délicat, subtil, à l’expression mesurée. Ce vin suggère. Le vin change ensuite et des notes plus râpeuses apparaissent. Mais ce qui est une constante, c’est que le vin explose de jeunesse. Il est comme une esquisse de vin non encore assemblée et on l’aime pour cette naïveté juvénile. C’est un grand vin porteur de joie, comme il convient à Pâques.

La querelle sur la cuisson se met en basse température. Et ce sont les petits qui sont au centre de la joie familiale, soulignée par deux immenses vins.